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Décisions

CA Poitiers, 2e ch. civ., 27 juin 2017, n° 16/04249

POITIERS

Arrêt

Infirmation partielle

PARTIES

Défendeur :

Frédéric Blanc - Mjo (Selarl) (ès qual.)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Conseillers :

Mme Caillard, M. Waguette

Avocat :

Me Jouteux

T. com. Poitiers, du 22 nov. 2016

22 novembre 2016

EXPOSÉ DU LITIGE

Monsieur X, qui exerce une activité de plombier, chauffagiste, électricien, a fait l'objet d'une procédure de redressement judiciaire ouverte le 21 mars 2011 par le tribunal de commerce de Poitiers sur l'assignation d'un créancier.

Par jugement rendu le 28 février 2012, ce même tribunal a homologué le plan de redressement par voie de continuation d'activité présenté par M. X aux termes duquel il offrait d'apurer son passif sur une période de 10 années par le versement de dividendes annuels d'un montant équivalent à 10 % du passif admis dont le premier devait intervenir un an après l'homologation du plan. La SELARL MJO Frédéric Blanc a été désignée commissaire à l'exécution du plan.

Par décision en date du 22 novembre 2016, saisi à la requête du commissaire à l'exécution du plan qui n'était pas en mesure de payer le dividende courant, le tribunal de commerce de Poitiers a prononcé la résolution du plan de redressement et l'ouverture de la liquidation judiciaire de M. X, fixé au 1er septembre la date de cessation des paiements et désigné la SELARL MJO, représentée par Me Frédéric Blanc en qualité de mandataire à la liquidation judiciaire.

Par acte reçu et enregistré au greffe le 7 décembre 2016, M. X a interjeté appel de cette décision. Il a, en outre, sollicité et obtenu l'arrêt de l'exécution provisoire assortissant la décision querellée au terme d'une ordonnance rendue en référé le 26 janvier 2017 par le premier président de la cour d'appel de céans.

En l'état de ses dernières conclusions, signifiées le 11 avril 2017, M. X demande à la cour de :

Annuler et à défaut réformer le jugement du Tribunal de Commerce de Poitiers du 22 novembre 2016 en toutes ses dispositions,

En conséquence,

Rejeter la requête en résolution de plan déposée par la SELARL MJO Frédéric Blanc, ès qualités,

Constater que Monsieur X a procédé au règlement des échéances 2016 et 2017 du plan de redressement,

Dire et juger et en tant que de besoin constater que Monsieur X n'est pas en état de cessation de paiement,

En tant que de besoin dire et juger que le plan de redressement est respecté à ce jour et doit être poursuivi,

Dire que les dépens seront employés en frais privilégiés de la procédure collective.

Au soutien de son appel, M. X fait valoir, que le jugement rendu doit être annulé :

- en ce que d'une part, en violation des dispositions des articles L. 626-27 et L. 631-20-1 du code de commerce qui l'impose, l'avis du ministère public n'a été ni sollicité ni recueilli avant de prononcer la résolution du plan et la liquidation judiciaire,

- et en ce que, d'autre part, il n'est pas justifié de sa convocation à l'audience à laquelle il n'était ni présent ni représenté, ce qui constitue une violation manifeste du principe d'ordre public de la contradiction rappelé, pour l'espèce, par l'article L. 626-9 du code de commerce auquel renvoie l'article L. 626-27 du même code.

Quant au fond de l'affaire qu'il demande à la cour d'évoquer, M. X soutient qu'il a versé au mandataire la somme de 17.448,83 , ce dont ce dernier atteste, permettant ainsi de régulariser le retard existant dans le paiement des dividendes du plan ce qui constituait le seul motif de la requête aux fins de résolution du plan laquelle ne pourra qu'être écartée, ajoutant qu'en tout état de cause, au jour où la cour statue, il ne se trouve pas en état de cessation des paiements.

La SELARL MJO Frédéric Blanc n'a pas constitué avocat, M. X lui a régulièrement fait signifier ses conclusions et lui a délivré assignation à comparaître selon exploit d'huissier délivré le 6 février 2017.

Le 21 février 2017, le ministère public a conclu à la confirmation de la décision entreprise au terme de conclusions écrites qui ont été portées à la connaissance es parties au jour de l'audience.

La clôture est intervenue le 18 avril 2017.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la nullité du jugement déféré.

En application des dispositions des articles L. 631-19 et L. 626-27 du code de commerce, le tribunal qui a arrêté un plan de redressement ne peut en décider la résolution qu'après avis du ministère public.

En application de l'article 14 du code de procédure civile, nulle partie ne peut être jugée sans avoir été entendue ou appelée, et en vertu des dispositions combinées des articles L. 626-27, L. 626-9 et R. 626-48 du code de commerce, le tribunal ne peut statuer sur la résolution du plan qu'après avoir entendu ou dûment appelé le débiteur.

Ces dispositions sont d'ordre public et donc énoncées à peine de nullité.

En l'espèce, le jugement du tribunal de commerce de Poitiers qui a prononcé la résolution du plan de redressement de Monsieur X et sa liquidation judiciaire ne fait mention d'aucun avis du ministère public, ni même d'aucune sollicitation de cet avis, pas plus qu'il ne précise si, et comment, M. X a été convoqué à l'audience. De plus, aucune des pièces communiquées à la cour par le greffe du tribunal de commerce ne permet de pallier cette carence.

En conséquence, le jugement déféré sera annulé.

Toutefois, en application des dispositions de l'article 562 du code de procédure civile, l'affaire sera évoquée.

Sur la résolution du plan de redressement et la liquidation judiciaire.

La demande tendant à la résolution du plan et au prononcé de la liquidation judiciaire avait été formée par le commissaire à l'exécution du plan au seul motif de l'inexécution des dispositions du plan de redressement en l'absence de paiement du dernier dividende échu au 1er mars 2016 pour un montant de 13.107,09 .

Or, Monsieur X justifie de ce qu'il a depuis lors versé au mandataire, qui en atteste par un courrier du 12 décembre 2016, une somme de 17.448,83 suffisante pour régulariser le retard dans l'exécution du plan de redressement.

Dés lors, le plan étant respecté et la cour n'étant saisie d'aucune autre défaillance de la part de M. X, il conviendra de débouter la SELARL MJO Frédéric Blanc de sa demande tendant à la résolution de son plan et à sa liquidation judiciaire.

En application des dispositions de l'article R. 661-7 du code de commerce, dans la mesure où le présent arrêt annule une décision soumise à la publicité, le greffier de la cour d'appel transmettra dans les huit jours du prononcé de l'arrêt une copie de celui au greffier du tribunal de commerce de La Rochelle pour l'accomplissement des mesures de publicité prévues à l'article R. 621-8 du code de commerce. Il notifiera l'arrêt aux parties et, par remise contre récépissé, au procureur général et informera les personnes mentionnées au 4° de l'article R. 661-6 du prononcé de l'arrêt.

Les dépens seront employés en frais privilégiés de la procédure collective.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

- Annule le jugement rendu par le tribunal de commerce de Poitiers le 22 novembre 2016,

Evoquant,

- Constate le paiement par M. X du dividende échu au 1er mars 2016 et la régularisation du retard pris dans l'exécution des dispositions de son plan de redressement,

- Déboute, en conséquence, la SELARL MJO Frédéric Blanc, ès-qualités de commissaire à l'exécution du plan de redressement de M. X, de ses demandes de résolution du plan et de prononcé de la liquidation judiciaire,

- Dit que le greffier de la cour d'appel transmettra dans les huit jours du prononcé de l'arrêt une copie de celui-ci au greffier du tribunal de commerce de La Rochelle pour l'accomplissement des mesures de publicité prévues à l'article R. 621-8 du code de commerce, notifiera l'arrêt aux parties et, par remise contre récépissé, au procureur général et informera les personnes mentionnées au 4° de l'article R. 661-6 du prononcé de l'arrêt,

- Dit que les dépens seront employés en frais privilégiés de procédure collective.