Cass. crim., 27 juin 2012, n° 11-86.920
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Louvel
Rapporteur :
Mme Ract-Madoux
Avocat général :
M. Sassoust
Avocat :
SCP Waquet, Farge et Hazan
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu le mémoire produit commun aux demandeurs ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que, les 6 novembre et 25 novembre 2009, le syndicat Sud Caisses d'épargne et les syndicats CGT des personnels de plusieurs banques ont porté plainte et se sont constitués partie civile devant le doyen des juges d'instruction du chef de prise illégale d'intérêts contre M. François X..., en exposant que ce dernier, secrétaire général adjoint à la présidence de la République, chargé des affaires financières et industrielles, avait surveillé l'opération de fusion entre les caisses d'épargne et les Banques populaires, jusqu'à sa nomination, le 2 mars 2009, aux fonctions de président du directoire de la Caisse nationale des caisses d'épargne et de directeur général de la Banque fédérale des banques populaires ;
Attendu que, par réquisitoire, en date du 15 mars 2010, le procureur de la République a estimé n'y avoir lieu à informer, aux motifs qu il était établi, de façon manifeste, que les faits dénoncés par les parties civiles n'étaient pas caractérisés ; que, par ordonnance, en date du 18 juin 2010, le juge d'instruction a dit y avoir lieu à informer ; que, sur appel du ministère public, la chambre de l'instruction a déclaré irrecevables les constitutions de partie civile précitées et dit n'y avoir lieu à suivre contre quiconque, en application de l'article 86, alinéa 4, du code de procédure pénale ;
En cet état :
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 2132-3 du code du travail, 2, 3, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré irrecevables les constitutions de partie civiles des syndicats Sud Caisse d'épargne, CGT des agents et des personnels des Caisses d'épargne et du personnel Banque assurance CGT ;
" aux motifs que les syndicats sont irrecevables en leurs constitutions de parties civiles lorsque le préjudice indirect porté à l'intérêt collectif de la profession ne se distingue pas du préjudice lui-même indirect qu'auraient pu subir individuellement les salariés de l'entreprise ; que la coïncidence des préjudices individuels avec un préjudice consistant en une atteinte aux intérêts collectifs de la profession est avérée en l'espèce, selon les parties civiles elles-mêmes, qui précisaient que les faits portent, selon le syndicat Sud, " préjudice à l'ensemble des salariés du groupe dans la mesure où la politique menée par M. X... n'a pas permis le redressement de la banque et qu'un plan social entraînant la suppression de 4500 emplois est envisagé " ; que selon la CGT, les faits ont " pu causer des préjudices à l'ensemble des salariés de la Caisse d'épargne, notamment au regard des licenciements de salariés par la mutualisation des personnels et des dégradations probables des conditions de travail " ; qu'à supposer qu'il existe un lien de causalité entre la nomination contestée, intervenue le 2 mars 2009, et les plans sociaux pouvant résulter de la décision du 31 juillet 2009 de fusionner les deux établissements, les syndicats doivent être déclarées irrecevables en leurs constitutions de parties civiles faute d'alléguer un préjudice indirect porté à l'intérêt collectif de la profession, se distinguant du préjudice lui-même indirect qu'auraient pu subir individuellement les salariés de l'entreprise, étant rappelé que les salariés ne peuvent eux-mêmes se prévaloir que d'un préjudice individuel direct ; qu'il y a ainsi lieu de déclarer irrecevables les constitutions de partie civile du syndicat Sud groupe BPCE et des syndicats CGT des personnels des caisses régionales des caisses d'épargne et du groupe Banque Palatine ;
" alors que porte nécessairement préjudice à l'intérêt collectif de la profession que représentent les syndicats de personnels d'un établissement bancaire, la commission de faits susceptibles de constituer une prise illégale d'intérêt de la part d'un ancien secrétaire général adjoint au cabinet de la présidence de la République devenu, à la faveur de ces faits, directeur de cet établissement, dès lors que de tels faits sont de nature à caractériser un manquement au devoir de probité et aux obligations déontologiques de nature à porter atteinte à l'image de la profession bancaire ainsi embrassée et à la confiance qu'elle se doit d'inspirer ; qu'en l'espèce, les syndicats invoquaient, comme portant atteinte à l'intérêt collectif de la profession, l'irrespect des dispositions légales et l'augmentation importante de la rémunération que M. X... s'était fait consentir à la faveur des faits suivants : irrespect d'un précédent avis de la commission de déontologie de la fonction publique à la faveur d'un premier pantouflage dans le secteur bancaire, puis nomination, sans saisine préalable de la commission de déontologie, comme président du directoire des établissements bancaires dont il avait piloté la fusion comme secrétaire général adjoint au cabinet de la Présidence de la République, et obtention consécutive d'une rémunération triplée par rapport à celle de son prédécesseur et d'une indemnité de 60 000 euros pour frais de réception et de représentation alors même que l'établissement bancaire avait subi des pertes financières considérables ; qu'en estimant que les parties civiles n'alléguaient cependant pas de préjudice indirect porté à l'intérêt collectif de la profession distinct de celui individuellement subi par les salariés et en déclarant irrecevable leur constitution de partie civile, la chambre de l'instruction n'a pas légalement justifié sa décision " ;
Vu les articles 2 et 3 du code de procédure pénale et l'article L. 2132-3 du code du travail ;
Attendu qu'il résulte de ces textes que les syndicats peuvent agir en justice et exercer les droits réservés à la partie civile pour les faits portant un préjudice direct ou indirect à l'intérêt collectif de la profession qu'ils représentent ;
Attendu que, pour déclarer irrecevable la constitution de partie civile des syndicats, l'arrêt se borne à énoncer que ceux-ci n'allèguent pas un préjudice indirect porté à l'intérêt collectif de la profession, se distinguant du préjudice lui-même indirect qu'auraient pu subir individuellement les salariés de l'entreprise ;
Mais attendu qu'en se déterminant ainsi, alors que les faits de prise illégale d'intérêts dénoncés par eux, à les supposer établis, rendent possible l'existence d'un préjudice, fût-il indirect, aux intérêts moraux de la profession qu'ils représentent, et distinct de celui qu'ont pu subir individuellement les salariés, la chambre de l'instruction a méconnu les textes susvisés ;
D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;
Et sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 432-12, 432-13 du code pénal, 85, 86, 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré l'appel du ministère public bien fondé, infirmé l'ordonnance entreprise, dit qu'il est établi de façon manifeste que les faits dénoncés par les parties civiles n'ont pas été commis et n'y avoir lieu à suivre du chef de prise illégale d'intérêt ;
" aux motifs, que le juge d'instruction a été saisi de faits qualifiés par les plaignants de prise illégale intérêt, avec visa des dispositions des articles 432-12 et 432-13 du code pénal ; que la qualité d'agent public de M. X... n'est pas contestable, étant rappelé que sa démission du corps des inspecteurs généraux des finances n'a été effective que le 11 mars 2009 ; qu'il convient de rappeler que M. X... a été nommé à l'administration centrale du ministère des finances le 22 mai 2001, qu'il a exercé ensuite des fonctions de sous-directeur à la direction du Trésor, à compter du 24 mai 2002, avant de rejoindre en avril 2004 le cabinet du ministre de l'économie et des finances, en qualité de directeur de cabinet adjoint ; que nommé inspecteur général des finances le 19 janvier 2005, il obtenait une mise en disponibilité le 26 janvier 2005 lui permettant de rejoindre la banque Rothschild et Cie, en qualité d'associé gérant ; qu'il prenait le 26 mai 2007 les fonctions de secrétaire général adjoint de la présidence de la République jusqu'à sa nomination le 2 mars 2009 président du directoire de la Caisse nationale des caisses d'épargne et de la Banque fédérale des banques populaires ; qu'à supposer que lors de ses précédentes fonctions en qualité de directeur de cabinet adjoint, exercées jusqu'en janvier 2005, M. X... ait eu à suivre l'opération de rapprochement des groupes Banque populaire et Caisse d'épargne, qui aboutira avec la création en 2006 de Natixis, leur filiale commune, ces fonctions ne peuvent constituer un élément de l'incrimination, n'étant plus exercées au moment de l'acte, au sens de l'article 432-12 du code pénal et étant antérieures de plus de trois ans (condition exigée à l'article 432-13 du code pénal) à la date de sa nomination à la tête des deux sociétés le 2 mars 2009 ; que sont visées principalement les fonctions exercées à la présidence de la République ; que les plaignants ont, en se référant