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Décisions

Cass. crim., 5 novembre 1998, n° 97-83.170

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Gomez

Rapporteur :

M. Schumacher

Avocat général :

M. Amiel

Avocats :

SCP Delaporte et Briard, SCP Guiguet, Bachellier et Potier de la Varde, SCP Piwnica et Molinié

Lyon, du 7 mai 1997

7 mai 1997

CASSATION sur le pourvoi formé par :

- Y... Andrée, veuve X...,

contre l'arrêt de la cour d'appel de Lyon, 7e chambre, en date du 7 mai 1997, qui, pour faux et usage et banqueroute, l'a condamnée à 1 an d'emprisonnement avec sursis, 20 000 francs d'amende et a prononcé sur les intérêts civils.

LA COUR,

Vu les mémoires produits en demande et en défense ;

Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 196, 197 de la loi du 25 janvier 1985, 121-3 du Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :

" en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a déclaré Andrée Y..., veuve X..., coupable du délit de banqueroute par tenue de comptabilité fictive et l'a condamnée de ce chef ;

" aux motifs qu'indépendamment du retard et du désordre dans la comptabilité des sociétés constatés par le commissaire aux comptes, les stocks avaient été surévalués en 1982 et 1983 de plus de 5,3 millions de francs sur 32,5 millions, et 3,2 millions de francs sur 24,8 millions ; qu'il a été démontré qu'Andrée Y..., veuve X..., avait eu recours à des traites fictives pour un montant de 43 millions de francs ; que, selon les témoins, la prévenue donnait personnellement des directives pour la tenue de la comptabilité et notamment pour l'établissement des traites fictives ;

" alors que le délit de banqueroute par tenue de comptabilité fictive suppose que le dirigeant de société ait agi sciemment, c'est-à-dire en connaissance du caractère fictif des écritures comptables ; qu'en se bornant à énoncer qu'Andrée Y..., veuve X..., donnait personnellement des directives pour l'établissement de la comptabilité et notamment pour l'établissement des traites fictives, la cour d'appel n'a pas caractérisé l'élément intentionnel requis, privant ainsi sa décision de base légale " ;

Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel, par des motifs exempts d'insuffisance ou de contradiction, a caractérisé en tous ses éléments constitutifs, tant matériels qu'intentionnel, le délit dont elle a déclaré la prévenue coupable ;

D'où il suit que le moyen, qui se borne à remettre en discussion l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne saurait être accueilli ;

Mais sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 147 et 150 de l'ancien Code pénal, 441-1 du Code pénal, 110 et suivants du Code de commerce, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :

" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Andrée Y..., veuve X..., coupable de faux en écriture de commerce et d'usage de faux et l'a condamnée de ces chefs ;

" aux motifs que la prévenue a fait établir des traites ne correspondant à aucune opération commerciale réelle et portant des indications fausses ; qu'elle a présenté ces traites à des établissements bancaires et obtenu de la trésorerie nécessaire au fonctionnement de l'entreprise ; que ces traites étaient destinées à faire la preuve auprès des banques de créances des sociétés du groupe Fortex sur des clients ; que peu importe qu'elles n'aient pas été acceptées, l'acceptation n'ayant pour effet que de nouer le rapport cambiaire qui s'ajoute aux liens de droit commun ;

" alors qu'une traite non acceptée par le tiré portant sur des opérations commerciales imaginaires constitue une simple allégation soumise à vérification qui ne peut constituer le délit de faux tel que défini par les anciens articles 147 et 150 du Code pénal et 441-1 du Code pénal ; que dès lors l'arrêt attaqué, en statuant ainsi, a privé de base légale sa décision " ;

Vu les articles 147 ancien et 441-1 du Code pénal ;

Attendu que l'altération frauduleuse de la vérité, préjudiciable à autrui, ne constitue un faux pénalement punissable que lorsqu'elle est commise dans un document faisant titre ;

Attendu que, pour relaxer Andrée Y... du chef d'escroquerie et la condamner pour faux et usage, les juges relèvent que, présidente de plusieurs sociétés, elle a présenté à l'escompte des lettres de change dépourvues de cause, tirées sur des clients et qu'elle a obtenu ainsi de 2 établissements bancaires la remise de fonds ;

Mais attendu qu'en prononçant ainsi, alors que, en l'absence de toute autre circonstance, les effets de commerce, qui n'avaient pas été acceptés par les tirés, ne constituaient pas des titres au sens des textes précités, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée de ces textes ;

Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu d'examiner le troisième moyen de cassation,

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt de la cour d'appel de Lyon, en date du 7 mai 1997, et pour qu'il soit à nouveau jugé conformément à la loi,

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Lyon autrement composée.