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Décisions

Cass. com., 10 juin 1997, n° 95-16.235

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Bézard

Rapporteur :

M. Métivet

Avocat général :

Mme Piniot

Avocats :

SCP Delaporte et Briard, Me Capron

Douai, du 1 juin 1995

1 juin 1995

Sur le moyen unique pris en ses quatre branches :

Attendu, selon les énonciations de l'arrêt attaqué (Douai, 1er juin 1995), que M. X..., actionnaire de la société anonyme Innovations et Prestations (la société), a assigné M. Y... aux fins de faire juger qu'il était propriétaire de 975 actions, indûment inscrites au registre des transferts de la société au nom de M. Y... depuis le 6 janvier 1986, et d'obtenir le paiement des dividendes attachés auxdites actions ;

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté ses demandes, alors, selon le pourvoi, d'une part, qu'il incombe à celui qui prétend avoir acquis la propriété des actions d'une société de prouver la convention de cession lui ayant transmis lesdites actions ; qu'en énonçant que M. X... ne pouvait prouver que l'inscription intervenue à cette époque sur le registre des transferts de la société était de la main de M. Y..., prétendu cessionnaire, pour déclarer celui-ci propriétaire des titres, la cour d'appel a fait peser sur le prétendu cédant la charge de prouver l'absence de cession, inversant ainsi la charge de la preuve et violant les dispositions de l'article 1315, alinéa 1er, du Code civil ; alors, d'autre part, que, entre les parties à la cession, le transfert de propriété s'opère par le seul effet de la convention ; que les formalités d'inscription sur les registres de la société n'ayant d'effet qu'à l'égard de la société et des tiers, aucune présomption ne peut en être déduite quant à l'existence de la convention de cession et au transfert de propriété des titres ; qu'en attribuant à l'écriture de transfert sur le registre tenu par la société la force d'une présomption de propriété entre les parties, et en exigeant de M. X... qu'il rapporte la preuve d'une erreur d'inscription, la cour d'appel a violé les dispositions des articles 1134 du Code civil et des articles 1 et 2 du décret du 2 mai 1983 ; alors, en outre, que l'aveu par une partie d'un fait ne peut émaner que de déclarations manifestant une volonté non équivoque exprimée en pleine connaissance de cause, c'est-à-dire avec la conscience des conséquences juridiques que la reconnaissance d'un fait contesté pourrait produire contre son auteur ; que, pour retenir que M. X... avait reconnu la propriété de M. Y... sur les actions litigieuses, l'arrêt se contente des déclarations qu'il avait faites dans des documents divers selon lesquelles M. Y... serait associé majoritaire et lui-même ne détiendrait que 250 titres, et il énonce encore que M. X... n'aurait pas contesté la cession des 975 actions ; qu'en ne relevant cependant aucun élément démontrant la conscience qu'aurait eu M. X... de reconnaître, par un aveu extrajudiciaire, l'existence d'une convention de cession de ces titres, et alors même qu'au moment où furent effectuées ces déclarations la question de la propriété des titres n'était pas encore débattue, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions de l'article 1354 du Code civil ; et alors, enfin, que dans ses conclusions d'appel, M. X... avait soutenu que la soi-disant vente d'actions dont se prévaut M. Y... était inexistante, faute d'accord sur un prix quelconque qui n'a d'ailleurs jamais été payé ; qu'en ne répondant pas à ce moyen des conclusions de l'appelant qui était pourtant de nature à influer sur la décision à intervenir, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu que l'arrêt constate que l'inscription des actions litigieuses au nom de M. Y... sur le registre des transferts de la société, constituait au bénéfice du titulaire une présomption de propriété à l'encontre de laquelle M. X... n'avait pas rapporté de preuve, qu'au contraire son comportement constant dans tous les actes de la vie sociale, alors que pendant 7 ans il avait été directeur général puis président du conseil d'administration, montrait qu'il n'avait pas contesté à M. Y... la propriété de ces actions ni réclamé le paiement des dividendes qui y étaient attachés ; qu'à partir de ces constatations et appréciations c'est sans inverser la charge de la preuve et en répondant aux conclusions prétendûment délaissées, que la cour d'appel, justifiant légalement sa décision, a pu estimer que le droit de propriété de M. Y... sur les actions devait lui être reconnu ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses quatre branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.