Sur les deux moyens, réunis :
 
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 30 janvier 1996), que la société Cobenko, propriétaire de locaux à usage commercial situés au rez-de-chaussée d'un immeuble en copropriété, les a donnés à bail à M. X... pour 24 mois à compter du 15 juin 1991, les locaux lui étant livrés "bruts de décoffrage", à destination exclusive d activité de restauration; qu'une promesse de bail commercial a été signée, pour ces mêmes locaux, le 27 juillet suivant, sous la condition suspensive que le bail de 24 mois ne serait pas résilié; que la copropriété ne lui ayant pas donné l'autorisation de procéder aux raccordements des canalisations d'eaux usées et d'aération sur les équipements collectifs de l'immeuble, M. X... a, le 30 juillet 1992, restitué les clés à la bailleresse et l'a assignée aux fins de faire prononcer la résiliation des deux conventions et obtenir des dommages-intérêts ;Attendu que la société Cobenko fait grief à l'arrêt d'accueillir la demande, alors, selon le moyen, "
 
1°) qu'au lieu de déclarer in abstracto que la bailleresse aurait manqué à son obligation de délivrance en ne livrant pas des locaux aptes à servir à usage de restauration à défaut de s'être préalablement assurée de l'obtention des autorisations nécessaires à l'exploitation d'une pizzeria auprès de la copropriété, l'arrêt aurait dû rechercher in concreto, ainsi que l'y invitaient les conclusions, si, tant en raison de sa nature précaire que du contexte conflictuel constaté à l'époque où le bail dérogatoire de deux ans du 14 juin 1991 a été rédigé, l'obligation de délivrance à laquelle était tenu le bailleur en vertu de ce contrat ne se limitait pas, pendant cette période transitoire, à l'établissement éventuel d'un bail commercial de neuf ans, - objet d'une simple promesse à exécution différée sous condition suspensive d'absence de résiliation du premier bail- à mettre à la disposition du preneur un local brut de décoffrage destiné à une restauration rapide avec simple réchauffement des plats, le bailleur étant simplement tenu de l'obligation complémentaire de moyen consistant à prêter son concours pour faciliter la mise en oeuvre des équipements nécessaires dont la réalisation eût seule permis l'établissement du bail commercial; que l'arrêt qui ne s'est pas expliqué à ce sujet est donc entaché d'un défaut de base légale au regard des articles 1134, 1184, 1719-1° et 1720 du Code civil;
 
2°) que l'arrêt a méconnu la loi du contrat du 14 juin 1991, qui s'imposait au preneur, autant qu'au bailleur, même si la prise de possession des lieux avait précédé, en ce qu'elle instaurait une précarité dans les droits de l'exploitant, puisque le bail de 24 mois pouvait être résilié à la fin de tout mois civil avec préavis d'un mois, en sorte que l'obligation de délivrance du bailleur était également empreinte de cette même précarité et ne pouvait donc porter sur l'exploitation sans réserve d'une pizzeria nécessitant un minimum de durée que ce contrat ne pouvait procurer; que l'arrêt a donc violé les articles 1134 , 1184 et 1719-1° du Code civil;
 
 3°) que l'arrêt ne pouvait isoler du litige actuel les fautes commises par le preneur dans l'exécution des travaux d'installation de son commerce dans la mesure où , comme le rappelaient les conclusions, ce sont ces non-conformités aux règles de l'art générant des troubles pour la copropriété qui ont incité celle-ci à différer jusqu'en novembre 1992 l'autorisation des travaux de raccordement des canalisations d'eaux et des conduits de fumée; qu'ainsi lesdites fautes du preneur engageaient à tout le moins sa responsabilité partielle comme étant en relation de causalité avec son préjudice prétendu; que l'arrêt a donc violé les articles 1147 du Code civil en combinaison avec les articles 1134 du même Code et 4 et 5 du nouveau Code de procédure civile;
 
4°) que l'arrêt a présumé que la novation intervenue entre les parties sur une réduction substantielle des loyers eu égard aux difficultés rencontrées traduisait une reconnaissance de responsabilité exclusive par la société Cobenko, étant donné que malgré cette diminution des 2/3, le preneur a brusquement arrêté son exploitation pendant la durée limitée du contrat précaire fin juillet 1992, au mépris de la compensation à lui accordée par la bailleresse pour le retard apporté par la copropriété à lui délivrer les autorisations nécessaires à une extension de son activité; qu'il y avait encore là matière à responsabilité au moins partielle de M. X...; que l'arrêt a donc violé les articles 1134 et 1147 du Code civil ;" Mais attendu qu'ayant relevé que l'obligation de délivrance de la bailleresse consistait à livrer au preneur des locaux devant servir à l'activité de restauration auxquels ils étaient exclusivement destinés, et constaté que le preneur s'était, dès son entrée dans les lieux, heurté à l'opposition de la copropriété de l'autoriser à faire procéder aux travaux de raccordement sur les parties communes, bien que les devis présentés à un expert aient reçu son agrément et que les lieux loués ne pouvaient être exploités conformément à leur destination contractuelle, non du fait du locataire, mais de l'obstacle résultant du défaut d'autorisation du syndicat des copropriétaires, la cour d'appel, qui en a exactement déduit que le manquement de la société Cobenko à son obligation était caractérisé par le fait qu'elle ne s'était pas assurée auprès de la copropriété que l'autorisation nécessaire serait donnée au preneur, a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ;
 
PAR CES MOTIFS :
 
REJETTE le pourvoi ;
 
Condamne la société Cobenko aux dépens ;
 
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit mars mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit.