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Décisions

Cass. com., 30 mai 2018, n° 16-23.482

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Mouillard

Avocats :

SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, SCP Thouin-Palat et Boucard

Aix-en-Provence, du 19 mai 2016

19 mai 2016

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 19 mai 2016), que la SARL Société nouvelles technologies électriques et de chauffage (la SONTEC) avait pour associé unique et pour gérant José G... ; que le 10 juillet 2009, celui-ci a décidé la distribution de dividendes à son profit d'un montant de 70 000 euros, prélevée sur le poste « réserves » et versée en deux fois, 35 000 euros le 31 juillet 2009 et le solde, soit 35 000 euros, le 31 mars 2010 ; que le 20 juillet 2009, José G... a cédé toutes ses parts à M. B..., l'acte prévoyant que le solde des dividendes ne serait payé qu'en proportion du montant des capitaux propres au 31 décembre 2009 dépassant 65 000 euros ; qu'estimant que le montant des capitaux propres à cette date était supérieur à 65 000 euros, José G... a assigné la SONTEC en paiement du solde de la distribution des dividendes ; que José G... étant décédé, Mmes Jessy G...-H... , Laura G... et I... L... (les consorts G... ), ses héritières, sont intervenues à l'instance ;

Attendu que les consorts G... font grief à l'arrêt de juger que le montant des capitaux propres de la SONTEC était inférieur à 65 000 euros au 31 décembre 2009 et de rejeter leurs demandes alors, selon le moyen :

1°/ qu'il résulte de l'article R. 123-191 du code de commerce que les capitaux propres correspondent à la somme algébrique des apports, des écarts de réévaluation, des bénéfices autres que ceux pour lesquels une décision de distribution est intervenue, des pertes, des subventions d'investissement et des provisions réglementées ; qu'un dividende distribuable sur réserve dont l'attribution et le montant sont conditionnés à l'atteinte d'un certain niveau de capitaux propres ne peut venir en déduction dans le calcul du poste relatif aux capitaux propres ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que José G... s'était vu attribuer un dividende de 35 000 euros maximum distribuable sur les réserves, dont le versement était conditionné au fait que les capitaux propres de la société atteignent 65 000 euros au 31 décembre 2009 et dont le montant était, une fois ce seuil atteint, fonction du montant des capitaux propres à cette même date ; qu'en jugeant que c'est à raison que la société SONTEC avait, pour calculer le montant des capitaux propres de la société au 31 décembre 2009, déduit de ceux-ci la somme de 35 000 euros correspondant au dividende maximum dont pouvait éventuellement bénéficier José G... , la cour d'appel a violé les articles R. 123-190 et R. 123-191 du code de commerce, ensemble l'article 1134 du code civil dans sa rédaction applicable à la cause ;

2°/ qu'en jugeant que la « dette » de la SONTEC à l'égard de José G... n'était pas conditionnelle et qu'elle était certaine à la date de la délibération ayant décidé l'attribution d'un dividende, cependant qu'il résultait de ses propres constatations que l'attribution de ce dividende, certes votée en juillet 2009, était conditionnée au fait que les capitaux propres de la SONTEC atteignent la somme de 65 000 euros au 31 décembre 2009 et que le montant de ce dividende, une fois ce seuil atteint, était fonction du niveau de capitaux propres, ce dont il résultait que le dividende en cause était incertain et aléatoire, la cour d'appel a violé les articles R. 123-190, 123-191, R. 123-182 et R. 123-183, ensemble l'article 1134 du code civil dans sa rédaction applicable à la cause ;

3°/ qu'un passif qui correspond à une obligation éventuelle dont le montant ne peut être évalué avec une fiabilité suffisante ne peut être comptabilisé au bilan et doit figurer pour information en annexe de celui-ci ; qu'ayant constaté que José G... s'était vu attribuer au mois de juillet 2009 un dividende de 35 000 euros à valoir sur les réserves, que son versement était conditionné au fait que les capitaux propres de la société atteigne 65 000 euros au 31 décembre 2009, et qu'une fois ce seuil franchi, son montant était fonction du montant des capitaux propres à cette même date, il en résultait que cette « dette » éventuelle devait uniquement être inscrite en annexe du bilan ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les articles R. 123-190 et R. 123-191 du code de commerce, ensemble l'article 1134 du code civil dans sa rédaction applicable à la cause ;

4°/ qu'il résulte des articles R. 123-182, R. 123-183 et R. 123-190 du code de commerce que les postes « Capitaux propres » et « provisions » constituent deux postes distincts devant apparaître au passif d'un bilan ; qu'il s'ensuit qu'une dette comptabilisée en tant que provision ne peut jamais venir en déduction des capitaux propres et doit faire l'objet d'un article distinct ; qu'en jugeant dès lors que, à supposer même que la dette de 35 000 euros soit aléatoire, « une provision pour charge aurait dû être comptabilisée pour tenir compte du passif créé par la décision et aurait affecté un compte de passif et donc le montant des capitaux propres », cependant que comptabilisée en tant que provision pour charge la dette éventuelle de la SONTEC à l'égard de José G... ne pouvait venir en déduction des capitaux propres dont le montant conditionnait à la fois l'attribution et le montant du dividende sur réserves alloué à José G... , la cour d'appel a violé les articles R. 123-190, R. 123-182 et R. 123-183 du code de commerce ;

Mais attendu qu'il résulte des articles R. 123-190, R. 123-182 et R. 123-183 du code de commerce que la distribution par prélèvement sur les réserves doit être enregistrée à la date à laquelle elle est décidée, sans qu'il y ait lieu de tenir compte de son règlement effectif ; que la cour d'appel ayant statué en ce sens, le moyen ne peut être accueilli ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.