à des articles de presse, souligné le rôle déterminant de M. X... dans la mise au point du projet de fusion des deux établissements bancaires ; qu'il aurait tiré avantage de cette nomination en bénéficiant d'une très importante rémunération ; que les copies des courriers électroniques adressés anonymement au juge d'instruction tendent à accréditer l'intervention de M. X... dans le débat sur le projet de fusion ; que les investigations que le juge d'instruction se propose d'entreprendre consistent essentiellement à rechercher et à prendre la mesure de son influence ; que cependant, les notions de surveillance, d'administration, de liquidation ou de paiement mentionnées à l'article 432-12 du code pénal s'entendent d'actes pris par une autorité juridiquement compétente ; que de même les actes mentionnés à l'article 432-13 du code pénal : " assurer la surveillance ou le contrôle d'une entreprise, conclure des contrats de toute nature avec une entreprise privée ou formuler un avis sur de tels contrats, proposer directement à l'autorité compétente des décisions relatives à des opérations réalisées par une entreprise privée ou formuler un avis sur de telles décisions " doivent s'entendre de compétences juridiques attribuées par un texte législatif ou réglementaire et la participation à un processus formalisé de prise de décision ; qu'une simple influence politique, même importante, ne permet pas de caractériser les délits susvisés ; que c'est à tort qu'un plaignant soutenait qu'il fallait s'attacher non pas aux décisions formelles (signature d'une autorité) mais aux décisions réelles et substantielles ; qu'il sera relevé que les décisions prises par la commission instituée par l'article 87 de la loi du 29 janvier 1993 sont fondées sur cette même analyse ; que dans son rapport public 1996, commentant sa jurisprudence, elle soulignait que " même si la commission n'ignore pas l'étendue de l'influence des membres des cabinets ministériels auprès des administrations placées sous l'autorité du ministre auprès duquel ils servent, elle a constaté que les responsabilités formelles sont, en matière de pouvoir de décision, de contrôle ou d'autorisation confiées par les textes les instituant, soit directement au ministre, soit par délégation aux directeurs d'administration centrale, de même que sont limitativement définies les compétences respectives des uns et des autres pour la passation des marchés publics " ; que dans l'avis donné par le président de la Commission de déontologie de la fonction publique le 24 février 2009, à titre d'« opinion personnelle qui n'engage pas la commission », il est rappelé cette jurisprudence : " les membres des cabinets ministériels, qui à la différence des fonctionnaires en poste dans les services, n'ont pas le plus souvent de pouvoirs propres ou délégués. Leurs fonctions, le cas échéant, de conseil, ne s'inscrivent pas normalement dans le processus formalisé de la prise de décision administrative " ; que, pour répondre à l'interrogation de M. X... sur la compatibilité de ses nouvelles fonctions avec ses fonctions de secrétaire général adjoint à la présidence de la République, que lui transmettait le secrétaire général de la présidence de la République, le président de la commission de déontologie se référait à la " jurisprudence traditionnelle " de la commission, qui avait émis des avis favorables, citant en particulier les cas d'un ancien secrétaire général adjoint de la présidence de la République, d'un ancien directeur de cabinet d'un Premier ministre et de l'ancien directeur de cabinet d'un ministre des finances qui avaient rejoint une banque d'affaires pour y exercer des fonctions de direction en qualité d'associés gérants " ; qu'il ressort de l'enquête préliminaire, des déclarations de M. X... et des textes législatifs et réglementaires applicables, qu'il n'existe pas de définition des fonctions de secrétaire général adjoint de la présidence de la République ; que ce point ne fait l'objet d'aucune discussion ou contestation des parties ; que M. X..., lors de son audition par la brigade financière le 8 avril 2009, a précisé que " sa fonction comporte trois aspects : un premier aspect d'ordre politique qui correspondait à l'essentiel de mon activité. A ce titre, je devais apporter au Président de la République un éclairage sur les conséquences politiques des choix faits en matière économique par le Gouvernement, ainsi que sur la cohérence de ces choix avec les grandes options politiques du Président cela implique de participer à la préparation des interventions du Président (discours, déplacements, interventions dans les médias ) je veux préciser que mon éclairage est d'ordre politique et non technique, cet éclairage technique étant apporté par les ministères... la seconde fonction est une mission de diplomatie économique, qui a pris beaucoup de place compte tenu de l'évolution financière et économique internationale... cette mission consiste en particulier en la préparation des réunions internationales, notamment la préparation et la conduite de la présidence de l'Union européenne la troisième mission est de tenir le Président informé de l'évolution de certains dossiers et de l'éclairer sur les questions économiques. Cela consiste en la production de synthèses sur la conjoncture, préparer des rencontres avec certains interlocuteurs, l'informer sur des sujets économiques très divers et répondre à des demandes du Président sur ces questions " ; que si cette description des fonctions de M. X... n'est pas contestée, cependant les pièces produites à l'appui des plaintes mentionnaient son influence déterminante sur les décisions prises pour la fusion des deux établissements bancaires ; que les copies de courriers anonymes reçus par le juge d'instruction, adressés par M. Y...à M. Z..., qui sont des comptes rendus d'entretien avec M. X..., tendent à établir l'intérêt qu'il porte au dossier et la prise en compte par ses interlocuteurs de ses interrogations sur les choix stratégiques ; que M. X... confirme avoir rencontré les acteurs du projet, à plusieurs reprises, afin de permettre au Président de la République de disposer d'une information directe ; qu'il justifie l'intérêt porté sur ce dossier : " les autorités considérant qu'il fallait une intervention de l'Etat, il fallait une analyse politique de cette décision d'aider une nouvelle fois les banques, comment expliquer cela à l'opinion. L'enjeu était le respect de l'engagement politique du chef de l'Etat qu'aucune banque en France ne ferait défaut " ; que M. X... indique avoir donné deux avis sur l'opération, mais dont les deux seuls destinataires étaient le président de la République et le secrétaire général de la présidence ; qu'il n'est pas contesté qu'il ne s'agit pas d'autorités juridiquement compétentes pour l'opération de fusion et son financement que lors de son audition par la commission des finances, de l'économie et du plan de l'Assemblée nationale le 25 mars 2009 (procès-verbal annexé à la procédure de la brigade financière), M. François X... soulignait ainsi : " la thèse selon laquelle je serais en situation de prise illégale d'intérêt est purement politique. J'ai certes donné mon avis au Président de la République, mais cela ne signifie pas que je sois en situation de prise illégale d'intérêts car, contrairement à ce que vous pensez, les institutions fonctionnent : c'est la Commission bancaire qui est chargée du contrôle des banques ; c'est le ministère des finances qui est chargé de la régulation du système bancaire. C'est la commission bancaire et la direction générale du Trésor qui instruisent les dossiers et ce sont elles, et non pas moi, qui ont calibré le plan de recapitalisation bancaire " ; qu'il ressort ainsi, de façon manifeste, de ces éléments que dans l'exercice de ses fonctions, M. X... n'avait au sens de la loi pénale, ni " la charge d'assurer la surveillance, l'administration, la liquidation ou le paiement ", ni d'« assurer la surveillance ou le contrôle d'une entreprise, de conclure des contrats de toute nature avec une entreprise privée ou de formuler un avis sur de tels contrats, de proposer directement à l'autorité compétente des décisions relatives à des opérations réalisées par une entreprise privée ou de formuler un avis sur de telles décisions " ; qu'il ressort de l'enquête préliminaire qu'aucun des actes auxquels il a pu procéder, auditions, missions d'information, avis destinés au Président de la République et au secrétaire général de la présidence de la République, qui étaient de sa compétence, ne permettent de caractériser l'infraction de prise illégale d'intérêts ; qu'il n'a pas et ne pouvait pas, au regard de la nature de ses fonctions, intervenir dans le processus formalisé de prise des décisions administratives relativement à la fusion et à la recapitalisation des établissements bancaires concernés ; qu'en conséquence, les investigations envisagées par le juge d'instruction ne sont pas utiles à la manifestation de la vérité ; qu'il est établi de façon manifeste, que les faits dénoncés par les plaignants n'ont pas été commis ; qu'il y a ainsi lieu, en application des dispositions de l'article 86, alinéa 4, du code de procédure pénale, d'infirmer l'ordonnance entreprise et de dire n'y avoir lieu à suivre contre quiconque du chef des infractions de prise illégale d'intérêt ou de prise de participation, les faits n'étant susceptibles d'aucune autre qualification pénale ;
" 1°) alors que la surveillance, au sens des articles 432-12 et 432-13 du code pénal, peut s'entendre de simples pouvoirs de préparation ou de proposition de décisions prises par d'autres ou même d'avis en vue de décisions prises par d'autres ; que de tels actes peuvent résulter de l'exercice d'un pouvoir de fait, y compris d'origine politique, sur les organes décisionnaires ; qu'en retenant, pour conclure au non-lieu à informer, que seule l'attribution de compétences juridiques par un texte législatif et règlementaire et la participation à un processus formalisé de prise de décision, faisant défaut en l'espèce, pouvaient tomber sous le coup des incriminations, la chambre de l'instruction a violé les articles 432-12 et 432-13 du code pénal ;
" 2°) alors que la juridiction d'instruction régulièrement saisie d'une plainte avec constitution de partie civile a le devoir d'instruire, quelles que soient les réquisitions du ministère public ; que cette obligation ne cesse, suivant les dispositions de l'alinéa 4 de l'article 86, que si, pour des causes affectant l'action publique elle-même, les faits ne peuvent comporter légalement une poursuite ou si, à supposer les faits démontrés, ils ne peuvent admettre aucune qualification pénale ; que le refus d'informer ne peut reposer sur un élément ou une affirmation de pur fait qu'il appartient à l'information de faire apparaître ou de vérifier ; que les fonctions de secrétaire général adjoint à la présidence de la République n'étant définies par aucun texte législatif ou règlementaire, il ne peut ressortir de la seule audition du mis en cause, contraire aux allégations de la plainte et qui n'a été ni vérifiée auprès de l'administration, ni recoupée auprès des acteurs de l'opération en cause, qu'aucun des actes auxquels il avait pu procéder dans l'exercice de ses fonctions ne permettait de caractériser l'infraction de prise illégale d'intérêt ; qu'en retenant néanmoins qu'il résultait de l'enquête préliminaire que les faits n'auraient pas été commis de façon « manifeste » et en refusant de vérifier l'exactitude des faits dénoncés par une information, la chambre de l'instruction a violé les articles 85 et 86 du code de procédure pénale " ;
Vu l'article 86, alinéa 4, du code de procédure pénale, ensemble l'article 432-13 du code pénal ;
Attendu que, selon le premier de ces textes, la juridiction d'instruction ne peut dire n'y avoir lieu à informer, le cas échéant au vu des investigations réalisées à la suite de la plainte préalablement déposée devant le procureur de la République, conformément à l'article 85 du même code, que s'il est établi, de façon manifeste, que les faits dénoncés par la partie civile n'ont pas été commis ;
Attendu que, pour infirmer l'ordonnance du juge d'instruction disant y avoir lieu à informer contre M. X..., du chef de prise illégale d'intérêts, l'arrêt énonce notamment que, de façon manifeste au regard de la nature de ses fonctions, ce dernier n'est pas intervenu et ne pouvait pas intervenir dans le processus formalisé de prise de décisions administratives relatives à la fusion et à la recapitalisation des établissements bancaires et qu'en conséquence, les investigations envisagées par le juge d'instruction ne sont pas utiles à la manifestation de la vérité ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, sans rechercher la nature des fonctions effectivement exercées par l'intéressé et alors que l'article 432-13 du code pénal n'exige pas que l'intervention du fonctionnaire s'inscrive dans le processus formalisé des décisions administratives, la chambre de l'instruction a méconnu les textes susvisés et le principe ci-dessus énoncé ;
D'où il suit que la cassation est encore encourue de ce chef ; qu'elle aura lieu sans renvoi, la Cour de cassation étant en mesure d'appliquer directement la règle de droit et de mettre fin au litige, ainsi que le permet l'article L. 411-3 du code de l'organisation judiciaire ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, en date du 3 mars 2011 ;
DECLARE RECEVABLE, en l'état, la constitution de partie civile des syndicats plaignants, du chef de prise illégale d'intérêts ;
ORDONNE le retour du dossier au juge d'instruction du tribunal de grande instance de Paris, afin d'informer ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi.