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Décisions

Cass. com., 6 octobre 2015, n° 14-13.812

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Mouillard

Avocats :

SCP Delaporte, Briard et Trichet, SCP Richard

Paris, du 6 mars 2014

6 mars 2014


Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 6 mars 2014), que, le 18 novembre 2010, Mme X..., salariée de la société Chêne de l'Orne ayant la qualité d'assistante de direction, a souscrit auprès de la société New PLV un contrat, d'une durée de quarante-huit mois avec paiement d'un acompte pour la première année, en vue de la diffusion de messages publicitaires sur des écrans situés au dessus des caisses d'un supermarché exploité sous l'enseigne Leclerc ; que, s'opposant à l'annulation du contrat sollicitée par Mme X... cependant que la société Chêne de l'Orne refusait d'honorer les engagements qui en résultaient, la société New PLV a assigné celle-ci en paiement des sommes dues au titre de ce contrat ;

Attendu que la société New PLV fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande alors, selon le moyen :

1°/ qu'une personne peut être engagée sur le fondement d'un mandat apparent, si le tiers a cru légitimement à l'étendue des pouvoirs du mandataire ; qu'il y a croyance légitime du tiers en l'existence du mandat apparent, dès lors que l'erreur n'aurait pu être évitée que moyennant certaines recherches que les exigences de la vie des affaires ne rendaient pas possibles ; qu'en jugeant que la société New PLV n'avait pu croire légitimement en l'existence d'un mandat confié à Mme X... par la société Chêne de l'Orne, dès lors qu'elle avait eu loisir de vérifier la qualité de Mme X... au cours de ses démarches et qu'elle pouvait identifier le dirigeant, personne physique, de cette société, peu important que celle-ci ait eu comme président une autre société, quand les exigences de la vie des affaires excluaient que la société New PLV, en négociation avec Mme X..., laquelle se présentait comme « responsable du site » de la société Chêne de l'Orne, pût exiger de Mme X... la justification de sa qualité de mandataire au cours des pourparlers précontractuels, d'autant plus qu'aucune circonstance ne justifiait une telle recherche puisque Mme X... n'avait jamais invité la société New PLV à s'adresser à une autre personne et qu'elle avait signé le contrat et l'autorisation de prélèvement en y apposant le cachet commercial de la société, la cour d'appel a violé l'article 1998 du code civil ;

2°/ qu'en retenant la mauvaise foi de la société New PLV exclusive d'une croyance légitimant l'existence d'un mandat apparent confié à Mme X..., aux motifs que le 22 décembre 2010, après s'être adressée à Mme X..., la société New PLV s'était adressée quelques minutes seulement plus tard directement à M. Y..., directeur général de la société Chêne de l'Orne, ce dont il résultait une duplicité et une mauvaise foi de la société New PLV, sans rechercher si la connaissance de l'existence et de la qualité de M. Y... ne résultait pas précisément du courriel de Mme X... informant la société New PLV, le 22 décembre 2010 à 12 heures 45, qu'elle allait contacter M. Y... dans l'après-midi, portant ainsi à la connaissance de la société New PLV l'existence et les qualités de cette personne à laquelle la société s'était alors immédiatement adressée, ce qui était exclusif de toute mauvaise foi, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1998 du code civil ;

3°/ que le "support" au sens de la loi n° 93-122 du 29 janvier 1993 est la personne qui dispose des espaces publicitaires ; que lorsque le support contracte directement avec l'annonceur, sans intermédiaire, aucun contrat de mandat ne peut ni ne doit être conclu entre l'annonceur et un intermédiaire inexistant ; qu'en reprochant à la société New PLV, qui dispose des espaces publicitaires et les a offerts à la société Chêne de l'Orne pour y publier ses annonces, de ne pas avoir fait conclure à cette société un contrat de mandat, aux motifs que New PLV agissait en qualité d'intermédiaire, même si les écrans sur lesquels les messages publicitaires devaient être diffusés lui appartenaient, dès lors que l'emplacement de ces écrans au sein de l'hypermarché Leclerc était déterminant et faisait naître une relation triangulaire avec la « société Leclerc », quand celle-ci, qui ne vendait pas les espaces publicitaires diffusés sur les écrans appartenant à la société New PLV, ne pouvait avoir la qualité de support et n'entrait pas dans la relation directe entre la société New PLV, vendeur d'espaces publicitaires, et la société Chêne de l'Orne, annonceur, la cour d'appel a violé les articles 20 et 23 de la loi n° 93-122 du 29 janvier 1993 ;

Mais attendu que, par motifs propres et adoptés, l'arrêt constate que Mme X..., bien que n'ayant aucun pouvoir de signer le contrat, a apposé le cachet de l'entreprise et signé les autorisations de prélèvement bancaires correspondantes ; qu'il relève que les parties n'avaient entretenu aucune relation commerciale antérieure et que la société New PLV n'a pas mis à profit le délai entre l'envoi de l'offre de contrat et sa signature pour vérifier l'habilitation de Mme X... ; qu'il retient que la société New PLV n'établit pas que Mme X... se soit prévalue d'une quelconque habilitation ou délégation de pouvoirs pour conclure le contrat litigieux, sa fonction de responsable de site étant trop vague pour établir de manière non équivoque qu'elle disposait de tels pouvoirs et que, comme professionnelle aguerrie, cette société ne pouvait ignorer les règles de représentation des personnes morales ; que, de ces constatations et appréciations, la cour d'appel, qui n'avait pas à effectuer la recherche invoquée à la deuxième branche, que ses constatations rendaient inopérante, et abstraction faite des motifs surabondants que critique la troisième branche, a pu déduire que les circonstances de la signature du contrat n'ont pu légitimement faire croire à la société New PLV qu'elle traitait avec une personne dûment habilitée à engager la société Chêne de l'Orne, ce qui l'aurait dispensée de vérifier l'étendue de ses pouvoirs ; que le moyen, qui ne peut être accueilli en sa deuxième branche, n'est pas fondé pour le surplus ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.