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Décisions

Cass. soc., 10 décembre 2014, n° 13-22.430

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Chollet

Avocats :

SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, SCP Spinosi et Sureau

Aix-en-Provence, du 7 juin 2013

7 juin 2013

Attendu, selon les arrêts attaqués, que la société Les Chantiers du Nord et de la Méditerranée (La Normed) a été créée le 24 décembre 1982 à la suite du regroupement des branches navales de trois autres sociétés ; que la société Normed a été mise en redressement judiciaire le 30 juin 1986 puis en liquidation judiciaire le 27 février 1989, Mme X... étant désignée en qualité de mandataire liquidateur ; que par arrêté du 7 juillet 2000, l'activité de réparation et de construction navales de cette société a été inscrite sur la liste des établissements susceptibles d'ouvrir droit au dispositif de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante (ACAATA) ; qu'invoquant, du fait d'une exposition à l'amiante, avoir subi des préjudices économique et d'anxiété, M. Y... et vingt et un autres salariés ont saisi la juridiction prud'homale aux fins d'obtenir des dommages et intérêts ;

Sur le deuxième moyen, qui est préalable :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ce moyen qui n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

Sur le troisième moyen relatif au seul pourvoi n° 13-22. 443 :

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt de déclarer recevable la demande de M. Z..., alors, selon le moyen, que l'article 11 du traité d'apport partiel d'actif stipule que « SPCN reprendra d'une manière générale et sans recours contre la société apporteuse les obligations contractées par cette dernière ou acceptées par elle, en application des contrats de travail ou de conventions collectives, dans les conditions prévues aux articles L. 122-12 et L. 123-7 du code du travail et concernant le personnel employé dans l'activité apportée » ; qu'il s'évince clairement et précisément de la volonté des parties que seuls les contrats de travail transférés à la Normed dans les conditions prévues aux articles L. 122-12 et L. 132-7 du code du travail donnaient lieu à reprise des engagements contractés par la société apporteuse, ce qui excluait les contrats de travail rompus avant le traité d'apport partiel d'actif ; qu'en énonçant que la Normed avait repris les engagements attachés aux contrats de travail rompus avant le traité d'apport, la cour d'appel a violé, par dénaturation de l'écrit, l'article 1134 du code civil ;

Mais attendu qu'il résulte des articles L. 236-3, L. 236-20 et L. 236-22 du code de commerce que sauf dérogation expresse prévue par les parties dans le traité d'apport, l'apport partiel d'actif emporte lorsqu'il est placé sous le régime des scissions, transmission universelle de la société apporteuse à la société bénéficiaire de tous les biens, droits et obligations dépendant de la branche d'activité qui fait l'objet de l'apport ;

Et attendu qu'ayant relevé que l'apport partiel d'actif était placé sous le régime juridique des scissions, la cour d'appel a exactement décidé que par l'effet du traité qui avait opéré une transmission universelle de tous les droits, biens et obligations concernant la branche de la division navale, les actions en responsabilité nées de cette branche d'activité transférée, notamment les actions nées du manquement de l'employeur à l'obligation de sécurité, devaient être dirigées contre la société La Normed, y compris pour les créances nées d'un contrat de travail rompu avant le traité d'apport ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le premier moyen :

Vu l'article L. 3253-8, 1° du code du travail ;

Attendu, selon ce texte, que l'AGS garantit les sommes dues aux salariés à la date du jugement d'ouverture de toute procédure de redressement ou de liquidation judiciaire ;

Attendu que pour dire que l'AGS doit garantir les créances fixées au passif de la Normed au titre du préjudice d'anxiété, les arrêts retiennent que le préjudice d'anxiété subi découle non pas de l'obligation de sécurité édictée à l'article L. 4121-1 du code du travail, mais du manquement contractuel fautif de l'employeur, lequel résulte de l'exposition à l'amiante au cours de l'exécution du contrat de travail, soit antérieurement à l'ouverture de la procédure collective de la société ;

Attendu cependant que le préjudice d'anxiété, qui ne résulte pas de la seule exposition à un risque créé par l'amiante, est constitué par les troubles psychologiques qu'engendre la connaissance de ce risque par les salariés ;

Qu'en statuant comme elle l'a fait, alors que le préjudice d'anxiété était né à la date à laquelle les salariés ont eu connaissance de l'arrêté ministériel d'inscription de l'activité de réparation et de construction navale de la Normed sur la liste des établissements permettant la mise en oeuvre de l'ACAATA, soit au plus tôt le 7 juillet 2000, à une date nécessairement postérieure à l'ouverture de la procédure collective, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Vu l'article 627 du code de procédure civile après avis donné aux parties conformément aux dispositions de l'article 1015 du même code ;


PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'ils disent que l'UNEDIC délégation AGS-CGEA Ile-de-France Ouest doit sa garantie, les arrêts rendus le 7 juin 2013, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

Dit n'y avoir lieu à renvoi ;

Dit n'y avoir lieu à garantie par l'AGS-CGEA Ile-de-France des créances des salariés fixées au passif de la liquidation judiciaire de la société Normed.