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Décisions

CA Paris, 15e ch. B, 22 janvier 2009, n° 07/02283

PARIS

Arrêt

Infirmation partielle

PARTIES

Demandeur :

Banque Populaire Occitane (SA)

Défendeur :

Séribo (SA), Jun (ès qual.) , Livolsi (ès qual.)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Henry-Bonniot

Conseillers :

Mme David, Mme Delbes

Avoués :

SCP Fanet-Serra, SCP Petit Lesénéchal

Avocat :

Me Lemoine

T. com. Paris, du 21 janv. 2005, n° 02/7…

21 janvier 2005

La société d'études et de réalisation pour l'industrie (SERIBO) s'est portée le 27 septembre 1995 caution solidaire à hauteur du montant d'un prêt de 3.556.000F consenti par moitié par la Banque Populaire du Tarn et de l'Aveyron, devenue B. Occitane, et par la Caisse régionale du Crédit Agricole à la société Seriparquet, dont elle était actionnaire majoritaire, pour l'achat de matériels.

La Banque Populaire du Tarn et de l'Aveyron avait, en outre, accordé une ligne de crédits documentaires de 2MF (304.898,04 €) pour laquelle la SERIBO a remis le 4 octobre 2000 à la banque une lettre d'intention portant sur une somme de 3.600.000F (548.816,46 € ). Cette lettre se substituait à des lettres antérieures.

La société Seriparquet a été déclarée en redressement judiciaire le 26 février 2002 avec conversion le 25 juin 2002 en plan de cession sans location gérance.

Par jugement du 21 janvier 2005, assorti de l'exécution provisoire, le tribunal de commerce de Paris a condamné la société SERIBO à payer à la Banque Populaire Occitane la somme de 37.967,99 € avec intérêts au taux conventionnel de 7,70 %. La juridiction a retenu la demande relative au prêt cautionné mais non celle concernant le crédit documentaire, objet de la lettre d'intention.

Par jugement du 1er mars 2006 le tribunal de commerce de Dax a ouvert une procédure de sauvegarde de justice à l'égard de la société SERIBO. Par jugement du 20 décembre 2006 la société a été placée en liquidation judiciaire.

La déclaration d'appel de la Banque Populaire Occitane a été remise au greffe de la Cour le 25 avril 2005.

Par arrêt du 11 janvier 2007 l'affaire a été retirée du rôle à la demande écrite de toutes les parties. Elle a été rétablie par conclusions du 27 mars 2008 de la banque.

Dans ses dernières écritures, au sens de l'article 954 du Code de procédure civile, déposées le 14 novembre 2006 la Banque Populaire Occitane demande :

- de confirmer le jugement quant au prêt, étant précisé que la condamnation a été exécutée

- de l'infirmer pour le surplus

- de fixer sa créance au passif de la procédure collective à la somme de 123.020,52 € au titre des crédits documentaires avec intérêts au taux légal à compter de la première réclamation amiable infructueuse jusqu'au règlement

- ordonner la capitalisation des intérêts

- condamner la société SERIBO à lui payer la somme de 4000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

Dans ses dernières écritures, au sens de l'article 954 du Code de procédure civile, déposées le 26 juin 2007 le mandataire judiciaire à la liquidation judiciaire demande :

- d'infirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société SERIBO

- ordonner le remboursement des sommes versées

Subsidiairement,

- la banque ayant produit pour la somme de 35.422,72 €, ne pouvant réclamer plus, ordonner le remboursement du trop perçu

- confirmer la décision au titre du crédit documentaire

- condamner la banque à lui payer la somme de 4000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

CELA ÉTANT EXPOSÉ,

LA COUR,

Sur la caution solidaire du prêt

Considérant que le mandataire judiciaire à la liquidation judiciaire de la société SERIBO fait valoir que le tribunal de commerce a arrêté un plan de cession et que, selon les dispositions de l'article L. 621-96 de l'ancien Code de commerce, la charge des sûretés ... garantissant le remboursement d'un crédit consenti à l'entreprise pour lui permettre de financer un bien sur lequel portent ces sûretés est transmise au cessionnaire qui doit payer entre les mains du prêteur les échéances restant dues à compter de l'entrée en jouissance des biens nantis' ; que le repreneur avait, le 24 juin 2002, proposé de reprendre les matériels soumis à ces dispositions et d'assumer les échéances des prêts ; que les dispositions de l'article L. 621-25, selon lequel les cautions solidaires ne peuvent se prévaloir du jugement qui arrête le plan, n'est pas applicable puisque celles de l'article L. 621-96 sont d'ordre public et constituent une exception au principe de la purge des inscriptions grevant les biens cédés dès le paiement du prix en faveur des créanciers qui ont financé un bien compris dans cette cession ; que la carence de la banque pour faire valoir son gage conduit à décharger la caution en application de l'article 2037 du Code civil (devenu 2314) puisque la subrogation aux droits du créancier ne peut plus s'effectuer par le fait de ce créancier à défaut pour la banque créancière, nantie sur le matériel d'équipement professionnel, d'avoir publié l'inscription modificative du nantissement grevant le matériel transféré au cessionnaire de l'entreprise ;

Mais considérant que le texte cité ne vise que les échéances restantes dues à compter du transfert de la propriété ; que la dernière échéance qui pouvait être exigible au titre de ce prêt était du 9 octobre 2002 de sorte qu'à la date, postérieure, du transfert de propriété au cessionnaire aucune somme ne pouvait lui être réclamée ; qu'aucune déchéance n'est encourue par la banque ;

Considérant, toutefois, que la créance doit être fixée au passif de la société désormais en liquidation judiciaire ; que son montant n'est pas limité à celui de la déclaration de créance, la caution étant tenue des intérêts, en application de l'article L. 621-48 du Code de commerce, jusqu'à ce qu'elle soit elle-même en liquidation judiciaire ;

Sur la lettre d'intention du 4 octobre 2000

Considérant que les termes de cette lettre d'intention adressée à la banque sont : ...nous ferons les meilleurs efforts pour que SERI PARQUET dispose d'une trésorerie suffisante lui permettant de faire face aux obligations envers vous au titre de l'ensemble des concours consentis par votre banque' ;

Considérant que la banque estime qu'il ne peut s'agir d'un engagement moral comme le tribunal de commerce l'a jugé ; que l'intention des parties doit être recherchée et que constitue une obligation de résultat l'engagement souscrit par une société de faire le nécessaire pour que sa filiale dispose d’une trésorerie suffisante ; qu'en outre des éléments extrinsèques démontrent l'existence d'une obligation de résultat ; en premier lieu l'autorisation par le conseil de surveillance qui aurait été inutile si la lettre ne comportait qu'une obligation de moyens ; en deuxième lieu les appellations que la société Seribo donne dans ses courriers de son propre engagement (lettre du 28 mai 2002 évoquant la caution fournie' de même le 20 septembre 2002 notre cautionnement... ) ; en troisième lieu, l’analyse des documents comptables comportant la caution donnée à la filiale ;

Mais considérant que la société SERIBO s'est engagée à faire les meilleurs efforts ; qu il s’agissait d'aider sa filiale ; qu'elle ne s'est pas engagée à faire le nécessaire, à maintenir ses engagements ni à apporter tout son soutien nécessaire ; qu'il ne s'agissait que d'efforts ; que les éléments extrinsèques soulignés par la banque ne peuvent transformer l'obligation de moyen ressortant des termes même de l'engagement litigieux ;

Considérant que, dès lors que la demande en a été judiciairement formée et qu'il s'agit d'intérêts dus pour au moins une année entière, la capitalisation de ces intérêts, à compter de la demande, est de droit ;

Considérant que le jugement est confirmé sous réserve des conséquences de la procédure collective ; qu'il est équitable de laisser à la charge des parties leurs frais non répétibles ;

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement déféré sauf en ce qu'il a condamné la société d'études et de réalisation pour l'industrie

Infirmant quant à ce

Fixe la créance de la Banque Populaire Occitane au passif de la procédure collective de la société d'études et de réalisation pour l'industrie à la somme de 37.967,99 € avec intérêts au taux conventionnel de 7,70% jusqu'à la date d'ouverture de la procédure collective et avec capitalisation dans les conditions de l'article 1154 du Code civil

Rejette toute autre demande

Condamne Me Jun, en sa qualité de mandataire judiciaire à la liquidation judiciaire de la société d'études et de réalisation pour l'industrie, aux dépens d'appel, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.