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Décisions

CA Dijon, 2e ch. civ., 14 août 2014, n° 13/01184

DIJON

Arrêt

Confirmation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Ott

Conseillers :

M. Molé, M. Leblanc

Avocats :

Me Soulard, Me Stouls, Me Lambert

T. com. Dijon, du 5 juin 2013, n° 12/104…

5 juin 2013

La SARL METALIC, dont M. A est le gérant,  - société à laquelle se substituera la SAS Ehrel Hydris Elévation, constituée pour l'occasion en 2009 par la SARL METALIC, associée unique, et dirigée par M. A - a repris le fonds de commerce de la société Ehrel Hydris Industrie suite à une ordonnance en date du 6 novembre 2009 du juge commissaire désigné dans la procédure de liquidation judiciaire de la société Ehrel Hydris Industrie.

Mme B a été nommée présidente de la SAS Ehrel Hydris Elévation et en a démissionné au 1er mars 2011, M. A étant alors nommé président de la société.

La SAS Ehrel Hydris Elévation a été placée en redressement judiciaire le 30 août 2011 sur assignation délivrée par l'URSAFF, procédure convertie le 15 novembre 2011 en liquidation judiciaire. Me Philippe Maître a été désigné liquidateur.

Le passif déclaré dans cette procédure de liquidation judiciaire représente un total de 4 160 707,92 €, tandis que les actifs réalisés représentent une somme de 357 813,65 €.

Par actes en date respectivement du 29 février 2012 et du 7 mars 2012, Me Philippe Maître ès-qualité de liquidateur de la SAS Ehrel Hydris Elévation a assigné Mme B et M. A, sur le fondement de l'article L. 651-2 du Code de Commerce, en comblement de l'insuffisance d'actif et en interdiction de gérer, à raison des fautes de gestion commises notamment par M. A comme dirigeant de droit, mais également déjà comme dirigeant de fait avant sa nomination comme président de la société à effet au 1er mars 2011.

C'est dans ces conditions que Me Philippe Maître, ès-qualité de liquidateur de la SAS Ehrel Hydris Elévation, a sollicité sur requête et obtenu du président du tribunal de commerce de Dijon en juillet 2012 l'autorisation à titre conservatoire d'inscrire des hypothèques judiciaires sur trois biens immobiliers appartenant à M. A et ce en application des nouvelles dispositions de l'article L. 631-10-1 du Code de Commerce issues de la loi du 12 mars 2012.

Par acte en date du 30 octobre 2012, M. A a assigné Me Philippe Maître, en sa qualité de liquidateur judiciaire de la SAS Ehrel Hydris Elévation, devant le président du tribunal de commerce de Dijon aux fins de rétractation des dites ordonnances ayant autorisé l'inscription d'hypothèques provisoires sur ses trois biens situés à Pollionay (69290), Courzieu (69690) et à Pouilly le Monial (69400), aux fins de constat de la caducité desdites hypothèques et de leur mainlevée.

Par ordonnance en date du 5 juin 2013, le juge des référés du tribunal de commerce de Dijon a :

- renvoyé les parties à se pourvoir,

- dès à présent et par provision, dit M. A non fondé en ses divers moyens, l'a débouté de l'ensemble de ses demandes et l'a renvoyé à mieux se pourvoir,

- condamné M. A à payer à Me Philippe Maître la somme de 2 000 € en application de l'article 700 du nouveau Code de Procédure Civile,

- rappelé que l'éxécution provisoire est de droit,

- condamné M. A aux dépens.

Pour statuer ainsi, le premier juge a constaté au vu des bordereaux produits que l'inscription provisoire d'hypothèque judiciaire a été dénoncée dans le délai de 8 jours et qu'il n'y a donc pas lieu à caducité.

