Cass. com., 24 septembre 2003, n° 99-20.291
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Tricot
Sur le moyen unique pris en ses trois branches :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, (Fort-de-France, 5 août 1999), rendu en matière de référé que, par un document daté du 17 janvier 1995, M. X..., agissant en qualité de gérant de la société à responsabilité limitée Caribbean Conch compagny (la société CCC), a reconnu devoir à M. Y... une certaine somme représentant le solde restant dû sur le montant d'un prêt ; que la société CCC ne s'étant pas acquittée du remboursement de cette somme, M. Y... l'a fait assigner en référé ; que la société a soutenu que le consentement de M. X... à l'emprunt avait été surpris par dol et a contesté la compétence du tribunal de grande instance en se fondant sur la qualité d'associé de fait de M. Y... ; que le juge des référés a retenu la qualité de bailleur de fonds à M. Y... et a condamné la société à lui rembourser la somme due ; que la cour d'appel a infirmé la décision et renvoyé la cause et les parties devant le tribunal mixte de commerce de Fort-de-France, compétent pour connaître de la demande de M. Y... ;
Attendu que M. Y... fait grief à l'arrêt d'avoir ainsi statué, alors, selon le moyen:
1 ) que les parties ne peuvent, après avoir clairement défini dans un contrat le cadre de leurs relations, s'en évader en invoquant la théorie de la société de fait ; qu'ayant constaté l'existence d'une reconnaissance de dette datée du 17 janvier 1995, fondée sur un contrat de prêt présumé valable, la cour d'appel ne pouvait conclure à la qualité d'associé de fait de M. Y... sans violer l'article 1832 du code civil ;
2 ) que l'application des règles précises du droit des sociétés et du Code de commerce n'est pas justifiée pour des personnes qui n'ont pas véritablement choisi d'insérer leur activité dans le cadre juridique de la société ; qu'il appartient donc aux juges d'établir que les différents éléments constitutifs de la société sont effectivement réunis ;
qu'en considérant qu'importe peut que l'intimé ait ou non véritablement songé à entrer au capital de la société, la cour d'appel a violé l'article 1832 du Code civil ;
3 ) qu'enfin, dès lors que la qualité d'associé de fait est invoquée par l'un des prétendus membres de la société, il appartient aux juges de constater l'existence effective des apports, des participations aux gains et pertes de la société et de l'intention des parties de s'associer ;
qu'en l'espèce, la cour d'appel n'a recherche ni la volonté réelle de M. Y... d'entrer au capital de la société ni l'existence d'apports ni la participation aux bénéfices et aux pertes en se retranchant derrière l'apparence d e sa qualité d'associé aux yeux des tiers et du gérant de la société ; qu'en se bornant à établir la simple perspective pour le gérant de la société CCC d'une association à court ou moyen terme avec M. Y..., la qualité de futur associé du gérant de la dite société et l'apparence créée aux yeux des tiers, la cour d'appel a privé sa décision deb ase légale au regard de l'article 1832 du Code civil ;
Mais attendu qu'en relevant le comportement univoque de M. Y... pendant la période au cours de laquelle il a effectué des apports de fonds au bénéficie de la société, réglé des factures, fait l'avance de frais, traité directement l'achat de marchandises et disposé d'une carte bancaire à son nom délivrée à la société CCC et de cartes de visite où il apparaissait avec l'en-tête de la société sous la dénomination "sales manager", la cour d'appel a pu en déduire que celui-ci ne pouvait être considéré comme un simple prêteur de fonds ; qu'elle a donc à bon droit renvoyé la cause et les parties devant le tribunal mixte de commerce de Fort-de-France pour connaître de la demande de M. Y... ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.