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Décisions

Cass. 1re civ., 8 juillet 2009, n° 08-16.153

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Bargue

Rapporteur :

M. Chaillou

Avocat général :

M. Chevalier

Avocats :

Me Blanc, SCP Waquet, Farge et Hazan

Grenoble, du 31 mars 2008

31 mars 2008

Sur le premier moyen, qui est recevable, pris en sa troisième branche :

Vu l'article 510 du code civil dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2007-308 du 5 mars 2007, ensemble l'article 1382 du même code ;

Attendu que la modification du bénéficiaire d'un contrat d'assurance-vie par un majeur en curatelle nécessite l'assistance du curateur ; que la substitution du bénéficiaire au profit du curateur ne peut être faite qu'avec l'assistance d'un curateur ad hoc ;

Attendu qu'un juge des tutelles a, le 2 octobre 2001, prononcé la mise sous curatelle renforcée d'Odette X... et a désigné sa fille, Mme Y..., en qualité de curatrice avec les pouvoirs de l'article 512 du code civil ; que, le 18 octobre 2001, Odette X... a modifié la clause désignant les bénéficiaires en cas de décès des contrats d'assurance-vie qu'elle avait souscrits les 22 septembre 1989 et 22 avril 1993, en substituant Mme Y... aux bénéficiaires désignés initialement ; qu'Odette X... est décédée le 13 janvier 2004, laissant pour lui succéder Mme Josiane X... épouse Z... et Mme Y..., ses deux filles, et ses deux petits-enfants, Mme Christelle A... épouse B... et Francis A..., venus aux droits de leur mère, France X... ; que le 28 octobre 2004, Mme Josiane X... épouse Z..., Mme Christelle A... et M. Francis A... (les consorts X...-A...) ont fait assigner Mme Y... devant un tribunal de grande instance pour demander le rapport à succession des sommes diverties au titre des deux contrats d'assurance-vie et subsidiairement l'octroi de dommages-intérêts en réparation du comportement fautif de Mme Y... ; qu'un jugement du 1er juin 2006 a rejeté la demande de rapport à succession mais a condamné Mme Y... à verser aux consorts X...-A... une certaine somme à titre de dommages-intérêts ;

Attendu que, pour rejeter la demande de dommages-intérêts des consorts X...-A..., la cour d'appel retient que ces derniers n'ont invoqué aucun vice du consentement, par erreur, violence ou dol par le fait de manoeuvres ou agissements imputés à la curatrice à l'occasion de la modification des bénéficiaires des contrats d'assurance-vie ;

Qu'en statuant ainsi, en l'état d'un conflit d'intérêts, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Et sur le second moyen :

Vu l'article 1382 du code civil ;

Attendu qu'une action en justice ne peut, sauf circonstances particulières, qu'il appartient alors au juge de spécifier, constituer un abus de droit, lorsque sa légitimité a été reconnue par la juridiction du premier degré, malgré l'infirmation dont sa décision a été l'objet en appel ;

Attendu que, pour condamner les consorts X...-A... à payer à Mme Y... la somme de 2 000 euros à titre de dommages-intérêts, la cour d'appel, dont l'arrêt est infirmatif, se borne à constater que le caractère abusif de la procédure a causé à Mme Y... un préjudice ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a rejeté les demandes en dommages-intérêts des consorts X...-A... et les a condamnés à payer 2 000 euros à Mme Y... pour abus de droit, l'arrêt rendu le 31 mars 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Grenoble ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Chambéry.