Livv
Décisions

Cass. crim., 7 novembre 2012, n° 11-82.961

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Louvel

Rapporteur :

Mme Labrousse

Avocat général :

M. Lacan

Avocats :

Me Copper-Royer, SCP Coutard et Munier-Apaire, SCP Peignot, Garreau et Bauer-Violas

Versailles, du 21 janv. 2011

21 janvier 2011

Attendu que la demanderesse, ayant épuisé, par l'exercice qu'elle en avait fait le 26 janvier 2011, le droit de se pourvoir contre l'arrêt attaqué, était irrecevable à se pourvoir à nouveau contre la même décision ; que seul est recevable le pourvoi formé le 26 janvier 2011 ;

- Sur le pourvoi formé le 26 janvier 2011 :

Attendu qu'aucun moyen n'est produit ;

II-Sur les autres pourvois :

Vu les mémoires en demande, en défense et les observations complémentaires produits ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que, par contrat, en date du 26 février 1998, la ville d'Asnières-sur-Seine, dont M. Frantz X... était le maire, a attribué sans mise en concurrence à la société CDA Productions, gérée par M. A..., le marché relatif à l'organisation d'un festival international des folklores et traditions populaires, d'un montant de 1, 3 millions de francs ; que ce marché a été résilié par M. X..., informé par le préfet de la violation des procédures prévues par le code des marchés publics ; qu'un second contrat, reprenant les termes du premier, a été conclu entre la société CDA Productions et l'association Asnières productions ; que le 25 juin 1998, le conseil municipal d'Asnières-sur-Seine a voté l'affectation d'une subvention de 1, 3 millions de francs à l'association précitée ; que M. X... est poursuivi du chef de favoritisme pour avoir négocié des avant contrats avec la société CDA Productions, signé ou négocié le contrat du 26 février 1998, accepté ou sollicité que l'association Asnières communication signe un contrat identique avec la société CDA Productions pour échapper aux règles de mise en concurrence et, enfin, fait allouer par la ville d'Asnières une subvention de 1, 3 millions de francs à l'association précitée pour financer le festival susvisé ; que M. A... est prévenu du chef de recel de ce délit ;

En cet état :

Sur le premier moyen de cassation, proposé par la société civile professionnelle Coutard-Munier-Appaire pour M. A..., pris de la violation des articles 6 § 1 et 6 § 3 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 321-1, 321-3, 321-4, 321-9, 321-10, 432-14, 432-17-2 du code pénal, 176, 179, 180, 184, 388, 512, 591 et 593 du code de procédure pénale, ensemble, violation des droits de la défense, défaut de motifs, manque de base légale, excès de pouvoirs et dénaturation ;

" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. A... coupable de recel de biens provenant d'atteinte à la liberté d'accès ou à l'égalité des candidats dans les marchés publics, l'a condamné à une peine de quinze mois d'emprisonnement avec sursis et à 20 000 euros d'amende et, sur l'action civile, l'a condamné, solidairement avec MM. X..., M. C... et Mme Z..., à payer à la ville d'Asnières-sur-Seine les sommes de 94 199 euros au titre du préjudice matériel et de 20 000 euros au titre du préjudice moral et à des frais irrépétibles ;

" aux motifs qu'il ressort de l'instruction que M. A... a été introduit à la mairie d'Asnières par M. E..., dirigeant de la société CIRNOV attributaire d'un marché d'impression de la ville d'Asnières ; que tous deux étaient proches puisqu'en 1986 ils s'étaient associés pour créer la SARL CDA productions dont l'activité était le conseil en communication et en publicité, société que M. A... transformera en EURL en 1988 après avoir racheté ses parts ; que M. E... avait par ailleurs employé M. C... au sein de CIRNOV pendant trois ou quatre mois en 1995 ; que M. E... a présenté M. A... à M. C... ; qu'en 1997 M. A... a travaillé en sous-traitance de la société CIRNOV pour la réalisation d'un quizz dans le cadre de la communication de la ville ; que M. E... et M. C... l'ont présenté à M. X... pour le remplacement de Mme Z... pendant son congé maternité ; que c'est dans ces circonstances et alors qu'il exerçait les fonctions de directeur de l'association Asnières communication que M. A... a élaboré le projet de festival des folklores qui devait être réalisé par sa société CDA productions, l'a présenté et l'a fait adopter par M. C... et par M. X... ; que la société CDA productions, constituée de sa seule personne, a donc été la bénéficiaire du contrat passé en violation des règles d'attribution des marchés publics ; que, compte tenu du montant du contrat, 1, 3 millions de francs (198 184 euros), de ses propres honoraires de 120 000 francs et de la marge bénéficiaire de la société 208 343 francs (31 761 euros), il a largement bénéficié du délit de favoritisme dont il ne pouvait ignorer le caractère frauduleux ; qu'en effet, à la place qui était la sienne au moment de l'élaboration du contrat et par les relations qu'il entretenait avec M. C..., il a eu connaissance des difficultés relatives au défaut de mise en concurrence puis du rejet explicite de la préfecture, ce qu'il reconnaît ; que fort de l'assurance qui lui avait été donnée qu'il obtiendrait cette prestation, il a accepté de contracter en des termes strictement identiques avec l'association Asnières communication qu'il avait lui-même dirigée et dont il affirme à plusieurs reprises qu'il la considérait comme un service technique de la mairie ; qu'il savait donc, d'une part que le contrat passé avec la ville l'avait été en violation des règles des marchés publics, d'autre part que le contrat identique passé avec une association qui n'était qu'un démembrement de la municipalité, violait les mêmes règles ;

" 1°) alors que l'ordonnance de renvoi fixe la saisine de la juridiction de jugement et doit énoncer le fait poursuivi, viser le texte de loi qui le réprime et déterminer la qualification juridique ; qu'en l'espèce, en déclarant que M. A... était prévenu, coupable et devait être condamné pour les faits de recel des fonds qu'il savait provenir du délit d'atteinte à la liberté et à l'égalité d'accès aux marchés publics commis par MM. X... et C..., faits prévus par les articles 321-1, 321-3, 321-4, 321-9, 321-10 mais aussi par les articles 432-14 et 432-17, lesquels n'étaient pas visés par la prévention, la cour d'appel a excédé sa saisine et a violé les textes précités ;

" 2°) alors qu'en déclarant M. A... coupable du délit de recel des fonds qu'il savait provenir du délit d'atteinte à la liberté et à l'égalité d'accès aux marchés publics commis par MM. X... et C..., sans que le prévenu n'ait été au préalable invité à s'expliquer devant les juges du fond, quand seul le délit de recel a été visé et non l'infraction originaire, la cour d'appel a excédé ses pouvoirs, et violé les droits de la défense et les textes précités ;

" 3°) alors que tout prévenu a le droit d'être informé de manière détaillée de la nature et de la cause de la prévention portée contre lui et mis à même de se défendre sur les chefs d'infraction qui lui sont reprochés et qu'une inexactitude dans le titre de poursuite relativement à l'infraction et à la peine applicables porte par elle-même atteinte au principe du procès équitable ; qu'en l'espèce, l'ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel et de non-lieu partiel visait les seuls faits prévus et réprimés par les articles 321-1, 321-3, 321-4, 321-9, 321-10 du code pénal relatifs au recel, sans viser le texte de l'infraction originaire, de sorte que les juges du fond ont placé et maintenu M. A... devant une incertitude sur l'objet exact de la prévention et la peine encourue ; qu'en condamnant M. A... dans ces conditions, la cour d'appel a violé les textes et les principes susvisés ;

" 4°) alors qu'en tout état de cause, en déclarant que M. A... était prévenu des faits prévus aux articles 432-14 et 432-17. 2 du code pénal quand l'ordonnance de renvoi ne visait pas ces textes, les juges du fond ont dénaturé ladite ordonnance " ;

Attendu que le demandeur ne saurait se faire un grief de ce que l'ordonnance de renvoi ne vise pas les articles 432-14 et 432-17 du code pénal incriminant le favoritisme dès lors que les faits caractérisant ce délit, pour le recel duquel le prévenu est poursuivi, sont précisés dans ladite ordonnance ;

Qu'ainsi, le moyen ne peut être accueilli ;


Sur le premier moyen de cassation proposé par Me Copper-Royer pour M. X..., pris de la violation des articles 6 et 7 de la Convention européenne des droits de l'homme, des articles 111-3, 121-3, 121-5, 432-14 du code pénal, des articles préliminaire, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. X... coupable d'atteinte à la liberté d'accès ou à l'égalité des candidats dans les marchés publics et l'a condamné à la peine d'un an d'emprisonnement avec sursis ainsi qu'à une amende de 15 000 euros et à verser à la partie civile diverses sommes à titre de dommages-intérêts ;

" aux motifs que sur le délit d'atteinte à la liberté dans les marchés publics reproché à M. X... et à M. C... : 1) sur l'élément matériel du délit, le code des marchés publics impose que toute commande publique de biens ou prestations de service dépassant une certaine valeur fasse l'objet d'un contrat passé selon une procédure gouvernée par le principe de mise en concurrence ; qu'en l'espèce, il est constant que la manifestation intitulée " 1er festival international des folklores et traditions " organisée à l'occasion de la fête de la musique les 20 et 21 juin 1998 est une commande publique de la ville d'Asnières qui souhaitait organiser une manifestation d'intérêt général et qui, en la personne de son maire M. X... et de son premier adjoint chargé de la communication M. C..., en a confié la réalisation à la société CDA productions représentée par M. A... lequel leur en avait proposé l'idée ;
que sur le contrat CDA Productions/ ville d'Asnières, après négociations préalables portant notamment sur le coût de la manifestation, le maire d'Asnières-sur-Seine, M. X..., a signé le 26 février 1998 un premier contrat avec CDA productions, pour un montant de 1 300 000 francs TTC ; que, par lettre du 26 mars 1998, le préfet des Hauts-de-Seine a demandé au maire d'Asnières de résilier ce contrat, en relevant qu'il s'agissait de prestations de services et qu'il convenait, compte tenu du montant de l'opération, de satisfaire aux procédures prévues par le code des marchés publics ; que c'est ce qu'a fait M. X..., ce dont il a informé la préfecture le 1er avril 1998 ; que MM. X..., C... et A... soutiennent que le contrat litigieux ne relevait pas de la procédure de mise en concurrence mais de l'exception prévue par l'article 104- II du code alors en vigueur qui disposait : " il peut être passé des marchés négociés sans mise en concurrence préalable lorsque l'exécution ne peut être réalisée que par un entrepreneur ou un fournisseur déterminé " ; que, toutefois, cette analyse ne saurait être retenue par la cour pas plus qu'elle ne l'a été par le tribunal ; qu'en effet, nonobstant l'intitulé du contrat « contrat de production et de cession du droit d'exploitation d'un spectacle » aucun élément du dossier ne permet de retenir qu'il s'agissait d'une prestation ne pouvant être exécutée que par le seul intervenant choisi ; que le programme tel que décrit dans le contrat était constitué essentiellement d'un défilé, d'une parade de rues et d'un spectacle exécuté par deux cents artistes organisés en troupe folklorique de différents pays dont la France, sans autre précision que le fait que les groupes représenteraient au minimum douze pays différents pas même identifiés ; que les artistes, non professionnels, étaient donc interchangeables et leur organisation pour le défilé non déterminée aucune chorégraphie particulière n'étant évoquée ; que, s'agissant de la " féerie des eaux et le décor lumineux de cônes géants ", aucune indication n'était donnée dans le programme sur le caractère original de ce spectacle d'ailleurs sous-traité par CDA production et qui était sans lien avec la présentation des troupes folkloriques ; qu'il apparaît donc, d'une part, que le contenu de la manifestation était modulable et scindable, d'autre part, qu'aucun élément ne caractérise l'impossibilité absolue de recourir pour tout ou partie de la manifestation qui doit être qualifiée d'événementielle plus que de culturelle, à un autre intervenant ; que, s'il ressort des auditions réalisées pendant l'enquête et l'instruction qu'un débat avait eu lieu au sein des services administratifs de la mairie sur le point de savoir si le contrat envisagé avec CDA productions nécessitait ou non une procédure de mise en concurrence, Mme G... ayant eu avec les services de la préfecture un entretien téléphonique à ce sujet, le préfet a en tout état de cause tranché en faveur de la nécessité d'un appel d'offre ; que, force est de constater que M. X... s'est rangé à l'analyse de la préfecture puisqu'il n'a d'aucune manière contesté la position de celle-ci ; qu'il convient donc d'en déduire qu'au moment de ce premier contrat, le maire d'Asnières a admis que la prestation envisagée relevait de par son montant et de par sa nature des procédures de mise en concurrence ; que selon ses explications M. X... s'est alors trouvé confronté à un dilemme ; qu'estimant la municipalité engagée vis à vis de CDA productions et craignant qu'elle soit tenue de dédommager le prestataire, il a fait rechercher une solution juridiquement acceptable pour permettre la réalisation de la manifestation telle que prévue ; que c'est dans ces conditions qu'il a accepté que le contrat soit passé avec I'association Asnières communication ;
que sur le contrat CDA Productions/ Association Asnières communication, ce second contrat, strictement identique au premier dans son contenu et dans son montant, a été signé, à une date qui n'est pas précisée dans le document, entre CDA Production et l'association Asnières communication représentée par sa présidente Mme D... ; qu'il a été exécuté ; que l'association Asnières communication s'est acquittée par trois chèques au bénéfice de CDA Productions de la somme totale de 1 300 000 francs prévue au contrat, puis a reçu de la municipalité une subvention exceptionnelle du montant exact de la somme versée ; qu'ii ressort des éléments du dossier que l'association Asnières communication est une association para-municipale transparente qui, dans le cas présent, s'est substituée à la mairie pour conclure un contrat qui restait soumis aux règles de passation des marchés publics ; que, même si la notion d'association transparente n'a été consacrée par la jurisprudence que postérieurement aux faits, il appartient à la juridiction saisie d'une infraction dont un des éléments est fondé sur la régularité d'un acte passé par une association, d'apprécier la régularité du dit acte au regard de celle de l'association, sans qu'il soit nécessaire qu'une juridiction ait préalablement statué sur la validité de cette association ; qu'en l'espèce, et en dépit des mesures prises par M. X... lors de son accession à la mairie pour « normaliser » le fonctionnement des associations para-municipales, il apparaît qu'Asnières communication n'avait aucune autonomie de fonctionnement par rapport à la municipalité ; qu'en effet :
* son activité principale était la rédaction du journal Asnières info, vecteur de communication de la mairie ;
* son financement était exclusivement assuré par des subventions municipales sans autre apport même minime ; qu'en outre le budget communication de la ville d'Asnières (2 502 KF) était quasi essentiellement dévolu à Asnières communication (2 500 KF) ; que compte tenu de ces conditions de financement le fait que les personnes employées aient été des salariés de l'association est sans incidence ;
* le rôle de la présidente de l'association, Mme D..., choisie par M. C... en 1996, est décrit par M. H..., directeur de cabinet de M. X..., et Mme I..., secrétaire générale adjointe de la mairie (entre autres), et par l'intéressée elle-même comme purement honorifique, il n'est versé au débat aucun exemple de décision qu'elle ait pu prendre, à l'exception de la signature du contrat litigieux dont elle ne savait rien ;
* la direction de l'association était assurée depuis fin 1995 par Mme Z... qui soutient qu'elle n'avait que peu d'initiative se définissant comme une simple exécutante des décisions du maire et de son premier adjoint qui l'avaient recrutée ; que si Frantz X... dans sa première audition par le magistrat instructeur (24/ 112003- D 93) indique que M. C... et Mme Z... dirigeaient tous les deux l'association, les responsables administratifs de la mairie déjà cités indiquent quant à eux que les décisions étaient de fait prises par M. C..., ancien président de l'association, qui, ayant la communication dans le champ de sa délégation " gardait la haute main sur l'association " ; que M. J..., expert comptable de l'association, indique quant à lui qu'il était en contact avec Mme Z... et M. C... en précisant que " ce dernier agissait habilement pour ne prendre aucune décision directement mais que son bras armé était Mme Y..., épouse Z... ",
* au yeux des tiers, aucune distinction n'apparaissait entre l'association et la municipalité, les propos de M. A... qui a soumis le même contrat successivement à la mairie et à l'association Asnières communication, sont à cet égard éclairants ; qu'il a déclaré devant le juge d'instruction (13/ 04/ 2006- D 525) qu'il ne faisait pas de distinction entre ces deux entités " pour moi l'association Asnières communication était le service technique de la délégation de M. C... en matière de communication, l'association était implantée rue Concorde dans un immeuble qui était occupé par les différents services techniques de la ville … je n'ai jamais fait de distinction entre l'association Asnières communication et la mairie ", il a renouvelé ces propos devant la cour, Mme B..., commissaire aux comptes de l'association, a refusé de certifier les comptes de l'exercice 1997 en raison de l'incertitude sur la nature des liens juridiques entre l'association et la ville d'Asnières ainsi que sur les modalités de dépense des fonds constitués exclusivement de subventions de la mairie ; qu'il résulte clairement de tous ces éléments que le statut associatif d'Asnières communication n'était qu'une façade du service de communication de la mairie, et qu'à l'époque des faits elle ne jouissait en réalité d'aucune autonomie financière ou de décision ; que cette absence d'autonomie est en outre démontrée en l'espèce par le fait qu'aucune modification n'a été apportée au contenu du contrat dont la négociation a échappé entièrement à la présidente de l'association à qui il n'a été soumis que pour signature sans la moindre explication ; que, dans ces conditions, le fait de faire endosser par cette association " transparente " le contrat passé avec CDA Productions pour une commande publique de la ville d'Asnières, ne permettait pas à la ville de se dispenser de respecter les procédures de mise en concurrence ; que l'élément matériel du délit est donc caractérisé, tant pour le contrat signé par la mairie d'Asnières le 28 février 1998 et résilié par la suite, que pour le second contrat signé par l'association Asnières communication qui a reçu exécution.
2) sur l'élément intentionnel du délit M. X... et M. C... soutiennent l'un et l'autre qu'ils se sont fiés à l'avis technique des responsables administratifs et financiers de la mairie ; que cet argument ne peut être retenu s'agissant de deux élus censés exercer pleinement leurs compétences notamment dans les commissions d'appel d'offre ; qu'en outre, il ressort du dossier qu'en réalité seule Mme G... pensait que cette manifestation ne relevait pas de la procédure d'appel d'offres, sa supérieure hiérarchique Mme I... à qui le premier contrat avait été soumis, avait soulevé deux objections, l'une sur la nécessité d'un appel d'offre, la seconde sur la difficulté qui résultait de ce que le prestataire choisi travaillait à l'époque pour Asnières communication ; que ce second point avait d'ailleurs retenu l'attention de M. X... puisqu'il avait souhaité attendre le retour de Mme Z... et donc le départ de M. A... pour conclure le contrat ; qu'en revanche, sur le premier point, il apparaît que M. X... ne s'est pas assuré de ce que ce contrat pouvait être dispensé d'appel d'offres, se contentant d'un seul avis, mais qui en l'espèce était contesté, alors que cette difficulté lui était signalée, il n'en a pas saisi ou fait saisir l'avocat de la ville qui était, à défaut de service juridique, censé être consulté sur toute difficulté juridique ; que c'est en toute connaissance de l'existence d'une difficulté qu'il a volontairement occultée, que M. X... a signé ce contrat, l'élément intentionnel de l'infraction est donc établi à son encontre ; que, s'agissant du second contrat passé sous couvert de l'association Asnières communication, outre que ni M. X... ni M. C... ne sont en mesure de démontrer avoir consulté officiellement les services compétents de la mairie, ils n'ignoraient ni l'un ni l'autre que l'association Asnières communication n'avait pas d'existence autonome, puisqu'ils n'ont pas même pris la peine de lui soumettre le projet de contrat d'ores et déjà négocié se contentant de lui demander de l'endosser en lieu et place de la municipalité ; que c'est donc sciemment que M. X... et M. C... se sont servis de l'association Asnières communication comme structure de substitution et ce afin d'échapper aux règles de mise en concurrence dont ils savaient, après le rejet de la préfecture, qu'elles s'imposaient pour ce contrat de prestation de service compte tenu de son montant ;
que la circonstance que cette pratique de recours à des associations " ad hoc " dans le domaine culturel était alors largement répandue dans les collectivités publiques n'est pas de nature à justifier la démarche ou à faire disparaître l'élément intentionnel de l'infraction qui est caractérisé pour M. X... comme pour M. C... ;

