Cass. 2e civ., 18 janvier 2001, n° 96-20.912
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Buffet
Rapporteur :
Mme Kermina
Avocat général :
M. Chemithe
Avocats :
SCP Masse-Dessen, Georges et Thouvenin, SCP Vincent et Ohl
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 5 septembre 1996) et les productions, que la société Fadier Elevage, qui exploite en Ille-et-Vilaine un élevage de porcs, a passé commande d'un produit d'alimentation animale auprès de la société Seretal qui s'est approvisionnée auprès de la société Ecopsi dont le siège social est dans le Pas-de-Calais ; que la société Ecopsi a directement fourni la société Fadier Elevage jusqu'au 22 avril 1994, date à laquelle elle a cessé ses livraisons ; que la société Fadier Elevage a alors assigné la société Ecopsi devant le tribunal de commerce de Rennes en résolution du contrat et en réparation de son préjudice ; que la société Ecopsi a soulevé in limine litis une exception d'incompétence au profit du tribunal de commerce d'Arras ; que le tribunal de commerce de Rennes s'étant déclaré compétent, la société Ecopsi a formé un contredit ;
Attendu que la société Ecopsi reproche à la cour d'appel de s'être déclarée compétente ratione loci, alors, selon le moyen :
1° que l'option de compétence territoriale prévue en matière contratuelle ne peut être invoquée qu'à la condition que la marchandise ait été effectivement livrée et non en cas de commande non suivie d'effet ; qu'en déclarant territorialement compétent le Tribunal saisi en fonction du lieu d'exécution du contrat de fourniture, pour connaître d'une action tendant à la résiliation pour non-livraison de marchandises commandées et paiement de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi de ce fait, pour la raison que, par deux télex, le fournisseur, domicilié dans le ressort d'une autre juridiction, s'était engagé à livrer un produit, bien qu'il résultât des termes mêmes de la demande qu'il n'y avait pas eu livraison effective de la chose en sorte que l'option de compétence ne pouvait jouer, la cour d'appel a violé l'article 46, alinéa 2, du nouveau Code de procédure civile ;
2° que le juge ne peut, par dérogation au principe selon lequel la juridiction territorialement compétente est celle du domicile du défendeur, fonder sa compétence sur l'option prévue en matière contractuelle au profit du Tribunal du lieu de livraison effective de la chose sans qualifier le contrat après avoir constaté la réunion de tous ses éléments constitutifs ; qu'en déduisant l'existence d'un contrat, sans même préciser sa qualification, du seul fait que la société Ecopsi se serait engagée à livrer un produit et qu'il lui était arrivé de le faire avant la survenance du litige, sans rechercher au titre de quel contrat ces livraisons auraient été effectuées ou auraient dû l'être pour celles qu'il lui était reproché de ne pas avoir honorées, ni pour quelle raison de droit les marchandises qui avaient été effectivement livrées et qui n'étaient pas concernées par le litige avaient été payées par le sous-acquéreur, non au fournisseur, ce qui aurait dû être le cas si un contrat avait existé entre eux, mais au revendeur, le juge ne pouvait omettre de trancher, ainsi qu'il y était invité par les deux parties, la question de savoir si ce revendeur était le cocontractant de la société Ecopsi ou bien un commissionnaire, simple intermédiaire entre le fournisseur et le sous-acquéreur ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 46, alinéa 2, du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu qu'au sens de l'article 46 du nouveau Code de procédure civile, le lieu de livraison effective s'entend de celui où la livraison a été ou doit être effectuée ;
Attendu qu'ayant constaté que le contrat liant les parties prévoyait que la marchandise était directement livrée par la société Ecopsi à la société Fadier Elevage, la cour d'appel en a justement déduit que celle-ci pouvait, en l'état de cette seule circonstance, se prévaloir de l'option de compétence édictée par l'article 46, alinéa 2, du nouveau Code de procédure civile ;
Et attendu que sous le couvert du grief de manque de base légale, le moyen ne tend, en sa seconde branche, qu'à remettre en discussion devant la Cour de Cassation l'appréciation souveraine par la cour d'appel de la valeur et de la portée des éléments de preuve qui lui ont été soumis quant à l'existence d'un contrat entre la société Ecopsi et la société Fadier Elevage peu important que le prix des marchandises ait été directement facturé par la société Seretal à la société Fadier Elevage ;
D'où il suit que le moyen, qui est recevable, n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.