Pour écarter les différents moyens invoqués par le demandeur, le premier juge a relevé que la liquidation judiciaire avait été ouverte en novembre 2011 et que M. A a été dirigeant de droit de la SAS Ehrel Hydris Elévation de mars à novembre 2011. Il a considéré que l'article L. 631-10-1 du Code de Commerce, issu de la loi du 12 mars 2012 dont il était précisé par l'article 6 de la loi qu'elle s'appliquait aux procédures en cours au jour de sa publication, est donc applicable en l'espèce ; qu'une action en comblement d'insuffisance d'actif a bien été introduite en mars 2012 par Me Philippe Maître, ès-qualité de liquidateur, à l'encontre de M. A ; que dans ces conditions le président du tribunal de commerce peut, en cas de mise en oeuvre d'une telle action, ordonner à la demande du liquidateur toute mesure conservatoire utile sur les biens des dirigeants et qu'il est seulement exigé la constatation par le président de l'utilité de la mesure, utilité qui consiste dans la prise des mesures qui apparaissent nécessaires à la sauvegarde de la collectivité des créanciers en évitant que les dirigeants puissent organiser leur insolvabilité.

Le juge des référés a estimé en l'espèce qu'eu égard à l'action intentée à l'encontre de M. A comme dirigeant de la SAS Ehrel Hydris Elévation, le président du tribunal a pu dans le cadre du pouvoir donné par l'article L. 631-10-1 du Code de Commerce estimer utile la prise des mesures conservatoires sur les immeubles de M. A, observant que rien dans les éléments apportés par ce dernier ne permet de considérer que ces mesures sont inutiles en ce que, sans elles, les intérêts des créanciers seraient sauvegardés. Il a ajouté que M. A ne démontre pas qu'il présente toute garantie en cas de condamnation.

Par déclaration formée le 20 juin 2013, M. A a régulièrement interjeté appel de ladite ordonnance.

Par ses dernières écritures du 20 septembre 2013, M. A demande à la Cour, vu les dispositions de la loi du 12 mars 2012 et notamment l'article L. 631-10-1 du Code de Commerce, vu le décret d'application de la loi du 12 mars 2012 du 28 octobre 2012, vu l'article 122 du Code de Procédure Civile, vu les articles L. 511-1, R. 511-1, R. 512- 1 et R. 512-2 du Code des Procédures Civiles d'Exécution, vu la motivation des requêtes présentées par Me MAITRE, ès-qualité, le 19 juillet 2012, vu les ordonnances rendues par le Président du Tribunal de Commerce de Dijon les 24 juillet, 21 août et 13 septembre 2012, vu l'ordonnance du 5 juin 2013 rendue par le Président du Tribunal de Commerce de Dijon, de :

- déclarer recevable et bien fondé l'appel interjeté par M. A,

- réformer l'ordonnance du 5 juin 2013 rendue par le Président du Tribunal de Commerce de Dijon,

- dire et juger que Me MAITRE, ès-qualité de liquidateur d'Erhel Hydris Elévation, n'avait ni la qualité, ni le pouvoir de prendre des hypothèques conservatoires sur les biens de M. A en application de l'article L. 631-10-1 du Code de Commerce,

- dire et juger que les mesures conservatoires pratiquées par Me MAITRE en application de l'article L. 631-10-1 du Code de Commerce en l'absence d'une action à l'encontre de M. A fondée sur l'article 1382 du Code Civil sont dépourvues de base légale et donc irrégulières,

- dire et juger caduques les autorisations du Président du Tribunal de Commerce de Dijon les 24 juillet, 21 août et 13 septembre 2012 en ce que Me MAITRE n'a pas introduit, à la suite des ordonnances rendues, d'action sur le fondement de l'article 1382 du Code Civil dans le délai d'un mois,

- en conséquence, ordonner la mainlevée des hypothèques provisoires aux frais avancés de la Liquidation Judiciaire d'Erhel Hydris Elévation inscrites par Me MAITRE, ès-qualité de Liquidateur, sur les biens appartenant à M. A situés :

- sur la commune de POLLIONAY (69290) Col de la Luère cadastrés section AM nº14 à 20, 29, 35,37, 38, 64, 65, 73, 173, 174, nº183 à 185, 194, 197 et 198,

- sur la commune de COURZIEU (69690) cadastrés section AO nº137 et section AR nº76 à 79,

- sur la commune de POUILLY LE MONIAL (69400) cadastrés section A nº252 à 258 et nº393,

En tout état de cause,

- dire et juger que Me MAITRE ne justifie ni d'une créance fondée en son principe à l'encontre de M. A, ni de circonstances menaçant son recouvrement,

- dire et juger que les hypothèques conservatoires ordonnées ne sont pas utiles,

En conséquence,

- rétracter les ordonnances rendues les 24 juillet 2012, 21 août 2012 et 13 septembre 2012 par le Président du Tribunal de Commerce de Dijon qui ont autorisé l'inscription d'hypothèque provisoire sur les biens appartenant à M. A situés :

- sur la commune de POLLIONAY (69290) Col de la Luère cadastrés section AM nº14 à 20, 29, 35,37, 38, 64, 65, 73, 173, 174, nº183 à 185, 194, 197 et 198,

- sur la commune de COURZIEU (69690) cadastrés section AO nº137 et section AR nº76 à 79,

- sur la commune de POUILLY LE MONIAL (69400) cadastrés section A nº 252 à 258 et nº 393,

- condamner la liquidation judiciaire d'Erhel Hydris Elévation à payer à M. A la somme de 5.000 euro au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

- laisser les dépens à la charge de la liquidation judiciaire d'Erhel Hydris Elévation.

Par ses dernières écritures du 8 octobre 2013, Me Philippe Maître ès-qualité de liquidateur judiciaire de la SAS Ehrel Hydris Elévation demande à la Cour, vu l'article L. 631-10-1 du Code de Commerce, de :

- dire et juger que Me Philippe Maître ès qualités de liquidateur judiciaire de la SAS Ehrel Hydris Elévation avait la possibilité de requérir une ordonnance du Président du Tribunal de Commerce compte tenu de l'applicabilité immédiate du texte,

- dire et juger que les mesures conservatoires prises en matière de procédure collective sont autonomes et que le liquidateur n'a pas à justifier de la réunion des conditions prévues par le Code des Procédures Civiles d'Exécution,

- dire et juger qu'en tout état de cause les conditions prévues par le Code des Procédures Civiles d'Exécution sont satisfaites,

- en conséquence, confirmer l'ordonnance dont appel.

à titre subsidiaire,

- dire et juger que le visa erroné de l'article L. 631-10-1 en lieu et place de l'article L.651-4 du Code de Commerce dans sa version applicable aux faits de l'espèce ne peut être cause de nullité de l'ordonnance entreprise,

- dire et juger qu'à supposer qu'une quelconque nullité soit encourue, il ne peut s'agir que d'une nullité de forme, laquelle n'emporte aucun grief en l'espèce.

En tout état de cause,

- débouter M. A de l'intégralité de ses demandes,

- le condamner à verser à Me Philippe Maître, ès qualités de liquidateur de la SAS Ehrel Hydris Elévation, une somme de 2 000 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens tant d'instance que d'appel.

Par ses réquisitions écrites du 31 mars 2014, le Ministère Public s'en est rapporté.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 3 avril 2014.

SUR CE :

Vu les dernières écritures des parties auxquelles la Cour se réfère expressément ; vu les pièces ;

Attendu que l'article L. 631-10-1 du Code de Commerce dans sa rédaction issue de la loi du 12 mars 2012 dispose que « à la demande de l'administrateur ou du mandataire judiciaire, le président du tribunal saisi peut ordonner toute mesure conservatoire utile à l'égard des biens du dirigeant de droit ou de fait à l'encontre duquel l'administrateur ou le mandataire judiciaire a introduit une action en responsabilité fondée sur une faute ayant contribué à la cessation des paiements du débiteur » ;

Attendu qu'il échet à titre liminaire de constater que les critiques, émises en première instance quant à une prétendue absence de dénonciation au débiteur dans le délai de 8 jours, écartées par le premier juge au vu des pièces produites, ne sont plus reprises et soutenues à hauteur de Cour ;

sur le défaut de base légale :

Attendu que l'appelant critique l'ordonnance entreprise, motifs pris de l'absence de base légale rendant irrégulières les mesures conservatoires puisque :

- d'une part prises au visa de dispositions légales nouvelles alors inapplicables faute de parution du décret d'application, lequel n'est intervenu que le 25 octobre 2012 sans effet rétroactif, de sorte que Me Philippe Maître n'avait ni le pouvoir ni la qualité pour saisir le juge commissaire par application de l'article L. 631-10-1 du Code de Commerce puis pour procéder ensuite aux inscriptions d'hypothèques, ce qui constitue une irrégularité de fond devant être accueillie sans exigence de grief conformément à l'article 119 du Code de Procédure Civile,

- d'autre part prises dans le cadre d'une action en comblement d'insuffisance d'actif exercée par application de l'article L. 651-2 du Code de Commerce, et non dans le cadre requis d'une action en responsabilité fondée sur l'article 1382 du Code Civil, étant souligné que ce n'est que le 18 décembre 2012, soit bien postérieurement et en tout cas tardivement, que le liquidateur l'a assigné devant le tribunal de commerce de Lyon aux fins de dommages-et-intérêts sur le fondement de l'article 1382 du Code Civil, de sorte que pour le moins le délai d'un mois imposé par l'article R. 511-7 du Code de Commerce n'étant pas respecté, les mesures conservatoires sont devenues caduques ;

Attendu que l'intimé réplique que la loi du 12 mars 2012 était d'application immédiate aux procédures collectives en cours sans que son applicabilité ne soit différée à la parution d'un décret d'application, qu'il a procédé en suivant les formalités substantielles alors prévues par le Code des Procédures Civiles d'Exécution et nécessaires au respect des droits de M. A auquel la mesure conservatoire devait être dénoncée, lesquelles sont d'ailleurs reprises désormais par l'article R. 662-1-1 du Code de Commerce issu du décret du 25 octobre 2012 renvoyant aux dispositions réglementaires du Code des Procédures Civiles d'Exécution, de sorte qu'il n'y a aucune cause d'irrégularité ;

que l'intimé ajoute qu'à supposer même qu'il eût fallu viser l'article L. 651-4 du Code de Commerce, lequel permettait déjà dans sa rédaction antérieure à la loi du 12 mars 2012 de recourir à des mesures conservatoires, il n'en résulterait qu'une simple irrégularité de forme ne pouvant donner lieu à nullité qu'au cas de démonstration d'un grief, lequel n'est en tout état de cause pas caractérisé puisque les ordonnances rendues par le président du tribunal de commerce ont été dénoncées à M. A selon la procédure adaptée et le mettent en mesure d'en quereller le bien fondé ; qu'il fait valoir que le vice dénoncé par l'appelant, qui affecterait l'ordonnance d'autorisation rendue au visa de l'article L. 631-10-1 du Code de Commerce, n'est pas un défaut de pouvoir mais simplement un visa erroné d'un texte, ce qui n'a jamais été cause de nullité ;

Attendu que suite à la requête présentée le 19 juillet 2012 par Me Philippe Maître, agissant en qualité de mandataire à la liquidation judiciaire de la SAS Ehrel Hydris Elévation, le président du tribunal de commerce de Dijon a par ordonnance en date du 24 juillet 2012 ' une première fois rectifiée pour erreur matérielle par ordonnance du 21 août 2012 puis une seconde fois rectifiée pour erreur matérielle par ordonnance du 13 septembre 2012 ' autorisé pour garantie de la somme de 500 000 € Me Philippe Maître, ès-qualité, à inscrire provisoirement une hypothèque judiciaire sur différents immeubles appartenant à M. A ;

Mais attendu que la loi du 12 mars 2012, dont sont issues les nouvelles dispositions de l'article L-631-10-1 du Code de Commerce a, dans son article 6, expressément précisé que 'la présente loi est applicable aux procédures de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire en cours à la date de sa publication' ; que l'entrée en vigueur des nouvelles dispositions n'a aucunement été reportée à un décret d'application à paraître ;

qu'il s'ensuit que les dispositions de l'article L. 631-10-1 du Code de Commerce sont bien applicables à la procédure collective de la SAS Ehrel Hydris Elévation, alors en cours, puisque le jugement d'ouverture est du 30 août 2011 ;

Attendu que l'article L. 631-10-1 du Code de Commerce énumère les personnes habiles, parmi lesquelles figure le mandataire judiciaire, à demander une mesure conservatoire et détermine le juge compétent pour décider de cette mesure, à savoir le président du tribunal de commerce saisi de la procédure collective ;

que ces dispositions légales se suffisent ; qu'il s'ensuit que Me Philippe Maître avait bien, quoiqu'en dise l'appelant, pouvoir et qualité pour saisir comme il l'a fait le 19 juillet 2012 le président du tribunal de commerce de Dijon, la procédure collective de la SAS Ehrel Hydris Elévation ayant été ouverte par ce tribunal ;

que le pouvoir et la qualité de Me Philippe Maître de saisir le juge d'une telle demande de mesure conservatoire induit les pouvoir et qualité de Me Philippe Maître pour se conformer à l'autorisation judiciaire donnée et donc pour faire inscrire les hypothèques judiciaires conservatoires sur les biens visés en exécution des ordonnances querellées ;

Attendu que Me Philippe Maître, dûment autorisé, a ensuite procédé en se conformant aux dispositions réglementaires, alors applicables, du Code des Procédures Civiles d'Exécution en matière de mesures conservatoires, afin de porter à la connaissance de M. A les inscriptions à titre provisoire prises en exécution des ordonnances du président du tribunal de commerce ;

qu'il est en effet de principe que si les règles régissant les autorisations de prises de mesures conservatoires au cas de procédure collective sont dérogatoires au droit commun, il n'en est pas de même des conditions de mise en oeuvre des dites autorisations ;

que M. A ne pourrait dès lors se plaindre que d'une irrégularité formelle affectant les actes de mise en oeuvre des mesures ordonnées par le président du tribunal de commerce, à la condition pour lui de démontrer un grief ; qu'or, d'une part, il a reçu le 3 octobre 2012 la dénonciation du dépôt d'une inscription d'hypothèque judiciaire provisoire et, d'autre part, aucune contravention aux règles des articles R. 511-1 à R. 511-5 du Code des Procédures Civiles d'Exécution n'est établie, les droits de l'intéressé étant parfaitement respectés puisqu'il a eu connaissance des mesures et a été mis en mesure de les contester, ce que précisément il fait par la présente procédure ;

qu'il sera ajouté que le décret du 25 octobre 2012 a instauré l'article R. 662-1-1 du Code de Commerce, disposant que 'les mesures conservatoires prévues aux articles L. 621-2, L. 631-10-1 et L. 651-4 sont soumises aux dispositions de la partie réglementaire du Code des Procédures Civiles d'Exécution sous réserve du présent livre', ce qui dénote bien, quoique cet article n'ait pas d'effet rétroactif comme le fait observer l'appelant, que M. A ne peut sérieusement prétendre à un quelconque grief par le soit-disant non-respect des formes dans la transcription et l'exécution des mesures conservatoires judiciairement autorisées ;

Attendu qu'il est constant que par acte en date du 7 mars 2012, soit antérieurement aux mesures querellées, Me Philippe Maître ès-qualité de liquidateur de la SAS Ehrel Hydris Elévation a assigné M. A, en sa qualité de dirigeant de droit et de fait, aux fins de paiement, solidairement avec Mme B, d'une somme de 3 994 330,81 € à raison de diverses fautes de gestion ayant contribué à l'insuffisance d'actif de la SAS Ehrel Hydris Elévation et ce sur le fondement de l'article L-651-2 du Code de Commerce;

que l'appelant ne peut utilement s'emparer de la circonstance que ce n'est qu'en décembre 2012 que le liquidateur l'a assigné en responsabilité pour faute sur le fondement de l'article 1382 du Code Civil pour en déduire l'annulation de l'ordonnance ayant autorisé les hypothèques judiciaires provisoires

ou la caducité des mesures conservatoires ;

Attendu que, comme le fait observer l'intimé, l'article L. 651-4 du Code de Commerce, dans sa rédaction antérieure à la loi du 12 mars 2012, inscrit au titre V - Des responsabilités et des sanctions -  du livre VI du Code de Commerce permettait déjà, lors de la mise en oeuvre d'une action en comblement de l'insuffisance d'actif, au président du tribunal de commerce d'ordonner toute mesure conservatoire utile sur les biens du dirigeant poursuivi ; qu'il sera rappelé à cet égard que depuis l'ordonnance du 18 décembre 2008 cette action n'est plus ouverte à l'égard du dirigeant qu'au cas de liquidation judiciaire de la société ;

que le nouvel article L. 631-10-1 du Code de Commerce s'inscrit au titre III 'Du redressement judiciaire' du même livre VI, permettant ainsi au cas de redressement judiciaire de prendre toute mesure conservatoire, destinée à préserver leur solvabilité, à l'égard des dirigeants de société en redressement judiciaire dont la responsabilité pourrait être engagée à raison de 'une faute ayant contribué à la cessation des paiements du débiteur' ;

que cela montre qu'il n'y a pas de dichotomie ou double emploi comme tend à le présenter l'appelant, les textes ayant dans les deux cas pour essence de préserver les intérêts des créanciers au cas de faute de gestion des dirigeants ;

Attendu que si effectivement la rigueur eût voulu que le président du tribunal de commerce rende son ordonnance d'autorisation de mesures conservatoires au visa de l'article L. 651-4 du Code de Commerce dès lors que la procédure de redressement judiciaire, initialement ouverte à l'égard de la SAS Ehrel Hydris Elévation était convertie en liquidation judiciaire et que M. A était poursuivi en comblement d'insuffisance d'actif sur le fondement de l'article L. 651-2, un tel visa erroné ne peut donner lieu à annulation de l'ordonnance querellée et rendre irrégulières les mesures conservatoires prises en exécution de celle-ci, l'annulation ne pouvant résulter que d'un excès de pouvoir non caractérisé par une mauvaise application de la loi par le juge qui reste dans la limite de son pouvoir juridictionnel ;

qu'en outre et à titre surabondant, l'irrégularité des mesures conservatoires prises en exécution d'une telle ordonnance ne serait que de forme et ne pourrait affecter la validité de ces mesures qu'à la condition pour l'appelant de démontrer l'existence d'un grief ; qu'or il n'existe pas de grief en l'espèce, dès lors que les mesures querellées pouvaient en tout état de cause être prises par application de l'article L-651-4 du Code de Commerce et qu'il n'y a pas d'atteinte aux droits de M. A ;

Attendu dès lors qu'il importe peu que M. A ait été assigné en décembre 2012 sur le fondement de l'article 1382 du Code Civil, pour faute détachable de ses fonctions de gérant de la SARL METALIC, unique associée de la SAS Ehrel Hydris Elévation, du moment qu'il était déjà poursuivi depuis mars 2012, antérieurement aux mesures querellées, au titre du comblement d'insuffisance d'actif ; que l'appelant n'est donc pas fondé à se prévaloir de la caducité des mesures conservatoires par application de l'article R. 511-7 du Code des Procédures Civiles d'Exécution, ce moyen manquant tant en droit qu'en fait ;

sur l'absence des conditions requises pour des mesures conservatoires :

Attendu que l'appelant fait valoir que les conditions légales et réglementaires conditionnant la prise de mesures conservatoires n'étaient pas, et ne sont toujours, pas réunies, ce qui démontre l'inutilité des mesures ordonnées ; qu'il se réfère aux dispositions de l'article R. 512-1 du Code des Procédures Civiles d'Exécution selon lesquelles il incombe au créancier de prouver que les conditions requises sont réunies ; qu'il soutient ainsi que le liquidateur doit justifier d'une créance fondée en son principe et justifier des circonstances susceptibles d'en menacer le recouvrement, ces conditions étant cumulatives, ce qu'admet d'ailleurs le liquidateur par le rappel des dispositions du Code des Procédures Civiles d'Exécution dans les dénonces signifiées par lui et par l'exposé de la motivation de sa requête au président du tribunal de commerce;

qu'or selon l'appelant, il n'est pas démontré de créance fondée en son principe, dans la mesure où d'une part il n'a commis aucune faute de gestion dans les quelques mois où il a été le président de la SAS Ehrel Hydris Elévation après la démission de Mme B, laquelle est seule responsable eu égard à la nature des faits reprochés et à leur date de commission, contestant par ailleurs toute direction de fait antérieure à sa nomination comme président à compter du 1er mars 2011, dans la mesure où d'autre part il n'a commis aucune faute au sens de l'article 1382 du Code Civil comme le lui reproche l'intimé dans l'assignation tardive de décembre 2012 puisque c'est la SARL METALIC, soit une entité distincte de lui, qui est l'associée unique de la SAS Ehrel Hydris Elévation, qui a procédé à des apports en compte-courant conséquents au seul bénéfice des créanciers de cette dernière, faisant à cet égard observer qu'il est quelque peu contradictoire de la part du liquidateur d'arguer à la fois d'une sous-capitalisation de la SAS Ehrel Hydris Elévation et de lui faire reproche de ces apports en compte-courant ;

que l'appelant soutient par ailleurs qu'il n'est pas établi de menaces de recouvrement, dans la mesure où son patrimoine étendu couvre largement le remboursement de la prétendue créance de 500 000 €, un seul des immeubles de Pouilly le Monial étant déjà estimé à plus de cette somme, dans la mesure où il s'est toujours présenté aux audiences auxquelles il a été convoqué et où il n'a jamais cherché à céder ses actifs ; qu'il soutient enfin que les mesures sont dépourvues d'utilité, d'autant que l'occupation d'un immeuble à Pollionay par sa mère âgée de 90 ans rendrait particulièrement difficile la vente immobilière forcée ;

Attendu que l'intimé oppose l'autonomie des mesures conservatoires ordonnées par le président du tribunal de commerce, qui nécessitent uniquement le constat de leur utilité; qu'à titre subsidiaire, à supposer que les conditions ordinaires du Code des Procédures Civiles d'Exécution soient requises, il s'attache à établir la créance fondée en son principe ' laquelle n'a pas à être certaine, liquide et exigible ' en soulignant que M. A a été dirigeant de droit et de fait, puisque notamment c'est par sa décision de gestion que la SAS Ehrel Hydris Elévation s'est vue attribuer des apports continus et massifs de fonds, plus de 3 000 000 € en deux ans, sans lesquels la société, dont il maîtrisait totalement la vie et la mort, ne pouvait avoir d'activité, M. A ayant ainsi abusivement soutenu le crédit de la SAS en lui donnant une apparence trompeuse de solvabilité ; que l'intimé conclut à des menaces de recouvrement, compte-tenu du patrimoine immobilier de l'intéressé déjà lourdement grevé d'hypothèques à l'exception des biens, objet des mesures litigieuses, de l'opacité des comptes et résultats des autres sociétés dans lesquelles M. A est intéressé, la seule dont les comptes ont été publiés, la SAS Fonderie Rhône, faisant apparaître une perte de 567 000 € au 31 décembre 2011 ;

Mais attendu que les mesures conservatoires ordonnées par le président du tribunal de commerce, qu'elles le soient d'ailleurs sur le fondement de l'article L-631-10-1 du Code de Commerce comme en l'espèce ou sur celui de l'article L. 651-4 du Code de Commerce, sont dérogatoires au droit commun et elles ne nécessitent que le constat de leur utilité, sans qu'il ne soit nécessaire de démontrer un risque d'organisation de l'insolvabilité ou de menaces de recouvrement ;

qu'en effet, l'article L. 631-10-1 nouveau du Code de Commerce, pas davantage que l'article L. 651-4 du Code de Commerce dans sa rédaction antérieure ou postérieure à la loi de 2012, ne renvoie aux conditions de droit commun posées par l'article L. 511-1 du Code des Procédures Civiles d'Exécution pour l'autorisation des mesures conservatoires, ce qui démontre le caractère dérogatoire et autonome de telles mesures autorisées dans le cadre d'une procédure collective par le président du tribunal de commerce ;

que cela est corroboré au vu de l'article R. 662-1-1 du Code de Commerce issu du décret du 25 octobre 2012 qui envoie, pour les mesures conservatoires prévues aux articles L. 621-2, L. 631-10-1 et L. 651-4, aux seules dispositions de la partie réglementaire du Code des Procédures Civiles d'Exécution 'sous réserve des dispositions du présent livre' ;

qu'or les conditions de créance paraissant fondée en son principe et de menaces de recouvrement sont posées par l'article L. 511-1 du Code des Procédures Civiles d'Exécution, lequel n'est pas applicable ici en matière de procédure collective ;

Attendu que l'intimé oppose ainsi à juste titre l'autonomie des mesures conservatoires autorisées par le président du tribunal de commerce, ce principe ayant été consacré par la jurisprudence de la Cour de Cassation (chambre commerciale, 31 mai 2011) ;

que dès lors l'appelant invoque en vain le rappel des différents articles de la partie réglementaire du Code des Procédures Civiles d'Exécution dans l'acte de dénonciation signifié le 3 octobre 2012, puisque l'inscription d' hypothèque judiciaire provisoire devait nécessairement être portée à la connaissance du débiteur concerné et que l'article R. 532-5 du Code des Procédures Civiles d'Exécution impose la reproduction de ces textes dans l'information faite au débiteur par huissier après dépôt des bordereaux d'inscription ;

qu'il ne peut davantage tirer d'argument pertinent de l'exposé, en fait et en droit, présenté par le mandataire dans sa requête aux fins de convaincre le juge requis de l'utilité des mesures conservatoires sollicitées ;

Attendu que M. A ayant été de façon incontestable à compter du 1er mars 2011 jusqu'au prononcé de la liquidation judiciaire le 15 novembre 2011 le dirigeant de droit de la SAS Ehrel Hydris Elévation, et étant poursuivi en cette qualité en comblement d'insuffisance d'actif par assignation du 7 mars 2012 à raison de fautes de gestion, notamment pour ne pas avoir à temps déclaré l'état de cessation des paiements, avoir poursuivi abusivement une activité déficitaire et ne pas avoir respecté la législation sociale ce qui a aggravé le passif de la société, le président du tribunal de commerce de Dijon ' tribunal saisi de cette procédure de liquidation judiciaire ' a pu estimer que les mesures conservatoires sollicitées par le liquidateur étaient utiles pour préserver l'intérêt collectif des créanciers, face à une insuffisance d'actif évaluée à plus de 3 900 000 €, afin de garantie à hauteur de la somme de 500 000 € ; que le président du tribunal était légitime, au regard du seul critère de leur utilité, à autoriser les mesures conservatoires contestées par l'appelant et qui conservent à ce jour leur utilité ;

qu'il appartient à l'appelant de rapporter la preuve de l'inutilité des mesures conservatoires, ce que ne fait pas M. A , étant observé que s'il allègue être propriétaire d'autres immeubles non grevés d'hypothèques en dehors des biens objet des mesures querellées, il ne produit aucune pièce de nature à en justifier ; qu'il procède de même par simples allégations sans le moindre justificatif quant aux difficultés que rencontrerait une vente forcée de l'immeuble soit-disant occupé par sa mère ; qu'il verse aux débats une estimation marchande faite en novembre 2006 d'un bien situé à Pouilly dont rien ne permet, à défaut de toute indication cadastrale, de vérifier qu'il s'agit effectivement d'un immeuble dont il est toujours propriétaire ou visé par les mesures conservatoires querellées ;

Attendu qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments qu'il n'y a lieu ni à annulation ni à rétractation des ordonnances du président de tribunal de commerce de Dijon en date des 24 juillet, 21 août et 13 septembre 2012, ni à mainlevée des inscriptions d'hypothèques judiciaires provisoires ;

qu'il convient en conséquence de débouter M. A de son appel, l'ordonnance entreprise devant être confirmée en toutes ses dispositions ;

sur les autres demandes :

Attendu que l'appelant qui succombe sur son appel doit être condamné aux entiers frais et dépens ;

Attendu qu'il est inéquitable de laisser à la charge de l'intimé les frais exposés à hauteur de Cour et non compris dans les dépens ; qu'il convient de lui allouer la somme de 2 000 € en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

PAR CES MOTIFS :

la Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort :

Déclare M. A recevable, mais mal fondé en son appel ; l'en déboute ;

Dit n'y avoir lieu à annulation ou à rétractation des ordonnances rendues par le président du tribunal de commerce de Dijon en date des 24 juillet 2012, 21 août 2012 et 13 septembre 2012 ;

Dit n'y avoir lieu à mainlevée des hypothèques judiciaires provisoires inscrites sur les biens de M. A, situés à Pollionay, Courzieu et Pouilly le Monial (69), en exécution des dites ordonnances ;

Confirme en conséquence en toutes ses dispositions l'ordonnance rendue le 5 juin 2013 par le président du tribunal de commerce de Dijon ;

Y ajoutant :

Condamne M. A à payer à Me Philippe Maître, en sa qualité de mandataire à la liquidation judiciaire de la SAS Ehrel Hydris Elévation, la somme de 2 000 € en application de l'article 700 du nouveau Code de Procédure Civile ;

Condamne M. A aux entiers frais et dépens de première instance et d'appel.