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Décisions

Cass. 3e civ., 7 mars 1979, n° 77-15.153

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

Paris, du 01 juill. 1977

1 juillet 1977

Attendu, selon les juges du fond, qu'en 1968, la société Voyer, entrepreneur, a été chargée de réaliser à Etoile-sur-Rhône (Drôme), sous la direction de Capelle architecte, l'ossature de deux bâtiments à usage d'entrepôt et hall d'exposition construite pour le compte de la société CODIM aux droits de laquelle vient la société AFEDA assistée des administrateurs à son règlement judiciaire ; qu'il a été procédé à la réception des travaux en 1969, et qu'en 1970, à la suite d'abondantes chutes de neige, les toits des bâtiments se sont effondrés ; que la société AFEDA a dès lors assigné les deux constructeurs en indemnisation sur le fondement de l'article 1792 du Code civil en sa rédaction de la loi du 3 janvier 1967 ;

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir totalement exonéré l'architecte et l'entrepreneur de la présomption de responsabilité résultant de ce texte, au motif que l'effondrement était dû à un événement de force majeure, alors, selon le moyen, que, "d'une part, un événement quel qu'il soit, ne peut constituer un événement de force majeure dégageant architectes et entrepreneurs de la présomption de responsabilité qui pèse sur eux, qu'à condition d'être à la fois imprévisible et irrésistible, et qu'en l'espèce actuelle, si les juges du fond ont considéré que les chutes de neige constatées étaient normalement imprévisibles, ils n'ont pas constaté que les conséquences de ces chutes aient été irrésistibles, alors, d'autre part, que les architectes et entrepreneurs sont tenus de se conformer non seulement aux normes de construction obligatoires mais également aux règles de l'art, et que la Cour d'appel aurait dû rechercher si l'annexe à la norme NV 65, à supposer qu'elle ait un caractère indicatif, ne constituait pas une règle de l'art que les constructeurs étaient tenus d'observer, qu'enfin, les juges du fond ont constaté que les constructeurs avaient commis des fautes, avaient le devoir de rechercher non pas si ces fautes ont eu un caractère déterminant, mais si elles ont joué un rôle causal dans la réalisation du sinistre ou son aggravation, qu'en effet, lorsque celui qui invoque la force majeure a lui même commis une faute ayant contribué soit à déterminer l'événement soit à en aggraver les conséquences, le juge du fond est fondé à atténuer seulement la responsabilité encourue, sans exonérer complètement l'auteur des fautes" ;

Mais attendu que la Cour d'appel a relevé que les normes NV 65 avaient été respectées, que si les pannes ne répondaient pas aux recommandations figurant en annexe au document NV 65, ces dernières n'étaient présentées qu'à titre indicatif sans constituer des règles précises et obligatoires, que leur stricte observation n'eût pas évité l'effondrement de l'ouvrage sous le poids de la neige, "les surcharges sur certaines pannes ayant dépassé de 30 à 100 % les prévisions les plus pessimistes et de 100 à 200 % les excédents proprement réglementaires" ; que l'arrêt ajoute que le dommage devait être attribué à des phénomènes météorologiques aux dimensions d'une véritable calamité dont l'ONM n'avait jamais enregistré l'équivalent en ses archives et qui avait amené les pouvoirs publics à édicter des dispositions spéciales de secours par le décret du 11 mars 1971 ; qu'elle a énoncé que ni l'architecte ni l'entrepreneur n'auraient pu prévoir ces chutes de neige accompagnées de vent d'une telle ampleur ;

Qu'en l'état de ces seules constatations et énonciations d'où résulte le caractère de cause étrangère de ce phénomène météorologique pour les constructeurs, la Cour d'appel a pu exonérer ceux-ci notamment de leur responsabilité ; d'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE LE POURVOI formé contre l'arrêt rendu le 1er juillet 1977 par la Cour d'appel de Paris ;