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Décisions

Cass. 3e civ., 30 avril 2003, n° 01-16.697

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Weber

Rapporteur :

M. Betoulle

Avocat général :

M. Cédras

Avocats :

SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, SCP Delaporte, Briard et Trichet

Paris, du 14 sept. 2001

14 septembre 2001

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu l'article L. 145-16, alinéa 2, du Code de commerce ;

Attendu qu'en cas de fusion de sociétés ou d'apport d'une partie de l'actif d'une société réalisé dans les conditions prévues à l'article L. 236-22, la société issue de la fusion ou la société bénéficiaire de l'apport est, nonobstant toute stipulation contraire, substituée à celle au profit de laquelle le bail était consenti dans tous les droits et obligations découlant de ce bail ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 14 septembre 2001), que par acte sous seing privé du 30 septembre 1997, la société à responsabilité limitée (SARL) Etablissements Braud, locataire de locaux à usage commercial appartenant à la société SEM plaine développement (société SPD), a fait un apport partiel d'actifs à la SARL Garage Braud sous la forme des éléments corporels et incorporels de son fonds de commerce de garage, en ce compris le droit au bail ; qu'après avoir fait délivrer le 29 septembre 1998 à la SARL Etablissements Braud, et, à toute fins, à la SARL Garage Braud, un congé sans offre de renouvellement avec indemnité d'éviction, la société SPD a rétracté son offre d'indemnité d'éviction le 24 juin 1999 en arguant d'une cession de fonds et de droit au bail sans son consentement ; que la société SPD a poursuivi pour ce motif la résiliation du bail aux torts des preneurs qui ont sollicité reconventionnellement une indemnité d'éviction ;

Attendu que pour rejeter cette dernière demande, l'arrêt retient que l'article L. 145-16, alinéa 2, du Code de commerce, qui permet la substitution de plein droit de locataires sans que les clauses restrictives de la cession puissent être invoquées, n'est pas applicable à la situation, l'apport partiel qu'il vise étant celui qui intervient entre deux sociétés anonymes ;

Qu'en statuant ainsi, alors que la société à responsabilité limitée qui apporte une partie de son actif à une autre société à responsabilité limitée et la société qui bénéficie ainsi de cet apport peuvent décider d'un commun accord de soumettre l'opération aux dispositions applicables en cas de scission par apports à des sociétés à responsabilité limitée existantes, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Et sur le moyen unique, pris en sa seconde branche :

Vu l'article L. 236-24 du Code de commerce, ensemble l'article L. 145-16, alinéa 2, du Code de commerce ;

Attendu que la société qui apporte une partie de son actif à une autre société et la société qui bénéficie ainsi de cet apport peuvent décider d'un commun accord de soumettre l'opération aux dispositions applicables en cas de scission par apports à des sociétés à responsabilité limitée existantes ;

Attendu que pour rejeter la demande tendant à voir reconnaître le droit à indemnité d'éviction de la SARL Garage Braud, l'arrêt retient que la préexistence de la société bénéficiaire de l'apport, condition spécifique aux sociétés à responsabilité limitée posée par l'article L. 236-24 du Code de commerce, n'est pas remplie en l'espèce puisqu'il résulte d'un extrait K bis que la société Garage Braud a été créée spécialement en vue de l'apport partiel d'actif, que si elle a été immatriculée au registre du commerce le 6 décembre 1996, elle n'a débuté son activité que le 30 septembre 1997, date de la convention d'apport partiel en cause ;

Qu'en statuant ainsi, alors que la SARL Garage Braud, régulièrement immatriculée avant la convention d'apport partiel d'actifs, préexistait à cet apport, la cour d'appel, qui a ajouté à la loi une condition qu'elle ne comporte pas, a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il a déclaré sans objet la demande de résiliation du bail, l'arrêt rendu le 14 septembre 2001, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles.