Cass. crim., 24 février 1972, n° 70-92.605
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Rolland
Rapporteur :
M. Hauss
Avocat général :
M. Boucheron
Avocat :
Me Fortunet
SUR LE PREMIER MOYEN DE CASSATION, PRIS DE LA VIOLATION DES ARTICLES 105, 172, 174 DU CODE DE PROCEDURE PENALE ET 7 DE LA LOI DU 20 AVRIL 1810, DEFAUT DE MOTIFS, MANQUE DE BASE LEGALE, "EN CE QUE L'ARRET ATTAQUE, RENDU A LA SUITE D'UNE INSTRUCTION NULLE POUR INCULPATION TARDIVE, A CONFIRME LE JUGEMENT PRONONCANT L'IRRECEVABILITE DU MOYEN TIRE DE CETTE NULLITE, AU MOTIF QU'ELLE N'ENTRAIT PAS DANS LES PREVISIONS DE L'ARTICLE 174 DU CODE DE PROCEDURE PENALE ;
"ALORS QUE, D'UNE PART, REVETANT UN CARACTERE D'ORDRE PUBLIC, CE MOYEN ETAIT RECEVABLE DEVANT LA JURIDICTION CORRECTIONNELLE ;
"ALORS QUE, D'AUTRE PART, ET EN TOUT ETAT DE CAUSE, IL EST RECEVABLE DEVANT LA COUR DE CASSATION ET NE PEUT, EN CONSEQUENCE, QU'ENTRAINER LA NULLITE DE L'ARRET DE CONDAMNATION" ;
ATTENDU QU'IL RESULTE DES ENONCIATIONS DE L'ARRET ATTAQUE QUE X..., RENVOYE DEVANT LE TRIBUNAL CORRECTIONNEL PAR ORDONNANCE DU JUGE D'INSTRUCTION, SOUS LA PREVENTION DE FAUX EN ECRITURE PRIVEE ET USAGE DE FAUX, A, AVANT TOUTE DEFENSE AU FOND, DEVANT LE TRIBUNAL, AINSI QUE DEVANT LA COUR D'APPEL, DEPOSE DES CONCLUSIONS PAR LESQUELLES IL DEMANDAIT QUE LA NULLITE DE L'INFORMATION SOIT PRONONCEE, AU MOTIF QU'EN VIOLATION DES DISPOSITIONS DE L'ARTICLE 105 DU CODE DE PROCEDURE PENALE, SON INCULPATION AURAIT ETE TARDIVE ;
ATTENDU QUE LES JUGES DU FOND ONT ECARTE CES CONCLUSIONS, EN FAISANT VALOIR QUE LES JURIDICTIONS CORRECTIONNELLES N'AVAIENT QUALITE POUR CONSTATER LES NULLITES DE L'INFORMATION QUE SI CES NULLITES ETAIENT DE CELLES QUE VISE L'ARTICLE 170, OU SI ELLES RESULTAIENT DE L'INOBSERVATION DES PRESCRIPTIONS DE L'ARTICLE 183, ALINEA 1ER, ET QUE TEL N'ETAIT PAS LE CAS DE L'ESPECE ;
ATTENDU QUE SI, A LA VERITE, L'ARRET, EN DECIDANT, COMME IL VIENT D'ETRE RAPPELE, A MECONNU LE SENS ET LA PORTEE DE L'ARTICLE 174 DU CODE DE PROCEDURE PENALE, ET, PAR VOIE DE CONSEQUENCE, LES POUVOIRS DES JURIDICTIONS REPRESSIVES EN LA MATIERE, IL NE SAURAIT CEPENDANT ETRE CASSE DE CE CHEF, LA NULLITE ALLEGUEE AU MOYEN N'ETANT PAS ETABLIE ;
QU'EN EFFET, IL RESULTE DU PROCES-VERBAL D'AUDITION DE X... QU'AVANT DE L'ENTENDRE, LE JUGE D'INSTRUCTION LUI A DONNE CONNAISSANCE DES TERMES DE L'ARTICLE 105 ET L'A SPECIALEMENT INTERPELLE SUR LE POINT DE SAVOIR S'IL CONSENTAIT A REPONDRE EN QUALITE DE TEMOIN OU S'IL PREFERAIT ETRE IMMEDIATEMENT INCULPE POUR POUVOIR BENEFICIER DES GARANTIES ACCORDEES A LA DEFENSE ;
QUE X... QUI EST D'AILLEURS AVOCAT A DECLARE VOULOIR ETRE ENTENDU COMME TEMOIN ;
QU'IL A ENSUITE AVOUE ETRE MATERIELLEMENT L'AUTEUR DES PIECES ARGUEES DE FAUX ;
QUE LE JUGE D'INSTRUCTION A ALORS INTERROMPU SON AUDITION EN QUALITE DE TEMOIN ;
QUE X... A ETE INCULPE ULTERIEUREMENT PUIS INTERROGE A DIVERSES REPRISES COMME INCULPE ;
QU'IL A MAINTENU SA VERSION DES FAITS, D'APRES LAQUELLE, S'IL AVAIT BIEN ETABLI LES PIECES LITIGIEUSES, IL N'AVAIT PAS, SELON LUI, EN CE FAISANT COMMIS LE DELIT DE FAUX EN ECRITURE PRIVEE ;
ATTENDU QUE, DE CET ENSEMBLE DE FAITS, IL RESSORT SANS EQUIVOQUE QUE LE JUGE D'INSTRUCTION, EN PROCEDANT COMME IL L'A FAIT, N'A PAS EU POUR DESSEIN DE FAIRE ECHEC AUX DROITS DE LA DEFENSE ;
QUE LES DISPOSITIONS DE L'ARTICLE 105 DU CODE DE PROCEDURE PENALE N'AYANT PAS ETE VIOLEES, IL S'ENSUIT QUE LE MOYEN DOIT ETRE REJETE ;
SUR LE SECOND MOYEN DE CASSATION, PRIS DE LA VIOLATION DES ARTICLES 150, 151 DU CODE PENAL ET 7 DE LA LOI DU 20 AVRIL 1810, DEFAUT DE REPONSE AUX CONCLUSIONS, DEFAUT DE MOTIFS, MANQUE DE BASE LEGALE, "EN CE QUE L'ARRET CONFIRMATIF ATTAQUE A RETENU A L'ENCONTRE DU PREVENU LES DELITS DE FAUX ET USAGE DE FAUX ;
"AU MOTIF QUE LES ELEMENTS CONSTITUTIFS EN ETAIENT REUNIS ;
"ALORS QUE D'UNE PART, DANS SES CONCLUSIONS D'APPEL DEMEUREES SUR CE POINT SANS REPONSE, LE PREVENU AVAIT SOULIGNE QUE L'IMITATION DE LA SIGNATURE DE L'INTERESSEE AVAIT ETE AUTORISEE ET MEME DEMANDEE PAR LE FRERE ET LE MANDATAIRE DE CETTE DERNIERE, CE QUI EXCLUAIT LE DELIT DE FAUX ;
"ALORS QUE D'AUTRE PART L'ARRET N'A PAS DAVANTAGE REPONDU AU MOYEN, CONCERNANT LES DEUX DELITS POURSUIVIS, TIRE DE L'ABSENCE DE TOUT PREJUDICE POUR SA CLIENTE, DONT LE FRERE ET MANDATAIRE CONNAISSAIT LE MONTANT DE LA TRANSACTION, OBJET DU RECU INCRIMINE" ;
ATTENDU QU'IL RESULTE DE L'ARRET ATTAQUE QUE X... A ETE RENVOYE DEVANT LA JURIDICTION DE JUGEMENT POUR AVOIR, DE SA MAIN, PORTE SUR UNE QUITTANCE DE REGLEMENT AMIABLE, CONCERNANT UNE INDEMNITE D'ACCIDENT, REVENANT A VEUVE Y..., SA CLIENTE, LA MENTION "LU ET APPROUVE ;
BON POUR QUITTANCE DEFINITIVE ET SANS RESERVE", EN LA FAISANT SUIVRE DU NOM DE L'INTERESSEE, ET POUR AVOIR, D'AUTRE PART, FAIT TRANSMETTRE CE FAUX DOCUMENT A LA COMPAGNIE D'ASSURANCE QUI LUI A ADRESSE EN CONTREPARTIE, UN CHEQUE D'UN MONTANT DE 18.901 FRANCS DESTINE A REPARER LE PREJUDICE SUBI PAR VEUVE Y..., EN SUS D'UNE PROVISION DE 1.000 FRANCS, DEJA VERSEE ANTERIEUREMENT ET QUE X... AVAIT CONSERVEE POUR FAIRE FACE AUX FRAIS DE LA PROCEDURE ;
QUE L'ARRET ENONCE, EN OUTRE, QUE X..., BIEN QUE RECONNAISSANT LA MATERIALITE DES DELITS, A SOUTENU DEVANT LES JUGES D'APPEL, POUR CONTESTER L'EXISTENCE, EN L'OCCURRENCE, DE L'INTENTION FRAUDULEUSE ET D'UN PREJUDICE CARACTERISE, NE S'ETRE RENDU COUPABLE DE CONTREFACON D'ECRITURES ET DE SIGNATURE QU'AVEC L'ASSENTIMENT DE Z..., FRERE ET MANDATAIRE DE VEUVE Y..., DANS UN BUT DE CELERITE ET POUR RENDRE SERVICE A SA CLIENTE ;
QU'IL A PRETENDU QUE VEUVE Y... N'AURAIT SUBI AUCUN DOMMAGE DU FAIT DU FAUX INCRIMINE, LA SOMME DE 1.901 FRANCS QU'IL A RETENUE SUR L'INDEMNITE, DESTINEE A SA CLIENTE, CORRESPONDANT AUX HONORAIRES CONVENUS ET UN SUPPLEMENT DE 1.700 FRANCS QUI LUI AVAIT ETE REMIS PAR Z... N'AYANT PAS ETE SOLLICITE ET AYANT D'AILLEURS ETE RESTITUE ;
ATTENDU QUE POUR DECLARER X... COUPABLE DES DELITS PREVUS ET REPRIMES PAR LES ARTICLES 150, 147 ET 151 DU CODE PENAL, LA COUR D'APPEL A RELEVE QUE LA RECEPTION DE LA PIECE FAUSSE AVAIT CONDITIONNE LE PAYEMENT, PAR LA COMPAGNIE D'ASSURANCE DE L'INDEMNITE TRANSACTIONNELLE, ET QUE, POUR FAIRE MIEUX CROIRE A L'AUTHENTICITE DE CE DOCUMENT, LE PREVENU AVAIT REPRODUIT LES FAUTES D'ORTHOGRAPHE, COMMISES PAR SA CLIENTE, LORS DE LA SIGNATURE DE LA PRECEDENTE QUITTANCE ;
QUE LES JUGES DU SECOND DEGRE ONT PRECISE, EN OUTRE, QUE X... AVAIT TENU VEUVE Y... A L'ECART DES NEGOCIATIONS QUI DEVAIENT ABOUTIR A LA CONCLUSION DE LA TRANSACTION DONT ELLE IGNORAIT LE MONTANT ;
QUE LE PREVENU S'ETAIT REFUSE A FOURNIR DES COMPTES ET A COMMUNIQUER LA CORRESPONDANCE CONCERNANT CET ACCORD AMIABLE ET, QU'EN REMETTANT A SA CLIENTE UN CHEQUE DE 17.000 FRANCS SEULEMENT, IL AVAIT FAUSSEMENT AFFIRME QUE CE MONTANT CONSTITUAIT L'ENTIERE INDEMNITE TRANSACTIONNELLE, ET PRESENTE UNE QUITTANCE FICTIVE DE CETTE SOMME ;
QU'ILS ONT CONCLU, QU'EN COMMETTANT LE FAUX INCRIMINE, X... AVAIT EU POUR BUT DE SE PROCURER UN AVANTAGE PECUNIAIRE AU PREJUDICE DE VEUVE Y..., GRACE A LA DISSIMULATION DU DETOURNEMENT DE CERTAINES SOMMES ET QUE SON INTENTION FRAUDULEUSE SE TROUVAIT AINSI ETABLIE, ENCORE QUE LES SOMMES DETOURNEES AIENT ETE REMBOURSEES ULTERIEUREMENT ;
ATTENDU QU'IL SE DEDUIT DE CES CONSTATATIONS ET ENONCIATIONS QUE L'ALTERATION DE LA VERITE, SCIEMMENT COMMISE PAR X..., ETAIT SUSCEPTIBLE DE PORTER PREJUDICE, AUSSI BIEN A LA COMPAGNIE D'ASSURANCE QU'A VEUVE Y... ELLE-MEME ET QUE LE PREVENU EN AVAIT CONNAISSANCE ;
QU'IL EST SANS INTERET EN L'ESPECE, QU'UN ACCORD AIT OU NON ETE DONNE PAR UN PRETENDU MANDATAIRE DE VEUVE Y... ;
ATTENDU QU'EN REPOUSSANT LES CONSEQUENCES QUE LE DEMANDEUR ENTENDAIT DEDUIRE DE CE PRETENDU ACCORD, LES JUGES D'APPEL ONT REPONDU, IMPLICITEMENT MAIS NECESSAIREMENT AUX CONCLUSIONS DEPOSEES PAR X... ET QUI TENDAIENT ESSENTIELLEMENT A FAIRE JUGER QUE LES DELITS DE FAUX ET D'USAGE DE FAUX N'ETAIENT PAS CARACTERISES DANS LEURS ELEMENTS CONSTITUTIFS ;
D'OU IL SUIT QUE LE MOYEN N'EST PAS FONDE ;
ET ATTENDU QUE L'ARRET EST REGULIER EN LA FORME : REJETTE LE POURVOI.