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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 9, 26 février 2015, n° 14/16934

PARIS

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Défendeur :

FFKB (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Franchi

Conseillers :

Mme Picard, Mme Rossi

Avocats :

Me Tournillon, Me Bernheim

T. com. Créteil, 1re ch., du 11 mars 201…

11 mars 2014

La société FFKB a été créée le 15 janvier 2008 pour exploiter un fonds de commerce de restauration à l'enseigne Wonder Food. Les 200 parts sociales ont été souscrites à parts égales entre les trois fondateurs. Le 5 mars 2009, Monsieur Aziz C. et son épouse, Madame Zoulikha C. ont acquis chacun 24 parts sociales des fondateurs. Le même jour dans le cadre d'un pacte d'actionnaires entre les 5 associés, les époux C. ont apporté en trésorerie 65.000 € à la société FFKB, sous forme de prêt, remboursable en cas de cession du fonds de commerce.

Les époux C. ont demandé à chacun des trois autres associés ainsi qu'à la société le remboursement du prêt estimant que la société FFKB ne leur donnait aucune information sur le fonctionnement de la société. Leurs mises en demeure étant restées sans réponse, ils ont fait assigner la société FFKB en remboursement du prêt.

Par jugement réputé contradictoire en date du 11 mars 2014, le tribunal de commerce de Créteil a débouté les époux C. de leur demande de remboursement.

Le tribunal a relevé que le pacte d'actionnaire précisait dans son article 6 que la société FFKB devra rembourser immédiatement le prêt en cas de cession du fonds de commerce et qu'en l'espèce, en l'absence d'autre convention, seule la cession du fonds permettait le remboursement du prêt. Aucune pièce n'étant versée aux débats relative à une cession du fonds leur demande était rejetée.

Les époux C. ont interjeté appel de cette décision le 5 août 2014.

***

Dans leurs dernières conclusions transmises par voie électronique le 29 septembre 2014, ils demandent à la cour d'appel de :

- Infirmer totalement le jugement frappé d'appel rendu par le tribunal de Commerce de Créteil

le 11 mars 2014.

- Dire recevables et bien fondés Monsieur Aziz C. et Madame Zoulikha K. épouse C. en leur demande dirigée à l'encontre de la Sarl FFKB exerçant sous l'enseigne Wonder Food.

En conséquence,

- Condamner la Société FFKB à restituer à Monsieur Aziz C. et Madame Z. Cacher épouse C. la somme de 65.000 euros majorée des intérêts au taux légal à compter du 28 mars 2011.

- Condamner la Société FFKB à payer à Monsieur Aziz C. et Madame Z. Cacher épouse C. la somme de 10 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

***

La déclaration d'appel et les conclusions des appelants ont été régulièrement signifiés par voie d'huissiers à la société FFKB le 2 octobre 2014. La société FFKB n'a pas constitué avocat.

SUR CE,

Sur l'annulation du contrat de prêt

Les époux C. exposent qu'ils poursuivent l'annulation du contrat de prêt et donc le remboursement des 65.000 euros.

Ils font valoir que la clause contenue dans l'article 6 du pacte d'actionnaires stipule qu'ils ont apporté la somme de 65.000 euros que la société devra leur rembourser en cas de cession de son fonds de commerce sauf convention ultérieure avec l'ensemble des sociétaires. Cette clause est assortie d'une condition et non d'un terme comme l'a retenu le tribunal de commerce, et elle subordonne le remboursement du prêt à la cession du fonds de commerce sans que les emprunteurs aient pris l'engagement de le céder. La survenance de cet événement est incertaine et la clause, purement potestative, est prohibée en vertu de l'article 1174 du code civil.

Aux termes du Pacte d'actionnaires de la Sarl FFKB les époux C. auront apporté la somme de 65.000 euros, que la SARL FFKB devra leur rembourser immédiatement en cas de cession de son fonds de commerce, sauf convention ultérieure avec l'ensemble des sociétaires. Ces apports constituent un prêt dont le débiteur est la SARL FFKB'.

La cour constate en premier lieu que ce prêt s'analyse en un compte courant d'associé ainsi que les parties l'ont d'ailleurs acté dans leurs échanges de correspondance.

La cour rappelle qu'en principe un compte courant d'associé est remboursable à tout moment sauf convention contraire des parties.

En l'espèce, les parties ont convenu que le compte courant devait être immédiatement remboursé en cas de cession du fonds de commerce.

La cour considère qu'il ne peut résulter de la rédaction maladroite de cette clause que le compte courant des époux C. est bloqué jusqu'à la survenance d'un terme qui serait constitué par la vente du fonds de commerce, une dérogation au principe de remboursement immédiat du compte courant devant être clairement exprimée, ce qui n'est pas le cas en l'espèce.

Cette clause constitue un engagement de la société FFKB de rembourser le compte courant dès la survenance de l'événement mentionné et non un engagement des époux C. de laisser la somme de 65.000 euros bloquée dans la société jusqu'à la vente du fonds de commerce.

Aucune pièce n'est produite qui indiquerait qu'une autre convention aurait été agréée par les parties relative à ce compte courant ou qu'un remboursement de ce compte courant aurait des conséquences sur la pérennité de la société.

Il en résulte que la société FFKB est dans l'obligation de rembourser aux époux C. le solde de leur compte courant puisqu'ils en ont fait la demande.

Il convient en conséquence d'infirmer le jugement entrepris.

Sur l'article 700 du Code de procédure civile

Les époux C. sollicitent le paiement de la somme de 10.000 euros à ce titre.

Il serait inéquitable de leur laisser la charge des frais qu'ils ont engagés et qui ne sont pas compris dans les dépens.

Il convient en conséquence de leur allouer la somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

Infirme le jugement rendu le 11 mars 2014 par le tribunal de commerce de Créteil,

Statuant à nouveau,

Condamne la société FFKB à rembourser à Monsieur Aziz C. et Madame Zoulikha K. épouse C. la somme de 65.000 euros représentant le montant de leur compte courant,

Condamne la société FFKB à payer à Monsieur Aziz C. et Madame Zoulikha K. épouse C. la somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

Condamne la société FFKB aux dépens qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.