Cass. com., 9 septembre 2020, n° 18-12.444
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Mouillard
Rapporteur :
M. Riffaud
Avocats :
SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SCP Bouzidi et Bouhanna, SCP Piwnica et Molinié, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano
Statuant tant sur le pourvoi principal formé par M. X..., que sur le pourvoi incident relevé par la société Finadvance SA, la société Finadvance associés, M. N..., en qualité d'administrateur judiciaire des sociétés Finadvance SA et Finadvance associés, et M. U... , en qualité de mandataire judiciaire des sociétés Finadvance SA et Finadvance associés ;
Donne acte à M. X... du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre MM. S..., Y... et la société Chubb European Group PLC venant aux droits de la société Chubb Insurance Company of Europe SE ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, que la société Intergestion, ayant pour société mère la société SDCI, a été cédée en 2006 au fonds d'investissement Finadvance par une opération d'achat avec effet de levier (LBO) ; que la société Interges, dont le conseil d'administration était composé de M. X..., président, la société Finadvance SA représentée par M. Y..., la société Finadvance associés, holding de Finadvance représentée par M. S..., et d'un administrateur indépendant, a été créée le 12 juillet 2006 pour la reprise de la totalité du capital de la société SDCI, sa holding ; que la société Intergestion, qui était constituée sous la forme d'une société anonyme avec conseil d'administration, a été dirigée à compter du 20 juillet 2006 par M. X..., président du conseil d'administration, la société Interges représentée par M. Y... et la société Finadvance associés représentée par M. S..., puis a été transformée en une société par actions simplifiée le 2 avril 2007 avec pour président la société Interges, elle-même représentée par son président, M. X... ; que la société Intergestion a été mise en redressement puis liquidation judiciaires les 30 mars 2010 et 29 septembre 2010, Mme Q... et la société [...] étant désignées liquidateurs ; que ces derniers ont assigné les sociétés Finadvance associés et Finadvance SA et MM. X..., Y... et S... en responsabilité pour insuffisance d'actif et, s'agissant des personnes physiques, en prononcé d'une mesure de faillite personnelle ; que les sociétés Finadvance associés et Finadvance SA ont été mises en redressement judiciaire, M. N... étant désigné administrateur judiciaire et M. U... mandataire judiciaire ;
Sur le premier moyen, pris en ses quatrième, sixième et septième branches, du pourvoi principal :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de rejeter l'exception de nullité de l'assignation qui lui a été délivrée et, en conséquence, de dire qu'il a, avec la société Finadvance SA et la société Finadvance associés, commis des fautes de gestion ayant contribué à l'insuffisance d'actif de la société Intergestion, et de le condamner solidairement avec ces deux sociétés au titre de la contribution à l'insuffisance d'actif constatée dans le cadre des opérations de liquidation judiciaire de la société Intergestion et de prononcer sa faillite personnelle pour une durée de dix ans alors, selon le moyen :
1°/ que la signification doit être faite à personne et il n'y a lieu à signification par procès-verbal de recherches que si le destinataire de l'acte n'a ni domicile, ni résidence, ni lieu de travail connus ; que le procès-verbal doit comporter avec précision les diligences accomplies par l'huissier de justice pour rechercher le destinataire de l'acte ; qu'en l'espèce, pour dire que les diligences effectuées par l'huissier étaient suffisantes, la cour d'appel s'est contentée de relever que le procès-verbal dressé à cette occasion comportait les mentions suivantes : « - le signifié ne demeure plus à l'adresse indiquée, - son nom ne figure ni sur le tableau des occupants, ni sur la porte des appartements ni sur les boîtes aux lettres, - les voisins ne peuvent me fournir de renseignement sur l'adresse actuelle de l'intéressé, - le préposé de La Poste m'oppose le secret professionnel, - la Mairie ne peut fournir une autre adresse, - mes recherches sur l'annuaire sont restées vaines » ; qu'en statuant ainsi par des motifs impropres à établir que l'huissier avait accompli des investigations complètes aux fins de délivrer l'acte à la personne de M. X..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 659 du code de procédure civile ;
2°/ que la signification doit être faite à personne et il n'y a lieu à signification par procès-verbal de recherches que si le destinataire de l'acte n'a ni domicile, ni résidence, ni lieu de travail connus ; que le procès-verbal doit comporter avec précision les diligences accomplies par l'huissier de justice pour rechercher le destinataire de l'acte ; que dans ses conclusions d'appel, M. X... faisait expressément valoir que son profil apparaissait facilement sur le réseau social « Linkedin », de sorte qu'il était aisé d'entrer en contact avec lui pour lui demander son adresse ; que la cour d'appel a constaté que le procès-verbal dressé par l'huissier comportait les mentions suivantes : « - le signifié ne demeure plus à l'adresse indiquée, - son nom ne figure ni sur le tableau des occupants, ni sur la porte des appartements ni sur les boîtes aux lettres, - les voisins ne peuvent me fournir de renseignement sur l'adresse actuelle de l'intéressé, - le préposé de La Poste m'oppose le secret professionnel, - la Mairie ne peut fournir une autre adresse, - mes recherches sur l'annuaire sont restées vaines » ; qu'en statuant comme elle l'a fait, quand il résultait de ses constatations que l'huissier de justice, qui avait négligé de procéder à des recherches sur les réseaux sociaux professionnels, n'avait pas procédé aux diligences nécessaires pour délivrer l'assignation à personne, la cour d'appel a violé l'article 659 du code de procédure civile ;
3°/ que la signification doit être faite à personne et il n'y a lieu à signification par procès-verbal de recherches que si le destinataire de l'acte n'a ni domicile, ni résidence, ni lieu de travail connus ; que le procès-verbal doit comporter avec précision les diligences accomplies par l'huissier de justice pour rechercher le destinataire de l'acte ; que dans ses conclusions d'appel, M. X... faisait expressément valoir que le nouveau propriétaire de son bien immobilier de Dommartemont connaissait son adresse à Versailles, indiquée sur l'acte de vente ; que la cour d'appel a constaté que le procès-verbal dressé par l'huissier comportait les mentions suivantes : « - le signifié ne demeure plus à l'adresse indiquée, - son nom ne figure ni sur le tableau des occupants, ni sur la porte des appartements ni sur les boîtes aux lettres, - les voisins ne peuvent me fournir de renseignement sur l'adresse actuelle de l'intéressé, - le préposé de La Poste m'oppose le secret professionnel, - la Mairie ne peut fournir une autre adresse, - mes recherches sur l'annuaire sont restées vaines » ; qu'en statuant comme elle l'a fait, quand il résultait de ses constatations que l'huissier de justice, qui avait négligé d'interroger le nouveau propriétaire du domicile de M. X... sur l'adresse actuelle de ce dernier, n'avait pas procédé aux diligences nécessaires pour délivrer l'assignation à personne, la cour d'appel a violé l'article 659 du code de procédure civile ;
Mais attendu que l'arrêt relève d'abord que l'huissier de justice chargé de la signification de l'assignation s'est rendu à la dernière adresse connue, à Dommartemont, de M. X..., lequel ne rapporte pas la preuve qu'il aurait habité à une autre adresse dont les mandataires judiciaires auraient eu connaissance, notamment celle figurant sur l'extrait Kbis de la société Tuileries d'Alsace Lorraine, distincte, de plus, de l'adresse à Versailles qu'il revendique et que les pièces de la procédure démontrent être son domicile dès le début de l'année 2012 ; que l'arrêt ajoute que l'huissier de justice a constaté que le nom de l'intéressé ne figurait ni sur le tableau des occupants ni sur la porte des appartements ni sur les boîtes aux lettres, que les voisins ne pouvaient lui fournir de renseignement sur son adresse actuelle, que le préposé de La Poste lui avait opposé le secret professionnel, tandis que la mairie ne pouvait lui fournir une autre adresse, et que ses recherches dans l'annuaire étaient demeurées vaines ; que la cour d'appel a exactement déduit de ces constatations que l'huissier de justice avait accompli toutes les diligences utiles et que la signification était régulière, dès lors que l'officier ministériel n'était pas tenu de mentionner dans le procès-verbal de signification l'identité des personnes auprès desquelles il s'assurait du domicile, ni de chercher à entrer à contact avec M. X... via un réseau social professionnel n'indiquant pas directement, selon les propres conclusions de l'intéressé, l'adresse de celui-ci ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le deuxième moyen, pris en sa première branche, du pourvoi principal :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de dire qu'il a, avec la société Finadvance SA et la société Finadvance associés, en qualité de dirigeant de droit, commis des fautes de gestion ayant contribué à l'insuffisance d'actif de la société Intergestion et, en conséquence, de le condamner, solidairement avec ces deux sociétés, à payer à la société [...] et à Mme Q..., ès qualités, la somme de 6 530 894 euros au titre de la contribution à l'insuffisance d'actif constatée alors, selon le moyen, que lorsque la liquidation judiciaire d'une personne morale fait apparaître une insuffisance d'actif, le tribunal peut, en cas de faute de gestion ayant contribué à cette insuffisance d'actif, décider que le montant de cette insuffisance d'actif sera supportée, en tout ou en partie, par tous les dirigeants de droit ou de fait, ou par certains d'entre eux, ayant contribué à la faute de gestion ; que lorsque plusieurs fautes de gestion ayant contribué à cette insuffisance d'actif sont retenues, il importe que chacune d'entre elles soit légalement justifiée ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a expressément retenu que l'opération d'acquisition de la société Intergestion avait été effectuée « dans le cadre d'un LBO » impliquant « le remboursement de la dette d'acquisition (...) par les dividendes versés par la société reprise à la holding qui en détient le contrôle » ; qu'il résultait nécessairement de ces constatations que la société Intergestion n'avait pas d'autre possibilité que d'effectuer le versement des dividendes litigieux ; qu'en retenant néanmoins l'existence d'une faute de gestion résultant de la remontée de dividendes de la société Intergestion vers la société Interges, la cour d'appel qui n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations, a violé l'article L. 651-2 du code de commerce ;
Mais attendu que la décision de verser les dividendes devant être prise au regard de la situation de l'entreprise et de sa trésorerie, quand bien même ces dividendes devraient être affectés dans le cadre d'une opération de LBO, c'est sans encourir le grief du moyen que la cour d'appel a statué comme elle a fait ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le sixième moyen du pourvoi principal :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de prononcer sa faillite personnelle pour une durée de dix ans alors, selon le moyen :
1°/ que la cassation à intervenir sur le fondement des deuxième, troisième, quatrième ou cinquième moyens de cassation, du chef de dispositif l'ayant condamné au titre de la contribution à l'insuffisance d'actif, entraînera, par voie de conséquence, celle du chef de l'arrêt ayant prononcé sa faillite personnelle pour une durée de dix ans, en application de l'article 624 du code de procédure civile ;
2°/ que le prononcé de la faillite personnelle doit être motivé en tenant compte de la gravité des faits, de la personnalité de son auteur et de sa situation personnelle ; qu'en prononçant à l'égard de M. X... une peine de faillite personnelle pour une durée de dix ans sans tenir compte de sa personnalité et de sa situation personnelle, la cour d'appel a violé l'article L. 653-2 du code de commerce ;
Mais attendu, d'une part, que le rejet des deuxième, troisième, quatrième et cinquième moyens du pourvoi principal rend le grief de la première branche sans portée ;
Et attendu, d'autre part, que M. X... n'ayant invoqué aucun élément tiré de sa situation personnelle qui aurait pu influer sur l'appréciation de la cour d'appel, celle-ci n'a pas méconnu les exigences de l'article L. 653-2 du code de commerce en prononçant sa faillite personnelle ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le deuxième moyen, pris en sa première branche, du pourvoi incident :
Attendu que la société Finadvance SA, la société Finadvance associés, M. N..., en qualité d'administrateur judiciaire des sociétés Finadvance SA et Finadvance associés, et M. U... , en qualité de mandataire judiciaire des sociétés Finadvance SA et Finadvance associés, font grief à l'arrêt de dire que la société Finadvance SA et la société Finadvance associés ont, en qualité de dirigeants de droit, commis des fautes de gestion ayant contribué à l'insuffisance d'actif de la société Intergestion et, en conséquence, de condamner la société Finadvance SA et la société Finadvance associés, solidairement avec M. X..., à payer à la société [...] et à Mme Q..., en qualité de liquidateurs de la société Intergestion, la somme de 6 530 894 euros au titre de la contribution à l'insuffisance d'actif constatée alors, selon le moyen, que l'action en paiement de l'insuffisance d'actif ne s'applique qu'aux dirigeants d'une personne morale de droit privé soumise à une procédure collective et aux personnes physiques représentants permanents de ces dirigeants personnes morales ; que pour condamner les sociétés Finadvance et Finadvance associés à payer une partie de l'insuffisance d'actif de la société Intergestion en qualité de dirigeants de droit, la cour d'appel s'est fondée sur le seul fait qu'elles étaient administrateurs de la société Interges, dirigeante de la SAS Intergestion, et que cette qualité suffisait à les condamner au titre de l'insuffisance d'actif au même titre que la société Interges, l'article L. 227-7 du code de commerce disposant que la responsabilité des dirigeants des personnes morales dirigeantes de SAS pouvant être recherchée dans les mêmes conditions que la personne morale dirigeant de cette SAS ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les articles L. 651-1 et L. 651-2 du code de commerce, ensemble l'article 227-7 du même code ;
Mais attendu qu'il résulte de l'arrêt que, pour la période antérieure au 2 avril 2007, M. X..., président du conseil d'administration, la société Finadvance associés, représentée par M. S..., et la société Interges, elle-même représentée par M. Y..., avaient la qualité de dirigeants de droit de la société Intergestion, alors société anonyme, tandis que pour la période postérieure, où cette société avait été transformée en une société par actions simplifiée, les statuts de cette dernière prévoyaient que la société était dirigée et administrée par un président et un ou plusieurs directeurs généraux, l'assemblée générale extraordinaire du 2 avril 2007 ayant désigné la société Interges comme président d'Intergestion ; que l'article L. 227-7 du code de commerce disposant que les dirigeants de la personne morale nommée présidente d'une société par actions simplifiée encourent les mêmes responsabilités civile et pénale que s'ils étaient président ou dirigeant en leur nom propre, sans préjudice de la responsabilité de la personne morale qu'ils dirigent, c'est sans méconnaître les textes invoqués que la cour d'appel a statué comme elle a fait ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le troisième moyen, pris en sa première branche, du pourvoi incident :
Attendu que la société Finadvance SA, la société Finadvance associés, M. N..., en qualité d'administrateur judiciaire des sociétés Finadvance SA et Finadvance associés, et M. U... , en qualité de mandataire judiciaire des sociétés Finadvance SA et Finadvance associés, font le même grief à l'arrêt alors, selon le moyen, qu'un dirigeant social ne peut être condamné à combler les dettes sociales de la société en liquidation judiciaire que s'il est établi un lien de causalité entre la faute de gestion retenue et l'insuffisance d'actif constatée ; qu'en se bornant à relever que la distribution de dividendes est en relation causale directe avec l'insuffisance d'actif, constatée trois ans plus tard, ayant eu pour conséquence de priver la société de réserves anciennes qui auraient pu être affectées en 2009 au règlement des dettes échues, la cour d'appel s'est prononcée par des motifs impropres à caractériser le lien de causalité entre la distribution de dividendes et l'insuffisance d'actif, privant sa décision base légale au regard de l'article L. 651-2 du code de commerce ;
Mais attendu que l'arrêt relève que la faute commise a privé la société de réserves anciennes qui auraient pu être affectées en 2009 au règlement des dettes échues ; que la cour d'appel, qui a ainsi caractérisé le lien de causalité entre la faute qu'elle retenait du fait de la distribution des dividendes et l'insuffisance d'actif, peu important que cette faute précédât de trois ans la constatation de l'insuffisance d'actif, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le cinquième moyen du pourvoi incident :
Attendu que la société Finadvance SA, la société Finadvance associés, M. N..., en qualité d'administrateur judiciaire des sociétés Finadvance SA et Finadvance associés, et M. U... , en qualité de mandataire judiciaire des sociétés Finadvance SA et Finadvance associés, font le même grief à l'arrêt alors, selon le moyen :
