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Décisions

Cass. crim., 5 janvier 1971, n° 69-93.323

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Costa

Rapporteur :

M. Gagne

Avocat général :

M. Boucheron

Avocat :

Me Lemaître

Bordeaux, du 12 nov. 1969

12 novembre 1969

SUR LE PREMIER MOYEN DE CASSATION, PRIS DE LA VIOLATION DES ARTICLES 147, 150 ET 151 DU CODE PENAL, ET DE L'ARTICLE 7 DE LA LOI DU 20 AVRIL 1810 POUR DEFAUT DE MOTIFS ET MANQUE DE BASE LEGALE, EN CE QUE L'ARRET ATTAQUE A PRONONCE CONDAMNATION POUR FAUX ET USAGE DE FAUX AU MOTIF QUE LE PREVENU AVAIT APPOSE DE FAUSSES OBLITERATIONS ET DE FAUSSES GRIFFES DE L'EXPERT SUR DES TIMBRES-POSTE ET SUR DES ENVELOPPES PORTANT LESDITS TIMBRES QU'IL AVAIT ENSUITE UTILISES ;

ALORS QU'IL NE S'AGISSAIT NI D'UN ACTE NI D'UNE ECRITURE NI D'UN DOCUMENT ET QUE LES TIMBRES OBLITERES ET REVETUS DE LA FAUSSE GRIFFE D'UN EXPERT N'ETAIENT PAS SUSCEPTIBLES DE CONSTITUER UN TITRE NI SERVIR DE BASE A L'EXERCICE D'UN DROIT OU D'UNE ACTION EN SORTE QUE LES CONDITIONS ESSENTIELLES DE L'INFRACTION FAISAIENT DEFAUT ;

ATTENDU QU'IL RESULTE TANT DES CONSTATATIONS DE L'ARRET ATTAQUE QUE DE CELLES DU JUGEMENT CONFIRME QUE X..., APRES AVOIR, COURANT 1967, ACHETE A UN NEGOCIANT EN TIMBRES-POSTE DES QUANTITES TRES IMPORTANTES DE TIMBRES-POSTE NON SURCHARGES EMIS SOUS L'OCCUPATION A L'EFFIGIE DU MARECHAL PETAIN, LES A COLLES SUR DES ENVELOPPES DONT LES ADRESSES DE FANTAISIE AVAIENT ETE DACTYLOGRAPHIEES PAR LUI ;

QU'IL A ENSUITE SURCHARGE CES TIMBRES DE DIVERSES MENTIONS IMITANT CELLES IMPRIMEES SUR CERTAINS TIMBRES PAR L'ADMINISTRATION DES POSTES, LORS DE LA LIBERATION ;

QU'IL A, DE MEME, OBLITERE CES TIMBRES PAR DES CACHETS IMITANT CEUX UTILISES A L'EPOQUE PAR L'ADMINISTRATION DES POSTES ;

QU'ENFIN, POUR TENTER D'AUTHENTIFIER SON TRAVAIL, X... A REVETU D'UNE FAUSSE GRIFFE DE L'EXPERT Y... LES ENVELOPPES AINSI PREPAREES, PUIS LES A VENDUES OU OFFERTES EN VENTE A DIVERS PHILATELISTES ;

ATTENDU QU'A LA VERITE, LES FAITS TELS QU'ILS ONT ETE CONSTATES SOUVERAINEMENT PAR LES JUGES DU FOND CONSTITUENT NON PAS LES SEULS DELITS DE FAUX ET USAGE DE FAUX, MAIS, 1° POUR CE QUI EST DES SURCHARGES APPOSEES SUR LES TIMBRES, LE DELIT PREVU ET REPRIME PAR L'ARTICLE 144-4° DU CODE PENAL QUI PUNIT CEUX QUI AURONT SURCHARGE PAR IMPRESSION OU TOUT AUTRE MOYEN LES TIMBRES-POSTE DE LA METROPOLE, PERIMES OU NON ;

2° POUR CE QUI EST DES FAUX CACHETS D'OBLITERATION LE DELIT PREVU ET REPRIME PAR L'ARTICLE 142-2° DU CODE PENAL QUI PUNIT CEUX QUI ONT CONTREFAIT LE TIMBRE OU LA MARQUE D'UNE AUTORITE QUELCONQUE OU QUI AURONT FAIT USAGE DE SCEAU, TIMBRE OU MARQUE CONTREFAITS ;

ATTENDU, CEPENDANT, QU'AUX TERMES DE L'ARTICLE 598 DU CODE DE PROCEDURE PENALE, L'ARRET NE SAURAIT ETRE CENSURE EN RAISON DE CES ERREURS DE QUALIFICATION, LA PEINE PRONONCEE ENTRANT DANS LES PREVISIONS DE LA LOI QUI S'APPLIQUE A L'INFRACTION ;

ATTENDU, ENFIN, QUE C'EST A BON DROIT QUE L'ARRET A DECLARE LE DEMANDEUR COUPABLE DE FAUX ET USAGE DE FAUX EN ECRITURES PRIVEES A RAISON DE LA FAUSSE GRIFFE DE L'EXPERT Y... PORTEE PAR LUI SUR LES ENVELOPPES ;

QU'EN EFFET, L'IMITATION D'UNE SIGNATURE SOUS FORME COMME EN L'ESPECE D'UNE FAUSSE GRIFFE, CONSTITUE UN FAUX MATERIEL PUNISSABLE DES L'INSTANT OU IL EST DE NATURE A PORTER PREJUDICE A AUTRUI ;

QU'AINSI LE MOYEN NE SAURAIT ETRE ACCUEILLI ;

SUR LE DEUXIEME MOYEN DE CASSATION, PRIS DE LA VIOLATION DES ARTICLES 8 ET 593 DU CODE DE PROCEDURE PENALE, ET DE L'ARTICLE 7 DE LA LOI DU 20 AVRIL 1810 POUR DEFAUT DE MOTIFS ET MANQUE DE BASE LEGALE, EN CE QUE L'ARRET NE S'EST PAS EXPLIQUE SUR L'EXCEPTION DE PRESCRIPTION INVOQUEE EXPRESSEMENT PAR LE DEMANDEUR ET N'A PAS CONSTATE L'ABSENCE DE PRESCRIPTION EN CE QUI CONCERNE LE DELIT DE FAUX RETENU A SON ENCONTRE ;

ALORS QUE L'EXCEPTION DE PRESCRIPTION EST D'ORDRE PUBLIC ET QU'EN PRESENCE DE CONCLUSIONS EXPRESSES L'INVOQUANT, L'AFFIRMATION QUE LE DELIT A ETE COMMIS DEPUIS TEMPS NON PRESCRIT NE CONSTITUE PAS UNE CONSTATATION SUFFISANTE DE L'ABSENCE DE PRESCRIPTION ;

ATTENDU QUE L'ARRET ATTAQUE, REPONDANT AUX CONCLUSIONS DEPOSEES PAR LE DEMANDEUR, ENONCE EN TERMES EXPRES QUE DES ELEMENTS ACCABLANTS VIENNENT CONFIRMER QUE X... A PERPETRE LES FAUX A UNE DATE RECENTE, ET DEPUIS TEMPS NON PRESCRIT LORS DES POURSUITES ;

QUE L'ARRET A ENUMERE LES PRESOMPTIONS GRAVES, PRECISES ET CONCORDANTES SUR LESQUELLES IL SE FONDAIT POUR ASSEOIR SA DECISION ;

ATTENDU QU'IL APPARTIENT AUX JUGES DU FOND DE DETERMINER LE POINT DE DEPART DE LA PRESCRIPTION ;

QUE LEURS CONSTATATIONS SUR CE POINT SONT SOUVERAINES DES LORS QU'ELLES NE COMPORTENT, COMME EN L'ESPECE, NI ILLEGALITE NI CONTRADICTION ;

D'OU IL SUIT QUE LE MOYEN NE SAURAIT ETRE ADMIS ;

SUR LE TROISIEME MOYEN DE CASSATION, PRIS DE LA VIOLATION DES ARTICLES 2, 3 ET SUIVANTS, 593 DU CODE DE PROCEDURE PENALE, DE L'ARTICLE 11 DU LIVRE 3 DU CODE DU TRAVAIL, ET DE L'ARTICLE 7 DE LA LOI DU 20 AVRIL 1810, POUR DEFAUT DE MOTIFS ET MANQUE DE BASE LEGALE, EN CE QUE L'ARRET ATTAQUE A DECLARE RECEVABLE L'ACTION CIVILE DE LA CHAMBRE SYNDICALE DES NEGOCIANTS EN TIMBRES-POSTE, SANS CONSTATER LA NATURE NI MEME L'OBJET DE CET ORGANISME ET SANS JUSTIFIER DE L'EXISTENCE D'UN PREJUDICE CAUSE A L'INTERET COLLECTIF DE LA PROFESSION OU A L'INTERET PARTICULIER DUDIT ORGANISME QUALIFIE D'ASSOCIATION PAR LA COUR ;

ALORS QUE LES JUGES DU FOND DEVAIENT PRECISER D'UNE PART S'IL S'AGISSAIT D'UN SYNDICAT PROFESSIONNEL OU D'UNE ASSOCIATION ET CONSTATER D'AUTRE PART, ET ENSUITE, LES CIRCONSTANCES DESQUELLES IL RESULTERAIT QUE L'INFRACTION RETENUE AURAIT LESE SOIT LES INTERETS DE LA PROFESSION, SOIT L'INTERET PARTICULIER DE L'ASSOCIATION ;

ATTENDU QUE LE JUGEMENT DONT LES MOTIFS ONT ETE ADOPTES PAR L'ARRET ATTAQUE ENONCE, POUR ACCUEILLIR LA CONSTITUTION DE PARTIE CIVILE DE LA CHAMBRE SYNDICALE DES NEGOCIANTS EN TIMBRES-POSTE, QUE LES AGISSEMENTS DES PREVENUS ONT ETE DE NATURE A PORTER PREJUDICE AU MARCHE DU TIMBRE ET AUX PHILATELISTES DONT ELLE (LA CHAMBRE SYNDICALE DES NEGOCIANTS EN TIMBRES-POSTE) A LA CHARGE DE DEFENDRE LES INTERETS ;

ATTENDU QU'UNE CHAMBRE SYNDICALE DE COMMERCANTS EST UN SYNDICAT PROFESSIONNEL QUI PEUT, AUX TERMES DE L'ARTICLE 11 DU LIVRE 3 DU CODE DU TRAVAIL, EXERCER DEVANT TOUTES LES JURIDICTIONS LES DROITS RESERVES A LA PARTIE CIVILE RELATIVEMENT AUX FAITS PORTANT PREJUDICE DIRECT OU INDIRECT A L'INTERET COLLECTIF DE LA PROFESSION ;

QU'IL RESSORT DES ENONCIATIONS DES JUGES DU FOND QUE LES INFRACTIONS RETENUES A LA CHARGE DE X... ONT PORTE PREJUDICE AU MARCHE DU TIMBRE ;

QU'ELLES ONT, DES LORS, NECESSAIREMENT LESE LES INTERETS COLLECTIFS DES NEGOCIANTS EN TIMBRES-POSTE ;

QU'IL S'ENSUIT QUE LA CONSTITUTION DE PARTIE CIVILE DE LA CHAMBRE SYNDICALE DES NEGOCIANTS EN TIMBRES-POSTE A ETE, A BON DROIT, DECLAREE RECEVABLE ;

QU'AINSI LE MOYEN NE SAURAIT ETRE RETENU ;

ET ATTENDU QUE L'ARRET EST REGULIER EN LA FORME ;

REJETTE LE POURVOI.