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Décisions

CA Angers, ch. civ. a, 20 octobre 2020, n° 17/02146

ANGERS

Arrêt

Infirmation partielle

PARTIES

Défendeur :

Aci Distri France (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Sochacki

Conseillers :

Mme Beuchee, Mme de la Roche Saint Andre

Avocats :

Selarl BFC Avocats, Selarl Praxis

TGI Laval, du 25 sept. 2017, n° 16/00502

25 septembre 2017

Vu le jugement, frappé du présent appel, rendu le 25 septembre 2017, par le tribunal de grande instance de Laval, qui a :

- prononcé la résiliation du contrat de fourniture et de prestations conclu le 12 février 2013 entre la SAS ACI Distri France et M. Nicolas B. ;

- condamné M. B. à payer à la SAS ACI Distri France les sommes suivantes :

2 000 euros TTC restant dus au titre du contrat précité ;

1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la SAS ACI Distri France à fournir à M. B. une facture détaillée pour les menuiseries alu distinguant le prix des fournitures de celui de la pose, dans le délai d'un mois à compter du paiement par ce dernier des sommes qu'il reste lui devoir et passé ce délai sous astreinte de 20 euros par jour de retard pendant trois mois ;

- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

- condamné M. B. aux dépens ;

- ordonné l'exécution provisoire du présent jugement ;

Vu les dernières conclusions du 6 février 2020 de M. Nicolas B., appelant, tendant, au visa de l'article 1793 du code civil, à :

- réformer le jugement du tribunal de grande instance de Laval du 25 septembre 2017 ;

- et statuant à nouveau,

- dire et juger que le contrat le liant à la société TBP Concept est un contrat d'entreprise à forfait ;

- juger que la résiliation de ce contrat est imputable aux torts exclusifs de la société TBP Concept ;

- avant dire droit, ordonner une expertise judiciaire confiée à tel expert qu'il plaira à la cour avec pour mission notamment de décrire les travaux exécutés par la société TBP Concept, indiquer si ces derniers ont été réglés conformément au devis établi ; décrire les travaux qui n'ont pas été exécutés par la société TBP Concept ; donner son avis sur le coût des travaux qui ont ainsi été réalisés par d'autres entreprises et préciser notamment si le coût de ces travaux était justifié par des contraintes techniques ou règles de l'art à respecter ; chiffrer le surcoût des travaux qu'il a dû régler pour la réalisation des travaux non exécutés par la société TBP Concept ; préciser la date à partir de laquelle il pourra prendre possession de l'immeuble et donner toute information utile sur les préjudices subis du fait des retards ;

- à titre subsidiaire,

- condamner la société TBP Concept au paiement d'une somme de 18 709,33 euros à titre de dommages et intérêts ;

- condamner la société TBP Concept au paiement d'une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- débouter la société TBP Concept de toutes ses demandes, fins, moyens et conclusions ;

- condamner la société TBP Concept aux entiers dépens de première instance et d'appel ;

Vu les dernières conclusions du 19 avril 2018, de la société par actions simplifiée (SAS) TBP Concept, intimée, tendant, au visa des articles 1134, 1184 et 1315 du code civil, à :

- confirmer en tout point le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Laval le 25 septembre 2017 ;

- débouter M. B. de toutes ses demandes nouvelles ;

- condamner M. B. à lui verser la somme 3 000 euros au titre de l'article 700 code de procédure civile ainsi que les entiers dépens. ;

Vu l'ordonnance de clôture en date du 4 mars 2020 ;

Suivant devis daté du 11 juillet 2005 et accepté le 12 février 2013, M. Nicolas B. a confié à la société TBP Concept, des travaux dans sa maison, et ce, pour un montant total s'élevant à 113 919,26 euros.

Par déclaration au greffe du 21 septembre 2015, la société TBP Concept a saisi la juridiction de proximité de Laval aux fins de résiliation judiciaire du contrat conclu le 12 février 2013 et de condamnation de M. B. à lui payer la somme de 2 000 euros au titre des prestations réalisées et impayées.

M. B. a soulevé l'incompétence matérielle de la juridiction de proximité et formé sur le fond une demande reconventionnelle tendant à obtenir la condamnation de la société TBP Concept au paiement de la somme de 27709,33 euros au titre de surcoûts, frais intercalaires de prêt et indemnités liées au retard de livraison.

Par jugement du 26 juillet 2016, le tribunal d'instance de Laval a déclaré la juridiction de proximité et le tribunal d'instance incompétents et a renvoyé l'affaire devant le tribunal de grande instance de Laval.

La dénomination de la société TBP Concept est devenue ACI Distri France à compter du 1er novembre 2016.

Par le jugement déféré, le tribunal a prononcé la résiliation du contrat considérant que les deux parties étaient d'accord pour résilier le contrat et que les travaux ont été totalement effectués, mais a refusé de le résilier aux torts exclusifs de la société ACI Distri France en relevant notamment qu'il appartenait à M. B. de la mettre en demeure d'effectuer les travaux dans un délai raisonnable avant d'avoir recours à d'autres entreprises.

Il a retenu que M. B. restait à devoir la somme de 2 682,61 euros TTC au regard des travaux exécutés par la société ACI Distri France, de ceux prévus au contrat qu'elle n'a pas exécutés et des sommes réglées, estimant que M. B. n'établissait pas le trop versé qu'il invoquait. La SCI ACI Distri France ayant accepté de ramener la somme restante due à 2 000 euros compte tenu du retard pouvant lui être imputé, il a condamné M. B. au paiement de cette somme.

Il a rejeté la demande reconventionnelle de M. B. aux motifs qu'il ne peut réclamer paiement du surcoût qu'il aurait payé et dont il ne justifie pas, faute d'avoir mis en demeure la société ACI Distri France d'effectuer les travaux dans un délai raisonnable ; que la TVA s'applique aux travaux réalisés par cette dernière, comme par les autres entreprises ; que le retard total des travaux n'est pas dû exclusivement à la société ACI Distri France, qui a d'ailleurs consenti une remise à ce titre ; que M. B. n'apporte aucun justificatif à l'appui de sa demande au titre des frais intercalaires de prêt.

Il a également débouté M. B. de sa demande au titre de l'attestation d'assurance décennale, considérant qu'elle ne présentait pas d'intérêt dans le cadre du litige.

Enfin il a ordonné à la société ACI Distri France d'établir une facture détaillée nécessaire à M. B. pour bénéficier du crédit d'impôt pour les menuiseries en aluminium.

Le 9 novembre 2017, M. Nicolas B. a interjeté appel de cette décision.

M. B. affirme que le contrat doit être qualifié de contrat d'entreprise tel que défini par les articles 1792 et suivants du code civil, et non de contrat de fourniture et prestations de service, s'agissant de travaux de rénovation et de réhabilitation complète d'une maison pour un montant conséquent et que M. T., exerçant par le biais de la société TBP Concept, avait une mission complète de conception et de réalisation dans le cadre d'un marché à forfait.

Il soutient que la rupture du contrat est imputable à la société TBP Concept qui aurait abandonné le chantier et demandé à d'autres entreprises de la remplacer pour finir ce qu'elle avait commencé, en le plaçant devant le fait accompli face auxdites entreprises. Il précise que M. T. a délaissé le chantier car il était en train de développer d'autres activités avec son entreprise ; qu'il a tout d'abord fait appel à des sous-traitants avant de demander aux entreprises d'établir leurs documents commerciaux avec lui et de se faire régler directement par lui ; que la société TBP Concept a usé du désarroi dans lequel il se trouvait et de son souhait de pouvoir habiter, avec sa famille, la maison rénovée dans des délais raisonnables ; qu'en réalité c'est la société TBP Concept qui s'est montrée défaillante dans le respect de ses obligations de maître d'œuvre et d'entreprise générale.

Il sollicite en conséquence une expertise judiciaire compte tenu de l'absence de précision des documents contractuels et des travaux prévus au devis, mais exécutés par d'autres entreprises que la société TBP Concept, et ce, afin de chiffrer le préjudice lié au surcoût engendré par l'inexécution de ses obligations et les travaux qu'elle a facturés, mais qui n'ont pas été réalisés.

À titre subsidiaire, il prétend justifier d'un préjudice global de 18 709,33 euros, au titre des manquements de la société TBP Concept dans l'exécution du contrat, en se fondant sur le décompte réalisé à l'occasion de la tentative de conciliation des parties. Il indique que ce préjudice recouvre plus précisément un surcoût supporté à hauteur de 9 052,37 euros, les acomptes versés ainsi que les frais intercalaires réglés de manière injustifiée à hauteur de 1 050 euros compte tenu du blocage du chantier.

La société TBP Concept, devenue ACI Distri France, fait observer tout d'abord que les travaux ont été effectués selon le devis accepté le 12 février 2013 et selon les règles de l'art, aucune contestation n'étant élevée sur la qualité des matériaux et des travaux.

Elle affirme ne pas être la cause des retards pris par le chantier. Elle expose à ce titre en particulier qu'elle a rencontré des difficultés lors des travaux, l'épouse de M. T., président et associé unique, étant tombée gravement malade courant 2013 ; que la plupart des travaux qui lui ont été confiés, lui ont été indûment retirés alors qu'elle était en mesure de les exécuter et qu'elle n'a pas été mise en demeure de les effectuer ; que M. B. a violé ses engagements contractuels en contractant directement avec les entreprises prestataires et que certaines entreprises se sont montrées défaillantes, en particulier celles en charge de la maçonnerie et des menuiseries.

Elle conteste avoir « recruté » des sous-traitants et prétend que c'est M. B. qui a pris l'initiative de faire appel à d'autres entreprises qu'il a lui-même choisies en faisant observer que, si elle s'était montrée défaillante, M. B. aurait dû préalablement la mettre en demeure.

Concernant l'inachèvement des travaux, elle met en avant la défaillance des entreprises auxquelles M. B. a fait appel.

Elle réitère sa demande de résiliation du contrat, au vu de l'inexécution fautive de M. B., et sollicite la confirmation de sa condamnation au versement de la somme de 2 000 euros au titre des prestations réalisées.

Elle s'oppose à la demande d'expertise judiciaire eu égard au temps écoulé depuis les travaux et à son absence d'utilité.

Enfin elle considère que les demandes financières de M. B. sont infondées parce qu'elles ne reposent sur aucun calcul, ni élément objectif.

Elle fait valoir notamment à ce titre :

- que l'acompte versé après la signature du devis est conforme à la volonté des parties et n'a pas à correspondre à des prestations identifiées ; que la perception d'un acompte correspond effectivement à l'accomplissement sans retard de prestations ;

- qu'elle ne nie pas que les cloisons n'ont pas été réalisées mais qu'elle a effectué un avoir de ce chef ;

- qu'elle ne peut supporter le moindre surcoût alors que M. B. a choisi lui-même les entrepreneurs, définit seul leurs prestations pour lesquelles il a eu toute latitude dans la détermination de la quantité et de la qualité des matières ; que certains surcoûts réclamés sont afférents à des prestations qui n'étaient pas prévues dans le devis ; que M. B. avait la possibilité de voir son chantier réalisé sans surcoût s'il l'avait laissée travailler ;

- qu'elle avait émis, à la demande de M. B., une facture au début des travaux afin de permettre le déblocage de son prêt et d'éviter des frais bancaires intercalaires.

Compte tenu de l'état d'urgence sanitaire déclaré dans les conditions de l'article 4 de la loi n°2020-290 du 23 mars 2020, l'audience du 6 avril 2020 ayant été supprimée selon décision de M. le premier président de la cour d'appel d'Angers en date du 16 mars 2020, l'affaire a été orientée vers la procédure sans audience par application des dispositions des articles 4 et 8 de l'ordonnance n° 2020-304 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables aux juridictions de l'ordre judiciaire statuant en matière non pénale et aux contrats de syndic de copropriété.

Les parties ont été avisées le 19 mai 2020 de cette orientation et de leur faculté de s'y opposer dans un délai de 15 jours.

En l'absence d'opposition dans le délai imparti, l'affaire est donc examinée selon la procédure sans audience et le délibéré est rendu par mise à disposition au greffe.

SUR QUOI, LA COUR

Sur la qualification du contrat

L'article 1779 du code civil distingue trois espèces principales de contrat de louage d'ouvrage et d'industrie, dont « celui des architectes, entrepreneurs d'ouvrages et techniciens par suite d'études, devis et marchés » soumis aux dispositions des articles 1787 à 1799-1 dudit code.

En application de l'article 1787 du code civil, « Lorsqu’on charge quelqu'un de faire un ouvrage, on peut convenir qu'il fournira seulement son travail ou son industrie, ou bien qu'il fournira aussi la matière. »

Il ressort du devis de la société TBP Concept accepté le 12 février 2013 par M. B. que les parties ont conclu un contrat de louage d'ouvrage ou contrat d'entreprise incluant la fourniture des matériaux tel que prévu par l'article 1787 du code civil.

M. B. prétend que la société TBP Concept avait une mission complète de conception et de réalisation de travaux de rénovation et de réhabilitation d'une maison dans le cadre d'un marché à forfait au sens de l'article 1793 du code civil.

Il est à noter tout d'abord qu'il n'est pas indiqué sur le devis que le prix serait forfaitaire ou encore ferme, définitif ou non révisable.

Qui plus est selon l'article 1793, le marché à forfait concerne uniquement «la construction d'un bâtiment » « selon un plan arrêté et convenu avec le propriétaire du sol ».

N'entrent pas en particulier dans le cadre d'application de l'article 1793 des travaux d'aménagements intérieurs.

En l'espèce le devis avait principalement pour objet la fourniture et la pose de menuiseries, la fourniture et la pose d'un escalier avec garde-corps, la pose de plaques de plâtre et de cloisons, la fourniture et la pose de peinture, carrelage et faïence, la fourniture et l'aménagement de placards et des travaux divers et de maçonnerie dont le détail n'a pas été fourni.

Les travaux divers et les travaux de maçonnerie projetés n'étant pas définis dans le devis, les travaux objet du devis doivent être considérés comme des travaux d'aménagements intérieurs ne nécessitant pas de modification du gros œuvre.

Ces travaux ne sont pas assimilables à la construction d'un bâtiment de sorte que la qualification de marché à forfait doit être écartée.

Sur la résiliation du contrat

Conformément à l'article 1184 du Code civil applicable en l'espèce eu égard à la date de conclusion du contrat litigieux qui est antérieure à l'ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016, la résolution d'un contrat synallagmatique peut être prononcée lorsque l'une des parties, pour quelque cause que ce soit, ne satisfait pas à son engagement.

En l'espèce M. B. et la société ACI Distri France s'accordent sur l'inexécution partielle des prestations que cette dernière s'était engagée à réaliser aux termes du devis accepté le 12 février 2013. L'un comme l'autre indiquent qu'une partie des travaux prévus sur ce devis a été réalisée et facturée par d'autres entreprises.

Sur la facture établie le 21 juin 2015 par la société ACI Distri France, elle indique ne pas avoir exécuté les travaux suivants : travaux de maçonnerie, fourniture d'un plancher bois, fourniture et pose d'un escalier avec garde-corps, aménagement de placards, pose d'une porte de cuisine et de cloisons.

Dans le même sens, il ressort de la pièce n°20 produite par M. B. intitulée : « résumé de la réunion avec M. B. » que, selon celui-ci, la société ACI Distri France n'a pas exécuté les travaux portant sur la maçonnerie, le plancher, l'escalier, les placards et la cuisine, travaux qu'il évalue à plus de 50 000 euros TTC, sur un devis d'un montant total avoisinant 114 000 euros TTC.

L'inexécution partielle des prestations confiées à la société TBP Concept devenue ACI Distri France est suffisamment importante pour justifier la résiliation du contrat, résiliation qui est au demeurant demandée par les deux parties.

Cette résiliation doit porter uniquement sur les prestations non exécutées par la société ACI Distri France. Elle ne doit pas opérer pour les prestations régulièrement exécutées.

En effet rien n'indique que les parties auraient entendu conclure un marché indivisible. Les différentes prestations confiées à la société ACI Distri France n'étaient pas indissociables.

M. B. ne fait valoir aucune réclamation sur la qualité des travaux réalisés par la société ACI Distri France et les a d'ailleurs conservés.

Le contrat conclu entre les parties ne peut donc être qualifié d'instantané et il n'y a pas lieu à anéantissement rétroactif de l'ensemble du contrat.

Il y a donc lieu de confirmer le jugement en ce qu'il a prononcé la résiliation du contrat, sauf à préciser qu'elle ne porte que sur les prestations non exécutées par la société ACI Distri France.

Sur la demande de résiliation aux torts exclusifs de la société ACI Distri France

M. B. demande à la cour d'appel de dire que la résiliation du contrat est imputable aux torts exclusifs de la société ACI Distri France. Il lui reproche plus précisément l'abandon de son chantier.

Il appartient dès lors à M. B. d'établir le manquement à ses obligations contractuelles commis par la société ACI Distri France.

Il produit à l'appui de ses dires notamment une attestation de son père qui ne peut être considérée comme suffisamment probante en raison de leurs liens familiaux.

Il verse également aux débats une attestation établie le 25 novembre 2017 par M. H., qui a assisté M. T. notamment lors d'une réunion avec M. B., qui s'est déroulée le 6 mai 2015.

M. H. déclare que, lorsque M. T. lui a expliqué la situation lors de leur première rencontre, il a précisé que son entreprise n'avait pas réalisé plusieurs lots prévus au devis car son épouse avait été malade et que le maçon n'avait pas pu intervenir à la date prévue ; qu'il n'avait ainsi rien pu faire au cours du 1er trimestre 2014 du fait du maçon qui n'avait pas pu venir ; qu'à partir du mois de mars 2014, il avait démarré une activité de terrassement ; qu'il n'avait donc pas pu retourner du tout chez M. B. courant 2014. Il a indiqué avoir été très en retard et avoir donné son accord pour que M. B. signe des devis avec d'autres artisans, notamment avec un charpentier pour le plancher bois.

Cette attestation caractérise le retard pris par la société ACI Distri France, qu'elle reconnaît d'ailleurs, mais ne peut suffire pas à établir son abandon du chantier.

Le démarrage d'une nouvelle activité par la société ACI Distri France au cours du 1er trimestre 2014 n'est pas suffisant pour en déduire un abandon des activités antérieures, et plus spécialement des engagements déjà pris.

Si, selon M. H., M. T. aurait indiqué que les travaux devaient être achevés dans un délai de deux ans, le devis ne porte mention d'aucun délai d'exécution. En conséquence les travaux devaient être réalisés dans un délai raisonnable.

Or M. B. n'allègue, ni ne démontre avoir mis en demeure la société ACI Distri France de poursuivre et achever les travaux. Qui plus est, il a contracté avec d'autres entreprises concernant certains des travaux objet du devis qu'il avait accepté le 12 février 2013.

La preuve n'est dès lors pas rapportée d'un abandon de chantier par la société ACI Distri France, ni d'un manquement de sa part à l'origine de la résiliation du contrat.

Il n'est en particulier pas établi que le retard était suffisamment grave pour justifier la résiliation du contrat, ce d'autant que, comme l'a souligné le premier juge, des imprécisions demeurent sur le déroulé du chantier puisque la cour d'appel ignore à quelle date la société ACI Distri France a réalisé une partie des travaux, puis a cessé d'intervenir et à quelle date et dans quelles conditions l'ensemble des travaux prévus au devis ont finalement été exécutés.

C'est dès lors à juste titre que le tribunal de grande instance n'a pas prononcé la résiliation aux torts exclusifs de la société ACI Distri France.

Sur la demande avant dire droit d'expertise judiciaire

M. B. sollicite une expertise judiciaire aux fins de :

- déterminer les travaux exécutés par la société TBP Concept et ceux qui ne l'ont pas été et si les travaux exécutés ont été réglés conformément au devis,

- avoir un avis sur le coût des travaux réalisés par d'autres entreprises,

- chiffrer le surcoût qu'il a dû régler et fournir tous éléments sur les préjudices subis du fait des retards.

Néanmoins les parties s'accordent sur le montant des sommes réglées, M. B. indiquant dans ses écritures avoir payé la somme totale de 71 104.20 euros ce qui correspond au montant des avoirs pris en considération par la société TBP Concept dans sa situation de fin de chantier du 21 juin 2015.

Elles s'accordent également sur l'exécution par la société TBP Concept des menuiseries, des plaques de plâtre, de la peinture, du carrelage et de la faïence et sur l'inexécution des travaux de maçonnerie, du plancher, de l'escalier et des placards. Leur désaccord porte sur les éléments de la cuisine que M. B. prétend inclus dans le devis. Selon la société ACI Distri France, des travaux supplémentaires ont en outre été réalisés en sous-traitance consistant en la pose d'une chape pour un montant de 4 096 euros que M. B. reconnaît avoir réglé le 11 juillet 2014.

L'importance des désaccords ou imprécisions ne saurait justifier la désignation d'un expert, dont le coût d'intervention risquerait d'excéder l'enjeu du litige, alors qu'un procès-verbal de constat aurait pu suffire.

M. B. invoque un surcoût lié à l'intervention d'autres entrepreneurs. Néanmoins la résiliation du contrat n'a pas été reconnue comme étant imputable à l'intimée. M. B. ne peut donc prétendre à une indemnisation de ce chef.

Quant au préjudice lié au retard, une expertise n'est pas nécessaire pour l'apprécier.

Il convient donc de rejeter la demande d'expertise.

Sur la demande formée par la société ACI Distri France au titre du solde dû sur les travaux exécutés

Ainsi que l'a relevé le premier juge, M. B. doit régler les travaux qui ont été réalisés par la société ACI Distri France.

Le tribunal de grande instance a retenu un montant total de travaux de 118'015,26 euros, correspondant au devis accepté le 12 février 2013 d'un montant de 113'919,26 euros TTC, outre des travaux réalisés en sous-traitance pour une chape à hauteur de 4096 euros TTC.

Il n'est pas justifié d'un accord écrit pour ces travaux supplémentaires. Toutefois, dans ses conclusions le 11 juillet 2014, M. B. a reconnu expressément avoir réglé la somme de 4096 euros pour une chape sans former aucune observation à ce sujet, et notamment sans contester l'avoir commandée.

Il y a donc lieu de retenir comme montant de travaux que la société ACI Distri France devait réaliser, la somme de 118'015,26 euros.

M. B. a reconnu dans ses écritures avoir réglé une somme totale de 71'104,20 euros qui correspond exactement au montant total des acomptes pris en considération sur la situation de fin de chantier du 21 juin 2015 élaborée par la société ACI Distri France.

Les parties s'accordent sur le fait que la société ACI Distri France n'a pas exécuté les travaux suivants, alors qu’ils étaient prévus et sur le devis accepté :

' fourniture et pose d'un escalier avec garde-corps,

' fourniture et aménagement de 4 placards,

' travaux de maçonnerie.

Il convient de prendre en considération pour ces travaux le montant mentionné sur le devis accepté le 12 février 2013 qui est égal à :

3 600 + 3 000 + 29'760 = 36'360 euros hors-taxes, soit 38'905,20 euros TTC avec une TVA 7 %.

M. B. reconnaît expressément dans ses écritures que la société intimée devait redresser un plancher, mais que la réalisation et la pose d'un plancher a été réalisée par un autre artisan, M. T..

La société ACI Distri France demande que soit déduite au titre de ce plancher une somme de 3 000 euros hors taxes.

La société B. oppose que M. T. lui a facturé une somme de 9 507,10 euros.

Le devis ne comporte pas de mention expresse relative à un plancher en bois. Le seul poste auquel il pourrait être rattaché sur le devis est le poste : « fourniture d'accompagnement et divers travaux» pour un montant de 3 000 euros hors-taxes. Les autres postes sont décrits de manière suffisamment précise pour exclure qu'il se réfère à un plancher.

En conséquence, peu important le montant qui a été facturé ultérieurement par une autre entreprise, il y a lieu de déduire du montant du devis cette somme de 3 000 euros hors-taxes, soit 3210 euros TTC.

La société ACI Distri France ajoute ne pas avoir réalisé une porte de cuisine et des cloisons prévues initialement pour un montant de 1975 euros hors taxes, soit 2 113,25 euros TTC, ce que ne conteste pas M. B.. Cette somme devra également être déduite.

Le solde restant dû s'établirait en conséquence selon la société ACI Distri France à 118'015,26 - (71'104,20 + 38'905,20 + 3 210 + 2 113,25) = 2 682,61 euros TTC.

M. B. prétend que le projet incluait des éléments de cuisine. Cependant aucun des postes du devis n'y fait référence. Quant aux plans qui auraient été élaborés par M. T., ils ne permettent pas de conclure que la société intimée s'était engagée à réaliser d'autres éléments dans la cuisine qu'une porte et des cloisons. Il n'y a donc lieu d'opérer une quelconque déduction de ce chef.

M. B. ne démontre pas que d'autres travaux prévus sur le devis n'auraient pas été exécutés, ni qu'il y aurait lieu de procéder à d'autres déductions à quelque titre que ce soit.

En conséquence le solde s'établit à 2 682,61 euros TTC.

La société ACI Distri France a ramené sa réclamation à une somme de 2 000 euros.

Il y a donc lieu de confirmer le jugement en ce qu'il a condamné M. B. à lui payer cette somme.

Sur la demande subsidiaire de dommages-intérêts formée par M. B.

M. B. réclame titre subsidiaire une somme de 18'709,33 euros se décomposant comme suit :

- acomptes : 8 606,96 euros TTC,

- surcoût : 9 052,37 euros,

- frais intercalaires : 1 050 euros.

Il est à noter que M. B. fonde cette réclamation sur sa pièce n°20 intitulée « résumé de la réunion avec M. B.». Selon lui, elle aurait été établie par M. H.. Sa lecture montre toutefois que ce document ne fait que reprendre les dires de M. B. et ne peut dès lors pas constituer une preuve de leur bien fondé.

Sur les acomptes

Il résulte de ce qui précède que M. B. ne démontre pas avoir réglé un montant supérieur à ce qu'il devait. Aucun trop versé au titre d'acomptes ne peut dès lors être retenu.

Sur le surcoût

Ainsi que cela a été relevé ci-dessus, il n'est pas établi que le surcoût résultant de l'intervention d'autres entreprises pour des travaux prévus au devis accepté le 12 février 2013 serait imputable à un manquement de la société ACI Distri France à ses obligations. M. B. ne peut donc prétendre à une indemnisation de ce chef.

Il convient d'ajouter que la somme de 9 052,37 euros que M. B. réclame correspond à la lecture de sa pièce n°20 à un surcoût de TVA qu'il a dû supporter sur les travaux exécutés par d'autres entreprises, la TVA appliquée étant de 10% alors que le devis établi par la société TBP Concept prévoyait une TVA de 7 %.

Cependant le taux de TVA a augmenté à compter du 1er janvier 2014 pour les travaux achevés après cette date. Compte tenu de l'importance du chantier, les travaux devaient nécessairement être terminés après le 1er janvier 2014. Le surcoût au titre de la TVA n'est donc pas imputable à un manquement de la part de la société TBP Concept.

Sur les frais bancaires intercalaires

M. B. prétend avoir supporté des frais bancaires intercalaires mais sans en justifier.

Il convient donc de débouter M. B. de sa demande de dommages-intérêts à hauteur de 18'709,33 euros.

Sur la condamnation de la société ACI Distri France à fournir une facture détaillée des menuiseries en aluminium, sous astreinte

La société ACI Distri France, qui conclut à la confirmation du jugement en toutes ses dispositions, n'a pas formé appel incident du chef de cette condamnation prononcée à son encontre.

M. B. a interjeté appel de cette disposition et conclu à la réformation du jugement entrepris sans développer aucun moyen de fait ou de droit la critiquant. Il produit au surplus la facture qui lui aurait été remise dans le cadre de l'exécution provisoire de la décision de première instance

Ce chef du jugement déféré sera donc confirmé.

Sur les autres dispositions du jugement entrepris

M. B. sollicite la réformation du jugement qui avait notamment rejeté :

- sa demande reconventionnelle de condamnation de la société ACI Distri France à lui payer la somme de 27'709,33 euros pour les surcoûts, frais intercalaires de prêt et indemnités liées au retard de livraison ;

- sa demande d'attestation d'assurance décennale.

Il ne développe aucun moyen au soutien de sa demande de réformation de ces chefs de décision qui seront confirmés.

L'exécution provisoire ordonnée en première instance n'est pas critiquée. Elle sera également confirmée.

Sur les demandes accessoires

Les dispositions du jugement entrepris relatives aux dépens et à l'article 700 du code de procédure civile seront confirmées.

M. B., partie perdante, doit supporter les dépens d'appel.

L'équité commande de le condamner en outre une somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles d'appel. La demande formée à ce titre par M. B. sera rejetée.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement, par arrêt contradictoire et par mise à disposition au greffe,

Infirme le jugement en ce qu'il a considéré le contrat comme un contrat de fournitures et prestations ;

Statuant à nouveau, dit que le contrat conclu entre les parties était un marché d'entreprise mais qu'il ne s'agissait pas d'un marché à forfait soumis à l'article 1793 du code civil ;

Confirme le jugement en ce qu'il a prononcé la résiliation du contrat, mais ne l'a pas prononcée aux torts exclusifs de la société TBP Concept devenue ACI Distri France ;

Y ajoutant, dit que la résiliation du contrat ne porte que sur les prestations non exécutées par la société ACI Distri France ;

Déboute M. Nicolas B. de sa demande d'expertise avant dire droit ;

Confirme le jugement en ce qu'il a condamné M. Nicolas B. à payer à la société ACI Distri France la somme de 2 000 euros au titre du solde restant dû sur le contrat ;

Déboute M. Nicolas B. de sa demande subsidiaire de dommages-intérêts à hauteur de 18 709,33 euros ;

Confirme les autres dispositions du jugement entrepris ;

Condamne M. Nicolas B. aux entiers dépens d'appel ;

Condamne M. Nicolas B. à payer à la société ACI Distri France la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés en appel ;

Rejette toute autre demande.