Cass. com., 16 mai 2018, n° 15-16.284
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Riffault-Silk
Avocats :
SCP Nicolaý, de Lanouvelle et Hannotin, SCP Waquet, Farge et Hazan
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 16 février 2015), que la SARL Financière Lector, société holding détenue à parts égales par MM. Y... et X... qui en sont les cogérants, détient la quasi-totalité du capital social de la SARL Lector Consulting et associés dont MM. Y... et X... sont cogérants et associés ; que les relations entre eux s'étant dégradées, M. Y... a assigné M. X... en révocation judiciaire de ses fonctions de cogérant des sociétés Financière Lector et Lector Consulting et associés ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'ordonner sa révocation de ses fonctions de gérant des sociétés Lector Consulting et associés et Financière Lector alors, selon le moyen :
1°/ qu'en considérant qu'en négociant directement et individuellement avec un client de la société le versement d'un avantage supplémentaire dans le cadre de l'acquisition personnelle de deux appartements, M. X... aurait méconnu son obligation de loyauté et de fidélité en qualité de gérant de la société Lector Consulting et associés, après avoir pourtant admis que la société Lector Consulting et associés avait bien été destinataire des honoraires de négociation sur la vente du terrain A... tout comme elle avait été destinataire de commissions sur la vente de divers lots du programme immobilier « Terrasse d'Albret », que l'absence de paiement de la commission sur la vente d'un appartement à M. A... n'était pas imputable au seul M. X... et ne pouvait manifester sa volonté d'occulter ses agissements et de se placer en conflit d'intérêt vis-à-vis de sa propre société, et qu'aucun détournement de commission par rapport à ce qui avait été contractuellement fixé ne peut lui être reproché, ce dont il résulte que le comportement de M. X... ne pouvait caractériser la violation d'une obligation de loyauté et de fidélité à l'égard de la société, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations au regard des articles 1134 du code civil et L. 223-22 du code de commerce qu'elle a violés ;
2°/ qu'en reprochant à M. X... une méconnaissance du devoir de loyauté et de fidélité à l'égard de M. Y..., pour ne l'avoir pas informé du montant de la réduction obtenue sur l'acquisition personnelle de deux appartements dans le cadre du programme « Terrasses d'Albret », revenant à acheter deux appartements pour le prix d'un ni du protocole d'accord signé le 6 septembre 2011 prévoyant l'achat de deux appartements et le versement d'une commission de 225 000 euros au titre d'apporteur d'affaires « pour une transaction traitée par l'intermédiaire de la SARL Lector Consulting et associés », sans préciser en quoi l'omission d'une information sur les détails d'une opération dont elle constate qu'elle n'a causé aucun préjudice à la société dont les commissions n'ont pas été détournées et qui ne concerne par conséquent que le patrimoine privé de M. X..., serait déloyal à l'égard de M. Y... son associé et cogérant, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 du code civil et L. 223-22 du code de commerce ;
3°/ que le gérant est révocable par les tribunaux pour cause légitime ; que cette cause doit être appréciée au regard de l'intérêt social ; qu'en retenant l'existence d'une cause légitime de révocation de M. X... en ce qu'il a bénéficié d'un avantage auprès d'un client de la société, après avoir constaté que ce comportement n'avait causé aucun préjudice à la société laquelle avait touché ses commissions, la cour d'appel qui n'a pas caractérisé une atteinte à l'intérêt social et partant une cause légitime de révocation, a violé l'article L. 223-25 du code de commerce ;
4°/ que le gérant est révocable par les tribunaux pour cause légitime ; que cette cause doit être appréciée au regard de l'intérêt social ; qu'en se fondant comme elle l'a fait, sur une prétendue déloyauté de M. X... à l'égard de son associé et cogérant et sur une perte de confiance et une mésentente aigüe qui en seraient résulté laquelle ne pourrait permettre un développement pérenne et serein, sans caractériser l'existence d'une atteinte actuelle à l'intérêt social et après avoir au contraire admis que cette mésentente n'altérait pas le fonctionnement quotidien de la société, la cour d'appel a violé l'article L. 223-25 du code de commerce ;
Mais attendu que l'arrêt retient que M. X... avait négocié directement et individuellement avec un client de la société Lector Consulting et associés le versement d'un avantage supplémentaire sans avoir expressément informé M. Y... ni du montant de la réduction obtenue, revenant à acheter deux appartements pour le prix d'un, ni du protocole d'accord signé le 6 septembre 2011, prévoyant l'achat de deux appartements et le versement, à son profit personnel, d'une commission de 225 000 euros à titre d'apporteur d'affaires pour une transaction pourtant traitée par l'intermédiaire de la société Lector Consulting et associés ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, dont elle a pu déduire que M. X... avait méconnu l'obligation de loyauté et de fidélité à laquelle il était tenu en sa qualité de gérant, la cour d'appel, qui a estimé que ces agissements étaient de nature à nuire à l'intérêt social de la société Lector Consulting et associés, a pu retenir l'existence d'une cause légitime de révocation ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.