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Décisions

Cass. 1re civ., 17 décembre 2009, n° 08-12.344

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Crédeville

Rapporteur :

M. Garban

Avocat général :

M. Legoux

Avocats :

SCP Peignot et Garreau, SCP Piwnica et Molinié

Montpellier, du 13 déc. 2007

13 décembre 2007

Sur le moyen unique, après avis de la chambre commerciale :

Attendu que, le 9 novembre 1999, l'association Saint-François pierre rouge, dite OGEC Saint-François pierre rouge (l'OGEC Saint-François) a transféré la totalité des actions qu'elle détenait dans le capital de la société anonyme Enclos Saint-François de la pierre rouge (la société Enclos) au profit de l'association Charles Prévost bienfaisance ; que le 1er février 2006, l'OGEC Saint-François, représentée par son président alléguant que la société Enclos avait, en réalité, acquis ses propres actions par le biais d'un prête nom, l'association Charles Prevost bienfaisance, a assigné celles-ci en annulation du transfert d'actions intervenu en 1999 et en nullité de l'association Charles Prevost bienfaisance ;

Attendu que l'OGEC Saint-François fait grief à l'arrêt attaqué (Montpellier,13 décembre 2007) d'avoir confirmé le jugement en ce qu'il a dit prescrite son action en nullité en application de l'article 1304 du code civil et d'avoir rejeté ses autres demandes alors, selon le moyen :

1°/ que l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties de sorte que la cour d'appel qui, pour rejeter la demande d'annulation du rachat de ses propres actions par une société, se fonde sur le moyen non invoqué selon lequel ni l'article L. 225-206 du code de commerce, qui ne comporte que des sanctions pénales, ni aucun autre texte ne prévoient la nullité d'un tel rachat, a modifié les termes du litige en violation de l'article 4 du code civil ;

2°/ que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction de sorte que la cour d'appel qui pour rejeter la demande d'annulation du rachat de ses propres actions par une société, se fonde sur le moyen non invoqué selon lequel ni l'article L. 225-206 du code de commerce, qui ne comporte que des sanctions pénales, ni aucun autre texte ne prévoient la nullité d'un tel rachat, sans inviter les parties à présenter leurs observations, a méconnu l'article 16 du code de procédure civile ;

3°/ qu'est nul tout contrat conclu au mépris de dispositions législatives et réglementaires d'ordre public sanctionnées pénalement si bien qu'en refusant d'admettre qu'était nul le rachat de ses propres actions par une société par l'intermédiaire d'un prête-nom à raison du non-respect des prescriptions de l'article L. 225-206 du code de commerce, au motif que ni ce texte, qui ne comporte que des sanctions pénales, ni aucun autre texte ne prévoient la nullité, la cour d'appel a violé les articles L. 225-206 du code de commerce et 6 du code civil ;

4°/ que les conventions ayant pour but une fraude à la loi sont frappées de nullité absolue en raison de leur cause illicite si bien que la cour d'appel, en se déterminant ainsi, sans rechercher, comme l'y invitaient les conclusions de l'OGEC Saint-François pierre rouge, si la cession de 4 487 actions à l'association Charles Prevost bienfaisance, prête-nom, ne constituait pas une fraude à la loi et n'avait pas pour seul motif de permettre le rachat de ses actions par la société Enclos Saint-François de la pierre rouge, n'a pas légalement justifié sa décision au regard du principe Fraus omnia corrumpit, ensemble les articles 1133 du code civil et L. 225-206 du code de commerce ;

5°/ que l'association déclarée dispose de la capacité juridique dans les limites de son objet statutaire et, en dehors de cet objet statutaire, est frappée d'incapacité de jouissance sanctionnée par la nullité absolue de sorte que la cour d'appel qui retient que l'action en nullité de la cession d'actions, opération dépassant l'objet social de l'association OGEC Saint-François de la pierre rouge relève du régime des actions en nullité relative qui se prescrivent par cinq ans, a violé les articles 1134 et 1304 du code civil ;

6°/ que le président d'une association est un mandataire de cette association et l'acte excédant ses pouvoirs passé par un mandataire est atteint d'une nullité absolue de sorte que la cour d'appel qui soumet l'action en nullité de l'acte juridique résultant du dépassement de pouvoir du président d'une association, a violé les dispositions des articles 1134 et 1998 du code civil ;

7°/ que la nullité d'une vente pour défaut de prix est une nullité absolue ; que dans ses conclusions d'appel, l'OGEC Saint-François pierre rouge faisait valoir la nullité de la cession d'actions litigieuse pour défaut de prix si bien qu'en laissant sans réponse ce moyen pertinent, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de réponse à conclusions et violé, par suite l'article 455 du code de procédure civile ;

8°/ qu'en vertu de l'article 3 de la loi du 1er juillet 1901, est nulle toute association fondée sur une cause ou en vue d'un objet illicite de sorte que la cour d'appel qui, pour écarter le moyen pertinent par lequel l'OGEC Saint-François pierre rouge a fait valoir que l'association Charles Prevost bienfaisance ayant été constituée dans le seul but de violer les dispositions de l'article L. 225-206 du code de commerce, son objet était illicite ce qui entraînait sa nullité, retient que cette demande en nullité était devenue inopérante en raison de la prescription de l'action en nullité de la cession d'actions, a statué par des motifs inopérants en violation des articles 1er de la loi du 1er juillet 1901 et L. 225-206 du code de commerce ;

Mais attendu, d'une part, que la cour d'appel qui n'était pas tenue de se livrer à une recherche que ses constatations rendaient inopérante et qui n'a ni modifié les termes du litige ni violé le principe de la contradiction, a retenu à bon droit que la méconnaissance des dispositions de l'article L. 225-206 II du code de commerce n'était pas sanctionnée par la nullité de l'acquisition ;

Que, d'autre part, sans avoir à répondre à des conclusions formulées en des termes ambigus, visées par la septième branche, elle a exactement jugé que l'action de l'OGEC Saint-François, engagée le 1er février 2006, qui ne tendait qu'à la protection d'intérêts privés, relevait du régime des actions en nullité relative qui se prescrivent par cinq ans pour en déduire sa prescription et le défaut de fondement, par voie de conséquence, de la demande de nullité formée à l'encontre de l'association Charles Prevost bienfaisance pour avoir disposé illicitement des actions de la société Enclos ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.