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Décisions

Cass. 1re civ., 2 mai 2001, n° 99-10.709

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Lemontey

Rapporteur :

M. Gridel

Avocat général :

M. Roehrich

Avocats :

SCP Waquet, Farge et Hazan, Me Jacoupy

Rennes, du 24 nov. 1998

24 novembre 1998

Sur le premier moyen, pris en sa première branche, et le deuxième moyen, pris en sa troisième branche :

Vu l'article 544 du Code civil ;

Attendu que le Comité régional de tourisme de Bretagne (le CRT) a utilisé à des fins de publicité un cliché dont il avait acquis le droit de reproduction de M. X..., photographe professionnel ; que cette image représente l'estuaire du Trieux, avec, au premier plan, l'îlot de Roch Arhon, propriété de la société civile immobilière du même nom, et a été diffusée malgré l'opposition de celle-ci ;

Attendu que pour accueillir la demande de la SCI en interdiction de cette reproduction, l'arrêt attaqué énonce que les droits invoqués par le CRT et M. X... trouvent leurs limites dans la protection du droit de propriété de la SCI, à la mesure des abus inhérents à l'exploitation d'une représentation de son bien à des fins commerciales et avec une publicité importante, que l'île est le sujet essentiel de l'image, et que la photographie est utilisée sous la forme d'une affiche à grande diffusion, au titre d'une campagne publicitaire destinée à la promotion du tourisme ;

Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans préciser en quoi l'exploitation de la photographie par les titulaires du droit incorporel de son auteur portait un trouble certain au droit d'usage ou de jouissance du propriétaire, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

Mais sur le troisième moyen :

Vu l'article 31 du nouveau Code de procédure civile ;

Attendu que, hors habilitation législative, une association ne peut agir en justice au nom d'intérêts collectifs qu'autant que ceux-ci entrent dans son objet ;

Attendu que pour dire recevable et fondée l'intervention de l'association Les Petites Iles de France l'arrêt relève que la SCI Roch Arhon en est membre et qu'il faut considérer " les incidences que peut présenter la solution du litige au regard des intérêts collectifs qu'elle défend, en particulier la préservation de sites dont l'environnement peut être menacé par les excès ou le nombre de touristes attirés sur les lieux du fait de la publicité autour de leur image " ;

Qu'en statuant ainsi, après avoir énoncé qu'aux termes de ses statuts l'association dont s'agit veille à la protection du patrimoine foncier constitué par ces îles, à la conservation d'un environnement particulièrement fragile, et, plus largement traite de toutes questions d'intérêt commun aux propriétaires de ces îles, au niveau national ou local, l'arrêt a méconnu le principe de spécialité et violé le texte visé au moyen ;

Et attendu qu'il y a lieu à cassation sans renvoi du chef de l'intervention de l'association Les Petites Iles de France, la Cour de Cassation, en application de l'article 627, alinéa 2, du nouveau Code de procédure civile, pouvant mettre fin au litige sur cette intervention en appliquant la règle de droit appropriée ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches des premier et deuxième moyens :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 24 novembre 1998, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi sur la cassation de la disposition accueillant l'intervention de l'association Les Petites Iles de France.