Cass. 3e civ., 13 septembre 2018, n° 16-26.049
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Chauvin
Avocats :
SCP Foussard et Froger, SCP Rousseau et Tapie
Sur le second moyen, après avis donné aux parties en application de l'article 1015 du code de procédure civile :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 30 juin 2016), rendu sur renvoi après cassation (3e Civ., 4 juin 2013, pourvoi n° 12-17.719), que les consorts X..., propriétaires de locaux à usage commercial donnés à bail à la société C..., avec une clause d'accession sans indemnité au profit du bailleur, lui ont délivré congé pour le 1er avril 1997, avec offre de renouvellement, puis ont exercé leur droit d'option ; que, le 17 janvier 2001, la société C..., placée en liquidation judiciaire et représentée par son liquidateur, a cédé son fonds de commerce à la société ASC ; que celle-ci a assigné les consorts X... en paiement d'une indemnité d'éviction ;
Attendu que les consorts X... font grief à l'arrêt de les condamner solidairement à payer à la société ASC une certaine somme au titre de l'indemnité d'éviction, alors, selon le moyen :
1°/ que, lorsque le bail commercial contient une clause d'accession au profit du bailleur en fin de bail, l'indemnité d'éviction due au preneur en cas de non-renouvellement doit s'apprécier en l'état des locaux sans les constructions et améliorations réalisées par le preneur en cours de bail ; qu'en l'espèce, il était stipulé au contrat de bail liant la société ASC aux consorts X... que le bailleur resterait propriétaire en fin de bail de tous travaux, embellissements et améliorations réalisés par le preneur, sans indemnité pour ce dernier ; qu'en retenant que la société ASC avait droit à obtenir une indemnité d'éviction fondée sur la valeur des locaux au jour du non-renouvellement, la cour d'appel a violé l'article L. 145-14 du code de commerce ;
2°/ que, subsidiairement, lorsque le bail commercial contient une clause d'accession au profit du bailleur en fin de bail, et que celui-ci a fait l'objet d'un ou plusieurs renouvellements, l'indemnité d'éviction due au preneur en cas de non-renouvellement doit s'apprécier en l'état des locaux sans les constructions et améliorations réalisées par le preneur depuis le dernier renouvellement ; qu'en déduisant en l'espèce de la clause d'accession bénéficiant aux bailleurs au terme du bail que la société ASC avait droit à obtenir une indemnité d'éviction fondée sur la valeur des locaux au jour du non-renouvellement, en ce compris toutes les améliorations apportées par les preneurs depuis le 10 février 1970, au motif que ces améliorations étaient réputées s'être incorporées au local à chaque renouvellement du bail, cependant que les améliorations réalisées lors de la dernière période de location, entre le 1er avril 1988 et le 31 mars 1997, devaient être exclues de cette évaluation comme ayant été acquises par les bailleurs au terme du bail non renouvelé, la cour d'appel a violé l'article L. 145-14 du code de commerce ;
3°/ que, en cas d'accession au profit du bailleur, la partie non amortie des améliorations apportées par le preneur peut être portée dans sa comptabilité en tant que charge déductible ; qu'il en résulte que, en l'absence de tout préjudice du preneur, celui-ci ne peut être indemnisé de la valeur de ses investissements par le bailleur accédant à ces améliorations ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a encore violé l'article L. 145-14 du code de commerce ;
Mais attendu qu'une clause d'accession sans indemnité stipulée au profit du bailleur ne fait pas obstacle au droit du preneur évincé d'être indemnisé des frais de réinstallation dans un nouveau local bénéficiant d'aménagements et équipements similaires à celui qu'il a été contraint de quitter ; que la cour d'appel a relevé que le bail initial contenait une clause d'accession en fin de bail au profit du bailleur et que la locataire avait réalisé des aménagements et des installations dans les lieux avant de se réinstaller dans un autre local à l'issue de son éviction ; qu'il en résulte que la locataire était en droit de prétendre à une indemnité au titre des frais de réinstallation ; que, par ces motifs substitués à ceux critiqués, l'arrêt se trouve légalement justifié ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le premier moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.