Cass. 2e civ., 9 janvier 2014, n° 12-25.472
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Flise
Avocats :
SCP Piwnica et Molinié, SCP Waquet, Farge et Hazan
Donne acte à M. Hugo X... du désistement de son pourvoi dirigé contre Mme Y... ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... et sa mère, Mme Y..., ont assigné MM. Jacques, Claude et Bernard Z... et Mmes Lucille et Irène Z... (les consorts Z...), ayants droit de Pierre Z..., en indemnisation du dommage commis par ce dernier qui, renvoyé devant une cour d'assises pour viol sur mineur de quinze ans, est décédé avant d'avoir été jugé ; que les consorts Z... ont été condamnés, par un arrêt du 24 septembre 2008, à verser certaines sommes à M. X... et à Mme Y... en réparation de leur préjudice moral respectif, une mesure d'expertise médicale étant ordonnée avant dire droit sur le surplus des demandes ; qu'il a été mis fin à la mission de l'expert judiciaire, qui n'a pas été en mesure de rencontrer M. X... ; que M. X... et Mme Y..., en sus de leurs demandes indemnitaires, ont sollicité une nouvelle mesure d'expertise ;
Sur le premier moyen :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de rejeter la demande d'expertise alors, selon le moyen :
1°/ que le juge ne peut refuser de statuer en se fondant sur l'insuffisance des preuves fournies par les parties, alors qu'il lui appartient d'ordonner toute mesure d'instruction nécessaire ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté la nécessité d'une expertise portant sur la consolidation
de l'état de M. X... pour procéder à l'évaluation de son préjudice, dont elle constate, par ailleurs, qu'il est certain et particulièrement important ; qu'en rejetant pourtant la demande d'expertise tout en refusant de fixer le montant total du préjudice de M. X... en raison de l'insuffisance des éléments de preuve portant sur la consolidation de son état, quand il lui appartenait d'ordonner toute mesure d'instruction nécessaire portant sur l'état de M. X..., la cour d'appel a violé l'article 4 du code civil, ensemble les articles 143 et 144 du code de procédure civile ;
2 / que la contradiction entre les motifs et le dispositif équivaut à un défaut de motifs ; que la cour d'appel, en l'espèce, a reconnu la nécessité d'une expertise médicale sur la consolidation de l'état de M. X... pour déterminer son préjudice et estimé qu'en son absence elle ne disposait pas d'éléments suffisants pour évaluer le dommage de M. X... ; qu'en rejetant pourtant dans son dispositif la demande d'expertise, la cour d'appel a entaché sa décision d'une contradiction entre les motifs et le dispositif en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'ayant relevé qu'une expertise médicale aurait été indispensable pour définir le préjudice corporel et s'assurer de la consolidation de l'état de M. X..., condition nécessaire pour permettre l'évaluation définitive de ses préjudices, mais que ce dernier ne s'était pas présenté à de multiples rendez-vous fixés par l'expert antérieurement nommé, de sorte qu'il était impossible d'envisager avec la moindre chance de succès une nouvelle mesure et qu'une expertise psychologique, telle que demandée par M. X..., ne permettrait pas de se prononcer médicalement sur les postes d'indemnisation prévus en matière de préjudice corporel, c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation que la cour d'appel, sans se contredire, a estimé qu'il n'y avait pas lieu d'ordonner une nouvelle mesure d'expertise ;
D'où il suit que le moyen, qui manque en fait en sa seconde branche, n'est pas fondé pour le surplus ;
Mais sur le second moyen, pris en sa deuxième branche :
Vu l'article 4 du code civil ;
Attendu que le juge ne peut refuser de statuer en se fondant sur l'insuffisance des preuves qui lui sont fournies par les parties ;
Attendu que pour fixer l'indemnisation de M. X... à une certaine somme, à valoir sur la réparation de ses préjudices tout en le déboutant du surplus de ses prétentions, l'arrêt retient qu'il existe très certainement des répercussions sur tous les aspects de sa vie que la cour d'appel n'est toutefois pas en mesure d'apprécier définitivement faute d'indication sur la consolidation de l'état de la victime et d'avis médical sur l'ampleur exacte des séquelles, qu'il est néanmoins d'ores et déjà certain que les préjudices extra-patrimoniaux, subis durant une période supérieure à dix ans couvrant les années de jeunesse de la victime, sont très importants de même que les répercussions sur la vie professionnelle de la victime, non compensées par des prestations sociales, et que cela justifie l'allocation en l'état d'une somme de 60 000 euros à valoir sur la fixation définitive du préjudice ;
Qu'en refusant ainsi d'évaluer le dommage dont elle constatait l'existence en son principe, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du second moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 18 mai 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Riom ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon.