CA Paris, Pôle 6 ch. 9, 18 novembre 2015, n° 13/03108
PARIS
Arrêt
PARTIES
Défendeur :
Angel (ès qual.), Univer (SARL), Association Unedic-CGEA-Ile De France Est (Sté)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Sommé
Conseillers :
M. Holleaux, Mme Lethiec
Avocats :
Me Carly, Me Calais, Me Gourdain, Me Herry
M. Carlos X... a été engagé par la SARL Univer par contrat verbal à compter du 2 juin 1998, en qualité de chauffeur emballeur et il percevait, en dernier lieu, une rémunération mensuelle brute de 2 195.37 €.
L'entreprise fabrique et commercialise des éléments de verrerie, principalement des miroirs, elle est assujettie à la convention collective du commerce de gros et elle employait huit salariés lors de la rupture des relations contractuelles.
M. Carlos X... a été victime d'un accident de travail le 18 mai 2006 et le 15 octobre 2007, il a été victime d'une rechute.
Lors de la première visite médicale de reprise ayant eu lieu le 22 mai 2008, le médecin du travail a conclu en ces termes : "Contre indication médicale à la conduite et au port de charges lourdes (supérieure à 2kg). Etude de poste et des conditions de travail à faire pour proposition d'aménagement de poste'».
Lors de la seconde visite médicale de reprise, le 5 juin 2008, le médecin du travail a émis l'avis suivant :
«'- inapte au poste, apte à une autre 2ème visite article 4624-31,
-inapte totalement au poste de chauffeur livreur dans l'entreprise Univer,
-inapte médicalement au port de charges de plus de 2 kgs de façon répétée, à la
conduite du camion et aux gestes répétés avec le poignet,
- Etude de poste et des conditions de travail faite le 03/06/2008
- Serait apte à tout autre poste respectant les restrictions précitées'».
Le 26 juin 2008, la CPAM de Paris a notifié au salarié un taux d'incapacité permanente de 10 %.
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 2 juillet 2008, la société Univer a notifié M. Carlos X..., une convocation à un entretien préalable à un éventuel licenciement pour inaptitude à l'emploi en l'absence de poste de reclassement au sein de l'entreprise, fixé au lundi 7 juillet 2008.
Suite à cet entretien du 7 juillet 2008, la société Univer a notifié au salarié, par lettre recommandée avec accusé de réception du 11 juillet 2008, une proposition de reclassement au poste d'opérateur d'emballage avec reprise du travail au 15 juillet.
Par lettre recommandée du 31 juillet 2008, la société Univer a licencié M. Carlos X... pour «'refus abusif de reclassement'».
Estimant ne pas être rempli de ses droits, M. Carlos X... a saisi, en référé le 19 septembre 2008, le conseil de prud'hommes de Meaux et, à l'audience du 17 octobre 2008, l'employeur a remis au salarié les sommes tenues à sa disposition au titre du solde de tout compte. Par ordonnance de référé rendue le 21 novembre 2008, le conseil des prud'hommes a renvoyé M. Carlos X... à se mieux pourvoir pour l'ensemble de ses demandes et l'intéressé a saisi au fond la juridiction prudhommale.
Par jugement rendu le 2 mai 2012, le tribunal de commerce de Meaux a prononcé l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la société Univer, en désignant Me Philippe Angel en qualité de mandataire judiciaire.
Par jugement rendu le 19 mars 2013, le conseil de prud'hommes de Meaux a jugé que le licenciement de M. Carlos X... était fondé sur le refus abusif du salarié du reclassement proposé et a débouté celui-ci de ses demandes indemnitaires à titre de licenciement sans cause et sérieuse et de ses demandes salariales. Le salarié s'est vu allouer une somme de 1 500 € à titre d'indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement et une indemnité de 850 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Le 28 mars 2013, M. Carlos X... a interjeté appel de cette décision.
Par jugement rendu le 15 avril 2013, le tribunal de commerce de Meaux a arrêté le plan de redressement d'une durée de dix ans de la SARL Univer et nommé Me Frédéric Brunet en qualité de commissaire à l'exécution du plan.