1°/ que lorsque la liquidation judiciaire d'une personne morale fait apparaître une insuffisance d'actif, le tribunal peut, en cas de faute de gestion ayant contribué à cette insuffisance d'actif, décider que le montant de cette insuffisance d'actif sera supportée, en tout ou en partie, par tous les dirigeants de droit ou de fait, ou par certains d'entre eux, ayant contribué à la faute de gestion ; que lorsque plusieurs fautes de gestion ayant contribué à cette insuffisance d'actif sont retenues, il importe que chacune d'entre elles soit légalement justifiée ; que dans leurs conclusions, les sociétés Finadvance et Finadvance associés faisaient valoir que toutes les décisions concernant la CEFEC avaient été prises par le Codir d'Intergestion, présidé par M. X..., dont elles n'avaient jamais fait partie, qu'elles n'avaient jamais décidé ni de la création ni du soutien financier de la CEFEC, ce que reconnaissaient les liquidateurs qui admettaient que le financement de CEFEC n'avait jamais fait l'objet d'une décision dans un conseil d'administration d'Interges et que les informations sur CEFEC transmises en 2010 au conseil d'administration d'Interges étaient rassurantes ; qu'en se bornant à relever, pour retenir l'existence d'une faute de gestion à l'encontre des appelantes tenant au financement des pertes de CEFEC, qu'à défaut d'être à l'origine de la création de CEFEC, elles avaient parfaitement connaissance de l'existence de cette filiale et des avances qui lui étaient consenties alors même que la société Intergestion ne disposait pas des moyens suffisants pour à la fois soutenir sa filiale et rembourser son propre endettement, la cour d'appel s'est prononcée par des motifs impropres à caractériser la connaissance par les sociétés Finadvance et Finadvance associés d'un soutien abusif de la CEFEC par Intergestion et a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 651-2 du code de commerce ;
2°/ qu'un dirigeant social ne peut être condamné à combler les dettes sociales de la société en liquidation judiciaire que s'il est établi un lien de causalité entre la faute de gestion retenue et l'insuffisance d'actif constatée ; qu'en se bornant à relever que le financement de la CEFEC a « directement concouru à aggraver l'insuffisance d'actif », la cour d'appel s'est prononcée par des motifs impropres à caractériser le lien de causalité entre le soutien financier de CEFEC par Intergestion et l'insuffisance d'actif, privant sa décision base légale au regard de l'article L. 651-2 du code de commerce ;
Mais attendu qu'ayant analysé le procès-verbal de réunion du conseil d'administration de la société Interges du 15 mars 2007, la cour d'appel a retenu que les administrateurs de cette société avaient parfaitement connaissance de l'existence de la création de la société CEFEC dont ils avaient été informés ; qu'elle a relevé que ses pertes cumulées, d'un montant de 1 158 894 euros au 31 décembre 2009, avaient été supportées en totalité par la société Intergestion au moyen d'avances en compte courant, ce que ne pouvaient ignorer les administrateurs, et qu'il n'était fourni aucun élément sur la part du chiffre d'affaires de la société Intergestion réalisé sur un plan international provenant des opérations espagnoles, de sorte que les charges supportées par cette dernière du fait de sa filiale espagnole s'avéraient excessives, la société Intergestion ne disposant pas des moyens suffisants pour soutenir sa filiale et rembourser son propre endettement, tandis que la crise économique ne permettait pas d'envisager un retournement de situation à brève échéance ; qu'elle a encore souligné le manque de vigilance des administrateurs de la société Interges, qui avais contribué à ce que cette situation perdure, aggravant ainsi l'insuffisance d'actif ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, la cour d'appel, qui a caractérisé la connaissance, par les sociétés Finadvance SA et Finadvance associés, d'un soutien abusif de la CEFEC par la société Intergestion et le lien de causalité entre la faute qu'elle retenait et l'insuffisance d'actif, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le sixième moyen, pris en sa deuxième branche, du pourvoi incident :
