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Décisions

Cass. com., 30 mai 2018, n° 16-21.022

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Mouillard

Avocats :

SCP Hémery, Thomas-Raquin, Le Guerer, SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, SCP Piwnica et Molinié

Lyon, du 24 mars 2016

24 mars 2016

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., Mme Y..., épouse Z... (Mme Y...), Mme A..., épouse Y... (Mme A...) et la société MTH ont constitué en 2004 la société à responsabilité limitée Médias territoires et cultures (la société MTC) dont Mme A... a été nommée gérante ; que lors de l'assemblée générale extraordinaire du 27 juin 2008, il a été consenti une rémunération, à compter de l'exercice 2007, à Mme A... ; que le 15 décembre 2008, Mme A... a, pour le compte de la société MTC, conclu avec Mme Y... un contrat de travail, qui a pris fin en mars 2010 ; que contestant la rémunération consentie à la gérante et le contrat de travail conclu avec Mme Y..., M. X... a assigné la société MTC et ses associés en condamnation solidaire de Mme Y... et de Mme A... à rembourser à la société MTC une certaine somme, en annulation des résolutions adoptées par l'assemblée générale extraordinaire depuis 2009 consentant une rémunération à la gérante, en condamnation de Mme A... à restituer à la société MTC les sommes perçues à titre de salaires ainsi que les charges sociales afférentes à ceux-ci et en condamnation solidaire de Mme Y..., de Mme A... et de la société MTH en réparation de son préjudice d'associé au titre de l'abus de majorité qu'il estimait avoir été commis à son détriment ;

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de déclarer prescrite son action en annulation des délibérations sociales accordant une rémunération à la gérante alors, selon le moyen, que l'action en nullité ou en responsabilité fondée sur un abus de majorité n'est pas soumise aux dispositions de l'article L. 223-23 du code de commerce ; qu'en relevant, pour déclarer irrecevables les demandes de M. X... tendant, sur le fondement de l'abus de majorité, à voir annuler les délibérations sociales ayant attribué à la gérante, Mme A..., une rémunération excessive, ordonner à celle-ci de restituer les sommes versées et condamner les associés ayant voté ces délibérations à lui verser une somme d'argent en réparation du préjudice subi, qu'il y avait donc lieu d'appliquer les dispositions de l'article L. 223-23 du code de commerce qui prévoit un délai de trois ans à compter du fait dommageable, la cour d'appel a violé ce texte par fausse application ;

Mais attendu que l'action en annulation d'une délibération sociale fondée sur un abus de majorité relève de la prescription triennale prévue par l'article L. 235-9 du code de commerce ; que par ce motif de pur droit, suggéré par la défense, la décision se trouve justifiée ; que le moyen ne peut être accueilli ;

Mais sur le moyen, pris en sa deuxième branche :

Vu l'article L. 235-9 du code de commerce ;

Attendu que pour déclarer prescrite l'action en annulation de toutes les délibérations sociales formée par M. X..., l'arrêt retient que la rémunération de la gérante a été décidée lors de l'assemblée générale du 27 juin 2008, qui constitue le point de départ de la prescription, et que l'assignation du 26 décembre 2011 a été faite après l'expiration du délai de trois ans ;

Qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher, comme il lui était demandé, si les demandes d'annulation et de restitution formées au titre de chacune des décisions annuelles d'allouer une rémunération à la gérante prises par l'assemblée générale, à partir de l'année 2009, étaient prescrites, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

Sur le moyen, pris en sa troisième branche :

Vu l'article 1382, devenu 1240 du code civil, ensemble l'article 2224 du même code ;

Attendu que pour déclarer prescrite l'action de M. X... en réparation des préjudices résultant d'un abus de majorité, l'arrêt retient que l'assignation du 26 décembre 2011 a été faite hors délai, après l'expiration du délai de trois ans pour l'abus de majorité dont se plaint M. X... dans la mesure où cet abus, s'il avait existé, était constitué au jour de la décision, le 27 juin 2008, fait dommageable créant le préjudice ;

Qu'en statuant ainsi, alors que l'action en réparation du préjudice causé par un abus de majorité se prescrit par cinq ans, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Et sur le moyen, pris en sa quatrième branche :

Vu l'article L. 223-23 du code de commerce ;

Attendu que pour déclarer prescrite l'action de M. X... fondée sur le contrat de travail, l'arrêt retient qu'il ne démontre pas que ce contrat, conclu avec Mme Y... en décembre 2008, ait été dissimulé ;

Qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si le fait que la gérante, dans le rapport de gestion sur les opérations de l'exercice clos le 31 décembre 2008 en vue de l'assemblée générale du 30 juin 2009, ait indiqué aux associés qu'il n'avait pas été conclu de conventions réglementées, n'établissait pas la dissimulation invoquée, laquelle aurait été de nature à reporter le point de départ de la prescription, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 24 mars 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon, autrement composée.