Cass. 3e civ., 17 décembre 2003, n° 02-17.388
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Chemin
Rapporteur :
Mme Maunand
Avocat général :
M. Bruntz
Avocats :
SCP Piwnica et Molinié, SCP Waquet, Farge et Hazan
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 27 mai 2002), qu'après le décès de leur fille, les époux X... ont confié à la société Marbrerie du Quai, le soin de réaliser un caveau et un monument funéraires dans le cimetière de Roubaix ; que peu après l'inhumation le 19 novembre 1994, les époux X... ont constaté la présence d'eau dans le caveau ; qu'en avril 1999, le corps de Mlle X... a été exhumé et transféré en Italie ;
que ses parents ont saisi le tribunal d'instance aux fins d'obtenir des dommages-intérêts en réparation de leurs préjudices matériel et moral ;
Attendu que la société Marbrerie du Quai fait grief à l'arrêt de la condamner au paiement de diverses sommes au profit des époux X..., alors, selon le moyen :
1 ) que la responsabilité de plein droit de l'entrepreneur prévue à l'article 1792 du Code civil ne s'applique qu'à la construction des ouvrages qui sont le support d'une activité humaine ; qu'il s'en déduit que l'installation d'un caveau funéraire relève , le cas échéant, du régime de la défaillance contractuelle de droit commun ; qu'en affirmant, pour retenir la responsabilité de plein droit de la société Marbrerie du Quai, que la notion d'ouvrage n'est pas nécessairement liée à l'exercice d'une activité humaine et que le caveau funéraire est une construction, la cour d'appel a violé l'article 1792 du Code civil ;
2 ) qu' en toute hypothèse, la société Marbrerie du Quai faisait valoir , dans ses conclusions d'appel, qu'elle n'était pas le constructeur du caveau litigieux, dès lors qu'elle ne l'avait ni fabriqué, ni installé et qu'il avait fait l'objet d'un contrat de vente ; qu'en se bornant à affirmer pour retenir la responsabilité de la société Marbrerie du Quai sur le fondement de l'article 1792 du Code civil, qu'un caveau funéraire constituait un ouvrage, sans répondre à ce chef de conclusions pertinent, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
3 ) qu'en toute hypothèse, le constructeur n'est pas responsable des désordres résultant d'un cas de force majeure ; que l'irrésistibilité d'un événement ne saurait à elle seule être constitutive de la force majeure lorsque sa prévision ne saurait permettre d'en empêcher les effets ; qu'ayant constaté que le cimetière de Roubaix est un site particulièrement humide où les infiltrations d'eau sont inévitables, la cour d'appel a néanmoins retenu la responsabilité de la société Marbrerie du Quai à raison des désordres affectant le caveau acquis par les époux X... ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations dont il s'évinçait que les infiltrations résultaient d'un cas de force majeure et a violé les articles 1148 et 1792 du Code civil ;
4 ) que le débiteur n'est tenu de réparer que ce qui est la suite immédiate et directe de l'inexécution de la convention ; que la décision des époux X... de rapatrier le corps de leur fille en Italie est une option personnelle dont ne découle pas l'existence d'un préjudice ;
qu'en retenant, pour condamner la société Marbrerie du Quai à payer aux époux X... la somme de 24 000 francs correspondant aux frais de transport vers l'Italie, qu'il existait un lien de causalité direct et immédiat entre les désordres affectant le caveau construit dans le cimetière de Roubaix et le rapatriement du corps en Italie, la cour d'appel a méconnu les dispositions de l'article 1151 du Code civil ;
Mais attendu qu'ayant constaté que le caveau funéraire était une construction qui subissait des infiltrations rendant celui-ci impropre à sa destination, que la société Marbrerie du Quai n'établissait pas la survenance d'un cas de force majeure et que les époux X... avaient dû exhumer et transférer le corps de leur fille en Italie en l'absence de réparation définitive proposée par ladite société, la cour d'appel qui n'était pas tenue de répondre à des conclusions que ses constatations rendaient inopérantes, a, à bon droit, retenu que le caveau constituait un ouvrage au sens de l'article 1792 du Code civil et a condamné la société Marbrerie du Quai tenue pour responsable des désordres par application de ce texte au paiement de diverses sommes en réparation des dommages liés directement aux désordres ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.