" 1°) alors que toute infraction doit être définie en des termes clairs et précis pour exclure l'arbitraire et permettre au prévenu de savoir quel comportement engage sa responsabilité pénale ; qu'en déclarant M. X... coupable du délit d'atteinte à la liberté d'accès et à l'égalité des candidats dans les marchés publics lors même qu'au jour des faits, le texte légal d'incrimination du délit de favoritisme renvoyait aux dispositions du code des marchés publics en vigueur dont le libellé et l'interprétation qui en était faite par la jurisprudence, au surplus élaborée par deux ordres de juridiction concurrents, ne permettaient pas de savoir si le contrat passé par une commune concernant l'organisation d'un festival de danse devait être soumis ou non à des procédures de mise en concurrence, de sorte que ce texte ne satisfaisait pas aux exigences de clarté et de prévisibilité de la loi pénale, la cour d'appel a violé les principes et textes susvisés ;

" 2°) alors que le prévenu doit pouvoir rapporter la preuve contraire aux imputations de la partie poursuivante ; qu'en considérant que, du fait de sa seule qualité d'élu, le maire d'Asnières n'avait pu ignorer que le contrat conclu par la commune relatif à l'organisation d'un festival de danse était soumis aux règles de mise en concurrence applicables aux marchés publics sans examiner aucun des moyens de défense développés dans ses écritures quant à l'impossibilité dans laquelle il s'était trouvé de s'assurer de la légalité de l'acte accompli, eu égard aux incertitudes liées à la notion de « prestation ne pouvant être exécutée que par le seul intervenant choisi » et soustraite à toute mise en concurrence visée à l'article 104 II du code des marchés publics, incertitudes que n'aurait au surplus pas levées la consultation d'un avocat, la cour d'appel a privé sa décision de tout motif et a fait peser sur le demandeur une présomption irréfragable de culpabilité contraire à la présomption d'innocence ;

" 3°) alors que, le délit de favoritisme, infraction matérielle, suppose la réalisation d'un acte contraire à la législation et à la réglementation garantissant l'accès et l'égalité des candidats dans les marchés publics ainsi que d'un résultat, le fait de procurer à autrui un avantage injustifié ; que la tentative suppose à tout le moins un commencement d'exécution qui n'a été suspendu qu'en raison de circonstances indépendantes de la volonté de son auteur ; qu'en déclarant M. X... coupable de favoritisme sans rechercher si, en l'état de l'absence de toute force contraignante de l'avis du préfet sur la légalité du contrat conclu par une commune, la résiliation du contrat conclu entre la ville d'Asnières et CDA productions opérée de son propre fait par lui ne caractérisait pas un désistement volontaire, exclusif de toute tentative de favoritisme, de surcroît de toute infraction principale de favoritisme, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés ;

" 4°) alors que toute infraction doit être définie en des termes clairs et précis pour exclure l'arbitraire et permettre au prévenu de savoir quel comportement engage sa responsabilité pénale ; qu'en déclarant M. X... coupable du délit d'atteinte à la liberté d'accès et à l'égalité des candidats dans les marchés publics lors même qu'au jour des faits, le texte légal d'incrimination du délit de favoritisme et l'interprétation qui en était faite par la jurisprudence, au surplus élaborée par deux ordres de juridiction concurrents, ne permettaient pas de savoir quels critères permettaient de retenir qu''une association para-municipale constituait une association dépourvue de toute autonomie et à ce titre devait être tenue comme « agissant pour le compte » de la commune de sorte que les contrats conclus par celle-ci auraient dû être soumis aux règles des marchés publics, la cour d'appel a violé les textes et principes susvisés ;

" 5°) alors que le délit de favoritisme suppose la réalisation d'un acte contraire à la législation et à la réglementation garantissant l'accès et l'égalité des candidats dans les marchés publics ; qu'en déclarant M. X... coupable du délit de favoritisme du fait de la soustraction aux règles de mise en concurrence applicables aux marchés publics d'un contrat conclu entre deux personnes privées sans caractériser l'acte matériel reprochable à l'élu, qui n'a ni signé ni exécuté ce contrat, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés ;

" 6°) alors que le prévenu doit pouvoir rapporter la preuve contraire aux imputations de la partie poursuivante ; qu'en considérant que, du fait de sa seule qualité d'élu, le maire d'Asnières avait nécessairement connaissance de l'absence d'existence autonome de l'association Asnières communication sans examiner aucun des moyens de défense développés par M. X... dans ses écritures selon lesquels, en l'état de l'incertitude juridique caractérisant les critères permettant de retenir l'absence de toute autonomie d'une association paramunicipale, qu'au demeurant aucune analyse plus poussée n'aurait pu dissiper, il avait pu légitimement croire que le contrat conclu entre Asnières communication et CDA Productions, personnes privées, n'était pas soumis aux règles de mise en concurrence, la cour d'appel a privé sa décision de tout motif et a fait peser sur le demandeur une présomption irréfragable de culpabilité contraire à la présomption d'innocence " ;

Sur le deuxième moyen de cassation proposé par la société civile professionnelle Coutard-Munier pour M. A..., pris de la violation des articles 2, 3-1°, 104- II du code des marchés publics dans sa rédaction antérieure au décret du 7 septembre 2001, 111-3, 111-4, 111-5, 321-1 et suivants, 432-14 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale et du principe d'interprétation stricte de la loi pénale ;

" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. A... coupable de recel de biens provenant d'atteinte à la liberté d'accès ou à l'égalité des candidats dans les marchés publics, l'a condamné à une peine de quinze mois d'emprisonnement avec sursis et à 20 000 euros d'amende et sur l'action civile l'a condamné, solidairement avec M. X..., M. C... et Mme Z..., à payer à la ville d'Asnières-sur-Seine les sommes de 94 199 euros au titre du préjudice matériel et de 20 000 euros au titre du préjudice moral et à des frais irrépétibles ;

" aux motifs qu'il ressort de l'instruction que M. A... été introduit à la mairie d'Asnières par M. E..., dirigeant de la société CIRNOV attributaire d'un marché d'impression de la ville d'Asnières ; que tous deux étaient proches puisqu'en 1986 ils s'étaient associés pour créer la SARL CDA Productions dont l'activité était le conseil en communication et en publicité, société que M. A... transformera en EURL en 1988 après avoir racheté ses parts ; que M. E... avait par ailleurs employé M. C... au sein de CIRNOV pendant trois ou quatre mois en 1995 ; que M. E... a présenté M. A... à M. C... ; qu'en 1997, M. A... a travaillé en sous-traitance de la société CIRNOV pour la réalisation d'un quizz dans le cadre de la communication de la ville ; que M. E... et M. C... l'ont présenté à M. X... pour le remplacement de Mme Z... pendant son congé maternité ; que c'est dans ces circonstances et alors qu'il exerçait les fonctions de directeur de l'association Asnières communication que M. A... a élaboré le projet de festival des folklores qui devait être réalisé par sa société CDA Productions, l'a présenté et l'a fait adopter par M. C... et par M. X... ; que la société CDA Productions, constituée de sa seule personne, a donc été la bénéficiaire du contrat passé en violation des règles d'attribution des marchés publics ; que, compte tenu du montant du contrat, 1, 3 millions de francs (198 184 euros), de ses propres honoraires de 120 000 francs et de la marge bénéficiaire de la société 208 343 francs (31 761 euros), il a largement bénéficié du délit de favoritisme dont il ne pouvait ignorer le caractère frauduleux ; qu'en effet, à la place qui était la sienne au moment de l'élaboration du contrat et par les relations qu'il entretenait avec M. C..., il a eu connaissance des difficultés relatives au défaut de mise en concurrence puis du rejet explicite de la préfecture, ce qu'il reconnaît ; que fort de l'assurance qui lui avait été donnée qu'il obtiendrait cette prestation, il a accepté de contracter en des termes strictement identiques avec l'association Asnières communication qu'il avait lui-même dirigée et dont il affirme à plusieurs reprises qu'il la considérait comme un service technique de la mairie ; qu'il savait donc, d'une part que le contrat passé avec la ville l'avait été en violation des règles des marchés publics, d'autre part que le contrat identique passé avec une association qui n'était qu'un démembrement de la municipalité, violait les mêmes règles ;

" 1°) alors que, selon la loi pénale, qui est d'interprétation stricte, constitue le recel le fait de dissimuler, de détenir ou de transmettre une chose ou de faire office d'intermédiaire afin de la transmettre en sachant que cette chose provient d'un crime ou d'un délit ; que constitue également le recel le fait, en connaissance de cause de bénéficier, par tout moyen, du produit d'un crime ou d'un délit ; que l'attribution d'un marché à une entreprise, fut-elle jugée illégale, ne constitue ni une chose pouvant être détenue ni le produit d'un crime ou d'un délit ; qu'en déclarant, néanmoins, M. A... coupable de recel de favoritisme, pour avoir signé pour le compte de la société CDA Productions dont il était le dirigeant, un contrat de production et de cession du droit d'exploitation d'un spectacle avec l'association Asnières communications, en violation des règles d'attribution des marchés publics quand ce marché, à le supposer illégal, ne constituait ni une chose susceptible de détention ni le produit d'un crime ou d'un délit, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

" 2°) alors, subsidiairement, que le recel de favoritisme suppose l'accomplissement par son auteur, en connaissance de cause, d'un acte contraire aux dispositions du code des marchés publics ; que M. A... soutenait en cause d'appel qu'il n'avait jamais eu conscience de porter atteinte aux règles d'attribution des marchés publics, dès lors qu'il avait toujours négocié l'ensemble de ses productions, y compris avec des personnes morales de droit public, de gré à gré et que le spectacle en cause était une oeuvre de l'esprit, originale avec cession de droits d'exploitation, ce qui excluait, à son égard, toute mise en concurrence préalable avec d'autres entreprises de spectacle, conformément à l'article 104 II du code des marchés publics ; qu'en jugeant le contraire, au motif inopérant qu'il avait signé pour le compte de la société CDA productions, dont il était le dirigeant, un nouveau contrat de production et de cession du droit d'exploitation d'un spectacle avec l'association Asnières communications, en sachant que le précédent contrat avait été rejeté par la préfecture pour violation des règles d'attribution des marchés publics, sans répondre à ce chef péremptoire des conclusions, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

" et aux motifs qu'après négociations préalables portant sur le coût de la manifestation, le maire d'Asnières-sur-Seine, M. X... a signé le 26 février 1998 un premier contrat avec CDA Productions pour un montant de 1 300 000 francs TTC ; que, par lettre du 26 mars 1998, le préfet des Hauts-de-Seine a demandé au maire d'Asnières de résilier ce contrat, en relevant qu'il s'agissait de prestations de services et qu'il convenait, compte tenu du montant de l'opération, de satisfaire aux procédures prévues par le code des marchés publics ; que c'est ce qu'à fait M. X..., ce dont il a informé la préfecture le 1er avril 1998 ; que MM. X..., C... et A... soutiennent que le contrat litigieux ne relevait pas de la procédure de mise en concurrence mais de l'exception prévue par l'article 104- II du code alors en vigueur qui disposait " il peut être passé des marchés négociés sans mise en concurrence préalable lorsque l'exécution ne peut être réalisée que par un entrepreneur ou un fournisseur déterminé " ; que toutefois, cette analyse ne saurait être retenue par la cour pas plus qu'elle ne l'a été par le tribunal ; qu'en effet, nonobstant l'intitulé du contrat " contrat de production et de cession du droit d'exploitation d'un spectacle " aucun élément du dossier ne permet de retenir qu'il s'agissait d'une prestation ne pouvant être exécutée que par le seul intervenant choisi ; que le programme tel que décrit dans le contrat était constitué essentiellement d'un défilé, d'une parade de rues et d'un spectacle exécuté par deu cents artistes organisés en troupe folklorique de différents pays dont la France, sans autre précision que le fait que les groupes représentaient au minimum douze pays différents par même identifiés ; que les artistes, non professionnels, étaient donc interchangeables et leur organisation pour le défilé non déterminée, aucune chorégraphie particulière n'étant évoquée ; que s'agissant de la " féerie des eaux et le décor lumineux de cônes géants ", aucune indication n'était donnée dans le programme sur le caractère original du spectacle d'ailleurs sous-traité par CDA productions et qui était sans lien avec la présentation des troupes folkloriques ; qu'il apparaît donc, d'une part, que le contenu de la manifestation était modulable et scindable, d'autre part, qu'aucun élément ne caractérise l'impossibilité absolue de recourir pour tout ou partie de la manifestation qui doit être qualifiée d'évènementielle plus que de culturelle, à un autre intervenant ;

" 3°) alors qu'à titre également subsidiaire, selon les dispositions de l'article 104- II du code des marchés publics dans sa rédaction applicable aux moments des faits, les marchés négociés sont passés sans mise en concurrence préalable lorsque les besoins ne peuvent être satisfaits que par une prestation qui, en raison de nécessités techniques, d'investissement préalable important, d'installation spéciale ou de savoir-faire, ne peuvent être confiés qu'à un entrepreneur ou un fournisseur déterminé ; qu'en se bornant à affirmer, pour déclarer M. A... coupable de recel de favoritisme, qu'il ressortait des indications du contrat que le spectacle ne présentait pas un caractère original, que les artistes étaient interchangeables et qu'aucune chorégraphique particulière n'était invoquée, la cour d'appel qui s'est déterminée au regard des seules indications abstraites du programme, sans rechercher si le spectacle pouvait être qualifié d'oeuvre originale au regard des nécessités techniques, d'un investissement préalable important, d'une installation spéciale ou d'un savoir-faire, a ainsi privé sa décision sa décision de base légale ;

" 4°) alors aussi qu'aux termes de l'article 104- II-1° du code des marchés publics dans sa rédaction applicable au litige, les marchés négociés sont passés sans mise en concurrence préalable « lorsque les besoins ne peuvent être satisfaits que par une prestation nécessitant l'emploi (…) de droits exclusifs détenus par (…) un seul fournisseur » ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, qui n'a pas recherché comme elle y était invitée, si le contrat de production et de cession du droit d'exploitation d'un spectacle conclu entre l'association Asnières communication et la société CDA ne répondait pas aux conditions fixées par ce texte, de sorte que les règles de mise en concurrence du code des marchés publics n'étaient pas applicables, a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard des textes précités ;

" et aux motifs qu'il ressort des éléments du dossier que l'association Asnières communication est une association para-municipale transparente qui, dans le cas présent, s'est substituée à la mairie pour conclure un contrat qui restait soumis aux règles de passation des marchés publics ; que même si la notion d'association transparente n'a été consacrée par la jurisprudence que postérieurement aux faits, il appartient à la juridiction saisie d'une infraction dont un des éléments est fondé sur la régularité d'un acte passé par une association, d'apprécier la régularité dudit acte au regard de celle de l'association, sans qu'il soit nécessaire qu'une autre juridiction ait préalablement statué sur la validité de cette association ; qu'en l'espèce, et en dépit des mesures prises par M. X... lors de son accession à la mairie pour normaliser le fonctionnement des associations para-municipales, il apparaît qu'Asnières communication n'avait aucune autonomie de fonctionnement par rapport à la municipalité ; qu'en effet, son activité principale était la rédaction du journal Asnieres Info, vecteur de communication de la mairie ; que son financement était exclusivement assuré par des subventions municipales sans autre apport même minime ; qu'en outre, le budget communication de la ville d'Asnières (2. 502 KF) était quasi essentiellement dévolu à Asnières communication (2. 500 KF) ; que compte tenu de ces conditions de financement le fait que les personnes employées aient été des salariés de l'association est sans incidence ; que le rôle de la présidente de l'association Mme D..., choisi par M. C... en 1996, est décrit par M. H..., directeur de cabinet de M. X..., et Mme I..., secrétaire générale adjointe de la mairie (entre autres), et par l'intéressée elle-même comme purement honorifique ; qu'il n'est versé au débat aucun exemple de décision qu'elle ait pu prendre, à l'exception de la signature du contrat litigieux dont elle ne savait rien ; que la direction de l'association était assurée depuis fin 1995 par Mme Z... qui soutient qu'elle n'avait que peu d'initiative, se définissant comme une simple exécutante des décisions du maire et de son premier adjoint qui l'avaient recrutée ; que si M. X... dans sa première audition par le magistrat instructeur indique que M. C... et Mme Z... dirigeaient tous les deux l'association, les responsables administratifs de la mairie déjà cités indiquent quant à eux que les décisions étaient de fait prises par M. C..., ancien président de l'association qui, ayant la communication dans le champ de sa délégation " gardait la haute main sur l'association " ; que M. J... expert-comptable de l'association, indique quant à lui qu'il était en contact avec Mme Z... et M. C... en précisant que " ce dernier agissait habilement pour ne prendre aucune décision directement mais que son bras armé était Mme Y..., épouse Z... " ; qu'aux yeux des tiers, aucune distinction n'apparaissait entre l'association et la municipalité ; que les propos de M. A... qui a soumis le même contrat successivement à la mairie et à l'association Asnières communication, sont à cet égard éclairants ; qu'il a déclaré devant le juge d'instruction qu'il ne faisait pas de distinction entre ces deux entités : " pour moi l'association Asnières Communication était le service technique de la délégation de M. C... en matière de communication ; l'association était implantée rue Concorde dans un immeuble qui était occupé par les différents services techniques de la ville … je n'ai jamais fait de distinction entre l'association Asnières communication et la mairie " ; qu'il a renouvelé ces propos devant la cour ; que Mme B..., commissaire aux comptes, a refusé de certifier les comptes de l'exercice 1997 en raison de l'incertitude sur la nature des liens juridique entre l'association et la ville d'Asnières ainsi que sur les modalités de dépense des fonds constitués exclusivement de subventions de la mairie ; qu'il résulte clairement de tous ces éléments que le statut associatif d'Asnières communication n'était qu'une façade du service de communication de la mairie, et qu'à l'époque des faits elle ne jouissait en réalité d'aucune autonomie financière ou de décision ; que cette absence d'autonomie et en outre démontrée en l'espèce par le fait qu'aucune modification n'a été apportée au contenu du contrat dont la négociation a échappé entièrement à la présidente de l'association à qui il n'a été soumis que pour signature sans la moindre explication ; que dans ces conditions, le fait de faire endosser par cette association " transparente " le contrat passé avec CDA productions pour une commande publique de la ville d'Asnières, ne permettait pas à la ville de se dispenser de respecter les procédures de mises en concurrence ;

" 5°) alors qu'à titre également subsidiaire, aux termes de l'article 2 du code des marchés publics, seules les personnes publiques ou leur mandataire sont soumis audit code ; que, selon l'article L. 432-14 du code pénal, constitue un délit de favoritisme le fait par une personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public ou investie d'un mandat électif public ou exerçant les fonctions de représentant, administrateur ou agent de l'Etat, des collectivités territoriales, des établissements publics, des sociétés d'économie mixte d'intérêt national chargées d'une mission de service public et des sociétés d'économie mixte locales ou par toute personne agissant pour le compte de l'une de celles susmentionnées de procurer ou de tenter de procurer à autrui un avantage injustifié par un acte contraire aux dispositions législatives ou règlementaires ayant pour objet de garantir la liberté d'accès et l'égalité des candidats dans les marchés publics et les délégations de service public ; que la loi pénale étant d'interprétation stricte, l'infraction ne saurait être étendue à une personne morale de droit privé, fût-elle qualifiée d'association para-municipale ; qu'en déclarant, néanmoins, M. A... coupable de recel de favoritisme, pour avoir signé, pour le compte de la société CDA qu'il dirigeait, un contrat de production et de cession du droit d'exploitation d'un spectacle avec l'association Asnières communication, quand une association de droit privé, si elle n'est pas mandataire de la personne publique ou chargée d'une délégation de service public, n'est pas soumise au code des marchés publics et ne fait pas partie des personnes morales susceptibles de commettre le délit de favoritisme, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

" 6°) alors qu'en tout état de cause, si le juge répressif peut se prononcer sur la légalité d'un acte administratif dont dépend les poursuites, seul le juge administratif est compétent pour qualifier une association de « transparente » s'il constate qu'elle a été créée à l'initiative d'une personne publique qui en contrôle l'organisation et le fonctionnement et lui procure ses ressources, et soumettre ses contrats aux règles des marchés publics s'ils sont conclus pour l'exécution d'une mission de service public ; que, pour déclarer M. A... coupable de recel de favoritisme, la cour d'appel qui a qualifié l'association Asnières communication d'association transparente, au prétexte qu'elle ne disposait d'aucune autonomie financière et de gestion et qui en a conclu, en cet état, qu'elle était soumise aux règles de passation des marchés publics, a excédé ses pouvoirs et a violé les textes susvisés ;

7) alors que le principe de la légalité des délits et des peines, tel qu'il résulte de l'article 7 de la Convention européenne des droits de l'homme fait obstacle à ce qu'une infraction, par son imprécision, puisse servir de fondement aux poursuites car le droit pénal doit définir en des termes clairs et précis les infractions pour exclure l'arbitraire et permettre au prévenu de connaître exactement, à partir du libellé de la disposition pertinente, la nature pénale de l'acte qu'il commet ; que l'infraction de recel de favoritisme suppose un acte contraire aux dispositions législatives ou réglementaires ayant pour objet de garantir la liberté d'accès et l'égalité des candidats dans les marchés publics et les délégations de service public ; qu'il s'ensuit que ne saurait, en raison de son imprécision, servir de fondement à une poursuite du chef d'atteinte à la liberté d'accès et à l'égalité des candidats dans les marchés publics, l'article 432-14 du code pénal qui ne définit pas les manquements qu'il réprime et n'énumère pas les dispositions législatives et réglementaires les prévoyant ; qu'en se fondant sur cette disposition pour condamner le prévenu, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision conformément aux dispositions conventionnelles susvisées ;

8) alors que, conformément aux dispositions de la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d'association, la suppression de la personnalité juridique d'une association ne peut résulter que de sa dissolution qui ne peut être prononcée que par le tribunal de grande instance ; que pour déclarer M. A... coupable du délit de recel de favoritisme, la cour d'appel a énoncé que l'association Asnières communication était une association transparente, ce dont il se déduit la suppression de la personnalité juridique de cette association ; qu'en l'absence de toute procédure de dissolution de ladite association, la cour d'appel ne pouvait pas considérer l'absence de personnalité juridique de cette association ; qu'en décidant de la culpabilité de M. A... aux motifs de la suppression de la personnalité juridique de l'association Asnières communication, la cour d'appel a méconnu les dispositions susvisées ;

Les moyens étant réunis ;

Attendu que, pour déclarer MM. X... et A... coupables respectivement de favoritisme et de recel, l'arrêt relève qu'il ne résulte d'aucun élément du dossier que la prestation de services prévue au contrat, à savoir un défilé, une parade de rues et un spectacle exécuté par deux cents artistes, organisés en troupes folkloriques de différents pays, ne pouvait être exécutée que par le seul intervenant choisi, les artistes non professionnels étant interchangeables et leur organisation pour le défilé indéterminée ; que les juges en déduisent que la prestation envisagée relevait, par sa nature et son montant, des procédures de mise en concurrence et non de l'article 104- II du code des marchés publics alors en vigueur ; qu'ils ajoutent que le second contrat, strictement identique au premier dans son contenu et son montant, conclu par l'association transparente Asnières communication, dépourvue de toute autonomie financière, de fonctionnement ou de décision, qui s'est substituée à la municipalité, demeurait en conséquence soumis aux règles du code des marchés publics ; que les juges énoncent également que M. X... a pleinement adhéré à ce que lui proposait M. C... et que c'est sciemment que ces deux prévenus ont utilisé l'association précitée afin d'échapper aux règles de mise en concurrence dont ils savaient, après le rejet de la préfecture, qu'elles s'imposaient pour ce contrat de prestation de services ; qu'ils relèvent, enfin, que M. A..., dont la société a été bénéficiaire dudit contrat, avait connaissance de la violation des règles du code des marchés publics ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations, la cour d'appel, qui a exclu, à bon droit, l'application de l'article 104- II du code des marchés publics alors applicable, répondu aux chefs péremptoires des conclusions des parties et caractérisé sans insuffisance ni contradiction en tous leurs éléments, tant matériels qu'intentionnel, les délits de favoritisme et recel dont elle a déclaré les prévenus coupables, a justifié sa décision, sans méconnaître la présomption d'innocence, ni les dispositions conventionnelles invoquées aux moyens ni celles de la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d'association ;

Qu'en effet, d'une part, lorsqu'une association est créée à l'initiative d'une personne publique qui en contrôle l'organisation et le fonctionnement et lui procure l'essentiel de ses ressources, le juge pénal est compétent pour qualifier cette personne privée d'association " transparente " et en déduire que les contrats qu'elle conclut pour l'exécution de la mission qui lui est confiée sont des contrats administratifs soumis au code des marchés publics ; d'autre part, le délit de recel de favoritisme est caractérisé à l'égard du prévenu qui bénéficie, en connaissance de cause, du produit de l'attribution irrégulière d'un marché ;

D'où il suit que les moyens ne peuvent être admis ;

Sur le troisième moyen de cassation proposé par la société civile professionnelle Coutard-Munier-Appaire pour M. A..., pris de la violation des articles 6 § 1 et 6 § 3 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 111-3, 111-4, 111-5, 321-1 et suivants, 321-1, 321-3, 321-4, 321-9, 321-10, 432-14, 432-17-2, 441-1 du code pénal, 2, 591 et 593 du code de procédure pénale, les articles 1 et 6 de la loi du 1er juillet 1901, ensemble, violation des droits de la défense, défaut de motif, manque de base légale, excès de pouvoirs et dénaturation ;

" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. A... coupable de recel de biens provenant d'atteinte à la liberté d'accès ou à l'égalité des candidats dans les marchés publics, l'a condamné à une peine de 15 mois d'emprisonnement avec sursis et à 20 000 euros d'amende et sur l'action civile l'a condamné, solidairement avec MM. X..., C... et Mme Z..., à payer à la ville d'Asnières-sur-Seine les sommes de 94 199 euros au titre du préjudice matériel et de 20 000 euros au titre du préjudice moral et à des frais irrépétibles ;

