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Décisions

Cass. 1re civ., 27 janvier 1993, n° 91-13.217

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Massip

Rapporteur :

M. Lemontey

Avocat général :

M. Gaunet

Avocats :

SCP Boré et Xavier, SCP Masse-Dessen, Georges et Thouvenin

Rouen, du 31 janv. 1991

31 janvier 1991

 
Attendu, qu'un groupement régional de maitres d'ouvrage a été constitué en 1979 entre deux offices publics d'habitations à loyers modérés, trois offices publics d'aménagement et de construction, deux sociétés anonymes d'HLM et deux autres sociétés de droit privé ; qu'il a lancé une consultation en vue de sélectionner des projets qui permettaient aux lauréats d'obtenir des marchés notamment avec les maîtres d'ouvrages du groupement pour la construction de 3100 logements ; qu'à la suite de cette sélection, le projet présenté par la société Auxiliaire d'Entreprises (SAE) a été agréé en qualité de " modèle ", au sens d'une circulaire ministérielle de 1977, par le directeur régional de l'équipement ; que la SAE, estimant n'avoir pas reçu le nombre de commandes auquel elle prétendait avoir droit, a assigné les quatre membres de droit privé du groupement en paiement de la somme de 12 855 054 francs représentant ses préjudices commercial et financier ; que l'arrêt confirmatif attaqué (Rouen, 31 janvier 1991) a déclaré que les juridictions judiciaires n'étaient pas compétentes pour connaître de ce litige ;
 
Sur le premier moyen :
 
Attendu que la SAE fait grief à cet arrêt d'avoir violé l'article 74 du nouveau Code de procédure civile en admettant, pour déclarer recevable l'exception d'incompétence soulevée par les défenderesses, que l'ordre de présentation prescrit par ce texte puisse être inversé ;
 
Mais attendu que la fin de non-recevoir pour défaut de qualité et l'exception d'incompétence ont été, en l'espèce, invoquées l'une et l'autre dans les mêmes conclusions en première instance ; qu'ainsi que l'a justement décidé la cour d'appel, peu importe, dès lors, l'ordre dans lequel ces deux moyens ont été présentés dans ce même acte ; que le moyen n'est donc pas fondé ;
 
Sur le second moyen, pris en ses deux branches :
 
Attendu qu'il est encore reproché à l'arrêt d'avoir fait droit à l'exception d'incompétence alors, selon le moyen, d'une part, qu'en considérant que le contrat litigieux était administratif bien que conclu entre une personne privée et un groupement également de droit privé en vertu de l'article R. 433-1 du Code de la construction, la cour d'appel a violé la loi des 16/24 août 1790 ; alors, d'autre part, que l'acte administratif unilatéral par lequel l'Etat confère le statut de " modèle " à un projet de construction est distinct de l'engagement en vertu duquel les maîtres de l'ouvrage garantissent aux lauréats du concours un nombre minimal de marchés ; qu'en déclarant que les maîtres d'ouvrage s'étaient vu conférer des prérogatives de finances publiques, la cour d'appel a également violé l'article R. 433-1 précité ;
 
Mais attendu que le groupement de maîtres d'ouvrage HLM de Haute-Normandie et de Picardie, constitué conformément à l'article R. 433-1 du Code de la construction, est composé majoritairement d'établissements publics, les uns à caractère administratif, les autres à caractère industriel et commercial ; qu'aux termes du texte précité, l'objet de ce groupement est la coordination des études, la préparation des marchés et l'exécution des travaux afin d'obtenir une réduction des prix de revient et des délais ; qu'en l'espèce, le règlement de la consultation rappelait que la circulaire ministérielle du 8 novembre 1977 avait transféré la responsabilité de la sélection des projets de construction aux maîtres d'ouvrage tandis que l'administration gardait celle de l'agrément qui confère le statut de " modèles " aux projets sélectionnés ; que l'objet du groupement et le but poursuivi par la consultation, ne font que prolonger l'objet des organismes publics et privés d'HLM qui composent le groupement et gèrent le service public du logement social ; que dans ces conditions, le groupement en cause est de droit public ; que la SAE n'établit pas en quoi sa demande, adressée dans un premier temps au mandataire commun du groupement, puis aux seules personnes privées, est divisible entre celles-ci et les autres membres du groupement ; que par ces motifs qui précisent ceux par lesquels la cour d'appel a retenu que les sociétés défenderesses se sont vu conférer avec les autres maîtres d'ouvrage au sein du groupement des prérogatives de puissance publique pour la réalisation d'une politique définie par les pouvoirs publics, l'arrêt attaqué se trouve légalement justifié ;
 
PAR CES MOTIFS :
 
REJETTE le pourvoi.