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Décisions

CA Grenoble, ch. com., 3 mai 2018, n° 16/03159

GRENOBLE

Arrêt

Infirmation partielle

PARTIES

Défendeur :

Société d’Audit et d'Expertise Comptable (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Clozel-Truche

Conseillers :

Mme Pages, Mme Blanchard

T. com. Gap, du 20 mai 2016

20 mai 2016

La SARL CMN exploite sous l'enseigne Gliss Center une activité de vente et fabrication d'articles, vêtements de sport et autres.

Suivant lettre de mission du 22 janvier 2013, elle a contracté avec la SAS SOCATEC expert-comptable.

Par ordonnance du 13 juin 2014, le président du tribunal de commerce de Gap a enjoint à la SARL CMN de payer à la SAS SOCATEC, une somme de 3 827, 20 euros en principal.

Le 30 juillet 2014, la société CMN a formé opposition à cette ordonnance d'injonction de payer et par jugement du 20 mai 2016, le tribunal de commerce de Gap a

:

- déclaré recevable mais mal fondée la SARL CMN-Gliss Center en son opposition, l'en déboutant ;

- mis à néant l'ordonnance d'injonction de payer du 13 juin 2014 ;

- condamné la société CMN-Gliss Center à payer à la société SOCATEC les sommes de :

* 3 827,20 euros avec intérêts de droit à compter de l'ordonnance d'injonction de payer ;

* 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la société CMN-Gliss Center aux dépens, comprenant les frais de sommation de payer et de procédure d'injonction de payer.

La société CMN-Gliss Center a interjeté appel de cette décision par déclaration au greffe du 27 juin 2016.

Au terme de ses conclusions signifiées par acte d'huissier du 28 septembre 2016, auxquelles il est expressément fait référence pour l'exposé détaillé de ses moyens, la société CMN-Gliss Center (société CMN) demande à la cour de :

- confirmer partiellement le jugement en ce qu'il a déclaré l'opposition de la société CMN Gliss Center recevable';

- l'infirmer pour tout le reste du dispositif';

- dire et juger la société CMN-Gliss Center recevable et bien fondée';

- débouter la societé SOCOTEC de l'ensemble de ses demandes et prétentions ;

- condamner la société SOCOTEC à lui verser la somme de 2.000 euros de dommages et intérêts pour le préjudice subi';

- condamner la societe SOCOTEC à lui verser la somme de 1500 euros titre de dommages et intérêts sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la même aux dépens d'instance.

La société CMN fait valoir que':

- son opposition à l'ordonnance d'injonction de payer a été régulièrement faite, la signification n'ayant pas été faite à personne et aucun acte d'exécution n'ayant été diligenté ;

- le montant des honoraires réclamés par la société SOCATEC est infondé au regard des prestations effectivement exécutées';

- la lettre de mission est équivoque dans sa description de l'étendue des missions confiées et les missions réalisées hors cadre contractuel n'ont donné lieu à aucun avenant';

- elle n'a pas été correctement informée du coût des prestations.

Par ordonnance juridictionnelle du 29 juin 2017, le président de la chambre chargé de la mise en état a débouté la société SOCATEC de sa demande de caducité de l'appel.

Au terme de ses conclusions notifiées par voie électronique le 4 octobre 2017, auxquelles il est expressément fait référence pour l'exposé détaillé de ses moyens, la SAS SOCATEC entend voir':

- confirmer la décision du tribunal de commerce de Gap du 20 mai 2016 ;

- condamner la société CMN sous l'enseigne GLISS CENTER à payer à la société SOCATEC la somme de 4.172,81 € avec intérêts au taux légal à compter de l'ordonnance d'injonction de payer ;

- débouter la société GLISS CENTER de sa demande reconventionnelle au titre de dommages et intérêts comme étant infondée ;

- condamner la société CMN sous l'enseigne GLISS CENTER à payer à la société SOCATEC les entiers dépens outre la somme de 2.000 € au titre de l'article

700 du code de procédure civile, autorisant la SCP LA R.-A., avocat, à recouvrer directement contre la ou les parties condamnées ceux dont il aura fait l'avance sans en avoir reçu provision, conformément aux dispositions des articles 696 et 699 du code de procédure civile.

Elle soutient que':

- la lettre de mission définit précisément le cadre de sa mission qui n'inclut pas l'examen et la vérification de comptes annuels et a été acceptée par la société

CMN';

- elle a notamment réalisé le bilan de l'année 2013, le compte d'exploitation prévisionnel pour l'exercice 2013/14';

- des provisions sur honoraires ont été prévues qui devaient être ajustées en fonction de la nature et du temps des travaux réalisés';

- les factures correspondent à des prestations précises réalisées et correspondant aux missions confiées.

La procédure a été clôturée par ordonnance du 22 février 2018.

MOTIFS DE LA DECISION :

La recevabilité de l'opposition à l'injonction de payer du 13 juin 2014 n'étant pas contestée devant la cour, le jugement de première instance sera confirmé en ce qu'il a déclaré recevable l'opposition formée le 3 juillet 2014 par la société CMN.

1°) sur la demande en paiement :

Selon les conditions générales de la lettre de mission du 22 janvier 2013, la société CMN a confié à la société d'expertise comptable SOCATEC des missions de présentation des comptes annuels et d'établissement des déclarations fiscales afférentes, pour une durée d'une année renouvelable par tacite reconduction et moyennant le versement d'honoraires fixés pour la première année, en raison de la difficulté d'évaluer le temps de travail nécessaire à l'exécution de ces missions, à une provision mensuelle de 240 euros HT payable le 30 de chaque mois et : « ajusté à la fin des travaux de l'exercice, suivant les temps passés et la nature des travaux effectués ».

Le tableau annexé à la lettre de mission décrit avec précision les différentes tâches comptables, fiscales, sociales et juridiques assurées par la société SOCATEC dans le cadre de ses missions.

La société CMN s'est acquittée du paiement des honoraires contractuellement déterminés jusqu'au mois de juin 2013, la SOCATEC sollicitant le paiement des provisions sur honoraires des mois de juin à octobre 2013, ainsi qu'une note d'honoraires du 30 novembre 2013 portant sur des travaux d'établissement de prévisionnels et d'une étude de financement ainsi que sur une indemnité de rupture anticipée de mission.

Même si une convention a été passée en vue de l'exécution de travaux donnant lieu à honoraires, le juge peut réduire ces derniers lorsqu'ils paraissent exagérés, à la condition qu'ils n'aient pas été versés en connaissance du travail effectué et après service fait.

En exécution de sa lettre de mission, la société SOCATEC justifie avoir procédé à l'établissement des statuts, la déclaration de création d'entreprise et de début d'activité de la société CMN, aux publicités requises, à son enregistrement auprès du Régime Social des Indépendants (RSI), à la déclaration de la TVA, outre diverses démarches.

Elle fournit les comptes annuels établis par ses soins pour l'exercice du 1er novembre 2012 au 30 septembre 2013.

Compte tenu des tâches confiées suivant l'annexe à la lettre de mission et des justificatifs de travaux produits, la provision mensuelle de 240 euros HT ne présente aucun caractère excessif et ne saurait être réduite.

C'est donc à bon droit que le tribunal de commerce a considéré que les factures d'honoraires des mois de juin à octobre 2013 étaient dues dans leur intégralité.

La note d'honoraires du 30 novembre 2013 porte sur des travaux qui ne sont pas répertoriés dans le tableau annexé à la lettre de mission et qui n'ont pas donné lieu à devis préalable.

Si la société SOCATEC verse aux débats un compte d'exploitation prévisionnel établi sur les trois premières années, elle ne fournit aucune étude de financement d'un véhicule.

Par ailleurs, elle n'établit pas qu'il ait été prématurément mis un terme à la mission par lettre recommandée avec accusé de réception conformément aux stipulations de l'article 3 des conditions générales du contrat, l'autorisant à se prévaloir de l'indemnité contractuelle de 25 % des honoraires convenus pour l'exercice en cours.

En conséquence, les honoraires objets de la facture du 30 novembre 2013 devront être réduits à la somme de 1 000 euros HT, soit 1 196 euros TTC.

La société CMN reste donc devoir à la société SOCATEC la somme totale de 2 691 euros TTC, ce qui conduira la cour à réformer le jugement du tribunal de commerce dans ce sens et à condamner la débitrice au paiement.

2°) Sur la demande indemnitaire de la société CMN :

Défaillante dans l'exécution de ses obligations contractuelles et n'apportant aucun élément de preuve d'un quelconque préjudice, la société CMN ne peut qu'être déboutée de sa demande reconventionnelle en dommages et intérêts.

La décision des premiers juges sera confirmée sur ce point.

3°) Sur l'application de l'article 700 du code de procédure civile :

La société SOCATEC a été contrainte d'engager en cause d'appel de nouveaux frais non taxables de représentation en justice qu'il paraîtrait contraire à l'équité de laisser à sa charge et en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, la société CMN sera condamnée à lui verser la somme complémentaire de 1 000 euros.

PAR CES MOTIFS :

La Cour,

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire, par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile et après en avoir délibéré conformément à la loi,

CONFIRME le jugement du tribunal de commerce de Gap, sauf en ce qu'il a condamné la société CMN-GLISS CENTER à payer à la SOCIETE D'AUDIT ET

D'EXPERTISE COMPTABLE - SOCATEC la somme de 3 827,20 euros avec intérêts de droit à compter de l'ordonnance d'injonction de payer ;

L'INFIRME sur ce seul point ;

Statuant à nouveau ;

CONDAMNE la SARL CMN à payer à la SAS SOCATEC la somme de 2 691 euros TTC augmentée des intérêts au taux légal à compter de l'ordonnance d'injonction de payer du 13 juin 2014 ;

Y ajoutant ;

CONDAMNE la SARL CMN à payer à la SAS SOCATEC la somme de 1 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la SARL CMN aux dépens de son appel et autorise la SCP A.-LA R., avocat, à exercer son droit de recouvrement direct conformément aux dispositions des articles 699 du code de procédure civile.