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Décisions

Cass. 3e civ., 14 octobre 2014, n° 13-18.604

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Terrier

Avocats :

SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Jean-Philippe Caston, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Paris, du 27 févr. 2013

27 février 2013

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 27 février 2013), que Mme X..., propriétaire indivise avec M. Y... (les consorts X...) de lots dans un immeuble soumis au statut de la copropriété, a assigné, après dépôt du rapport d'expertise, le syndicat des copropriétaires et son assureur la société Ace European Group Limited, ainsi que la société Gérance-expert « autre gestion » en qualité de syndic et son assureur la société AIG europe aux droits de laquelle vient la société Chartis europe, en réparation de divers préjudices consécutifs à des dégâts des eaux survenus dans les locaux ; que M. Y... est intervenu volontairement à la procédure ;


Sur le premier moyen du pourvoi principal :

Attendu que le syndicat des copropriétaires fait grief à l'arrêt de le condamner à payer aux consorts X... une somme de 228 673, 25 euros et de le débouter ainsi de sa demande tendant à contester la validité du rapport d'expertise judiciaire, alors, selon le moyen, qu'en se fondant sur le rapport d'expertise judiciaire établi par M. Z... pour statuer comme elle l'a fait, sans répondre aux conclusions par lesquelles le syndicat des copropriétaires du 55/ 57 rue Stephen faisait valoir l'irrégularité de ce rapport, faute de respect du principe de la contradiction, l'expert ayant omis de convoquer l'avocat du syndicat des copropriétaires à sa dernière réunion, de communiquer aux parties les derniers dire et documents reçus des consorts X... les 29 juillet et 15 novembre 2003 et d'inviter les parties à présenter leurs observations sur ces éléments avant de déposer son rapport le 22 janvier suivant, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

Mais attendu que les irrégularités affectant le déroulement des opérations d'expertise sont sanctionnées selon les dispositions de l'article 175 du code de procédure civile, qui renvoient aux règles régissant les nullités des actes de procédure ; que le syndicat des copropriétaires n'ayant pas sollicité la nullité de l'expertise, la cour d'appel n'était pas tenue de répondre à des conclusions que ses constatations rendaient inopérantes ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le second moyen du pourvoi principal et le troisième moyen du pourvoi incident :

Vu l'article 1134 du code civil ;

Attendu que pour écarter la garantie de la société Ace European Group Limited, l'arrêt retient que les consorts X... reconnaissent eux-mêmes que les désordres objet de la présente procédure ont la même origine que les précédents et que le syndicat des copropriétaires s'est refusé à faire exécuter les travaux nécessaires à mettre fin aux infiltrations et ce depuis 1994, que les constatations des experts A... et Z... corroborent ces affirmations, qu'aucun procès-verbal d'assemblée générale des copropriétaires ne mentionne le vote des travaux de mise en conformité préconisés par ces experts et que l'exécution d'un contrat de curage n'apparaissait pas suffisant à faire cesser les désordres d'infiltrations constatés de manière répétitive ;

Qu'en statuant ainsi, alors que dans les assurances « dégâts des eaux », l'assureur est tenu à garantie dès lors que le sinistre est survenu pendant la période de validité du contrat, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Et sur le premier moyen du pourvoi incident :

Vu l'article 31 du code de procédure civile ;

Attendu que pour déclarer irrecevable la demande des consorts X... en indemnisation des frais de remise en état des locaux et de remplacement des WC, la cour d'appel retient que ces sommes correspondent aux travaux de remise en état des trois pièces sinistrées visitées par l'expert et de remplacement des WC déposés pour le dégorgement de la descente d'eaux vannes, et que les consorts X... n'étant plus propriétaires de ces locaux depuis 2005, ils ne justifient pas d'un intérêt né et actuel pour obtenir l'indemnisation de ce chef de préjudice ;

Qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si les consorts X... n'avaient pas subi un préjudice personnel leur conférant un intérêt direct et certain à agir, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

Et sur le deuxième moyen du pourvoi incident :

Vu l'article 4 du code civil ;

Attendu que pour rejeter la demande des consorts X... en réparation du préjudice financier subi lors de la vente de leurs lots, la cour d'appel retient qu'en l'absence de toute justification sur le prix immobilier de ce type de bien lors de la vente de celui-ci, elle n'est pas en mesure de chiffrer le préjudice subi mais que ce préjudice apparaît être établi en son principe car distinct du préjudice d'embellissement du chef duquel leur demande a été déclarée irrecevable ;

Qu'en refusant ainsi d'évaluer le dommage dont elle avait constaté l'existence en son principe, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a déclaré les consorts X... irrecevables en leur demande en paiement d'une somme de 28 549, 90 euros au titre des travaux d'embellissement et de remise en état des WC, rejeté leur demande en paiement d'une somme de 1 280 571, 74 euros au titre de la perte de valeur des locaux litigieux lors de leur revente, et rejeté la demande de garantie formée par le syndicat des copropriétaires à l'encontre la société Ace European Group Limited, l'arrêt rendu le 27 février 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet sur ces points la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée.