Cass. 3e civ., 20 juin 2001, n° 99-20.245
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mlle Fossereau
Rapporteur :
M. Martin
Avocat général :
M. Guérin
Avocats :
SCP Peignot et Garreau, SCP Philippe et François-Régis Boulloche, SCP Masse-Dessen, Georges et Thouvenin, Me Bouthors, Me Vuitton, Me Foussard, SCP Defrenois et Levis
Donne acte à la société Samu Auchan du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre les sociétés Ettori Z... et Mutuelle des architectes français ;
Sur le premier et le second moyens, réunis :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Chambéry, 23 juin 1999), que la société Samu Auchan, maître de l'ouvrage, assurée par la compagnie Allianz aux droits de laquelle viennent les Assurances générales de France (AGF), ayant entrepris la construction d'un "hypermarché" sous la maîtrise d'oeuvre de la société Ettori Révillon, architecte, assurée par la société Mutuelle des architectes français (MAF), et le contrôle de la Société de contrôle technique (Socotec), assurée par la Société mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux publics (SMABTP), a chargé de la pose du carrelage, un groupement d'entreprises, les sociétés Basso, depuis lors en liquidation judiciaire, ayant M. X... comme mandataire-liquidateur, Petit, également en liquidation avec M. Y... pour mandataire-liquidateur, assurée par la compagnie L'Auxiliaire, et Mignola carrelages, assurée par la société Mutuelle assurances artisanale de France (MAAF) ; que des désordres affectant le carrelage étant apparus, la société Samu Auchan a assigné en réparation les locateurs d'ouvrage et leurs assureurs ;
Attendu que la société Samu Auchan fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande, alors, selon le moyen :
1 / que des désordres généralisés affectant un carrelage et nécessitant la réfection intégrale de celui-ci rendent l'ouvrage impropre à sa destination, et donnent lieu à l'application de la garantie décennale ;
qu'il résultait en l'espèce des pièces du dossier, en particulier du rapport de l'expert judiciaire, que des désordres généralisés affectaient les carrelages litigieux et rendaient nécessaire une réfection totale de ceux-ci de sorte qu'en décidant que ces désordres ne créaient aucune impropriété de l'ouvrage à sa destination, la cour d'appel a violé l'article 1792 du Code civil ;
2 / que pour déterminer si des désordres portent atteinte à la destination de l'ouvrage, le juge doit prendre en considération l'importance et la gravité du dommage occasionné ; qu'il ressortait des indications expresses du rapport d'expertise que les désordres litigieux rendaient l'utilisation de l'hypermarché incompatible avec des conditions d'hygiène sanitaire satisfaisantes si bien qu'en décidant que ces désordres n'avaient pas rendu l'ouvrage impropre à sa destination, la cour d'appel a derechef violé l'article 1792 du Code civil ;
3 / qu'en relevant à l'appui de sa décision l'absence d'intervention des services d'hygiène et de sécurité, la cour d'appel a statué par des motifs étrangers à l'appréciation de l'importance et de la gravité des dommages, ces motifs étant par conséquent radicalement inopérants au regard de l'appréciation de l'impropriété de l'ouvrage à sa destination de sorte que la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1792 du Code civil ;
4 / qu'un élément d'équipement donne lieu à l'application de la garantie décennale dès lors que, loin de constituer un simple élément mobile, il est indissociablement lié à son support, notamment par scellement de sorte que la cour d'appel, qui a retenu que le carrelage défectueux était lié par scellement à son support, a violé l'article 1792-2 du Code civil ;
Mais attendu qu'ayant constaté, par motifs propres et adoptés, qu'aucune pièce, aucun rapport, aucune étude et aucune intervention des services d'hygiène et de sécurité ne permettait d'établir que les désordres avaient été à l'origine d'un non-respect des normes sanitaires et qu'en revanche, l'exploitation de "l'hypermarché" n'avait pas été interrompue, notamment pendant les travaux de réfection, ni même rendue difficile par les désordres affectant le carrelage, dont elle constatait qu'il était dissociable, la cour d'appel, qui a retenu souverainement que l'ouvrage n'avait pas été rendu impropre à sa destination, en a exactement déduit que les désordres ne relevaient pas de la garantie décennale ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.