Cass. com., 13 mai 2003, n° 01-15.171
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Tricot
Sur le moyen unique, pris en ses diverses branches :
Attendu que Mlle X..., présidente de l'association Alpha et Oméga (l'association) mise en liquidation judiciaire le 9 septembre 1997, et Mlle Y..., trésorière de cette association, reprochent à l'arrêt confirmatif déféré (Lyon, 14 juin 2001) d'avoir prononcé à leur encontre, pour une durée de cinq ans, une interdiction de gérer, administrer ou contrôler directement ou indirectement toute entreprise commerciale ou artisanale, toute exploitation agricole et toute personne morale, alors, selon le moyen :
1 ) que selon les stipulations des articles 11 et 12 des statuts de l'association, le président qui remplit également les fonctions de trésorier est chargé à ce titre de tout ce qui concerne la gestion de l'association, effectue tous paiements et reçoit toutes sommes dues à l'association, tient une comptabilité régulière de toutes les opérations par lui effectuées et rend compte à l'assemblée générale annuelle qui approuve, s'il y a lieu, sa gestion ; qu'en énonçant que ces stipulations, pourtant propres au rôle du trésorier rempli par le président en cas d'identité de personne, établissent que Mlle Y... du fait qu'elle était trésorière de l'association bénéficiait de pouvoirs équivalents à ceux accordés au président, la cour d'appel a dénaturé lesdites stipulations et violé l'article 1134 du Code civil ;
2 ) qu'en ne répondant pas au moyen invoqué par Mlles Y... et X... dans leurs conclusions d'appel et essentiel à l'issue du litige, selon lequel si les fonctions de président et de trésorier de l'association étaient confondues dans les statuts d'origine, ceux-ci ont subi une modification le 1er mars 1995 à l'issue de laquelle Mlle Y... a été élue aux fonctions de trésorière, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
3 ) qu'a la qualité de dirigeant de fait la personne qui a, au sein de la société, une activité positive de direction, exercée souverainement et en toute indépendance ; qu'en se bornant à énoncer que Mlle Y... était directement impliquée dans la gestion de l'association au même titre que l'était le dirigeant avec lequel elle partageait les décisions pour conclure à sa qualité de dirigeant de fait sans caractériser par une appréciation concrète des éléments de la cause l'activité de direction exercée souverainement et en toute indépendance par celle-ci, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 625-1 et L. 625-8 du Code de commerce ;
4 ) que le tribunal peut prononcer la faillite personnelle du commerçant ayant omis de faire, dans le délai de quinze jours, la déclaration de l'état de cessation des paiements ; que si la date de cessation des paiements retenue par le tribunal est celle du jugement qui la constate, aucun retard dans la déclaration ne peut être reproché au débiteur ; que la cour d'appel, pour faire application de ces dispositions à l'encontre de Mlles X... et Y..., a retenu que l'association avait été reconnue en état de cessation des paiements depuis le 15 mars 1997 par jugement rendu le 9 septembre et par arrêt du 29 janvier 1999 et qu'elle devait à l'URSSAF de Lyon pour la période du 1er octobre 1994 au 31 mars 1996 la somme de 126 906 francs et à la recette des impôts au titre de la TVA, taxée d'office en l'absence de déclaration pour la période du 1er juillet 1992 au 1er juin 1995, celle de 303 595 francs ; qu'en reprochant à Mlles X... et Y... de n'avoir pas déclaré la cessation des paiements fixée à la date de l'assignation du créancier, la cour d'appel a violé l'article L. 625-5, 5 du Code de commerce ;
5 ) que pour considérer comme tardive la déclaration de cessation des paiements, les juges du fond ne peuvent retenir comme date réelle de celle-ci une date imprécise et doivent, à la date précise à laquelle ils font remonter l'existence de la cessation des paiements, caractériser l'impossibilité pour le débiteur de faire face à son passif exigible avec son actif disponible ; qu'à supposer que la cour d'appel n'ait pas retenu comme date de cessation des paiements, celle retenue par le jugement l'ayant constatée, elle ne pouvait se contenter de relever que l'association devait à l'URSSAF de Lyon pour la période du 1er octobre 1994 au 31 mars 1996 la somme de 126 906 francs et à la recette des impôts au titre de la TVA, taxée d'office en l'absence de déclaration pour la période du 1er juillet 1992 au 1er juin 1995, celle de 303 595 francs, sans constater la date précise de cessation des paiements de l'association et caractériser l'impossibilité pour cette dernière de faire face à son passif exigible avec son actif disponible à cette date, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 621-1 et L. 625-5, 5 du Code de commerce ;
6 ) que le liquidateur s'était exclusivement prévalu du fait que la comptabilité était irrégulière et incomplète visé par l'article L. 624-5, 7 du Code de commerce ; qu'en relevant d'office le moyen tiré de l'absence de comptabilité conforme aux règles légales visée par l'article L. 624-5, 5 , sans inviter au préalable les parties à s'en expliquer, la cour d'appel a violé les articles 4 et 16 du nouveau Code de procédure civile et le principe du contradictoire ;
7 ) qu'en se fondant sur l'absence de transmission des documents comptables par le cabinet chargé de la comptabilité de l'association et sur l'inertie des appelantes pour retenir le caractère manifestement incomplet ou irrégulier de la comptabilité, sans relever aucune irrégularité ayant un caractère manifeste, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 625-4, 7 du Code de commerce ;
8 ) qu'il appartient au demandeur à l'action qui allègue l'existence d'un fait d'en apporter la preuve ; qu'en énonçant qu'il appartient aux dirigeants de l'association de prouver la remise de la liste complète et certifiée des créanciers ainsi que le montant des dettes au motif que l'article L. 625-8 du Code de commerce leur en fait l'obligation alors qu'il incombe au liquidateur d'établir la réalité du grief qu'il reproche à Mlles X... et Y..., la cour d'appel a renversé la charge de la preuve et ainsi violé les dispositions des articles 9 du nouveau Code de procédure civile et 1315 du Code civil ;
9 ) qu'en ne répondant pas au moyen au soutien duquel Mlles X... et Y... faisaient valoir que le liquidateur avait établi plusieurs situations du passif de l'association dans lesquelles les créanciers étaient mentionnés et les créances précisément chiffrées, ce dont il résultait que le mandataire liquidateur avait eu en sa possession la liste des créanciers, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
10 ) qu'en se fondant sur le seul fait que la remise complète et certifiée des créanciers n'était pas intervenue pour condamner Mlles X... et Y..., sans constater leur mauvaise foi, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 625-8, alinéa 2, du Code de commerce ;
11 ) qu'en se bornant à relever par motifs adoptés des premiers juges que le retard de paiement avait fourni la trésorerie nécessaire au financement de la poursuite d'activité supplémentaire, sans relever l'intention d'éviter ou de retarder l'ouverture du redressement judiciaire de Mlles X... et Y..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 625-5, 2 du Code de commerce ;
Mais attendu, en premier lieu, qu'en sa qualité de trésorière de l'association, Mlle Y... était dirigeante de droit de l'association ;
Attendu, en second lieu, que le débiteur, qui est tenu de demander l'ouverture de la procédure collective au plus tard dans les quinze jours qui suivent la cessation des paiements, n'en est pas dispensé par la délivrance d'une assignation à cette fin par un créancier ;
Attendu, enfin, qu'après avoir constaté, par motifs adoptés, que la procédure collective de l'association Alpha et Oméga avait été ouverte le 9 septembre 1997 et retenu comme date de cessation des paiements, le 15 mars 1997, l'arrêt relève que les dirigeantes de l'association n'ont pas fait la déclaration de l'état de cessation des paiements dans le délai légal ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations et abstraction faite des motifs surabondants évoqués aux 6e à 11e branches, la cour d'appel n'a fait qu'user des pouvoirs qu'elle tient des articles L. 625-4 et L. 625-5.5 du Code de commerce en statuant comme elle a fait ;
D'où il suit que le moyen, inopérant en ses trois premières branches, ne peut être accueilli ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.