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Décisions

Cass. soc., 14 mai 1998, n° 96-40.693

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Carmet

Rapporteur :

M. Chagny

Avocat général :

M. de Caigny

Avocats :

Me Boullez, SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez

Aix-en-Provence, du 20 nov. 1995

20 novembre 1995

Sur le moyen unique :

Attendu que Mme X... a été engagée au mois d'août 1986 en qualité de vendeuse par la société La Boutique Tempora, dont elle a été nommée gérante le 15 février 1988 ; que, le 23 mai 1992, l'assemblée générale extraordinaire des associés a décidé de mettre fin " tant à sa qualité de vendeuse, que de gérante de la société " ; que ladite société ayant été mise en liquidation judiciaire le 2 juillet 1992, Mme X... a demandé à la juridiction prud'homale la fixation de sa créance de rappel de salaire ;

Attendu que l'ASSEDIC des Alpes-Maritimes fait grief à l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 20 novembre 1995) d'avoir fait droit à la demande de Mme X..., alors, selon le moyen, d'une part, que le cumul d'un contrat de travail et d'un mandat social n'est licite que si le mandataire social exerce des fonctions salariales distinctes des fonctions sociales dans un réel état de subordination, ce qui est exclu dans une société à responsabilité limitée de dimension réduite où la gérante est l'unique personnel de la société ; qu'en l'espèce il résulte des constatations de l'arrêt que, le 15 février 1988, Mme X..., unique employée de la société Boutique Tempora, a été nommée gérante de ladite société avec les pouvoirs les plus étendus et qu'elle a procédé seule à la déclaration de cessation des paiements de l'entreprise, éléments qui font obstacle à la réalité de l'état de subordination de Mme X... et à la qualité de salariée de celle-ci ; que la cour d'appel, qui retient la qualité de salariée de Mme X..., ne déduit pas de ses constatations les conséquences légales au regard de l'article L. 121-1 du Code du travail ; et alors, d'autre part, que le contrat de travail emporte versement d'une rémunération spécifique au titre des fonctions salariées ; qu'en l'espèce il résulte des énonciations de l'arrêt que, selon procès-verbal du 23 mai 1992, Mme X..., " pour ne pas gêner la trésorerie " et " pour régler le maximum de fournisseurs ", n'a reçu sur son salaire en 1991 qu'une somme de 45 450 francs et qu'il lui est dû au 31 mars 1992 la somme de 170 347,69 francs, ce qui implique le consentement de Mme X... à ne pas percevoir l'intégralité d'un salaire et exclut la réalité d'un contrat de travail ; que la cour d'appel, qui relève que Mme X... n'est pas restée sans réclamer le montant de ses salaires et qui retient la qualification de salariée de Mme X..., n'a pas déduit de ses constatations les conséquences légales au regard de l'article L. 121-1 du Code du travail ;

Mais attendu que la cour d'appel a constaté qu'après sa désignation aux fonctions de gérante de la société, en contrepartie desquelles elle percevait une rémunération distincte de son salaire, Mme X..., qui ne détenait aucune part du capital de la société, avait continué d'occuper son emploi de vendeuse, qu'elle n'avait alors disposé d'aucune autonomie et qu'elle avait été placée sous l'autorité et le contrôle des deux associés ; que la cour d'appel, ayant ainsi fait ressortir que Mme X... avait exercé effectivement des fonctions techniques distinctes du mandat social dans un lien de subordination, en a déduit à juste titre que son contrat de travail antérieur à sa désignation en qualité de gérant de la société s'était poursuivi au sein de celle-ci jusqu'à la rupture des relations salariales décidée par l'assemblée générale extraordinaire des associés ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.