" aux motifs que, sur les demandes, il est acquis que la ville d'Asnières-sur-Seine a financé en sa totalité la prestation de CDA productions en votant le 17 juillet 1998 le versement d'une subvention exceptionnelle à l'association Asnières communication pour le montant exact du contrat conclu (1, 3 millions de francs soit 198 184 euros) ; que du fait de l'attribution frauduleuse du marché à CDA productions sans mise en concurrence, la ville d'Asnières-sur-Seine a été privée de la possibilité de choix du prestataire le moins ou le mieux disant, alors que par ailleurs le coût du festival apparaît surévalué par rapport aux prestations réalisées ; que ce préjudice matériel qui découle directement des faits dont les prévenus ont été déclarés coupables doit être indemnisé ; qu'il correspond au surcoût imposé à la ville par la fraude ; que les éléments du surcoût sont constitués par les prestations facturées qui, soit n'avaient pas lieu d'être s'il y avait mise en concurrence, soit n'étaient pas liées à une prestation réelle ; qu'à ce titre, il convient de déduire du sous-total avant marge présenté par M. A... (1 091 656 francs) :
- la facture de « commission d'apport d'affaire » présentée par la société DGA (M. E...) : 289 440 francs (44 125 euros),
- la facture émise par la société BB Six au titre de la réalisation d'un film qui n'a pas été monté : 50 094 francs (9 009 euros),
- la facture d'honoraires de M. A... à titre personnel pour une prestation qui n'est pas distincte de celle de la société CDA Productions : 120 000 francs (18 294 euros),
- le fonds de caisse injustifié de CDA Productions : 39 000 francs (5 946 euros), ce qui aboutit à une somme totale de 593 122 francs (90 420 euros) ; qu'en appliquant à ce montant un taux de marge de 15 %, taux habituellement pratiqué pour ce type de marché comme l'explique sans être utilement contestée la partie civile, la manifestation litigieuse n'aurait pas dû dépasser le montant de 682 090 francs (103 985 euros) ; que le surcoût imposé à la ville s'élève donc à la somme de (1 300 000 – 682 090 = 617 910 francs) soit 94 199 euros ; que l'élément de comparaison produit par la commune correspondant à une manifestation équivalente organisée pour la fête de la musique de 2008 pour un montant de 82 076, 51 euros (535 387 francs), ne saurait être retenu comme élément de calcul dans la mesure où la partie civile elle-même ne remet en cause aucun autre élément de la facturation litigieuse que ceux qui ont été retenus ci-dessus ; que la cour réformera le jugement sur le montant du préjudice matériel ; qu'elle le confirmera en revanche sur la somme accordée à la partie civile au titre du préjudice moral résultant de l'atteinte portée à l'image de la ville d'Asnières-sur-Seine auprès du public qui a été justement évalué par le tribunal à la somme de 20 000 euros ; qu'il serait inéquitable de laisser à la ville d'Asnières-sur-Seine la charge des frais exposés pour faire valoir ses droits en première instance et en appel ; que chacun des prévenus sera condamné à verser à la ville d'Asnières-sur-Seine la somme de 4 000 euros au titre de l'article 475-1 du code de procédure pénale ;

" 1°) alors que l'action civile appartient à tous ceux qui ont personnellement souffert du dommage directement causé par l'infraction ; qu'en l'espèce, dès lors qu'il résulte des propres constatations de la cour d'appel que la ville d'Asnières-sur-Seine a voté le 17 juillet 1998 une subvention exceptionnelle à l'association Asnières communication, il s'en déduisait que le préjudice qu'elle invoquait à ce titre découlait du vote de cette subvention et non directement du recel de fonds provenant du délit d'atteinte à la liberté et l'égalité d'accès aux marchés publics reproché à M. A... peu important, par ailleurs, que la subvention corresponde à la totalité de la prestation de la CDA Production ; qu'en faisant droit aux demandes de la ville d'Asnières-sur-Seine et en condamnant M. A... à lui payer différentes sommes à titre de préjudice matériel et moral, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

" 2°) alors qu'une association, fut-elle qualifiée de para-municipale transparente, sans autonomie de gestion, reste une personne morale avec une personnalité juridique distincte de la commune à laquelle elle est rattachée ; qu'en l'espèce, il est constant que le contrat litigieux a été passé entre l'association Asnières communication et la société CDA Productions, de sorte que le préjudice matériel découlant du surcoût des prestations facturées avait été subi éventuellement par cette seule association qui en a payé les prestations ; qu'en jugeant bien-fondées les demandes de la ville d'Asnières-sur-Seine et en condamnant M. A... à payer à la commune différentes sommes à titre de préjudice matériel et moral, au prétexte qu'elle a subventionné l'association pour le montant du contrat litigieux, la cour d'appel a violé les articles susvisés ;

" 3°) alors que, subsidiairement et en tout état de cause, le fait de facturer des prestations qui ne sont pas liées à une prestation réelle est constitutif du délit de faux et d'usage de faux ; qu'en condamnant solidairement M. A... à payer à la commune d'Asnières certaines sommes en réparation de son préjudice matériel lié au surcoût constitué par des prestations facturées qui n'étaient pas liées à une prestation réelle, la cour d'appel a entendu réparer un préjudice découlant d'un délit de faux, infraction qui n'était pas reprochée à M. A... ;

" 4°) alors qu'en tout état de cause, en condamnant solidairement M. A... à réparer le préjudice matériel de la ville d'Asnières-sur-Seine, pour des éléments de surcoût constitués par les prestations facturées « qui soit n'avaient pas lieu d'être s'il y avait eu mise en concurrence, soit n'étaient pas liées à une prestation réelle », la cour d'appel n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle sur les sommes découlant directement et exclusivement du délit de recel de favoritisme reproché à M. A... " ;

Attendu qu'en évaluant, comme elle l'a fait, la réparation du préjudice résultant pour la ville d'Asnières-sur-Seine des infractions poursuivies, la cour d'appel n'a fait qu'user de son pouvoir d'apprécier souverainement, dans la limite des conclusions des parties, l'indemnité propre à réparer le dommage né de l'infraction ;

D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;

Sur le second moyen de cassation proposé par Me Copper-Royer pour M. X..., pris de la violation de l'article 7 de la Convention européenne des droits de l'homme, de l'article 432-14 du code pénal, des articles 2, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

" en ce que l'arrêt attaqué a condamné M. X... solidairement avec ses coprévenus à verser à la partie civile la somme de 94 199 euros au titre du préjudice matériel subi par celle-ci et de 20 000 euros au titre du préjudice moral.

" alors que l'agent d'un service public n'est personnellement responsable des conséquences dommageables de l'acte délictueux qu'il a commis que si celui-ci constitue une faute détachable de ses fonctions ; qu'en condamnant M. X... à verser à la partie civile des dommages-intérêts sans rechercher, même d'office, si la faute qui lui était imputée présentait le caractère d'une faute personnelle détachable du service, la cour d'appel a violé les textes et principe susvisés " ;

Attendu qu'après avoir déclaré M. X... coupable de favoritisme, l'arrêt le condamne à verser des dommages-intérêts à la ville d'Asnières-sur-Seine ;

Attendu qu'en cet état, et dès lors qu'il résulte des constatations de l'arrêt que les faits commis par le prévenu présentaient le caractère d'une faute personnelle détachable du service, la cour d'appel a justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

Par ces motifs :

I-Sur le pourvoi de Mme Y... formé le 28 janvier 2011 :

Le DÉCLARE IRRECEVABLE ;

II-Sur les autres pourvois :

Les REJETTE.