Cass. 2e civ., 16 mars 2017, n° 16-11.314
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Flise
Avocats :
SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, SCP Waquet, Farge et Hazan
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Bécheret-Thierry-Sénéchal-Gorrias, agissant en qualité de liquidateur ou de commissaire à l'exécution du plan de la société Aro menuiserie et de cinquante-quatre autres personnes, a été autorisée par ordonnance d'un juge de l'exécution à faire pratiquer une saisie conservatoire de créance à l'encontre de la société SOGRC (la société), qui en a sollicité la mainlevée ;
Sur le premier moyen, pris en ses deux premières branches :
Attendu que la société fait grief à l'arrêt de la débouter des exceptions de nullité formées à l'encontre tant de l'ordonnance sur requête du 18 janvier 2013 que des saisies conservatoires litigieuses, et de dire n'y avoir lieu à rétractation de l'ordonnance sur requête du juge de l'exécution du 18 janvier 2013, alors, selon le moyen :
1°/ qu'à peine de nullité de son ordonnance, le juge détermine le montant des sommes pour la garantie desquelles la mesure conservatoire est autorisée et précise les biens sur lesquels elle porte ; que l'ordonnance qui autorise un prétendu créancier à pratiquer la saisie conservatoire de tous les comptes ouverts au nom du saisi entre les livres de tout établissement financier ne répond pas à l'exigence de précision des biens sur lesquels porte la saisie conservatoire ; qu'en décidant le contraire au motif inopérant qu'un tel libellé exclut les biens qui ne seraient pas des comptes, la cour d'appel a violé l'article R. 511-4 du code des procédures civiles d'exécution ;
2°/ que l'ordonnance qui autorise un prétendu créancier à pratiquer la saisie conservatoire de tous les comptes ouverts au nom du saisi entre les livres de tout établissement financier ne répond pas à l'exigence de précision des biens sur lesquels porte la saisie conservatoire, une telle imprécision ne pouvant être palliée par l'identification ultérieure des comptes par l'interrogation que l'ordonnance litigieuse autorise du fichier Ficoba ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé l'article R. 511-4 du code des procédures civiles d'exécution ;
Mais attendu qu'ayant relevé que le juge de l'exécution avait autorisé le représentant de la procédure collective à pratiquer au préjudice de la société une saisie conservatoire de ses comptes pour garantir une créance chiffrée entre les mains de tout établissement financier qui pourrait les détenir, c'est à bon droit que la cour d'appel a retenu que l'ordonnance, qui déterminait le montant de la créance et les biens sur lesquels portait la saisie, soit les sommes détenues sur tout compte bancaire, était suffisamment précise ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le second moyen :
Vu les articles L. 152-1 et L. 152-2 du code des procédures civiles d'exécution et l'article L. 151 A du livre des procédures fiscales, en leur rédaction alors applicable, ensemble les articles L. 111-2 et L. 111-3 du code des procédures civiles d'exécution ;
Attendu qu'il résulte de ces textes que les administrations, les entreprises concédées ou contrôlées par l'Etat, les régions, les départements, les communes, les établissements publics ou les organismes contrôlés par l'autorité administrative et les établissements habilités par la loi à tenir des comptes de dépôt doivent communiquer à l'huissier de justice chargé de l'exécution, dès lors qu'il est porteur d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible, les renseignements qu'ils détiennent, permettant de déterminer l'adresse des organismes auprès desquels un compte est ouvert au nom du débiteur ;
Attendu que pour débouter la société de sa demande d'annulation de l'ordonnance, l'arrêt retient que l'huissier de justice, qui détient l'autorisation du juge de l'exécution de pratiquer une mesure conservatoire, est porteur d'un titre exécutoire lui permettant de consulter le fichier Ficoba pour obtenir la liste des comptes détenus par la société ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'ordonnance du juge de l'exécution autorisant à procéder à une saisie conservatoire ne constitue pas le titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible dont doit se prévaloir l'huissier de justice à l'occasion de la mise en oeuvre d'une mesure d'exécution forcée ou d'une mesure conservatoire pour obtenir l'adresse des organismes auprès desquels un compte est ouvert au nom du débiteur, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la troisième branche du premier moyen :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 17 novembre 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Dijon ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon.