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Décisions

CA Toulouse, 2e ch., 15 mars 1993, n° 2987/91

TOULOUSE

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Molinier et Compagnie (SNC)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Fouloh

Conseillers :

M. Lebreuil, M. Milhet

Avoués :

SCP Boyer-Lescat, Me Cantaloube-Ferrieu

Avocats :

SCP Maroou, SCP Duran-Bec-Palazy-Bru-Valax

T. com. Castres, du 4 mars 1991

4 mars 1991

Par assignation en date du 9 aout 1990, le gérant de la S.N.C MOLINIER ET COMPAGNIE a demandé au Tribunal de Commerce de CASTRES de condamner X, Y et Z, associés dans ladite société, à exécuter la délibération de L’assemblée Générale du 9 Juin 1989 qui a décidé que chacun des associés ferait un apport en compte courant au prorata de sa participation.

Par jugement en date du 4 Mars 1991, le Tribunal de Commerce de CASTRES a fait droit à cette réclamation en constatant que X avait déjà effectué le paiement réclamé.

Au soutien de leur appel, les trois associés font d’abord valoir que la demande de la SOCIETE MOLINIER est dénuée de tout fondement à l’égard de X puisque celui-ci avait exécuté la décision de l’Assemblée Générale avant la mise en route de la procédure. Ils estiment dès lors que X doit être mis hors de cause, et qu’il est en droit de réclamer 3.000 frs à la société intimée application de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Pour ce qui concerne Y et Z, ces deux associés soutiennent :

- que l’action du gérant à leur encontre est irrecevable à défaut d’avoir recueilli préalablement l’accord de la majorité des associés.

- que l’Assemblée Générale du 9 Juin n’a rien décidé, mais a émis simplement un vœu.

- que les associés sont libres d’agir à leur guise et ne sont pas tenus de procéder à un apport en compte courant.

Ils ne concluent dès lors à l’infirmation du jugement et à la condamnation de la société intimée à payer à chacun d’entre eux, 3.000 frs au titre de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

La S.N.C MOLINIER ET COMPAGNIE qui précise que le Tribunal a pris acte du règlement effectué par X, ajoute que ce paiement est intervenu après l’assignation, et qu’en l’absence de toute condamnation prononcée contre lui, X n’avait aucun intérêt pour faire appel et que son recours doit donc être déclaré irrecevable. 

Au fond elle sollicite la confirmation du jugement déféré et réclame 10.000 frs à titre de dommages-intérêts et 5.000 frs en application de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

SUR QUOI, LA COUR

Sur l’action dirigée contre X.

Attendu que X a été assigné par la S.N.C MOLINIER, le 9 aout 1990 ; qu’il s’était cependant acquitté du paiement de la somme réclamée par ladite société, dès le 17 juillet précédent, ainsi qu’il résulte des propres pièces fournies par l’intimée ;

Attendu dès lors que c’est à bon droit que X sollicite sa mise hors de cause ;

Que cependant l’équité ne commande pas de faire droit à sa réclamation au titre de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, alors que les premiers juges avaient constaté qu’il avait payé et que la société intimée qui ne lui a pas signifié le jugement a ainsi montré qu’elle considérait que le litige te concernant était clos ;

* Sur la recevabilité de l’action intentée par la S.N.C MOLINIER.

Attendu que l'assignation de la S.N.C MOLINIER a été délivrée à l’initiative du gérant W ;

Que contrairement à ce que soutiennent les appelant l’action de celui-ci est recevable, y compris à l’égard de l’autre gérant Y, dès lors que les statuts - qui ne font que reprendre les dispositions de l’article 13 de la loi du 24 Juillet 1966 prévoient expressément que dans les rapports entre associés chaque gérant peut faire tous acte de gestion dans I'intérêt de la société, et que la réclamation faite au nom de cette société se rattache bien, par sa nature d’administration du patrimoine, aux pouvoirs du gérant ;

Qu’en conséquent l’action de la S.N.C MOLINIER sera déclarée recevable.

· Sur le fond du litige.

Attendu que selon l’article 11 des statuts de la S.N.C MOLINIER « chaque part sociale confère à son propriétaire un droit proportionnel d’après le nombre de parts existantes, dans les bénéfices de la société et dans tout l’actif social. Les pertes se répartissent le cas échéant selon les mêmes proportions… chaque associé répond indéfiniment et solidairement des dettes sociales » ;

Attendu que la demande en apport supplémentaire de fonds faite par W au nom de la société vise la contribution des associés aux pertes de la société et ce au prorata de leurs parts ;

Que cette action, trouve son fondement dans les deux délibérations de l’Assemblée Générale ordinaire de la société en date des 9 juin 1989 et 20 avril 1990 ; qu'en conséquence seule la majorité en capital était requise pour l'adoption d'une telle décision, conformément à l'article 17 des statuts de la société ;

Qu’il convient cependant de noter que la délibération du 9 Juin 1989 a été prise à l’unanimité des membres présents ;

Attendu que si les délibérations des deux assemblés générales mentionnent pour l'une "le vœu que les associés fassent apport en compte courant au prorata de leur participation” et pour l' autre "à nouveau le souhait d'un apport à effectuer par chacune des associés au prorata de participation dans le capital", il ne peut être déduit de cette terminologie habituellement considérée comme non comminatoire que chacun des associés était libre d'exécuter ou non un tel voeu; alors que les termes ainsi employés ne peuvent être compris, s'agissant d’une société de ce type, que comme l’expression d’une résolution valant obligation pour chacun de ses membres de s’exécuter dans l’intérêt de la société ;

Que dès lors c'est à bon droit que la S.N.C a réclamé aux deux seuls associés qui n'ont pas obtempéré une telle décision, l'exécution de leurs obligations ; que le jugement querellé sera donc confirmé par ce point ;

* Sur la demande en dommages-intérêts.

Attendu que la société intimée qui demande réparation du préjudice que lui aurait causé l'attitude des appelants ne fournit aucune justification à l’appui de sa demande ; qu’elle en sera donc déboutée ;

*Sur l’article 700 Nouveau Code de Procédure Civile.

Attendu que l’équité commande de faire droit à cette demande.

PAR CES MOTIFS.

LA COUR.

Déclare Y, Z recevable mais mal fondés en leur appel et les en déboute.

Déclare X recevable et bien fondé en son appel.

Confirme le jugement déféré sauf en ce qui concerne X et statuant à nouveau en son égard et y ajoutant :

- Met hors de cause X et le déboute de sa demande au titre de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

- Déboute la S.N.C MOLINIER et compagnie de sa demande de dommages et intérêts.

Condamne solidairement Y et Z à verser à la S.N.C MOLINIER et compagnie la somme de 5.000 frs (cinq milles francs) au titre de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Condamne Y et Z aux entiers dépends de l’instance.