Attendu que la société Finadvance SA, la société Finadvance associés, M. N..., en qualité d'administrateur judiciaire des sociétés Finadvance SA et Finadvance associés, et M. U... , en qualité de mandataire judiciaire des sociétés Finadvance SA et Finadvance associés, font le même grief à l'arrêt alors, selon le moyen, que lorsque la liquidation judiciaire d'une personne morale fait apparaître une insuffisance d'actif, le tribunal peut, en cas de faute de gestion ayant contribué à cette insuffisance d'actif, décider que le montant de cette insuffisance d'actif sera supporté, en tout ou en partie, par tous les dirigeants de droit ou de fait, ou par certains d'entre eux, ayant contribué à la faute de gestion ; que lorsque plusieurs fautes de gestion ayant contribué à cette insuffisance d'actif sont retenues, il importe que chacune d'entre elles soit légalement justifiée ; que la cour d'appel a constaté que « la déconfiture de la société a été précipitée par la rupture des relations avec la société Bohnacker System qui a cessé ses livraisons en octobre 2009, privant ainsi brutalement la société Intergestion de 30 % de son chiffre d'affaires, ce qui corrélativement a conduit à la suppression d'une source de financement immédiat de la trésorerie résultant du recours au factoring, situation qui ne pouvait être anticipée par la direction », ce dont il résultait que la baisse significative du chiffre d'affaires de la société Intergestion avait eu lieu en 2009 et qu'elle était due à la rupture brutale de ses relations avec la société Bohnacker System ; qu'en retenant néanmoins à l'encontre des sociétés Finadvance et Finadvance associés une faute de gestion résultant d'un défaut de surveillance de M. X... qui avait commis une faute de gestion résultant de la poursuite d'une activité déficitaire, aux motifs que M. X... avait tardé à réagir en ne présentant un plan de crise qu'à partir du mois d'avril 2009 « alors que la situation de la société était déjà préoccupante dès la fin 2008 et que la crise économique prenait toute son ampleur », la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article L. 651-2 du code de commerce ;
Mais attendu qu'ayant retenu que la déconfiture de la société Intergestion n'avait été que précipitée par la rupture des relations avec la société Bohnacker System, en octobre 2009, et souligné que les difficultés étaient préexistantes, la société y étant confrontée dès 2008, avec une baisse de 63 % du chiffre d'affaires de son pôle agencement à cette date, cependant que M. X... présentait en décembre 2008 un budget quasiment à l'équilibre et prévoyait un résultat d'exploitation de 5 342 884 euros pour le site relatif à l'agencement qui avait enregistré en 2008 une perte de 2,8 millions d'euros, et que, si ce dernier avait initié en 2008 une politique de réduction des coûts notamment salariaux, il avait dans le même temps envisagé un résultat peu réaliste pour 2009 et repoussé au mois d'avril 2009 la présentation d'un plan de crise, c'est sans encourir le grief du moyen que la cour d'appel a statué comme elle a fait ; que le moyen n'est pas fondé ;
Et sur le premier moyen, pris en ses trois premières et en sa cinquième branches, le deuxième moyen, pris en sa deuxième branche, le troisième moyen, le quatrième moyen, le cinquième moyen du pourvoi principal et sur le premier moyen, le deuxième moyen, pris en ses deuxième et troisième branches, le troisième moyen, pris en sa seconde branche, le quatrième moyen et le sixième moyen, pris en sa première branche du pourvoi incident :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Mais sur le sixième moyen, pris en sa troisième branche, du pourvoi incident :
Vu l'article L. 651-2 du code de commerce :
Attendu que pour retenir la responsabilité pour insuffisance d'actif des administrateurs du fait d'un défaut de surveillance de M. X..., qui avait poursuivi l'activité déficitaire de la société, l'arrêt retient que ces derniers disposaient de remontées d'informations sur la situation de la trésorerie de la société mais que l'une de leurs priorités était de garantir le remboursement par la société Interges de la société senior, et que le grief tiré d'un défaut de surveillance de leur part est fondé ;
Qu'en se déterminant ainsi, sans caractériser le lien de causalité entre cette dernière faute de gestion, qu'elle retenait, et l'insuffisance d'actif de la société, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
Et attendu que la condamnation à supporter l'insuffisance d'actif ayant été prononcée en considération de plusieurs fautes de gestion, la cassation encourue à raison de l'une d'entre elles entraîne, en application du principe de proportionnalité, la cassation de l'arrêt de ce chef ;
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne les sociétés Finadvance associés et Finadvance SA à payer à la société [...] et Mme Q..., en qualité de liquidateurs de la société Intergestion, la somme de 6 530 894 euros au titre de la contribution à l'insuffisance d'actif de cette société, l'arrêt rendu le 20 décembre 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Nancy ;
Remet, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Metz.