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Décisions

CAA Marseille, 4e ch., 4 octobre 2016, n° 14MA01238

MARSEILLE

Arrêt

Annulation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Cherrier

Rapporteur :

Mme Boyer

Rapporteur public :

M. Ringeval

Avocat :

Cabinet Edouard Degryse

CAA Marseille n° 14MA01238

3 octobre 2016

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Montpellier, en qualité d'associé solidaire mis en demeure le 10 janvier 2012 d'acquitter les rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui ont été réclamés à la SNC Assistance Auto A...par avis de mise en recouvrement du 16 juillet 2008, de prononcer la décharge, en droits et pénalités, de ces impositions ainsi que la décharge de l'obligation de payer procédant de cette mise en demeure.

Par un jugement n° 1201897 du 21 janvier 2014, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 20 mars 2014 et un mémoire enregistré le 27 juin 2014, M. B...A..., représenté par MeC..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 21 janvier 2014 ;

2°) de prononcer la décharge de l'obligation de payer la taxe sur la valeur ajoutée faisant l'objet de l'avis de mise en recouvrement émis à son nom le 31 mars 2009 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2500 euros au titre des frais exposés tant en première instance qu'en appel.

Il soutient que :

- le tribunal a commis une erreur d'analyse en se plaçant sur le terrain d'un contentieux d'assiette ;

- la SNC Assistance Auto A...n'a pas lapersonnalitémorale en l'absence d'immatriculation au registre du commerce et des sociétés ;

- la SNC Assistance Auto A...est inexistante dès lors que l'un des deux associés était mineur lors de sa constitution, et ne pouvait donc avoir la qualité de commerçant visée à l'article L. 221-1 du code du commerce, ni la capacité d'adhérer à un contrat de société au regard des dispositions de l'article 1108 du code civil ;

- en application de la doctrine administrative référencée BOFIP FOI-REC-PREA-10-10, l'avis de mise en recouvrement aurait dû être établi à son nom à titre principal et non pas lui être adressé en sa qualité d'associé au titre de sa responsabilité solidaire découlant de l'article L. 221-1 du code de commerce ;

Par un mémoire en défense enregistré le 16 juin 2014, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens présentés par M. A... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Boyer,

- et les conclusions de M. Ringeval, rapporteur public.

1. Considérant que la SNC Assistance AutoA..., qui a été constituée le 26 décembre 2002 entre M. B...A...alors mineur et son père, M. D...A..., et qui a pour activité principale l'assistance et le dépannage automobile, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité au titre de la période allant du 1er janvier 2003 au 31 décembre 2005 à l'issue de laquelle des rappels de taxe sur la valeur ajoutée assortis de pénalités lui ont été réclamés pour un montant de 55 775 euros, par un avis de mise en recouvrement en date du 16 juillet 2008 ; que la SNC Assistance Auto A...n'ayant effectué aucun versement, l'administration fiscale a émis à l'encontre de chacun des deux associés, sur le fondement de la responsabilité solidaire prévue à l'article L. 221-1 du code de commerce, un avis de mise en recouvrement en date du 31 mars 2009, suivi d'une mise en demeure valant commandement de payer le 21 avril 2009, également restés sans effet ; qu'une nouvelle mise en demeure valant commandement de payer en date du 10 janvier 2012 a été signifiée à M. B...A... ; que l'administration ayant rejeté, le 15 mars 2012, l'opposition formée contre cet acte de poursuite, M. A... a saisi le tribunal administratif de Montpellier d'une demande tendant d'une part à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis en recouvrement le 16 juillet 2008, et d'autre part à la décharge de l'obligation de payer procédant de la mise en demeure du 10 janvier 2012 ; que M. A... relève appel du jugement du 21 janvier 2014 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté cette demande ;

Sur la régularité du jugement et l'étendue du litige :

2. Considérant que dans ses écritures de première instance M. A... a indiqué que son recours était dirigé contre la décision en date du 15 mars 2012 par laquelle l'administration a rejeté l'opposition à contrainte qu'il a formée contre la mise en demeure du 10 janvier 2012 et a notamment conclu à la décharge des impositions mentionnées dans cette mise en demeure ; qu'il doit par suite être regardé comme ayant dans cette mesure engagé devant le tribunal administratif un contentieux du recouvrement ; qu'ainsi, le requérant est fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté l'ensemble de son recours comme irrecevable faute d'avoir été précédé d'une réclamation d'assiette ; que, dès lors, le jugement attaqué doit être annulé comme étant entaché d'irrégularité en tant qu'il concerne les conclusions tendant à la décharge de l'obligation de payer procédant de la mise en demeure du 10 janvier 2012 ; que, dès lors, il y a lieu de se prononcer immédiatement sur ces conclusions par voie d'évocation ;

