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Décisions

CA Caen, 2e ch. civ. et com., 14 décembre 2017, n° 16/00135

CAEN

Arrêt

Infirmation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Briand

Conseillers :

Mme Heijmeijer, Mme Gouarin

Avocat :

Me Lejard

T. com. Caen, du 9 déc. 2015, n° 2015011…

9 décembre 2015

EXPOSE DU LITIGE

Par acte notarié établi le 7 mai 2015 par Me D.., M. C... E.., exploitant un fonds de commerce de vente de textile, a déposé une déclaration d'insaisissabilité portant sur l'immeuble dont il est propriétaire, au lieudit La Corbinière à La Bigne, en application des dispositions de l'article L.

526-1 du code de commerce.

Par jugement rendu le 1er juillet 2015, le tribunal de commerce de Caen, saisi par M. C..., a ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l'encontre de M. C..., a désigné Me A... en qualité de mandataire liquidateur et a fixé la date de cessation des paiements au 29 juin 2015.

Par jugement réputé contradictoire en date du 9 décembre 2015, le tribunal de commerce de Caen a débouté Me A..., ès qualités de liquidateur, de sa demande tendant à obtenir la nullité de la déclaration d'insaisissabilité.

Par déclaration reçue le 14 janvier 2016, Me A..., ès qualités de mandataire à la liquidation de M. C..., a relevé appel de la décision.

Par dernières conclusions remises au greffe le 19 janvier 2016 et régulièrement signifiées à M. C... par acte d'huissier délivré le 1er février 2016, auxquelles il sera renvoyé pour un exposé des moyens de l'appelant, Me A..., pris en sa qualité de mandataire à la liquidation judiciaire de M. C... demande à la cour de :

- réformer le jugement entrepris dans l'ensemble de ses dispositions ;

Sous le bénéfice de l'exécution provisoire

- prononcer la nullité de la déclaration d'insaisissabilité ;

- dire que le jugement sera publié au bureau de la conservation des hypothèques territorialement compétent ;

- condamné M. C... aux dépens, lesquels seront employés en frais privilégiés de la procédure collective.

M. C... n'a pas constitué avocat.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 6 septembre 2017.

MOTIFS

Aux termes de l'article L. 632-1 du code de commerce, le tribunal peut annuler la déclaration d'insaisissabilité faite par le débiteur en application de l'article L. 526-1 dans les six mois précédant la date de cessation des paiements.

En l'espèce, il est constant que la déclaration d'insaisissabilité a été déposée le 7 mai 2015 alors que la date de cessation des paiements a été fixée par le tribunal de commerce au 29 juin 2015 et qu'elle est dès lors susceptible d'être annulée au titre des actes accomplis pendant la période suspecte.

Il résulte des pièces versées aux débats par Me A... que la déclaration d'insaisissabilité a été déposée alors que le passif s'établit à la somme de 134.533,67 euros selon l'état succinct des créances au 24 août 2015, qui inclut des cotisations URSSAF impayées depuis novembre 2014 pour un montant de

25.763 euros.

En outre, le rapport du mandataire liquidateur indique que M. C... a ouvert une boutique à Villers

Bocage en 2012, dont le chiffre d'affaires ne s'est pas développé, de sorte qu'il a tenté de vendre son droit au bail, cession qui n'a pas abouti en raison des conditions financières imposées par le bailleur au titre de la déspécialisation.

Me A... relève en outre que la trésorerie de M. C... s'est tarie progressivement dans la mesure où ce dernier n'a plus été en mesure de réserver des salons nautiques, alors que l'essentiel de son activité consistait dans la vente de textiles dans les salons et les foires.

Il en résulte que M. C..., dont il a été démontré que la situation financière était obérée, a régularisé une déclaration d'insaisissabilité sur sa maison d'habitation avant de saisir, moins de deux mois plus tard, le tribunal de commerce en vue de l'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire, dans but d'éluder les droits des créanciers.

Il convient en conséquence de prononcer l'annulation de la déclaration d'insaisissabilité et d'infirmer le jugement rendu dans toutes ses dispositions.

La demande relative au prononcé de l'exécution provisoire est sans objet en l'absence de voie de recours suspensive d'exécution.

Partie succombant, M. C... sera condamné aux dépens de première instance et d'appel, qui seront employés en frais privilégiés de la procédure collective.

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement rendu par le tribunal de commerce de Caen le 9 décembre 2015 dans toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau

Prononce la nullité de la déclaration d'insaisissabilité reçue par Me D..., notaire, en date du 7 mai 2015, portant sur l'immeuble dont M. C... E... est propriétaire au Lieudit La Corbinière à

La Bigne, cadastré section B n°341, n°191 et n°339 ;

Dit que la présente décision sera publiée au service de la publicité foncière territorialement compétent ;

Condamne M. C... aux dépens de première instance et d'appel, qui seront employés en frais privilégiés de la procédure collective.