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Décisions

Cass. 3e civ., 13 septembre 2018, n° 17-14.010

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Chauvin

Avocats :

SCP Alain Bénabent, SCP Lesourd, SCP Spinosi et Sureau

Paris, du 21 juin 2017

21 juin 2017

Attendu, selon les arrêts attaqués (Paris, 25 novembre 2016 et 21 juin 2017), que le Centre national d'ophtalmologie des Quinze-vingts (le bailleur) est propriétaire d'un ensemble immobilier dans lequel est exploité le Théâtre des Folies Bergère, donné en location commerciale depuis le 29 novembre 1913 à la société Théâtre des Folies Bergère (la locataire), aux droits de laquelle se trouvent désormais la société d'exploitation des Folies Bergère et la société Omnium parisien de participation ; que, le 3 août 2005, le bailleur a assigné la locataire en exécution de travaux, notamment de remise en état de la façade du bâtiment situé [...] , en soutenant que la vétusté ne procédait que de la carence du preneur à son obligation, et de réfection de la toiture des deux bâtiments dont le rétablissement s'imposait selon les constatations faites par l'architecte qu'il avait mandaté ; qu'un arrêt du 25 novembre 2016 a procédé à la répartition, entre le bailleur et la locataire, de la charge des travaux ; qu'un arrêt du 21 juin 2017, statuant sur une omission de statuer, a fixé le montant des travaux de couverture dont le bailleur devait remboursement à la locataire ;

Sur le premier moyen, pris en ses deux premières branches, du pourvoi principal du bailleur dirigé contre l'arrêt du 25 novembre 2016 :

Attendu que le bailleur fait grief à l'arrêt d'accueillir la demande en remboursement des travaux de couverture alors, selon le moyen :

1°/ que, sauf urgence, le bailleur ne doit rembourser au preneur les travaux dont il est tenu que s'il a été préalablement mis en demeure de les réaliser et, à défaut d'accord, que si le preneur a obtenu une autorisation judiciaire de se substituer à lui ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a mis à la charge du bailleur la réfection de l'ensemble des couvertures, à l'exclusion des travaux de charpente rendus nécessaires par l'absence de réparation adéquates sur les couvertures ayant permis à l'humidité de s'infiltrer au niveau des charpentes bois dont la dégradation s'est accélérée et qui resteront à la charge du preneur ; qu'elle a ensuite relevé que dès le dépôt du rapport d'expertise, le preneur avait entrepris un certain nombre de travaux dont ceux afférents aux couvertures, sans les soumettre préalablement à l'architecte du bailleur comme le bail lui en faisait l'obligation en application de l'article 5 ; qu'il résultait de ces constatations que la société d'exploitation des Folies Bergère et la société Omnium parisien de participations avaient effectué les travaux incombant au Centre national d'ophtalmologie des Quinze-vingts en l'absence de toute mise en demeure adressée à celui-ci, d'avoir à les réaliser et, à défaut d'accord, de décision de justice l'autorisant à les faire exécuter, de sorte que le bailleur n'était pas tenu d'en supporter la charge ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article 1144 du code civil, dans sa rédaction applicable à la cause ;

2°/ que, sauf urgence, le bailleur ne doit rembourser au preneur les travaux dont il est tenu que s'il a été préalablement mis en demeure de les réaliser et, à défaut d'accord, que si le preneur a obtenu une autorisation judiciaire de se substituer à lui ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a mis à la charge du bailleur la réfection de l'ensemble des couvertures, à l'exclusion des travaux de charpente rendus nécessaires par l'absence de réparation adéquates sur les couvertures ayant permis à l'humidité de s'infiltrer au niveau des charpentes bois dont la dégradation s'est accélérée et qui resteront à la charge du preneur ; qu'elle a ensuite relevé que dès le dépôt du rapport d'expertise, le preneur avait entrepris un certain nombre de travaux dont ceux afférents aux couvertures, sans les soumettre préalablement à l'architecte du bailleur comme le bail lui en faisait l'obligation en application de l'article 5 ; qu'en faisant droit à la demande des sociétés d'exploitation des Folies Bergère et Omnium parisien de participations tendant à obtenir le remboursement des dépenses de travaux de couverture devant être en définitive supportées par le bailleur au terme de la décision, et qui avaient été avancées par le preneur, sans relever aucune circonstance caractérisant l'urgence dans laquelle la société d'exploitation des Folies Bergère se serait trouvée de les faire exécuter, la cour d'appel a violé l'article 1144 du code civil, dans sa rédaction applicable à la cause ;

Mais attendu qu'après avoir retenu que la réfection de l'ensemble des couvertures, à l'exclusion de certains travaux rendus nécessaires par l'absence de réparations adéquates, incombait au bailleur et ayant relevé que celui-ci, qui invoquait l'application du bail et l'obligation d'entretien du preneur, l'avait, lui-même, mis en demeure, puis assigné aux fins d'exécuter les travaux de couverture, la cour d'appel a pu déduire de ces seuls motifs que le bailleur ne pouvait exciper d'un défaut d'autorisation préalable à la réalisation de travaux dont il avait exigé l'exécution ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le moyen unique du pourvoi incident de la locataire dirigé contre l'arrêt du 25 novembre 2016 :

Attendu que la locataire fait grief à l'arrêt de dire que les travaux de ravalement des façades du bâtiment secondaire rue [...] lui incombent, alors, selon le moyen :

1°/ que les travaux prescrits par l'autorité administrative sont à la charge du bailleur sauf stipulation expresse contraire ; qu'en mettant à la charge du preneur les travaux de ravalement de la façade de la rue [...], après avoir pourtant constaté que ces travaux de ravalement avaient fait l'objet d'une injonction de l'administration, la cour d'appel n'a pas tiré les bonnes conséquences légales de ses constatations, en violation de l'article 1719, 2° du code civil ;

2°/ qu'en confirmant le jugement qui avait mis à la charge du preneur les travaux de ravalement de la façade de la rue [...], au motif inopérant que, s'il est constant que la charge du ravalement du fait de l'intervention de l'administration incombe au bailleur, il en va différemment lorsque le défaut de ravalement motivant cette injonction est due aux lenteurs d'une procédure judiciaire, la cour d'appel a violé le même texte ;

3°/ qu'à tout le moins, en vertu de l'article 1755 du code civil, les dégâts causés par la vétusté doivent être supportés par le bailleur ; que la cour d'appel ne pouvait dès lors, sans méconnaître les dispositions du texte précité, mettre à la charge du preneur les travaux de ravalement de la façade de la rue [...], quand elle avait pourtant constaté que les dégâts subis par cette façade avaient été causés par la vétusté des couvertures, dont la réfection a été mise à la charge du bailleur ;

Mais attendu qu'ayant relevé qu'aux termes du bail, le ravalement des façades incombait au preneur et retenu, par motifs adoptés, que, si le preneur avait respecté son obligation d'entretien régulier des lieux loués, les façades de la rue [...] ne se seraient pas dégradées à ce point et, par motifs propres, que le bailleur avait délivré une assignation aux fins de remise en état de la façade en application de l'obligation contractuelle d'entretien, cinq années avant l'injonction administrative d'y procéder intervenue en raison de la durée de la procédure, la cour d'appel a pu décider que les travaux, qui s'imposaient en raison de l'absence d'entretien et de réparation de l'immeuble, incombaient au preneur qui ne pouvait se prévaloir de l'injonction administrative pour imputer au bailleur la nécessité de procéder au ravalement ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le premier moyen, pris en ses trois dernières branches, et le second moyen du pourvoi principal du bailleur formé contre l'arrêt du 25 novembre 2016 et sur le moyen unique du pourvoi du bailleur formé contre l'arrêt du 21 juin 2017 qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois ;