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Décisions

Cass. 3e civ., 20 janvier 1999, n° 97-16.336

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mlle Fossereau

Rapporteur :

M. Villien

Avocat général :

M. Sodini

Avocats :

SCP Monod et Colin, Me Copper-Royer

Versailles, 4e ch., du 14 mars 1997

14 mars 1997

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 14 mars 1997), que le Centre communautaire d'Ermont-Eaubonne (le Centre), maître de l'ouvrage, a chargé de la construction d'un bâtiment la société CBA, entrepreneur principal, depuis en liquidation judiciaire, qui a sous-traité les travaux d'étanchéité, menuiserie métallique et serrurerie à la société Bardeco industries (société Bardeco) ; que celle-ci n'ayant pas été réglée de ses travaux a assigné en paiement le maître de l'ouvrage ;

Attendu que le Centre fait grief à l'arrêt d'accueillir la demande, alors, selon le moyen, "1 / que le maître d'ouvrage n'est fautif de ne pas avoir mis en demeure l'entrepreneur principal de régulariser la situation du sous-traitant que s'il a effectivement eu connaissance, avant la fin du marché, de la présence du sous-traitant sur le chantier ; qu'il incombe au sous-traitant, demandeur, d'établir la faute du maître d'ouvrage, et donc de rapporter la preuve que le maître d'ouvrage a eu connaissance de son intervention sur le chantier en temps utile ; que le Centre faisait valoir qu'en décembre 1992, la société CBA avait achevé ses travaux et quitté le chantier ; qu'en mettant à la charge du Centre la preuve qu'à la mi-décembre 1992, date à laquelle ce dernier a eu connaissance de la présence de la société Bardeco industries sur le chantier, le marché était terminé, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et violé les articles 9 du nouveau Code de procédure civile, 1315 du Code civil, 14-1 de la loi du 31 décembre 1975 et 1382 du Code civil ;

2 / que même si le maître d'ouvrage respecte l'obligation prévue à l'article 14-1, il est possible que l'entrepreneur principal ne défère pas à sa mise ne demeure, et qu'en outre, le maître d'ouvrage a la faculté de ne pas accepter le sous-traitant et de ne pas agréer ses conditions de paiement ; que la méconnaissance, par le maître d'ouvrage, de l'obligation prévue à l'article 14-1 a donc seulement pour effet de priver le sous-traitant d'une chance d'être agréé, et par suite de pouvoir exercer l'action directe ; qu'en décidant que le préjudice subi par la société Bardeco industries correspondait à la totalité des sommes dues à cette dernière par la société CBA et en condamnant par suite le Centre communautaire à payer à la société Bardeco industries la somme de 630 759,60 francs, la cour d'appel a violé les articles 3, 12 et 14-1 de la loi du 31 décembre 1975 et 1382 du Code civil ; 3 / que même si l'impossibilité, pour le sous-traitant non agréé, d'exercer l'action directe contre le maître d'ouvrage, est la conséquence directe et certaine de l'inexécution par celui-ci de l'obligation prévue à l'article 14-1, l'étendue du préjudice du sous-traitant est nécessairement limitée à ce qu'il aurait pu obtenir par la voie de l'action directe ; qu'aux termes de l'article 13 de la loi, l'action directe ne peut tendre qu'au paiement des prestations prévues par le contrat de sous-traitance dont le maître d'ouvrage est effectivement bénéficiaire, et est limitée aux sommes que ce dernier doit à l'entrepreneur au moment de la réception de la copie de la mise en demeure de l'entrepreneur ; qu'en affirmant que l'article 13 est inapplicable dans le cadre de l'action en responsabilité fondée sur la violation de l'article 14-1, que, par suite, l'examen des sommes dues par le maître d'ouvrage à l'entrepreneur principal est sans objet, et qu'il n'y avait pas lieu de surseoir à statuer jusqu'à ce que la créance du Centre sur la société CBA ait été définitivement fixée, la cour d'appel a violé les articles 13 et 14-1 de la loi du 31 décembre 1975 et 1382 du Code civil" ;

Mais attendu qu'ayant constaté que des relations s'étaient nouées entre le maître de l'ouvrage et le sous-traitant dans le cadre du marché passé entre l'entrepreneur principal et la société Bardeco industries, que le Centre connaissait la présence de cette société sur le chantier depuis au moins la mi-décembre 1992 avant l'achèvement des travaux et retenu que s'agissant de l'évaluation du préjudice subi par le sous-traitant, le maître de l'ouvrage pouvait se voir réclamer par celui-ci toutes les sommes encore dues par l'entrepreneur principal, la cour d'appel qui a souverainement apprécié le préjudice du sous-traitant, a, sans inverser la charge de la preuve et par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.