Cass. crim., 23 mai 2002, n° 01-86.979
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Cotte
Rapporteur :
M. Rognon
Avocat :
SCP Gatineau
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 312-1, 312-9 du Code pénal, 575, alinéa 2, 6 , 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a confirmé n'y avoir lieu à suivre contre Françoise X... et Arnold A... du chef d'extorsion ;
"aux motifs que Raymond Y... avait expliqué avoir fait connaissance de Françoise X... au cours de l'année 1995 et avoir rapidement entretenu des relations intimes avec cette dernière qui avait alors investi dans ses projets professionnels une somme allant de 350 000 francs à 400 000 francs ; qu'il avait encore soutenu qu'un peu plus tard, lorsqu'ils n'entretenaient plus que des relations amicales, Françoise X... lui avait proposé de lui acheter des terrains dont il était l'un des propriétaires indivis, qu'il lui avait répondu que cela lui permettrait de rembourser les investissements qu'elle avait fait, qu'une première discussion rapide avait eu lieu à Lyon puis un rendez-vous avait été pris à la gare de Chaumont le 9 avril 1997 ; que Françoise X... avait proposé qu'ils se rendent à son domicile à Joinville, que là il avait été insulté et frappé par son ancienne amie et un homme qu'il ne connaissait pas, que cet individu lui avait fait voir une arme, dont il ignorait si elle était vraie, qu'il portait à sa ceinture, qu'il avait ensuite été contraint de rédiger et de signer une reconnaissance de dette faussement antidatée à la date de sa rencontre à Lyon avec Françoise X..., d'établir sept chèques et de signer un échéancier ; que Françoise X..., quant à elle, avait admis avoir fait venir Raymond Y... à son domicile pour obtenir de lui le remboursement des fonds qu'elle lui avait remis et avait reconnu avoir demandé à un ami "assez impressionnant physiquement" et "au faciès rébarbatif" d'être présent lors du rendez-vous qu'elle avait donné à cette fin et avoir fermé la porte de son logement à clef afin d'éviter que ce dernier ne parte ; qu'aucun élément du dossier de l'information ne permettant de retenir que des violences physiques aient été exercées sur la personne de Raymond Y..., ce comportement n'apparaissait pas - eu égard à la nature des relations ayant existé entre Françoise X... et Raymond Y..., à la personnalité de celui-ci (rompu aux négociations, y compris difficiles ..) et aux conditions dans lesquelles les remises de fonds étaient intervenues - comme constitutif d'une contrainte au sens de l'article 312-1 du Code pénal, d'autant plus que Raymond Y..., qui avait fait opposition au paiement des sept chèques, s'était présenté dès le 9 avril 1997 au commissariat de police de Chaumont pour déposer plainte pour vol, mais n'avait alors fait aucune allusion à son entrevue avec Françoise X..., prétendant s'être fait dérobé ce même jour, en gare de Chaumont, une sacoche contenant, entre autres objets, un chéquier ; qu'aucune autre investigation, notamment l'expertise en écriture sollicitée, n'apparaissait de nature à apporter des éléments complémentaires utiles à la manifestation de la vérité ;
"1 - alors que tout jugement doit comporter des motifs suffisants pour permettre à la Cour de Cassation d'exercer son contrôle ; qu'en se bornant à relever l'absence de violences physiques ou contrainte exercées par les prévenus, sans rechercher si ces derniers n'avaient pas usé de menaces de violences, quand il ressortait de ses propres énonciations que la partie civile avait prétendu que l'homme qui accompagnait son ancienne amie "lui avait fait voir une arme (...) qu'il portait à la ceinture" et quand, par ailleurs, il était établi que la partie civile se trouvait alors dans une maison "fermée à clef" et que l'homme avait été choisi tout spécialement parce qu'il était "impressionnant physiquement" et avait un "faciès rébarbatif", la cour d'appel a entaché sa décision d'une insuffisance de motifs empêchant le contrôle de la Cour de Cassation ;
"2 - alors que la partie civile soutenait, dans son mémoire (p. 2, in fine), qu'il ressortait de l'aveu même de l'un des prévenus qu'ils lui avaient imposé de sortir son chéquier en le menaçant "s'il ne le sortait pas, (d'aller) le chercher nous-même" ;
qu'en confirmant n'y avoir lieu de suivre du chef d'extorsion, sans répondre au chef des conclusions de la partie civile tiré de l'aveu d'une menace de violences physiques exercée sur elle, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de motifs ;
"3 - alors que la partie civile soutenait encore, dans son mémoire (p. 2, al 8), que l'un des prévenus avait même reconnu que c'était bien parce que la présence de l'homme à la stature et à la mine inquiétantes avait "impressionné" la partie civile que cette dernière avait signé, libellé et daté de sa main les sept chèques obtenus par la prévenue ; qu'en excluant l'existence d'une contrainte subie par la partie civile, sans répondre au chef des conclusions de cette dernière tiré de l'aveu de la contrainte exercée sur elle, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de motifs ;
"4 - alors qu'en toute hypothèse, en affirmant que le comportement des prévenus "n'apparai(ssai)t pas constitutif d'une contrainte, la cour d'appel, qui a déduit un motif dubitatif, a entaché sa décision d'un défaut de motifs ;
"5 - alors que les juridictions d'instruction ont l'obligation de se prononcer sur l'ensemble des infractions ou tentatives punissables d'infractions qui résultent des faits dont elles sont saisies ; qu'en retenant, pour dire n'y avoir lieu à suivre du chef d'extorsion, que la partie civile avait "fait opposition au paiement des sept chèques", sans rechercher si les faits dénoncés n'étaient pas susceptibles de constituer une tentative d'extorsion, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision" ;
Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que, pour confirmer l'ordonnance de non-lieu entreprise, la chambre de l'instruction, après avoir analysé l'ensemble des faits dénoncés dans la plainte et répondu aux articulations essentielles du mémoire produit par la partie civile appelante, a exposé les motifs pour lesquels elle a estimé qu'il n'existait pas de charges suffisantes contre Françoise X... et Arnold A... ou quiconque d'avoir commis le délit reproché, ni toute autre infraction ;
Que le demandeur se borne à critiquer ces motifs, sans justifier d'aucun des griefs que l'article 575 du Code de procédure pénale autorise la partie civile à formuler à l'appui de son pourvoi contre un arrêt de chambre de l'instruction en l'absence de recours du ministère public ;
Que, dès lors, le moyen est irrecevable, et qu'il en est de même du pourvoi, par application du texte précité ;
Par ces motifs,
DECLARE le pourvoi IRRECEVABLE ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;