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Décisions

Cass. soc., 7 décembre 2016, n° 15-23.820

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Chauvet

Avocats :

SCP Delaporte et Briard, SCP Delvolvé et Trichet, SCP Rousseau et Tapie

Paris, du 18 juin 2015

18 juin 2015

Attendu selon l'arrêt attaqué, (Paris, 18 juin 2015), que M. X... a été engagé le 1er janvier 2001 par la société Artepack, filiale de la société Artecom, en qualité de directeur commercial ; que le 24 avril 2003, il a été nommé administrateur de la société Artecom devenue la société Bergame ; qu'il a été engagé le 1er janvier 2006 par la société Bergame en qualité de directeur technico-commercial et responsable qualité de la branche PLV du groupe Bergame ; que la société Bergame a été placée en liquidation judiciaire et la société Y... et B... désignée en qualité de liquidateur ;

Sur le premier moyen, pris en sa première branche :

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de confirmer le jugement en ce qu'il a jugé que le contrat de travail conclu avec la société Bergame était affecté de nullité absolue alors, selon le moyen, qu'un salarié peut cumuler cette qualité et celle d'administrateur de la société qui l'emploie lorsque son contrat de travail est antérieur à son mandat social ; qu'en cas de mutation du salarié à l'intérieur d'un groupe de sociétés, étroitement associées et présentant une cohésion économique, c'est dans le cadre de ce groupe qu'il convient d'apprécier la condition d'antériorité d'un contrat de travail ; qu'en refusant d'apprécier la condition d'antériorité du contrat de travail conclu par M. X... à sa nomination en qualité d'administrateur de la société Bergame le 24 avril 2003, au niveau du groupe, sans rechercher, comme elle y était pourtant invitée, si la filiale avec laquelle M. X... avait conclu le 1er décembre 2001 et la société mère au sein de laquelle il était muté n'étaient pas étroitement associées et ne présentaient pas une cohésion économique, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 225-22 du code de commerce ;

Mais attendu qu'ayant constaté, dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation des éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, que M. X... avait conclu un nouveau contrat de travail avec la société Bergame, dans le cadre d'une réorganisation interne du groupe, sans poursuite du contrat de travail antérieurement conclu avec la société Artepack, pour des fonctions et une rémunération différentes, la cour d'appel qui n'avait pas à faire une recherche que ses constatations rendaient inutiles, en a exactement déduit que ce contrat qui avait pris effet le 1er janvier 2006 alors que l'intéressé occupait des fonctions d'administrateur, était nul ; que le moyen n'est pas fondé ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les autres branches du moyen, ci-après annexé, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Sur le second moyen, pris en ses deux premières branches :

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de le condamner à payer à la société Y... et B..., prise en la personne de M. Y..., ès qualités, la somme de 1 089 648 euros alors, selon le moyen :

1°/ que l'effet rétroactif attaché à l'annulation d'un contrat impose de replacer les parties dans l'état dans lequel elles se trouvaient avant son exécution, au moyen de restitutions réciproques ; qu'ainsi, en cas de nullité d'un contrat de travail, si le salarié est condamné à rembourser les salaires qu'il a perçus au titre du contrat annulé, il doit également être indemnisé pour les prestations qu'il a fournies ; qu'en se bornant à condamner à M. X... à rembourser les rémunérations brutes perçues par celui-ci, la cour d'appel a violé l'article 1304 du code civil ;

2°/ que l'annulation d'un contrat de travail qui impose au salarié de rembourser les rémunérations perçues sans être indemnisé pour les prestations fournies porte une atteinte manifestement disproportionné aux droits de celui-ci sur les fruits de son travail, protégés par l'article 1er du premier protocole additionnel de la convention européenne des droits de l'homme ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans rechercher si la privation de toute indemnisation de M. X... quant au travail fourni en exécution du contrat de travail annulé ne portait pas une atteinte disproportionné au droit de créance du salarié tenant à la mise à disposition de son travail, eu égard au bénéfice qu'en avait malgré tout retiré de la société, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des exigences de ce texte et de l'article L. 225-44 du code de commerce ;

Mais attendu qu'il résulte de l'article L. 225-44 du code de commerce que, pendant la durée de son mandat social, l'administrateur d'une société anonyme ne peut percevoir de la société aucune rémunération, permanente ou non, à la seule exception de celles prévues par les articles L. 225-45, L. 225-46, L. 225-47 et L. 225-53 de ce code ; qu'ayant constaté que le contrat de travail qui liait M. X... à la société Bergame à compter du 1er janvier 2006 était atteint de nullité, pour avoir été conclu et exécuté alors qu'il était administrateur en fonction, la cour d'appel qui a condamné l'intéressé à rembourser le montant des salaires perçus depuis cette date, sans avoir à rechercher si cette condamnation était disproportionnée, les dispositions du texte précité étant d'ordre public, a légalement justifié sa décision ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les autres branches du moyen, ci-après annexé, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.