Cass. 1re civ., 3 juin 2003, n° 01-00.859
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Lemontey
Rapporteur :
M. Pluyette
Avocat général :
M. Mellottée
Avocats :
SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, SCP Défrenois et Levis
Sur le moyen unique, pris en ses quatre branches :
Attendu que M. X..., débiteur de banques sénégalaises, a vendu, le 7 décembre 1989, un immeuble à la SCI "Union Karim" dont la gérante est son épouse ; que, faisant application de l'article 13, paragraphe 2, de la loi sénégalaise du 16 février 1991, déclarant nuls les actes à titre onéreux ou gratuits accomplis par un débiteur depuis moins de trois ans au moment des poursuites, s'ils ont été faits dans l'intention de dissimuler tout ou partie de sa fortune, l'arrêt attaqué (Paris, 26 octobre 2000) a déclaré la demande en annulation de cette vente formée en mai et juin 1994 par la Société nationale sénégalaise de recouvrement (SNR) contre les époux X... et la SCI irrecevables comme prescrites ; que la SNR fait grief à la cour d'appel d'avoir méconnu les dispositions de l'article 3 du Code civil, en dénaturant la loi étrangère et en n'en recherchant pas suffisamment le contenu par d'autres sources, alors qu'elle se serait fondée sur le seul avis de M. Y..., bien que contesté et produit par les époux X..., ainsi que de ne pas avoir répondu à ses conclusions selon lesquelles l'argumentation des époux X... privait de tout effet utile l'article 13, paragraphe 2, de la loi sénégalaise précitée ;
Mais attendu, que s'il incombe au juge français, qui applique une loi étrangère, de rechercher et de justifier la solution donnée à la question litigieuse par le droit positif de l'Etat concerné, l'application qu'il fait de ce droit étranger, quelle qu'en soit la source, légale ou jurisprudentielle, échappe, sauf dénaturation, au contrôle de la Cour de Cassation ; que l'arrêt attaqué retient, d'abord, que l'article 13, paragraphe 2, de la loi sénégalaise du 16 février 1991 n'a fait jusqu'alors l'objet d'aucune application jurisprudentielle, de sorte que la cour devait en déterminer le sens et la portée en fonction du texte lui-même et des éléments d'interprétation produits aux débats et contradictoirement débattus ; qu'il se réfère, ensuite, à un certificat de coutume délivré par un conseiller à la Cour suprême du Sénégal qui, après avoir fait état des diverses interprétations possibles de cette disposition, estime que les poursuites en cause ne peuvent s'entendre que de celles tendant à faire déclarer nuls les actes litigieux, ainsi qu'à une consultation non contestée d'un avocat en droit sénégalais définissant la notion de poursuite au sens procédural ; qu'il relève, enfin, que selon l'analyse littérale du texte, aucune mention n'est faite aux créances et à leur recouvrement et que le délai de trois ans prescrit pour agir n'a de sens que s'il concerne l'action en nullité de l'acte frauduleux ;
qu'il en résulte que, sans encourir aucun des griefs du moyen, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.