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Décisions

Cass. 1re civ., 7 juin 2005, n° 05-60.044

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Ancel

Rapporteur :

M. Bargue

Avocat général :

Mme Petit

Avocats :

SCP Gaschignard, SCP Piwnica et Molinié

Paris, du 27 janv. 2005

27 janvier 2005

Attendu que les élections pour la désignation du successeur du bâtonnier de l'Ordre des avocats au barreau de Paris et des membres du conseil de l'Ordre se sont déroulées les 23 et 24 novembre 2004 ; que le conseil de l'Ordre avait décidé d'utiliser un système électronique pour enregistrer les votes et d'autoriser le vote à distance par le réseau Internet ; que M. X..., avocat au barreau de Paris, a saisi la cour d'appel d'une demande en annulation de ces élections ;

Sur le deuxième moyen, pris en ses deux premières branches :

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande alors, selon le moyen :

1 / qu'en se fondant sur la circonstance que les délibérations ayant introduit dans le règlement intérieur du Barreau de Paris des dispositions prévoyant le vote par correspondance sur support électronique, n'avaient pas fait l'objet de recours dans les délais, la cour d'appel a violé, par fausse application, l'article 15 du décret du 27 novembre 1991 ;

2 / qu'il résulte de la confrontation de l'article 15 de la loi du 31 décembre 1971 et des articles 5 et suivants du décret du 27 novembre 1991, d'une part, de l'article 28 dudit décret, d'autre part, qu'à la différence de ce qui est expressément prévu pour les élections au conseil national des barreaux, le législateur et l'autorité réglementaire n'ont pas entendu autoriser le vote électronique par correspondance pour les élections au conseil de l'Ordre ; qu'en énonçant qu'il ne résulte d'aucune disposition légale qu'un texte réglementaire soit nécessaire pour permettre à un barreau d'utiliser le vote électronique à l'occasion des élections professionnelles, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Mais attendu que l'article 5 du décret du 27 novembre 1991 disposant que le règlement intérieur fixe les modalités de l'élection, c'est à bon droit que la cour d'appel a décidé que le conseil de l'Ordre n'avait pas excédé ses pouvoirs en adoptant les dispositions contestées ; que le moyen, inopérant en sa première branche, n'est pas fondé en sa deuxième ;

Mais sur le premier moyen, pris en sa deuxième branche :

Vu les articles 10, alinéa 1er, du Code civil et 3 du nouveau Code de procédure civile ;

Attendu que le juge est tenu de respecter et de faire respecter la loyauté des débats ;

Attendu que pour écarter des débats les notes et pièces produites en cours de délibéré par les parties, l'arrêt attaqué retient que conformément aux dispositions des articles 16 et 445 du nouveau Code de procédure civile, les parties ne pouvaient déposer aucune note ni produire aucune pièce après la clôture des débats intervenue le 6 janvier 2005 si ce n'est en vue de répondre aux arguments développés par le ministère public ou bien à la demande du président de la formation de jugement et que les notes et pièces litigieuses n'avaient pas été produites dans les conditions prévues par ces textes ;

Qu'en statuant comme elle l'a fait, alors que la lettre du président de la Commission nationale de l'informatique et des libertés envoyée à M. X... le jour-même de l'audience des plaidoiries et faisant état d'une délibération de cet organisme antérieurement adressée au bâtonnier, reçue par lui le 25 novembre 2004 et cependant non communiquée avant la clôture des débats, comportait des éléments susceptibles de modifier l'opinion des juges quant à la confidentialité du scrutin au regard, notamment, des modalités adoptées dans l'utilisation d'identifiants personnels, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres griefs du pourvoi :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 27 janvier 2005, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon.