Cass. 1re civ., 19 février 2014, n° 12-23.519
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
Vu l'article L. 213-1 du code rural et de la pêche maritime, ensemble les articles L. 211-1 à L. 211-17 du code de la consommation et l'article 12 du code de procédure civile ;
Attendu que les dispositions qui régissent la garantie légale de conformité sont applicables aux ventes d'animaux conclues entre un vendeur agissant au titre de son activité professionnelle ou commerciale et un acheteur agissant en qualité de consommateur ;
Attendu, selon le jugement attaqué, rendu en dernier ressort, que Mme X... a acquis le 23 mars 2011 auprès de Mme Y..., éleveur professionnel, un chiot qui, atteint d'hémophilie, a dû être euthanasié le 31 mai suivant ; qu'elle a saisi la juridiction de proximité, sur le fondement de l'article 1641 du code civil, aux fins d'obtenir le remboursement du prix de la vente et des frais médicaux engagés ;
Attendu que pour la débouter de l'ensemble de ses demandes, le jugement, après avoir relevé que l'acte de vente ne contenait aucune stipulation qui énonçait que les parties avaient convenu de déroger aux dispositions du code rural et de la pêche maritime, retient que la maladie à l'origine de la mort de l'animal n'entre pas dans le champ d'application de la garantie légale prévue par ces dispositions pour les espèces canines ;
Qu'en statuant ainsi, alors que, selon ses propres constatations, la vente avait été conclue entre un vendeur agissant au titre de son activité professionnelle et un acheteur agissant en qualité de consommateur, en sorte qu'il lui incombait de faire application, au besoin d'office, des dispositions d'ordre public relatives à la garantie légale de conformité, la juridiction de proximité a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait de statuer sur la seconde branche du moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, le jugement rendu le 29 mai 2012, entre les parties, par la juridiction de proximité d'Albertville ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant la juridiction de proximité de Chambéry ;
Condamne Mme Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de Mme Y... et la condamne à payer à Mme X... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf février deux mille quatorze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, avocat aux Conseils, pour Mme X....
Il est fait grief au jugement attaqué d'avoir débouté Madame Kareen X... de ses demandes tendant à la condamnation de Madame Anna Y... à lui rembourser le prix de vente du chiot d'une valeur de 900 euros et à lui verser la somme de 1.728,12 euros en remboursement des frais médicaux engagés, outre intérêts au taux légal,
AUX MOTIFS QUE la requérante fonde son action en premier lieu sur le fondement des articles 1641 du code civil ; qu'il résulte de ces dispositions que le vendeur est tenu de la garantie à raison des vices cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine ; que le défendeur s'oppose à l'application de ces dispositions invoquant celles de l'article L. 213-1 du code rural ; qu'il résulte en effet des principes de droit et de la jurisprudence applicable que l'action en garantie dans les ventes d'animaux domestiques est régie à défaut de convention contraire entre les parties par les dispositions du code rural ; qu'en l'espèce il n'existe dans l'acte de vente signé entre les parties aucune disposition qui énonce que les parties aient convenu de déroger aux dispositions du code rural; qu'au contraire il est expressément stipulé : "l'acheteur convient avoir été informé et accepter que la présente vente soit soumise à l'ensemble des dispositions du Code Rural" ; que le fait que l'animal soit destiné à la compagnie est sans conséquence sur ce point de discussion ; qu'aux termes des dispositions du code rural applicables aux faits de l'espèce, le vendeur est tenu de garantir les maladies inscrites au tableau des vices rédhibitoires ; qu'en l'espèce les parties s'accordent pour reconnaître que la cause du décès de l'animal est l'hémophilie ; que cette maladie n'est pas une maladie répertoriée entrant dans le champ d'application de la garantie légale prévue par le code rural pour les espèces canines; qu'il y a donc lieu de rejeter purement et simplement les demandes formées par l'acheteur en remboursement de prix de vente et frais médicaux,
ALORS, D'UNE PART, QUE les dispositions d'ordre public qui régissent la garantie légale de conformité sont applicables aux ventes d'animaux domestiques conclues entre un vendeur agissant au titre de son activité professionnelle ou commerciale et un acheteur agissant en qualité de consommateur, l'action résultant du défaut de conformité se prescrivant par deux ans à compter de la délivrance de l'animal ; qu'en rejetant les demandes indemnitaires de Madame X..., formulées à l'encontre de Madame Anna Y..., quand il résultait pourtant de ses propres constatations que la vente avait été passée entre un éleveur professionnel et une consommatrice, que l'action avait été introduite dans un délai inférieur à deux ans à compter de la délivrance du chiot, et que celui-ci était impropre à l'usage habituellement attendu d'un animal de compagnie, dès lors que, atteint d'hémophilie, il avait dû être euthanasié deux mois seulement après son acquisition, le juge de proximité, qui devait faire application, au besoin d'office, des règles d'ordre public relatives à la garantie légale de conformité, a violé l'article L. 213-1 du code rural et de la pêche maritime, ensemble les articles L. 211-1 à L. 211-17 du code de la consommation,
ALORS, D'AUTRE PART, QU'en matière de vente d'animaux domestiques, entre un vendeur agissant au titre de son activité professionnelle ou commerciale et un acheteur agissant en qualité de consommateur, les conventions qui écartent ou limitent directement ou indirectement les droits reconnus par les dispositions relatives à la garantie légale de conformité, avant que l'acheteur n'ait formulé de réclamations, sont réputées non écrites ; qu'en se fondant sur la circonstance qu'il n'existait dans l'acte de vente signé entre les parties aucune stipulation qui énonçait qu'elles avaient convenu de déroger aux dispositions du code rural, mais qu'au contraire il était expressément stipulé que "l'acheteur convient avoir été informé et accepter que la présente vente soit soumise à l'ensemble des dispositions du Code Rural" (jugement, p. 2), pour écarter la demande indemnitaire de Madame X..., quand cet acte écartait indirectement les droits reconnus par les dispositions d'ordre public relatives à la garantie légale de conformité, le juge de proximité a violé les articles L 213-1 du code rural et de la pêche maritime et L 211-17 du code de la consommation.