Par conclusions visées par le greffe le 28 septembre 2015 et soutenues oralement, M. Carlos X... demande à la cour d'infirmer le jugement entrepris, de fixer sa créance et, en tant que de besoin, condamner les AGS à lui payer les sommes suivantes :
' 2 195.37 € pour non-respect de la procédure de licenciement
' 4 390.74 € au titre de l'indemnité de préavis
' 3 756.38 € au titre de l'indemnité de licenciement
' 26 344.44 € au titre de l'indemnité spécifique de l'article L. 1226-15 du code du travail
' 36 473 € bruts au titre de l'indemnisation de son préjudice
' 2 195.37 € au titre de son salaire à compter du 5 juin au 5 juillet 2008
' 3 546.36 € bruts au titre du solde de congés payés
' 7 500 € au titre du préjudice subi du fait de la remise des documents sociaux non conformes à ses droits
' 3 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
M. Carlos X... demande, en outre, la condamnation de la société Univer et la SCP Philippe Angel-Denis Hazane, ès-qualités, à fournir à son domicile ou à son conseil les bulletins de salaires, le certificat de travail et l'attestation Assedic/Pôle Emploi corrigés.
Par conclusions visées par le greffe le 28 septembre 2015 et soutenues oralement, la société Univer et Me Frédéric Brunet, pris en sa qualité de commissaire à l'exécution du plan, demandent à la cour d'infirmer le jugement déféré en ce qu'il a condamné la société Univer à verser à M. Carlos X... la somme de1 500 € pour non-respect de la procédure de licenciement et celle de 850 € au titre des frais irréppétibles.
Ils sollicitent la confirmation du jugement entrepris pour le surplus et la condamnation de M. Carlos X... à restituer la somme de 780.71 € correspondant à un trop perçu au titre de l'indemnité de licenciement et à verser à la société Univer une indemnité de 2 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Par conclusions visées par le greffe le 28 septembre 2015 et soutenues oralement, l'UNEDIC, Délégation AGS CGEA Île de France Est rappelle que sa garantie est limitée à la garantie des sommes dues dans le cadre des procédures collectives, en cas d'insuffisance de fonds. Dès lors que la société Univer fait l'objet d'un plan de redressement et qu'elle se trouve in bonis, l'AGS sollicite sa mise hors de cause à titre principal.
A titre subsidiaire, elle développe une argumentation similaire à celle des intimés pour demander le rejet des prétentions de M. Carlos X... et elle conclut à une réduction notable des indemnités à allouer, en précisant, en tout état de cause, qu'elle ne devra procéder à l'avance des créances visées aux articles L. 3253-6 du code du travail que dans les termes et conditions résultant des dispositions des articles L. 3253-8 et L. 3253-17 et suivants du même code.
Pour un plus ample exposé de la procédure et des prétentions des parties, la cour se réfère à leurs conclusions visées par le greffier, reprises et complétées oralement lors de l'audience des débats.
MOTIFS
Sur la rupture du contrat de travail
Selon les dispositions de l'article L. 1226-10 du code du travail,'«'Lorsque, à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à un accident du travail ou à une maladie professionnelle, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre, à l'issue des périodes de suspension, l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités. Cette proposition prend en compte, après avis des délégués du personnel, les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existant dans l'entreprise....
L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par
la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de poste ou aménagement du temps de travail...'».
L'article L. 4624-1 du code du travail précise :'«'Le médecin du travail est habilité à proposer des mesures individuelles telles que mutations ou transformations de postes, justifiées par des considérations relatives notamment à l'âge, à la résistance physique ou à l'état de santé physique ou mentale des travailleurs.
L'employeur est tenu de prendre en considération ces propositions et, en cas de refus, de faire connaître les motifs qui s'opposent à ce qu'il y soit donné suite.
En cas de difficultés ou de désaccord, l'employeur ou le salarié peut exercer un recours devant l'inspecteur du travail. Ce dernier prend sa décision après avis du médecin du travail'».
En l'espèce, lors de la seconde visite de reprise du 5 juin 2008, le médecin du travail a constaté l'inaptitude de M. Carlos X... au poste de chauffeur livreur dans l'entreprise Univer, en indiquant que le salarié était inapte médicalement au port de charges de plus de 2 kgs de façon répétée, à la conduite de camion et aux gestes répétés avec le poignet.
Il a ajouté qu'une étude de poste et des conditions de travail avait été faite le 3 juin 2008 et que l'intéressé «serait apte à tout autre poste respectant les restrictions précitées».
Les motifs du licenciement de M. Carlos X... sont ainsi exposés dans la lettre de licenciement notifiée le 31 juillet 2008 qui fixe les limites du litige et lie les parties et le juge :
«' Nous accusons réception de votre lettre recommandée AR du 29 juillet dernier nous informant de votre refus définitif à notre proposition de reclassement.
C'est avec regret que nous accueillons cette décision ultime.
Comme exposé dans notre courrier du 21 juillet dernier, nous vous exposions tous les efforts entrepris par l'entreprise afin de vous accueillir grâce à une multitude de tâches répondant aux restrictions de votre incapacité constatée.
C'est pourquoi, nous devons procéder à votre licenciement au motif :
Refus abusif de reclassement....'».
Il est constant que le licenciement pour inaptitude du salarié n'est légitime que si l'employeur justifie avoir, préalablement, satisfait à l'obligation de reclassement mise à sa charge par les dispositions précitées.
L'employeur, débiteur de cette obligation de moyens renforcée, doit démontrer, en vertu de l'article L. 1226-12, qu'il y a satisfait et que le reclassement du salarié par le biais de l'une des mesures prévues par la loi s'est avéré impossible, soit en raison du refus d'acceptation par l'intéressé d'un poste de reclassement adapté à ses capacités et conforme aux prescriptions du médecin du travail, soit en considération de l'impossibilité de reclassement à laquelle il se serait trouvé confronté.
En l'espèce, la société Univer a proposé à M. Carlos X..., le 11 juillet 2008, un poste d'opérateur d'emballage, en tenant compte des restrictions émises par le médecin du travail, lors de la seconde visite de reprise du 5 juin 2008, mais le salarié a refusé cette proposition de reclassement, par courrier du 15 juillet 2008, au motif que le poste d'opérateur d'emballage ne pouvait répondre aux restrictions, notamment «'le port de charge de plus de 2kg et les gestes répétés avec le poignet ».
Suite à ce premier refus du salarié d'accepter l'offre de reclassement, la société Univer a précisé, par courrier du 21 juillet 2008, la nature des tâches relevant du poste de reclassement en soulignant leur conformité aux restrictions du médecin du travail, mais le salarié a maintenu ce refus, par courrier recommandé du 29 juillet 2008, en précisant s'être mis en relation avec le médecin du travail et M. Chevot, délégué syndical, l'ayant assisté lors de l'entretien préalable.
Dans la mesure où M. Carlos X... contestait la compatibilité du poste de reclassement qui lui était proposé avec son état de santé, en invoquant sa non-conformité aux recommandations du médecin du travail, il appartenait à l'employeur, tenu d'une obligation de sécurité de résultat, de solliciter l'avis du médecin du travail.
La société Univer se prévaut du caractère abusif du refus du salarié pour justifier le licenciement.
Toutefois l'impossibilité de reclasser le salarié en raison de son refus constitue une cause réelle et sérieuse de licenciement si l'employeur ne peut formuler de nouvelles propositions. Le licenciement repose alors sur l'inaptitude et sur l'impossibilité de reclassement ce que doit mentionner la lettre de rupture.
La société Univer ne démontre pas qu'elle ne disposait d'aucun autre poste compatible avec l'inaptitude du salarié et elle s'est abstenue de faire connaître à ce dernier les motifs s'opposant à son reclassement.
Il en résulte que l'employeur n'a pas satisfait à son obligation de reclassement de M. Carlos X..., que le licenciement a été prononcé en violation des dispositions de l'article L. 1226-10 du code du travail de sorte qu'il est dépourvu de cause réelle et sérieuse.
Le jugement déféré est infirmé à ce titre.
Sur les demandes en paiement au titre de la rupture du contrat de travail
L'indemnité stipulée à l'article L1226-15 du code du travail
M. Carlos X... sollicite une indemnité de 26 344.44 € en application de l'article L. 1226-15 du code du travail
L'article L 1226-15 du code du travail prévoit que: «'Lorsqu'un licenciement est prononcé en méconnaissance des dispositions relatives à la réintégration du salarié déclaré apte, prévues à l'article L. 1226-8, le tribunal saisi peut proposer la réintégration du salarié dans l'entreprise, avec maintien de ses avantages
acquis.
Il en va de même en cas de licenciement prononcé en méconnaissance des dispositions relatives au reclassement du salarié déclaré inapte prévues aux articles L. 1226-10 à L. 1226-12.
En cas de refus de réintégration par l'une ou l'autre des parties, le tribunal octroie une indemnité au salarié. Cette indemnité ne peut être inférieure de douze mois de salaires. Elle se cumule avec l'indemnité compensatrice et le cas échéant, l'indemnité spéciale de licenciement prévue à l'article L. 1226-14.
Lorsqu'un licenciement est prononcé en méconnaissance des dispositions du troisième alinéa de l'article L. 1226-12, il est fait application des dispositions prévues par l'article L. 1235-2 en cas d'inobservation de la procédure de licenciement'».
M. Carlos X... est fondé en sa demande en paiement d'une indemnité de 26 344.44 €, correspondant à 12 mois de salaires, en application des dispositions précitées.
L'indemnité compensatrice et l'indemnité de licenciement
M. Carlos X... sollicite une indemnité de préavis de 4 390.74 € et une indemnité de licenciement de 3 756.38 €.
Il n'a pas été rapporté la preuve du caractère abusif du refus du salarié du reclassement proposé ; dès lors l'intéressé est fondé en sa demande en paiement d'une indemnité compensatrice de 4 390.74 €, en application de l'article L. 1226-14 susvisé et de l'article 35-2 de la convention collective applicable.
La société Univer fait valoir qu'elle a versé une indemnité de licenciement de 5 269.02 €, alors même que du fait de son ancienneté de dix ans et deux mois, le montant de cette indemnité était de 4 488.31 €, de sorte que M. Carlos X... lui est redevable d'un trop perçu de 780.71 € dont elle sollicite le remboursement.
En application de L. 1226-14 du code du travail M. Carlos X... a droit «'à une indemnité spéciale de licenciement qui, sauf dispositions conventionnelles plus favorables, est égale au double de l'indemnité prévue par l'article L. 1234-9 du code du travail'».
Compte tenu de l'ancienneté de dix ans et deux mois du salarié, celui-ci est en droit de prétendre à une indemnité spéciale de licenciement d'un montant de 9 025.16 € selon le calcul suivant :
2.195,37 x (2/5) x 10 ans = 8.781,48 €,
- 2.195,37 x [ (2/5) + (4/15)] x 2/12 = 243,68 € ,
Dans la mesure où l'employeur n'a versé au salarié qu'une somme de 5.269,02€ au titre de l'indemnité de licenciement ainsi que le mentionne le bulletin de paye de juillet 2008, M. Carlos X... est fondé en sa demande en paiement de la somme de 3 756.14 €.
Il convient de faire droit à ce chef de demande et de rejeter la demande reconventionnelle de l'employeur sur laquelle les premiers juges n'ont pas statué.
L'indemnité pour non-respect de procédure de licenciement
M. Carlos X... sollicite une indemnité de 2 195.37 € pour non-respect de la procédure de licenciement dès lors que le courrier le convoquant à l'entretien préalable du 7 juillet 2010 lui a été présenté le 3 juillet 2010, qu'il ne respecte pas le délai de cinq jours stipulé à l'article L. 1232-2 du code du travail et qu'il n'est pas mentionné, selon les dispositions de l'article R. 1232-1 du même code, la faculté pour l'intéressé de se faire assister par une personne de son choix appartenant à l'entreprise et, en l'absence d'institutions représentatives du personnel, la faculté de se faire assister par un conseiller de son choix inscrit sur la liste départementale ainsi que l'adresse des services où cette liste est tenue à la disposition des salariés.
Toutefois, l'indemnité stipulée à l'article L. 1226-15 du code du travail pour violation des règles particulières aux salariés victimes d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle et sanctionnant cette irrégularité de fond, ne se cumule pas avec l'indemnité prévue en cas d'inobservation des règles de forme.
Il convient de rejeter ce chef de demande.
L'indemnisation du préjudice résultant du manque à gagner suite à la rupture abusive
M. Carlos X... sollicite à ce titre une somme de 36 473 €.
Cependant, l'indemnité qui a été allouée au salarié sur le fondement de l'article L. 1226-15 du code du travail répare l'intégralité du préjudice résultant du caractère illicite de la rupture. Il convient en conséquence de rejeter ce chef de demande.
La demande en rappel de salaires pour la période du 5 juin au 5 juillet 2008
Selon les dispositions de l'article L 1226-11 du code du travail, «' Lorsque, à l'issue d'un délai d'un mois à compter de la date de l'examen médical de reprise du travail, le salarié déclaré inapte n'est pas reclassé dans l'entreprise ou s'il n'est pas licencié, l'employeur lui verse, dès l'expiration de ce délai, le salaire correspondent à l'emploi que celui-ci occupait avant la suspension de son contrat de travail.
Ces dispositions s'appliquent également en cas d'inaptitude à tout emploi dans l'entreprise constatée par le médecin du travail'».
En l'espèce, M. Carlos X... a été déclaré inapte à son poste lors de la seconde visite de reprise du 5 juin 2008 et il n'a été convoqué à un entretien préalable à un licenciement pour inaptitude que par courrier recommandé présenté le 3 juillet 2008, suite à la télécopie adressée le 1er juillet 2008 à l'employeur par son conseil et la rupture lui a été notifiée le 31 juillet 2008.
En application des dispositions précitées, la société Univer est tenue de verser au salarié la somme de 2 195.37 € au titre des salaires qu'il lui appartenait de verser pour la période du 5 juin au 5 juillet 2008, le nouvel arrêt de travail du salarié suite à son hospitalisation et après que celui-ci ait été déclaré inapte n'ayant pas pour conséquence juridique d'ouvrir une nouvelle période de suspension du contrat de travail.
Sur la remise des documents sociaux
Il y a lieu d'ordonner la remise des documents sociaux conformes au présent arrêt.
M. Carlos X... sollicite une indemnisation à hauteur de 7 500 € au titre du préjudice résultant de la remise tardive de documents sociaux au demeurant non conformes.
Il résulte de l'article R. 1234-9 du code du travail que l'employeur délivre au salarié, au moment de l'expiration ou de la rupture du contrat de travail, les attestations et justifications qui lui permettent d'exercer son droit aux prestations sociales ainsi qu'un certificat de travail et que ces documents sont quérables et non portables.
Les bulletins de paye de février à juillet 2008 mentionnent l'absence du salarié sans indiquer le fait que celui-ci était en accident de travail, ils ne font état d'aucun élément de rémunération ou de prise en charge et l'attestation Assédic/Pôle emploi ne tient pas compte du salaire brut réel du salarié.
Outre le fait que ces documents sociaux ne sont pas conformes, ils n'ont été remis au salarié que le 20 octobre 2008, dans le cadre de l'instance en référé et cette remise tardive et non conforme occasionne, nécessairement, un préjudice à l'intéressé, qu'au vu des documents versés aux débats, il convient de chiffrer à la somme de 1 000 €.
Sur le solde de congés payés
M. Carlos X... sollicite le paiement de la somme de 3 456.36 € au titre du solde de
congés payés de sept semaines qu'il n'a pas pris.
La société Univer, pour sa part, reproche au salarié de ne pas justifier du bien-fondé de cette demande dès lors qu'il lui a versé la somme de 1 805.11 € au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés ainsi que le mentionne le bulletin de paye du mois de juillet 2008.
L'examen de ce document révèle qu'outre l'indemnité de congés payés due au salarié suite à son départ de l'entreprise, l'employeur a décompté 22 jours de congés payés pour un montant de 2 042.47 €.
Toutefois, dans son offre de reclassement notifiée le 11 juillet 2008, la société Univer rappelle au salarié que la suspension de son contrat de travail a pris fin le 5 juillet 2008, que ses droits à rémunération ont repris le 7 juillet 2008 et elle l'invite à se présenter à son poste de travail le mardi 15 juillet 2008 ou à faire valoir ses droits à congés.
Cette offre précise, en outre, que le salarié a un reliquat d'une semaine de congé pour la période du 1er juin 2006 au 31 mai 2007 et un reliquat de six semaines de congés pour la période du 1er juin 2007 au 31 mai 2008.
L'échange des correspondances entre les parties révèle que M. Carlos X... s'est, régulièrement, présenté à l'entreprise pour discuter des modalités de l'offre de reclassement, qu'il a contacté le médecin du travail et le délégué syndical à ce titre, qu'il s'est tenu à la disposition de son employeur et qu'il n'a déposé aucune demande de congés, étant observé qu'il lui était, matériellement, impossible de prendre 22 jours de congés payés à compter du 15 juillet 2008.
En l'état des explications et des pièces fournies, M. Carlos X... qui percevait un salaire mensuel de 2 195.37 € est fondé en sa demande en paiement des sept semaines de congés payés pour un montant de 3 456.36 € selon le calcul
suivant : (26 344.44/52) x 7 = 3 456.36 €.
Sur les conséquences de la procédure collective
Suite au jugement prononcé 15 avril 2013 par le tribunal de commerce de Meaux, la société Univer est en redressement judiciaire avec un plan d'apurement de son passif sur dix ans.
Il résulte des articles L. 622-21, L. 622-22, L. 625-3 et L. 626-25 du code de commerce que les instances en cours devant la juridiction prud'homale à la date du jugement d'ouverture de la procédure collective ne sont pas suspendues mais sont poursuivies en présence du mandataire judiciaire et de l'administrateur lorsqu'il a une mission d'assistance, ou du commissaire à l'exécution du plan, ou ceux-ci dûment appelés.
La procédure ne peut toutefois tendre qu'à la fixation du montant des créances qui, en raison de leur origine antérieure au jugement d'ouverture, restent soumises, même après l'adoption du plan de redressement par cession ou continuation, au régime de la procédure collective.
L'UNEDIC, Délégation AGS CGEA Île de France Est conclut à sa mise hors de cause.
Cependant, en application de l'article D. 3253-5 du code du travail, le montant maximum de la garantie de l'AGS s'apprécie à la date à laquelle est due la créance du salarié et au plus tard à la date du jugement arrêtant le plan ou prononçant la liquidation judiciaire.
Dès lors que le salarié a été licencié avant l'ouverture de la procédure collective, sa créance a pris naissance à la date de la rupture et doit être garantie par l'AGS dans la limite du plafond applicable à
cette date, soit en l'espèce le plafond 6.
Il sera rappelé qu'en application de l'article L. 626-20 du code de commerce, les délais prévus par le plan de continuation arrêté au bénéfice de la société Univer sont inopposables à M. Carlos X....
Sur la demande au titre des frais irrépétibles et les dépens
En vertu de l'article 700 du code de procédure civile, la société Univer, qui succombe, supportera la charge des dépens de première instance et d'appel, en versant à l'intimé une indemnité de 2 500 € au titre des frais irrépétibles exposés.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
CONFIRME le jugement en ce qu'il a débouté M. Carlos X... de sa demande relative à l'indemnisation du préjudice résultant du manque à gagner suite à la rupture abusive;
INFIRME le jugement pour le surplus;
Statuant à nouveau,
DIT que le licenciement de M. Carlos X... a été prononcé en violation des dispositions de l'article L. 1226-10 du code du travail et qu'il est privé de cause réelle et sérieuse;
FIXE les créances de M. Carlos X... au passif du redressement judiciaire de la SARL Univer aux sommes suivantes :
' 26 344.44 € au titre de l'indemnité spécifique, prévue à l'article L. 1226-15 du code du travail
' 4 390.74 € au titre de l'indemnité compensatrice, prévue à l'article L. 1226-14 du code du travail
' 3 756.14 € au titre de l'indemnité spéciale de licenciement, prévue à l'article L. 1226-14 du code du travail
' 2 195.37 € à titre de rappel de salaires pour la période du 5 juin 2008 au 5 juillet 2008
' 3 456.36 € au titre du solde de congés payés
'1 000 € à titre de dommages-intérêts pour remise tardive et non conforme des documents sociaux
PRECISE que le jugement d'ouverture de la procédure collective arrête le cours des intérêts légaux et conventionnels ainsi que tous intérêts de retard et majorations;
DECLARE le présent arrêt opposable à l'UNEDIC, délégation AGS CGEA Île de France Est ;
DIT que l'AGS-CGEA IDF EST devra garantir le paiement de ces sommes dans la limite de six fois le plafond mensuel retenu pour le calcul des contributions au régime d'assurance chômage ;
ORDONNE à la SARL Univer de remettre à M. Carlos X... les bulletins de paye, un certificat de travail et une attestation Pôle emploi conformes au présent arrêt ;
DEBOUTE la SARL Univer de sa demande reconventionnelle en restitution de trop perçu sur
l'indemnité de licenciement;
CONDAMNE la SARL Univer à verser à M. Carlos X... une indemnité de 2 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile;
DEBOUTE M. Carlos X... du surplus de ses demandes;
CONDAMNE la SARL Univer aux dépens de première instance et d'appel.