Cass. com., 9 décembre 1997, n° 95-14.115
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Bézard
Rapporteur :
Mme Aubert
Avocat général :
M. Lafortune
Avocats :
SCP Rouvière et Boutet, Me Bouthors
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux 10 avril 1995) que le Crédit d'équipement des petites et moyennes entreprises (CEPME) a consenti un prêt de 530 000 francs remboursable en huit ans à la SARL Sermi-Aero que M. et Mme Z... d'une part, M. et Mme Y... d'autre part ont cautionné solidairement;
que la SARL a été transformée en société anonyme prenant la dénomination Sermaero et que rencontrant des difficultés elle a obtenu un aménagement du prêt;
qu'à la suite de sa mise en redressement judiciaire le 17 octobre 1989 puis en liquidation judiciaire le 6 février 1990, le CEPME a assigné les cautions solidaires en exécution de leurs obligations;
que débouté de sa demande en première instance, il a formé un appel déclaré recevable par une ordonnance du conseiller de la mise en état;
que la cour d'appel après avoir par arrêt du 13 juillet 1993, écarté la fin de non-recevoir et renvoyé l'affaire à la mise en état a statué au fond ;
Sur le premier moyen :
Attendu que M. et Mme Z... font grief à l'arrêt du 13 juillet 1993 d'avoir dit que la cour d'appel n'a pas qualité pour infirmer l'ordonnance du conseiller de la mise en état du 9 janvier 1992, ayant constaté la recevabilité de l'appel du CEPME à l'encontre des époux Z... alors, selon le pourvoi, que les ordonnances du conseiller de la mise en état n'ont pas au principal l'autorité de la chose jugée et que doit être cassé l'arrêt qui, pour refuser d'examiner la fin de non-recevoir tirée de la tardiveté d'un appel, énonce que l'appel avait été déclaré recevable par ordonnance du conseiller de la mise en état, insusceptible d'être critiquée devant la formation collégiale de la cour d'appel expressément saisie de la question, d'où une violation des articles 125, 538 et suivants, 775, 910 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu qu'il résulte de la déclaration de pourvoi du 25 avril 1995, que les époux Z... n'ont pas attaqué l'arrêt du 13 juillet 1993;
que le moyen n'est donc pas recevable ;
Sur le second moyen, pris en ses deux premières branches :
Attendu que M. et Mme Z... font grief à l'arrêt du 10 avril 1995 de les avoir condamnés en leur qualité de cautions solidaires à s'acquitter du montant du prêt demeuré impayé alors, selon le pourvoi, d'une part, qu'aux termes de l'article 2015 du Code civil, le cautionnement ne peut être étendu au delà des limites dans lesquelles il a été contracté ; que, dès lors, la cour d'appel ne pouvait, sans violer ce texte condamner les époux Z..., qui avaient donné leur caution pour le remboursement d'un prêt consenti à la SARL Sermiaero dont ils étaient associés, au paiement du solde dû sur ce même prêt repris à des conditions différentes par la société anonyme Sermaero dont ils n'étaient pas associés;
et, alors, d'autre part, que même si elles ne se sont pas traduites par un nouveau contrat de prêt, les modifications intervenues dans le montant du prêt et les modalités d'amortissement du capital valaient novation déchargeant les époux Z... de leurs obligations de caution;
que, dès lors, la cour d'appel ne pouvait faire droit à la demande du CEPME et condamner les époux Z..., en qualité de caution solidaire, sans répondre à leurs conclusions sur ce point ;
Mais attendu que la cour d'appel a relevé que la transformation de la SARL Sermi-Aero en une société anonyme dénommée Sermaero n'avait pas entraîné la création d'une personne morale nouvelle, que la perte de la qualité d'associé était sans incidence sur le cautionnement et que les modifications apportées au contrat de prêt consistaient en un allongement de trois mois de la durée du prêt et en l'élaboration d'un nouveau tableau d'amortissement prenant en compte les échéances impayées;
qu'elle a déduit, à bon droit, de ces constatations et appréciations que le cautionnement n'avait pas été étendu au delà des limites dans lesquelles il avait été contracté et que ni le changement de forme de la société débitrice principale, ni l'aménagement du prêt n'avaient eu un effet novatoire;
que le moyen n'est fondé dans aucune de ses deux premières branches ;
Mais sur le moyen, pris en sa troisième branche :
Vu l'article 55 de la loi du 25 janvier 1985 ;
Attendu que l'arrêt condamne solidairement les époux Y... et les époux Z... à payer au CEPME la somme de 405 918,70 francs outre les intérêts conventionnels et de retard depuis le 30 juillet 1990 ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que la caution n'était pas tenue des intérêts de la dette du débiteur au-delà de la date du jugement prononçant le redressement judiciaire de celui-ci, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement dans sa disposition condamnant les époux Z... au paiement des intérêts conventionnels et de retard depuis le 30 juillet 1990, l'arrêt rendu le 10 avril 1995, entre les parties, par la cour d'appel de Bordeaux;
remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Agen.