3. Considérant qu'en revanche il n'y a pas lieu de statuer par l'effet dévolutif de l'appel sur le surplus des conclusions de première instance tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à la charge de la SNC Assistance Auto A...par l'avis de mise en recouvrement du 16 juillet 2008, dès lors que le requérant, qui précise dans sa requête d'appel qu'il entend critiquer uniquement l'obligation de payer les impositions en cause, n'a pas repris ces conclusions devant la Cour ;

Sur les conclusions relatives au recouvrement de l'impôt :

4. Considérant que M. A... ne peut utilement se prévaloir de l'irrégularité qui selon lui affecterait la mise en demeure du 21 avril 2009 pour contester l'obligation de payer procédant de la mise en demeure du 10 janvier 2012, dès lors que ces actes de poursuite sont indépendants l'un de l'autre ;

5. Considérant que M. A... ne peut davantage utilement soutenir qu'en raison de son irrégularité, l'avis de mise en recouvrement du 31 mars 2009 n'a pu interrompre le délai de reprise prévu à l'article L. 176 du livre des procédures fiscales, dès lors qu'à l'égard de l'action en recouvrement est applicable le délai de prescription de quatre ans prévu à l'article L. 274 du même livre, courant à compter de la mise en recouvrement de l'impôt ;

6. Considérant que si M. A... soutient que l'avis de mise en recouvrement du 31 mars 2009 comporte une erreur quant à la dénomination de la société, laquelle y est indiquée comme étant la SNC Auto A...et non la SNC Assistance AutoA..., un tel moyen ne peut qu'être écarté, cette erreur étant sans incidence sur l'identification du destinataire de l'avis de mise en recouvrement dont il s'agit ;

7. Considérant qu'aux termes de l'article L. 221-1 du code du commerce : " Les associés en nom collectif ont tous la qualité de commerçant et répondent indéfiniment et solidairement des dettes sociales. " ;

8. Considérant qu'il est constant que la société constituée le 26 décembre 2002 entre le requérant et son père en tant que société en nom collectif exerçait son activité au nom de la SNC Assistance AutoA..., sans avoir été immatriculée au registre du commerce et des sociétés ; que si elle était de ce fait dépourvue de lapersonnalitémorale, l'administration fiscale était en droit, alors qu'il ne résulte pas de l'instruction et qu'il n'est pas allégué qu'elle était informée de sa situation réelle, d'opposer au requérant la qualité d'associé d'une société en nom collectif et, par suite, de lui réclamer, par l'avis de mise en recouvrement du 31 mars 2009, le paiement de la dette fiscale de la SNC Assistance Auto A...en tant que débiteur solidaire sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 221-1 du code de commerce, sans qu'y fasse obstacle la circonstance qu'auraient été méconnues les dispositions du code civil et du code du commerce relatives à l'incapacité des mineurs respectivement à adhérer à un contrat de société et à avoir la qualité de commerçant ;

9. Considérant qu'il suit de ce qui a été dit au point 8 que doit en tout état de cause être écarté le moyen tiré de ce que l'administration aurait méconnu les énonciations de la doctrine administrative référencée BOFIP FOI-REC-PREA-10-10 n° 220 et 240 du 12 septembre 2012, en ce que l'avis de mise en recouvrement du 31 mars 2009 aurait dû être établi au nom du requérant à titre principal et non en qualité d'associé de la SNC Assistance AutoA... ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à demander la décharge de l'obligation de payer procédant de la mise en demeure en date du 10 janvier 2012 ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à verser quelque somme que ce soit sur leur fondement ;

DECIDE

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 21 janvier 2014 est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions de M. A... tendant à la décharge de l'obligation de payer procédant de la mise en demeure en date du 10 janvier 2012.

Article 2 : Les conclusions mentionnées à l'article 1er et le surplus des conclusions de la requête d'appel sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A...et au ministre de l'économie et des finances. Copie en sera adressée à la direction régionale des finances publiques de Provence-Alpes-Côte d'Azur et du département des Bouches-du-Rhône. Délibéré après l'audience du 20 septembre 2016, où siégeaient : - M. Cherrier, président, - Mme Chevalier-Aubert, président assesseur, - Mme Boyer, premier conseiller. Lu en audience publique, le 4 octobre 2016. '' '' '' '' N° 14MA012382 nc.