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Décisions

Cass. com., 13 avril 1972, n° 70-14.443

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Guillot

Rapporteur :

M. Larere

Avocat général :

M. Robin

Avocat :

Me Lemanissier

Paris, du 8 mai 1970

8 mai 1970

SUR LE PREMIER MOYEN : ATTENDU QUE SELON LES ENONCIATIONS DE L'ARRET ATTAQUE (PARIS,8 MAI 1970), X... A ETE RECONNU COPROPRIETAIRE, A CONCURRENCE DE LA MOITIE, DU BREVET D'INVENTION N° 1 178 836 CONCERNANT UNE POMPE A JERRICANE, DEMANDE PAR Y... LE 30 AVRIL 1957 ET DELIVRE A CE DERNIER LE 27 OCTOBRE 1958 ;

QUE CE BREVET AVAIT ETE ANTERIEUREMENT APPORTE PAR Y..., QUI S'EN PRESENTAIT COMME SEUL PROPRIETAIRE, A UNE SOCIETE INDUSTRIELLE ET MECANIQUE D'APPAREILS A MAZOUT ET ELECTRIQUES DITE SIMANE CONSTITUEE LE 25 JUILLET 1957 ENTRE Y... ET LES EPOUX Z... QUI EN DETENAIENT LA MAJORITE DES PARTS ;

QUE CE BREVET FUT EXPLOITE, D'ABORD PERSONNELLEMENT PAR Y..., PUIS PAR LA SIMANE, PENDANT DEUX ANNEES ET FRAPPE DE DECHEANCE EN 1959 POUR DEFAUT DE PAIEMENT DES ANNUITES ;

QUE X... SOUTENANT NOTAMMENT QUE LE BREVET AVAIT ETE EXPLOITE EN FRAUDE DE SES DROITS FIT ASSIGNER Y... ET LA SOCIETE SIMANE POUR LES FAIRE CONDAMNER A LUI RESTITUER LA MOITIE DES PRODUITS DE L'EXPLOITATION DU BREVET ;

ATTENDU QU'IL EST FAIT GRIEF A L'ARRET DEFERE D'AVOIR DECIDE QUE X... NE POUVAIT OBTENIR LA RESTITUTION DES FRUITS ANTERIEURS A SON ACTION EN JUSTICE AU MOTIF NOTAMMENT QUE CELLE-CI N'ETAIT PAS UNE ACTION EN CONTREFACON ET QU'X... S'ETAIT BORNE A REVENDIQUER UN DROIT DE COPROPRIETE SUR UN BREVET ET EN CONSEQUENCE LA PART DU BENEFICE D'EXPLOITATION QU'IL PRETEND LUI REVENIR EN VERTU DE CE DROIT ET QUE, DANS LES LIMITES DE CETTE ACTION, LE DEFAUT D'ENREGISTREMENT AU REGISTRE SPECIAL DES BREVETS DE L'APPORT EN SOCIETE DU BREVET LITIGIEUX N'IMPORTE PAS, ALORS QUE, SELON LE POURVOI, RIEN DANS LE TEXTE DES ARTICLES 20 ET 21 DE LA LOI DU 5 JUILLET 1844 ORGANISANT LA PUBLICITE DES ACTES EMPORTANT TRANSMISSION DES DROITS DE PROPRIETE OU D'EXPLOITATION D'UN BREVET, NE PERMET DE FAIRE UNE TELLE DISTINCTION ;

MAIS ATTENTION QUE LA COUR D'APPEL RELEVE QUE X... FONDE SA REVENDICATION UNIQUEMENT SUR LA RECONNAISSANCE DE COPROPRIETE SOUSCRITE PAR Y... A SON PROFIT LE 28 MARS 1956 ET DECLARE QUE L'INSCRIPTION DE L'APPORT EN SOCIETE DU BREVET SUR LE REGISTRE DES BREVETS N'EUT PAS EMPECHE LE SUCCES DE SON ACTION EN REVENDICATION DE PROPRIETE ;

QUE L'ARRET EN DEDUIT JUSTEMENT QUE L'ABSENCE D'INSCRIPTION N'A PAS EU POUR EFFET DE MODIFIER LES CONSEQUENCES QU'X... POUVAIT TIRER DE SON DROIT ;

QU'EN CONSEQUENCE, LA COUR D'APPEL DECIDE A JUSTE TITRE QUE X... DOIT SE VOIR RECONNAITRE LE DROIT A LA MOITIE DES PRODUITS NETS D'EXPLOITATION DU BREVET PENDANT LA PERIODE OU Y... S'EST LIVRE SEUL A CETTE EXPLOITATION ;

QU'EXAMINANT LE CAS DE LA SOCIETE SIMANE L'ARRET A PU, SANS MECONNAITRE L'INOPPOSABILITE AUX TIERS D'UNE CESSION OU D'UN APPORT EN SOCIETE DE BREVET, NON INSCRIT AU REGISTRE SPECIAL, DECIDER QUE X... NE POUVAIT SE FONDER SUR L'ABSENCE D'ENREGISTREMENT POUR CONTRAINDRE UNE SOCIETE, DONT LA MAUVAISE FOI N'ETAIT PAS ETABLIE, A RESTITUER LES FRUITS PRODUITS AVANT QUE L'ACTION EN JUSTICE NE LUI AIT REVELE LE VICE AFFECTANT PARTIELLEMENT LA PROPRIETE DU BREVET DONT IL LUI AVAIT ETE FAIT APPORT ;

D'OU IL SUIT QUE LE MOYEN NE PEUT ETRE ACCUEILLI ;

SUR LE DEUXIEME MOYEN : ATTENDU QU'IL EST REPROCHE A LA COUR D'APPEL D'AVOIR REFUSE DE DIRE, COMME L'AVAIENT FAIT AU CONTRAIRE LES PREMIERS JUGES, QUE LA SOCIETE SIMANE AVAIT EXPLOITE LE BREVET DANS DES CONDITIONS CONSTITUTIVES DE CONTREFACON A L'EGARD D'X..., ALORS QUE, SELON LE POURVOI, L'EXPLOITATION DU BREVET PAR LA SIMANE A, DE TOUTE FACON, CONSTITUE L'ATTEINTE AUX DROITS DU BREVETE DONT PARLE LA LOI ;

MAIS ATTENDU QUE LA COUR D'APPEL, QUI ANALYSE EXACTEMENT L'ACTION ENGAGEE PAR X... COMME UNE ACTION EN REVENDICATION DE LA COPROPRIETE D'UN BREVET ET NON COMME UNE ACTION EN CONTREFACON ET QUI CONSTATE QUE LA SOCIETE SIMANE ETAIT A CONCURRENCE DE LA MOITIE PROPRIETAIRE DU BREVET REVENDIQUE, S'EST ABSTENUE A JUSTE TITRE DE FAIRE APPLICATION DES DISPOSITIONS DE LA LOI CONCERNANT LE DELIT DE CONTREFACON ;

QUE, DES LORS, LE MOYEN EST DEPOURVU DE TOUT FONDEMENT ;

SUR LE TROISIEME MOYEN, PRIS EN SES DEUX BRANCHES : ATTENDU QU'IL EST EGALEMENT FAIT GRIEF A L'ARRET ATTAQUE D'AVOIR REFUSE D'ORDONNER LA RESTITUTION PAR LA SIMANE DES PRODUITS DE L'EXPLOITATION DU BREVET ANTERIEURS A L'ACTION EN JUSTICE, AU MOTIF QUE LA MAUVAISE FOI DE CETTE SOCIETE N'AVAIT PAS ETE DEMONTREE, ALORS QUE, SELON LE POURVOI, D'UNE PART, LA MAUVAISE FOI N'EST PAS NECESSAIRE POUR QUE, L'ACTION, MEME QUALIFIEE D'ACTION EN REVENDICATION PRODUISE SES EFFETS A L'EGARD DE SIMANE ET QUE, D'AUTRE PART, MEME SI LA MAUVAISE FOI AVAIT ETE NECESSAIRE AU SUCCES DE LA DEMANDE DE RESTITUTION DES FRUITS ANTERIEURS PRESENTEE PAR X..., LA COUR D'APPEL NE POUVAIT, PAR DES MOTIFS DUBITATIFS ET HYPOTHETIQUES, JUGER QU'IL N'Y AVAIT PAS MAUVAISE FOI ;

MAIS ATTENDU, D'UNE PART, QUE SAISIE D'UNE ACTION DE REVENDICATION DE PROPRIETE, LA COUR D'APPEL A PU FAIRE APPLICATION DU PRINCIPE SELON LEQUEL LE POSSESSEUR EST DE BONNE FOI QUAND IL POSSEDE EN QUALITE DE PROPRIETAIRE, EN VERTU D'UN TITRE TRANSLATIF DE PROPRIETE DONT IL IGNORE LES VICES ET DECLARER LA SIMANE PROPRIETAIRE DES FRUITS DANS LEUR TOTALITE TANT QU'ELLE N'AVAIT PAS ETE INFORMEE DE L'ACTION ENGAGEE PAR X... ;

ATTENDU, D'AUTRE PART, QUE LA COUR D'APPEL EN DECLARANT QU'AUCUN ELEMENT DE LA CAUSE N'ETABLIT QUE LES EPOUX Z..., FONDATEURS DE LA SOCIETE, DONT ILS POSSEDENT LES DEUX TIERS DES PARTS, AIENT CONNU UNE FRAUDE QU'IL LEUR ETAIT PRATIQUEMENT IMPOSSIBLE DE DECELER A TRAVERS L'APPARENCE CREEE PAR LA DEMANDE DE BREVET AU SEUL NOM DE L'APPORTEUR, A STATUE PAR DES MOTIFS QUI NE SONT NI DUBITATIFS, NI HYPOTHETIQUES ET A APPRECIE SOUVERAINEMENT LA BONNE FOI DE LA SOCIETE ;

D'OU IL SUIT QUE LE MOYEN N'EST FONDE EN AUCUNE DE SES BRANCHES ;

PAR CES MOTIFS : REJETTE LE POURVOI FORME CONTRE L'ARRET RENDU LE 8 MAI 1970, PAR LA COUR D'APPEL DE PARIS.