CA Paris, 3e ch. C, 17 septembre 1999, n° 1998/03177
PARIS
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Penet-Weiller (ès qual.)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Conseillers :
Mme Le Jan, M. Carre-Pierrat
Avoués :
SCP Varin-Petit, Me Cordeau
Avocats :
Me Meslem, Me de Frouville, Me Le Goff
La cour statue sur l'appel interjeté par Me Brigitte PENET-WEILLER, ès £ qualités de mandataire judiciaire à la liquidation de la société SH9/ HOTEL DE TOURLAVILLE (SH9), du jugement rendu le 5 janvier 1998 par le tribunal de commerce de Paris qui l'a déboutée de ses demandes tendant à voir prononcer la nullité du remboursement du compte courant d'associé de M. Luc GRODWOHL et à la condamnation de ce dernier à lui reverser la somme de 30.000 francs.
Par jugement en date du 24 janvier 1994, le tribunal de commerce de Paris a prononcé la liquidation judiciaire de SH9, la date de cessation des paiements étant fixée au 24 juillet 1992.
Alors qu'il était actionnaire de SH9 et titulaire d'un compte courant qui s'élevait à la somme de 30.000 francs, M. A a, postérieurement à la date de cessation des paiements fixée par le tribunal, obtenu le remboursement de son compte courant par chèque débité le 22 novembre 1993.
Pour débouter Me PENET-WEILLER, ès qualités, le tribunal a, d'une part, écarté l'application des dispositions de l'article 107 de la loi du 25 janvier 1985 et, d'autre part, estimé qu'elle n'avait pas, sur le fondement de l'article 108 de la même loi, rapporté la preuve de la connaissance par M. A, au jour du remboursement de son compte courant, de l'état de cessation des paiements de
Appelante, Me PENET-WEILLER, ès qualités, demande à la cour d'infirmer le jugement déféré, de dire et juger que le remboursement du compte courant effectué après la date de cessation des paiements est nul en vertu des dispositions de l'article 107 de la loi du 25 janvier 1985 et, en tout état de cause, de l'article 108 de la même loi, de condamner M. A à lui payer la somme de 30.000 francs avec intérêts de droit et celle de 10.000 francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Elle soutient essentiellement que, ayant participé, en sa qualité d'associé de SH9, à une assemblée générale tenue le 29 juillet 1993 quelques mois avant la déclaration de cessation des paiements de la société, M. A ne pouvait ignorer la situation financière dans laquelle celle-ci se trouvait.
Intimé, M. A fait valoir, en premier lieu, que le remboursement du compte courant débiteur constitue un paiement de dettes échues ne rentrant pas dans les causes de nullité visées par l'article 107 de la loi du 25 janvier 1985 et, en second lieu, que la qualité d'associé ne suffit pas à induire la connaissance par celui-ci de la cessation des paiements de la société.
II conclut à la confirmation du jugement déféré et à la condamnation de Me PENET-WEILLER, ès qualités, à lui payer la somme de 10.000 francs au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
CELA EXPOSE, LA COUR,
Considérant qu'il n'est pas contesté que M. A a, le 22 novembre 1993, obtenu le règlement de la somme de 30.000 francs, montant de son compte paiements courant de cette d'associé dernière de SH9, au 24 et que juillet le tribunal 1992 ; que a fixé ce la paiement date de cessation est donc intervenu pendant la période suspecte ;
* sur l'application de l'article 107 de la loi du 25 janvier 1985
Considérant, en droit, que selon l'article 107, 3°, " sont nuls, lorsqu'ils auront été faits par le débiteur depuis la date de cessation des paiements (…) tout paiement, quel qu'en ait été le mode, pour dettes non échues au jour du paiement" ;
Considérant, en l'espèce, que Me PENET-WEILLER soutient qu'il appartient à l'intimé d'apporter la justification que le remboursement de son compte courant constituait une dette échue et échappait ainsi à l'application des dispositions du texte ci-dessus rappelées ;
Mais considérant qu'il appartient à l'appelante de justifier de l'existence de conditions particulières, notamment au regard de l'exigibilité, précisées dans les statuts ou dans une convention passée entre l'associé préteur et la société, quant au remboursement des avances consenties en compte courant ;
Qu'en l'absence d'une telle clause, le solde créditeur d'un compte courant d'associé constitue une dette échue, dont le titulaire du compte est, à tout moment, en droit de demander le remboursement ;
Considérant qu'il s'ensuit que les dispositions de l'article 107 de la loi du 25 janvier 1985, ne sont pas applicables en l'espèce ;
* sur l'application de l'article 108 de la loi du 25 janvier 1985.
Considérant, en droit, que selon l'article 108 de la loi du 25 janvier 1985 " les paiements pour dettes échues effectuées après la date de cessation des paiements (…) peuvent être annulés si ceux qui ont traité avec le débiteur ont eu connaissance de la cessation des paiements " ;
Considérant, en l'espèce, que Me PENET-WEILLER, ès qualités, prétend que l'intimé ne pouvait ignorer la situation financière de SH9 dès lors qu'il ne conteste pas avoir assisté à l'assemblée générale de la société, tenue le 29 juillet 1993, au cours de laquelle le président directeur général aurait rappelé qu'elle avait été réunie pour délibérer sur les mesures urgentes qui devaient être adoptées compte tenu de la situation ;
Mais considérant que, à défaut d'éléments précis de nature à établir la connaissance qu'a un associé de la situation réelle de la société, la qualité d'associé ne suffit pas, par elle-même, à démontrer qu'il dispose de tous les éléments d'appréciation de cette situation ;
Considérant que la seule participation de M. A, qui détenteur de 900 des 51.000 actions de SH9, n'occupait par ailleurs aucune fonction de gestion ou de direction, à l'assemblée générale du 29 juillet 1993 ne lui permettait pas d'avoir connaissance de l'état de cessation des paiements de la société ;
Qu'en effet, il résulte du procès-verbal de cette assemblée générale que, l'ordre du jour débattu concernant exclusivement la restructuration de ses filiales, il n'a été, à aucun moment, évoqué l'état de cessation des paiements de SH9, ;
Considérant que les conditions d'application des dispositions de l'article 108 de la loi du 25 janvier 1985 ne sont donc pas remplies ; qu'il convient en conséquence de confirmer le jugement déféré ;
* sur l'application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Considérant que Me PENET-WEILLER, ès qualités, partie perdante, ne peut se prévaloir de l'application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile; qu'en revanche, l'équité commande de la condamner, sur ce même fondement, à payer à M. A la somme de 5.000 francs ;
PAR —E CES MOTIFS :
Confirme le jugement déféré ;
Y ajoutant,
Condamne Me PENET-WEILLER, ès qualités, à payer à M. Aa A la somme de 5.000 francs au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;
Rejette toute autre demande plus ample ou contraire à la présente motivation ;
Condamne Me PENET-WEILLER, ès qualités, aux dépens d'appel ;
Admet Me CORDEAU, avoué, au bénéfice de l'article 699 du nouveau code procédure civile.