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Décisions

Cass. 3e civ., 21 janvier 1971, n° 70-11.065

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. De Montera

Rapporteur :

M. Dutheillet-Lamonthezie

Avocat général :

M. Tunc

Avocat :

M. Giffard

Pau, du 13 févr. 1970

13 février 1970

SUR LES DEUX MOYENS REUNIS : ATTENDU QU'IL RESSORT DES ENONCIATIONS DE L'ARRET ATTAQUE QUE LA SAFER DES BASSES-PYRENEES, APRES AVOIR RECU NOTIFICATION DU PROJET DE VENTE AUX EPOUX Y... D'UN DOMAINE RURAL APPARTENANT A VEUVE DOMECQ, A REGULIEREMENT NOTIFIE SON INTENTION D'EXERCER SON DROIT DE PREEMPTION ;

QUE LA PROPRIETAIRE, APRES AVOIR FAIT CONNAITRE A LA SAFER SA DECISION DE RENONCER A LA VENTE PROJETEE, A VENDU SON DOMAINE A UN NOUVEL ACQUEREUR, LA DAME X..., ET A SIGNE UN ACTE AUTHENTIQUE ;

QUE LA SAFER A DEMANDE EN JUSTICE LA NULLITE DE CETTE VENTE, ET LA RECONNAISSANCE DE LA VALIDITE DE SON DROIT DE PREEMPTION ANTERIEUREMENT EXERCE ;

ATTENDU QU'IL EST FAIT GRIEF A L'ARRET ATTAQUE, QUI A REJETE CETTE DEMANDE, D'AVOIR DECLARE QUE LA CONDITION SUSPENSIVE, INSEREE AU PREMIER CONTRAT, D'OBTENIR QUE LA SAFER N'EXERCE PAS SON DROIT DE PREEMPTION NE S'ETANT PAS REALISEE, LA PROPRIETAIRE AVAIT REPRIS SA PLEINE LIBERTE, ALORS, SELON LE POURVOI, QUE CETTE CLAUSE ETAIT LEGALEMENT REPUTEE NON ECRITE COMME CONTRAIRE A LA REGLEMENTATION D'ORDRE PUBLIC REGISSANT LE DROIT DE PREEMTION, ET NULLE COMME PUREMENT POTESTATIVE, LES AGISSEMENTS DE VEUVE DOMECQ REVELANT AU SURPLUS SON INTENTION DE FAIRE ECHEC AU DROIT DE PREEMPTION TOUT EN REALISANT UNE MUTATION A TITRE ONEREUX ;

MAIS ATTENDU D'ABORD QUE LE BENEFICIAIRE DU DROIT DE PREEMPTION, QUI N'A PAS CONTESTE LES CONDITIONS DE LA VENTE SUIVANT LES REGLES PREVUES A L'ARTICLE 795 DU CODE RURAL, EST, AUX TERMES DE L'ARTICLE 796 DU MEME CODE, LIE PAR LES CONDITIONS QUI LUI ONT ETE NOTIFIEES ;

QUE DES LORS, LA CONDITION SUSPENSIVE, INSEREE AU CONTRAT, ETANT OPPOSABLE A LA SAFER, SA DEFAILLANCE RENDAIT INEXISTANTE LA VENTE, ET, PAR SUITE, LE DROIT DE PREEMPTION QUI SUPPOSAIT LA REALITE DE CELLE-CI ;

ATTENDU ENSUITE QU'UNE CONDITION PUREMENT POTESTATIVE, NULLE DE LA PART DE CELUI QUI S'OBLIGE, N'AFFECTE PAS LA VALIDITE D'UN CONTRAT SYNALLAGMATIQUE, DANS LEQUEL LES PARTIES SONT RESPECTIVEMENT CREANCIERES ET DEBITRICES ;

ATTENDU ENFIN QUE LA COUR D'APPEL, TANT PAR MOTIFS PROPRES QUE PAR ADOPTION DE CEUX DES PREMIERS JUGES, ENONCE A BON DROIT QUE LA FRAUDE A LA LOI SUPPOSE L'EXISTENCE D'UNE MANOEUVRE ENTREPRISE DANS LE BUT DE FAIRE ECHEC, PAR UN PROCEDE DISSIMULE, AU DROIT DE PREEMPTION DE LA SAFER ;

QU'EN L'ESPECE, VEUVE DOMECQ N'A JAMAIS CONTESTE A LA SAFER SON DROIT DE PREEMPTION , ET S'EST STRICTEMENT CONFORMEE AUX REGLES LEGALES POUR FAIRE LES NOTIFICATIONS PRESCRITES ;

QU'A LA SUITE DE L'EXERCICE DE SON DROIT PAR LA SAFER, LE BIEN A ETE RETIRE DE LA VENTE PAR APPLICATION DE LA CONDITION SUSPENSIVE, QUE RIEN N'EMPECHAIT LA PROPRIETAIRE D'INSERER A L'ACTE ;

QUE CETTE DERNIERE, AGEE DE 80 ANS, AYANT VOULU REALISER SES BIENS A LA FIN DE SA VIE POUR ETRE SOIGNEE ET ENTRETENUE PAR DES ACQUEREURS QUI AVAIENT CONQUIS SON AFFECTION ET QUI, SELON L'ACTE, DEVAIENT AGIR ENVERS ELLE COMME DES ENFANTS ENVERS LEUR MERE, AVAIT POUR BUT, EN INSERANT CETTE CONDITION LEGITIME, D'EVITER QUE CES OBLIGATIONS NE SE TROUVENT TRANSFEREES A UN TIERS ;

QUE DE CES CONSTATATIONS ET ENONCIATIONS, LA COUR D'APPEL A PU DEDUIRE QUE LA FRAUDE A LA LOI N'EXISTAIT PAS EN L'ESPECE ;

QU'AINSI LE POURVOI NE PEUT ETRE ACCUEILLI EN AUCUN DE SES GRIEFS ;

PAR CES MOTIFS : REJETTE LE POURVOI FORME CONTRE L'ARRET RENDU LE 13 FEVRIER 1970, PAR LA COUR D'APPEL DE PAU.